Archive pour le 22 septembre, 2010
PRIÈRE DU PAPE ET DE L’ARCHEVÊQUE ANGLICAN : L’HÉRITAGE COMMUN DES SAINTS
22 septembre, 2010du site:
http://www.zenit.org/article-25412?l=french
PRIÈRE DU PAPE ET DE L’ARCHEVÊQUE ANGLICAN : L’HÉRITAGE COMMUN DES SAINTS
ROME, Vendredi 17 septembre 2010 (ZENIT.org) – Le pape Benoît XVI et l’archevêque de Cantorbéry, Rowan Williams, ont prié ensemble les vêpres dans la prestigieuse abbaye de Westminster, qui a autrefois abrité une communauté bénédictine : la liturgie a rassemblé les responsables des confessions chrétiennes présentes en Grande-Bretagne. Ils ont tous deux évoqué l’héritage commun des saints : Augustin de Cantorbéry, Grégoire le Grand, Benoît, Edouard, Bède, et… Jean-Paul II.
Le pape puis l’archevêque ont chacun pris la parole, avant la prière d’intercession dont une intention était l’unité et le dialogue œcuménique. Benoît XVI a insisté sur le témoignage commun dans la société et sur l’héritage de saint Edouard et de saint Bède pour l’Europe aujourd’hui, et l’archevêque sur l’actualité de l’héritage du pape Grégoire le Grand et de saint Benoît.
Après la prière du Notre Père, et l’encensement de la tombe de saint Édouard le Confesseur, Roi d’Angleterre, à genoux, l’archevêque puis le pape ont prié demandant notamment de pouvoir toujours servir « le bien commun » et « dépasser les divisions ». « Où sont amour et charité, Dieu est présent », a chanté le chœur en latin. Le pape et l’archevêque ont prononcé ensemble l’oraison finale et ils ont ensemble béni l’assemblée qui a éclaté en applaudissements, au moment de la procession, tandis que le pape et l’archevêque allaient signer le livre d’or.
Edouard le Confesseur
Dans son homélie, Benoît XVI a admiré cette « magnifique église abbatiale dédiée à saint Pierre, dont l’architecture et l’histoire évoquent avec tant d’éloquence le patrimoine commun de notre foi »: « Ici, nous ne pouvons que nous souvenir avec admiration de la façon dont la foi chrétienne a influencé l’unité et la culture de l’Europe ainsi que le cœur et l’esprit du peuple anglais. Ici aussi, il nous est rappelé avec force que ce que nous partageons, dans le Christ, est plus grand que ce qui continue de nous diviser ».
« Je remercie le Seigneur de me permettre, comme Successeur de saint Pierre sur Siège de Rome, d’accomplir ce pèlerinage sur la tombe de saint Édouard le Confesseur. Édouard, Roi d’Angleterre, demeure un modèle de témoignage chrétien et un exemple de cette vraie grandeur à laquelle le Seigneur appelle ses disciples selon les Écritures ».
Le mouvement œcuménique
Le pape a évoqué le « centième anniversaire du mouvement œcuménique moderne, qui a commencé par l’appel de la Conférence d’Edimbourg en faveur de l’unité des Chrétiens, condition préalable à un témoignage crédible et convainquant de l’Évangile à notre époque ».
Le pape s’est réjoui de « l’extraordinaire progrès fait pour atteindre ce grand but grâce aux efforts convaincus de chrétiens de toutes dénominations ».
Le pape a invité à la proclamation « avec une conviction renouvelée » de « la réalité de notre réconciliation et de notre libération en Christ », et à l’annonce de « la vérité de l’Évangile comme la clef d’un développement humain authentique et intégral ».
« L’unité de l’Église (…) ne peut jamais être autre qu’une unité dans la foi des Apôtres, dans la foi confiée à chaque nouveau membre du Corps du Christ durant le rite du Baptême. C’est cette foi qui nous unit dans le Seigneur, qui nous rend participants de son Esprit Saint, et qui ainsi, aujourd’hui encore, nous rend participants de la vie de la Sainte Trinité, modèle de la koinonia de l’Église ici-bas », a résumé Benoît XVI.
Le ministère de Pierre
Le pape a dit son devoir de veiller à l’unité : « C’est là le mot d’encouragement avec lequel je désire vous quitter ce soir, et je le fais en conformité avec mon ministère d’Évêque de Rome et de Successeur de saint Pierre, chargé de veiller avec une attention particulière à l’unité du troupeau du Christ ».
Le pape a aussi évoqué l’héritage du docteur de l’Eglise, saint Bède le Vénérable dont il a montré l’actualité, spécialement pour l’Europe: « Cette nation et l’Europe que Bède et ses contemporains ont aidé à construire, se trouvent encore une fois au seuil d’une ère nouvelle. Que l’exemple de saint Bède inspire les Chrétiens de ces terres pour qu’ils redécouvrent l’héritage qu’ils partagent, pour qu’ils fortifient ce qu’ils ont en commun, et qu’ils consolident leurs liens d’amitié ».
« Puisse le Seigneur bénir nos efforts pour remédier aux séparations du passé et pour affronter les défis actuels, dans l’espérance en un avenir que, dans sa Providence, il nous offre ainsi qu’à notre monde », a conclu le pape.
Augustin, Grégoire et Benoît
Pour sa part, l’archevêque Williams a cité saint Augustin de Cantorbéry envoyé en Angleterre pour annoncer l’Evangile, par le pape Grégoire le Grand en qui il voit une figure attirante aussi pour aujourd’hui, non seulement comme théologien mais comme pasteur dont la « vision » a permis l’évangélisation des VIe et VIIe s.
Il y voit une source d’inspiration à l’occasion de la visite du pape, mais il a cité aussi celui dont le pape porte le nom, saint Benoît qui a donné à l’Europe une règle de vie simple faite de joie et de service mutuel, et un exemple « équilibré » de vie dans « le travail et la prière » qui préserve la « dignité humaine » et « l’amour de Dieu ».
Il a souligné que cet exemple n’était pas seulement pour les moines mais aussi pour la société contemporaine marquée par la « productivité », une vision du travail parfois « obsédante » et « déshumanisante » qui rend le chômage encore plus insupportable.
Il souligne une urgente nécessité de retrouver la dignité du travail humain et l’ouverture à l’amour de Dieu : ce serait une façon de retrouver l’héritage bénédictin aujourd’hui.
Enfin, parmi les titres des papes, et donc aussi de saint Grégoire le Grand, l’archevêque anglican a retenu celui de « serviteur des serviteurs de Dieu » : l’autorité de l’Eglise, c’est le service. Il a rappelé l’invitation de Jean-Paul II dans Ut unum sint de réfléchir ensemble à la façon d’exercer le ministère de Pierre aujourd’hui, avec un « amour créatif ».
Anita S. Bourdin
Les anges dans la tradition judéo-chrétienne et patristique
22 septembre, 2010du site:
http://v.i.v.free.fr/spip/spip.php?article3385
JEAN DANIÉLOU, S. J.
Les anges dans la tradition judéo-chrétienne et patristique
LES AMIS DU BEC-HELLOUIN – 3E ANNÉE – N°11 – SAINT MICHEL ET SES ANGES –OCTOBRE 1964, P. 23-27
mardi 28 avril 2009, par Blaise
Sommaire
I. Le Judéo-Christianisme
II. La Tradition Patristique
Je me propose de reprendre les grandes lignes de ce que j’ai écrit dans mon petit livre : « Les Anges et leur mission », en apportant quelques éléments sur la toute première tradition judéo-chrétienne, puis sur la tradition patristique.
I. Le Judéo-Christianisme.
Dans l’Ascension d’Isaïe, les Odes de Salomon, d’autres livres analogues, ainsi que dans des traditions que l’on retrouve chez Clément d’Alexandrie ou Hermas, l’angélologie tient une très grande place ; deux thèmes principaux se retrouvent : la montée aux cieux et la désignation du Christ comme Ange.
a) – La Montée aux Cieux – Ce thème intéresse d’abord la christologie ; il comprend la descente du Fils à travers les hiérarchies angéliques, descente cachée aux anges. On trouve là certains aspects mythologiques : le Verbe revêt la forme de chacun des anges à mesure qu’il traverse chacune des sphères angéliques, non par une sorte d’incarnation, mais pour ne pas être reconnu. Inversement, quand le Christ remonte aux Cieux, il est reconnu par les anges à cause de sa gloire manifestée, et les anges s’étonnent de ne pas l’avoir reconnu à sa descente ; ils sont surtout dans la stupeur de voir la nature humaine qui leur était inférieure, exaltée au-dessus d’eux. Ce thème persistera dans la tradition patristique ; on le retrouve par exemple dans un sermon de Saint Jean Chrysostome sur l’Ascension (PG 54, 146).
Il semble bien que nous ayons ici un thème majeur de la tradition, en rapport avec le psaume 23 (vv. 7-10) « Elevamini, portae aeternales, et introibit Rex gloriae… » dont on trouve des commentaires en ce sens depuis la tradition la plus ancienne.
Corrélativement, on trouve le thème de l’Ascension de l’âme, surtout après la mort. L’âme traverse les sphères angéliques, et doit rendre compte de sa vie : elle ne peut passer sans avoir montré la sphragis, le signe du baptême, et c’est alors que ses mérites sont jugés. Ceci est très important pour les origines de la doctrine du purgatoire. Nous avons là un domaine où le Nouveau Testament est peu explicite ; et ce thème du destin de l’âme après la mort recevra un développement considérable dans la gnose, apparue dès les origines en milieu judéo-chrétien, en rapport avec l’angélologie.
b) – La Désignation du Christ comme Ange – Le Verbe, le Fils, le Bien-aimé, est désigné souvent sous des termes empruntés à l’Angélologie. Ainsi les deux Chérubins ou les deux Séraphins désignant le Fils et l’Esprit. De même les sept Archanges, dont le premier est le Fils, en rapport avec les sept jours de la création. Egalement la substitution du Fils, du Verbe, à Michel, déjà sensible dans l’Apocalypse johannique, ou à Gabriel dans la scène de l’Annonciation (Gabriel serait alors le Fils de Dieu venant vers Marie). L’importance de ces thèmes vient de ce que, pour les juifs, l’Ange est la manifestation même de Dieu
Le développement de la théologie du Fils et de l’Esprit a posé, vis-à-vis de la doctrine juive des attributs divins, un immense problème. On a été un certain temps avant de s’y reconnaître, pour savoir quels étaient les aspects de cette doctrine qui devaient être appliqués au Verbe et à l’Esprit, et introduits dans le domaine de la transcendance, et quels étaient les aspects qu’il fallait laisser appliqués aux anges. Ce qui me frappe, c’est que la tendance a été de voir partout le Verbe et l’Esprit. Ce que l’Ancien Testament désignait comme une manifestation d’anges, on y a vu en réalité une manifestation du Verbe et de l’Esprit. Il y aurait là un argument assez fort pour montrer que dans la perspective des premiers chrétiens, Gabriel, Michel et les autres étaient des manifestations de la Divinité même, et non des individualités angéliques.
c) – L’Exégèse des premiers chapitres de la Genèse – Il y a là un troisième thème judéo-chrétien, où l’angélologie occupe une grande place. Pour les juifs de ce temps, la Bible était considérée comme une révélation en voie de développement ; ils n’avaient pas notre attachement à la littéralité du texte, et citaient l’Ancien Testament avec une extrême liberté. Nous le constatons dans le Nouveau Testament ; la tradition biblique était considérée comme une tradition vivante, et non figée.
Ainsi la création des cieux et de la terre en Genèse 1, 1, ou la séparation des eaux supérieures et inférieures en Genèse 1, 7, sont alors interprétées comme désignant la création d’un monde angélique à côté du monde d’en bas. Il y a là un développement d’une conception du monde céleste constituée par les anges.
II. La Tradition Patristique.
Il faut signaler tout d’abord deux Pères chez lesquels on rencontre un développement très poussé des théories des hiérarchies angéliques, et à mon avis ils dépendent l’un de l’autre, Clément d’Alexandrie et le Pseudo-Denys. Clément disait tenir ses données sur les anges de traditions orales remontant aux Apôtres ; Denys disait la même chose. Dans les deux cas, il y a une référence non dénuée de fondement à une tradition dite apostolique, non au sens normatif, mais au moins en un sens chronologique de tradition remontant au temps des Apôtres et des Pères apostoliques.
Ces doctrines n’ont rien de spécifiquement chrétien ; par contre, elles sont spécifiquement juives. Et le problème, qui n’est pas facile, est de savoir quelle appréciation porter sur ces éléments doctrinaux ; que valent les écrits juifs non canoniques, dont certains, comme Hénoch, sont cités par le Nouveau Testament, et sont lus encore de nos jours dans des Eglises chrétiennes – celle d’Ethiopie.
Si nous mettons à part ces théories sur les hiérarchies angéliques, il y a chez les Pères des données nombreuses et importantes concernant le rôle des anges dans l’histoire du salut. Et tout d’abord la question des Anges des Nations, qui touche au problème politique.
Cette question se rattache au texte de Deutéronome 32, selon lequel les peuples sont distribués suivant le nombre des Anges de Dieu. Chaque peuple, avant la venue du Christ, a un bon ange et un mauvais ange ; les bons sont désolés parce qu’ils n’obtiennent aucun résultat, et les nations s’enfoncent dans le mal. Par contre, à partir de la venue du Christ, les bons anges des nations se réjouissent et coopèrent avec le Verbe au salut des hommes. Si l’Ancien Testament était encore considéré comme le temps des anges, on pourrait dire, en suivant saint Paul, que le Christ les a en quelque sorte dépossédés ; le Verbe de Dieu prend directement les choses en main.
Ceci est en rapport avec un thème constant : les anges sont associés aux préparations, les enfants (au sens matériel et spirituel), les débuts de la vie spirituelle, les préparations lointaines de la grâce.
Nous trouvons cela spécialement dans trois domaines, la liturgie, la vie spirituelle et la mort.
a) – La Liturgie – le baptême et l’assemblée chrétienne – Pour ce qui est du baptême, il y a deux conceptions : l’enfant est confié à un ange dès sa naissance ou seulement au baptême. On peut relever un parallélisme entre le parrain et l’ange, et cette correspondance entre un aspect céleste et un aspect terrestre est fréquente –ainsi pour l’évêque et la cité à laquelle il est envoyé, dans l’Apocalypse johannique. D’autre part, la présence des anges marque l’importance d’une action divine : ils ne l’opèrent pas, mais ils en sont les témoins.
La présence des anges à l’assemblée chrétienne est extrêmement importante. Origène la relève avec insistance, parlant même d’une double église dans l’assemblée, celle des hommes et celle des anges.
b) – Les anges et la vie spirituelle – Origène encore insiste beaucoup sur cet aspect. Celui qui s’avance dans la vie spirituelle rencontre d’abord les anges, dont le rôle est de le conduire au Christ, d’assister l’âme dans son ascension, mais jamais d’attirer à eux-mêmes.
c) – Les anges et la mort – on rencontre le thème de l’ange psychopompe, qui accueille l’âme à la sortie du corps et la conduit à sa demeure ; ici le contact avec les croyances grecques est tout à fait certain.
Il y a aussi le thème des anges qui pèsent les âmes, des anges du jugement, thème très développé chez saint Basile.
La présence des anges au martyre relève de ce que nous avons déjà rencontré, la présence des anges lorsque s’accomplit une action divine essentielle ; et le martyre n’est rien s’il n’est pas une telle action divine.
En plus de ce rôle des anges dans l’histoire du salut, il faudrait évoquer le thème central du monde céleste des anges environnant la Trinité ; c’est ce que Erik Peterson a développé dans son Livre des Anges : la place des anges dans la liturgie, le lien du monde angélique et de la prière, thèmes toujours présents dans la tradition patristique et les diverses liturgies.
La tradition patristique nous met ainsi en présence d’un mélange de thèmes dans lesquels une certaine influence des croyances païennes n’est pas douteuse ; nous touchons à des formes de la piété populaire. Et c’est là que se pose un problème critique, différent du problème exégétique : comment discerner dans ces traditions ce qui est donnée chrétienne authentique, et ce qui est à la limite des croyances païennes. Ce dernier élément n’est pas pour autant condamnable nécessairement, mais il importe de le reconnaître pour ce qu’il est.