Archive pour le 9 août, 2010
Saint Laurent, diacre et martyr (Homélie)
9 août, 2010du site:
http://www.catholique.org/vie_chretienne/homelie-2961-Saint-Laurent-diacre-et-martyr
Homélie
Saint Laurent, diacre et martyr
Une hymne Ambrosienne du Vème siècle célèbre ainsi la mémoire de saint Laurent : « La Foi des chrétiens de Rome a mis l’archidiacre Laurent au même rang de sainteté que les Apôtres pour une même couronne de martyr ». Il est vrai que dans les premiers siècles de l’Eglise, saint Laurent était en grand honneur. En témoigne à Rome le fait que plus de trente églises portent son nom. La basilique construite à l’emplacement de sa sépulture par Constantin a toujours été l’une des plus visitées par les pèlerins après les tombeaux de saint Pierre et de saint Paul.
Saint Laurent est mort martyr au temps de la persécution de Dèce en 285. Les textes de sa fête nous ramènent aux vertus qui le caractérisaient d’une façon toute particulière. La première lecture nous dit : « L’homme qui donne aux pauvres à pleines mains demeure juste pour toujours. » Nul doute que saint Paul se réfère ici au verset suivant du psaume que la liturgie a retenu pour ce jour : « A pleines mains, il donne au pauvre ; à jamais se maintiendra sa justice, sa puissance grandira, et sa gloire ! » Saint Laurent avait, en effet, en tant que diacre la charge d’administrer les biens de l’Eglise et particulièrement celle de veiller aux plus nécessiteux de la communauté. Il l’assuma avec sainteté gardant toujours au cœur le souci des plus pauvres et des plus démunis. Sa passion s’en fait l’écho lorsqu’elle rapporte qu’il subit son martyre après avoir distribué aux pauvres les biens de la communauté chrétienne de Rome.
Saint Laurent vivait ainsi dans la dynamique du don qui allait pour lui s’exprimer de la façon la plus haute. Il n’est pas fortuit que les textes de la liturgie de ce jour insistent sur le don. C’est là le secret de la sainteté, le témoignage de la vie divine accueillie en plénitude dans une existence. Car c’est bien la vie divine que vise à partager le chrétien. Et pour atteindre cet objectif, il n’y a qu’un chemin : celui que Jésus a ouvert devant nous en donnant sa vie par amour des pécheurs : « Celui qui aime sa vie la perd ; celui qui s’en détache en ce monde la garde pour la vie éternelle. Si quelqu’un veut me servir, qu’il me suive ; et là où je suis, là aussi sera mon serviteur. Si quelqu’un me sert, mon Père l’honorera. » (Cf. Evangile) Il s’agit de mourir à soi pour porter un fruit de vie et un jour avoir part soi-même en plénitude à la vie même de Dieu. Jésus nous le rappelle : « Amen, amen, je vous le dis : si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il donne beaucoup de fruit. » (Cf. Evangile) Saint Laurent a compris cela et il en a témoigné jusque dans sa mort. Diacre, ministre du sang du Christ, il le fut en répandant son propre sang pour le nom du Christ.
Saint Laurent et les martyrs ont suivi le Christ. Nous aussi, à leur exemple, nous sommes appelés à marcher sur ses traces. Saint Augustin nous dit : « Et nous frères, si nous aimons vraiment, nous devons imiter. Car nous ne pourrons produire un meilleur fruit de notre amour qu’en nous montrant nous aussi des imitateurs. Le Christ a souffert pour nous et nous a laissé son exemple pour que nous suivions ses traces. Par cette phrase, il semble que, pour l’Apôtre Pierre, le Christ a souffert seulement pour ceux qui suivent ses traces, que la passion du Christ ne sert à rien, sinon à ceux qui suivent ses traces. En effet, les saints martyrs l’ont suivi jusqu’à répandre leur sang, jusqu’à imiter sa passion ; les martyrs l’ont suivi, mais ils ne sont pas les seuls. Après leur passage, le pont n’a pas été coupé ; après qu’ils ont bu, la source n’a pas tari ».
Alors nous aussi, n’ayons pas peur de nous engager derrière cette foule immense de témoins. Les martyrs n’ont pas souffert pour souffrir. Ils ont souffert par amour de Jésus et de leurs frères, dans la foi que leur chemin de croix déboucherait sur la gloire de la résurrection.
« Seigneur, à ta suite et à l’image de saint Laurent ton martyr, donne-nous la grâce d’entrer dans la même dynamique de don de nous-mêmes. Donner par Amour est la seule chose qui puisse donner sens à toute une vie dans un monde où il ne semble y avoir d’autres valeurs que la logique du profit et de l’intérêt personnel ou de groupe. Seigneur, que ton Esprit d’Amour vienne dilater nos cœurs et ouvrir nos mains ! »
Saint Laurent de Rome
9 août, 2010du site:
http://nominis.cef.fr/contenus/saint/1652/Saint-Laurent-de-Rome.html
Saint Laurent de Rome
Diacre et martyr à Rome (+ 258)La « passio » de St Laurent, rédigée au moins un siècle après sa mort, n’est pas crédible. Le récit prétend que Laurent, diacre du pape saint Sixte II, fut mis à mort trois jours après le martyre de ce dernier et qu’il fut brûlé à petit feu sur un gril, ce qu’on ne souhaite à personne. La plupart des auteurs modernes estiment qu’il fut décapité, comme Sixte. Quoiqu’on pense de la valeur des « acta », il n’en reste pas moins que Laurent a toujours été vénéré, en Orient comme en Occident, comme le plus célèbre des nombreux martyrs romains (voir la liste chronologique, autour des années 258-259…). Les écrits des saints Ambroise, Léon le Grand, Augustin et Prudence témoignent de ce culte.
Son nom est cité dans la première prière eucharistique. Il est représenté comme diacre, tenant un gril ou couché dessus.
Diacre de l’Eglise de Rome, auprès du pape saint Sixte II, il a pour fonction d’être le gardien des biens de l’Eglise. Lorsque l’empereur Valérien prend un édit de persécution interdisant le culte chrétien, même dans les cimetières, il est arrêté en même temps que le pape et les autres diacres. Ils sont immédiatement mis à mort, mais lui est épargné dans l’espoir qu’il va livrer les trésors de l’Eglise. Voyant le pape marcher à la mort, Laurent pleure. Est-il donc indigne de donner sa vie pour le Christ? Saint Sixte le rassure, il ne tardera pas à le suivre. Sommé de livrer les trésors, il rassemble les pauvres, les infirmes, les boiteux, les aveugles. « Voilà les trésors de l’Eglise. » Il est condamné à être brûlé vif sur le gril. Il a encore le sens de l’humour et un courage extraordinaire : « C’est bien grillé de ce côté, tu peux retourner, » dira-t-il au bourreau. Il fut l’un des martyrs les plus célèbres de la chrétienté. Au Moyen Age, avec saint Pierre et saint Paul, il était le patron de la Ville éternelle où 34 églises s’élevaient en son honneur. 84 communes françaises portent son nom.
Dans son désir de partager le sort du pape Sixte II jusque dans son martyre, comme le rapporte saint Léon le Grand, quand il reçut l’ordre de livrer les trésors de l’Église, il montra au tyran les pauvres, nourris et vêtus aux frais de l’Église, et au bout de trois jours, il triompha des flammes et même les instruments de son supplice devinrent les signes de sa victoire. Ses restes furent déposés à Rome, sur la voie Tiburtine, au cimetière de Cyriaque (le Campo Verano).
Martyrologe romain
SAINT LAURENT : PROTO DIACRE DE L’EGLISE ROMAINE
9 août, 2010du site:
SAINT LAURENT
PROTO DIACRE DE L’EGLISE ROMAINE
Don Francesco Moraglia
Docteur de théologie systématique
Gênes
L’histoire de l’Eglise nous a laissé de grandes figures d’évêques et de prêtres qui ont contribué à illustrer, sur le plan théologique et pastoral, le sens profond du ministère ordonné. Pour l’épiscopat, on distingue, entre autres, les figures d’Irénée, Augustin, Winfrid, Boniface, Bartolomé Las Casas et Ildephonse Schuster; pour la prêtrise, l’époque moderne et contemporaine a été marquée par Philippe Néri, Jean-Marie Vianney, Jean Bosco, Pierre Chanel et Maximilien Kolbe. Le ministère diaconal acquiert lui aussi des contours plus nets si on le considère à la lumière de la figure de grands diacres; c’est le cas, par exemple, du martyr Laurent, proto diacre de l’Eglise romaine qui, avec Etienne et Philippe, est certainement l’un des plus célèbres de l’antiquité.
Le diaconat considéré en lui-même, en tant que ministère permanent, non finalisé à la prêtrise, disparaît en Occident après avoir été une institution florissante jusqu’au Ve siècle; à partir de cette époque – principalement à cause de l’engagement plus grand des prêtres dans l’activité pastorale -, le premier degré du sacrement de l’ordre se réduit à une simple étape d’accès au degré suivant, la prêtrise. On peut alors aisément comprendre pourquoi l’institution diaconale, sur le plan de la réflexion théologique et de la pratique pastorale, est restée inhibée, presque fossilisée.
Dès le XVIe siècle, le concile de Trente tenta de réagir à cette situation, sans succès; il faudra attendre le concile Vatican II, dans la seconde moitié du XXe siècle, pour assister au rétablissement du diaconat « en tant que degré propre et permanent de la hiérarchie… »; le texte de la constitution dogmatique Lumen Gentium, toujours au n. 29, précise immédiatement après: « …avec l’accord du pontife romain ce diaconat pourra être conféré à des hommes mûrs, même s’ils vivent dans le mariage, ainsi qu’à des jeunes gens idoines, pour lesquels, cependant, la loi du célibat doit rester ferme » (EV. 1/360).
Paul VI, dans la lettre apostolique Sacrum diaconatus ordinem – 18 juin 1967 -, réaffirme que l’ordre du diaconat « …ne doit pas être considéré comme un pur et simple degré d’accès au sacerdoce; celui-ci, insigne par son caractère indélébile et sa grâce particulière, s’enrichit d’autant plus que ceux qui y sont appelés peuvent se consacrer de manière stable aux mystères du Christ et de l’Eglise » (EV. 2/369).
Le seul fait que pendant une période aussi longue – quinze siècles -, le diaconat ne se soit pas réalisé sous une forme permanente dans l’Eglise latine, laisse deviner qu’il est nécessaire, sur le plan de la réflexion théologique et de la pratique pastorale, de récupérer le temps perdu à travers une ample réflexion de la part de toute la communauté ecclésiale. Le diaconat permanent, en effet, représente un important enrichissement pour la mission de l’Eglise.
Naturellement, le rétablissement du diaconat permanent, sollicité avec autorité par le dernier concile, ne pourra se réaliser qu’en harmonie et continuité avec la tradition ancienne. A ce sujet, la récente déclaration conjointe – 22 fevrier 1998 – de la Congrégation pour l’Education catholique et de la Congrégation pour le Clergé est extrêmement significative; elle se trouve au début des « Normes fondamentales pour la formation des diacres permanents » et du « Directoire pour le ministère et la vie des prêtres »; le contenu de cette déclaration apporte une clarification et une orientation pour le futur: « c’est la réalité diaconale toute entière (vision doctrinale fondamentale, discernement vocationnel et préparation, vie, ministère, spiritualité et formation permanente) qui postule une révision du chemin de formation jusqu’ici parcouru, pour obtenir une clarification globale, indispensable à une nouvelle impulsion de ce degré de l’Ordre sacré, en correspondance avec les vœux et les intentions du Concile Œcuménique Vatican II » (Normes fondamentales pour la formation des diacres permanents, Directoire pour le ministère et la vie des diacres permanents. Cité du Vatican, page 7).
Pour reprendre ce qui a été dit au sujet des grandes figures d’évêques, de prêtres et de diacres qui ont illustré et influencé le ministère ordonné, permettant une compréhension plus vraie et plus approfondie de celui-ci, il est raisonnable de s’arrêter sur la figure du diacre Laurent dont l’histoire personnelle incite à repenser le premier degré du ministère ordonné; lequel, en raison de l’évolution historique évoquée plus haut, attend encore aujourd’hui d’être pleinement compris et mis en valeur. Il s’agit de donner une nouvelle vigueur à un ministère permanent en mesure de s’exprimer avec une plus grande fécondité dans la vie de l’Eglise.
Les vicissitudes personnelles de saint Laurent, archidiacre de l’Eglise de Rome, nous sont parvenues à travers une tradition ancienne divulguée dès le IVe siècle; cette tradition accueillie par l’Eglise a également été admise dans les textes liturgiques.
Les épisodes les plus connus du martyre de Laurent sont décrits, avec richesse de détails, dans la Passio Polychromi dont nous avons trois rédactions (V-VIIe siècle); De fait, ce récit renferme des éléments légendaires, même si certaines informations que nous rapportons ici figurent dans des témoignages précédents comme celui de saint Ambroise dans De Officiis (cf. PL XVL 89-92).
Nous commençons, avec l’intention de les développer, par les courtes annotations reportées pour la fête du martyr qui – selon la « Depositio martyrum » (année 354) – tombe le 10 août; voici les expressions du Missel Romain: « Laurent, célèbre diacre de l’Eglise de Rome, confirma son service de charité par le martyre sous Valérien (258), quatre jours après la décapitation du pape Sixte II. Selon une tradition divulguée dès le IVe siècle, il soutint, intrépide, un atroce martyre sur le gril, après avoir distribué les biens de la comunauté aux pauvres qu’il considérait comme les vrais trésors de l’Eglise… ». Ces annotations se terminent en rappelant que le nom de Laurent figure également dans le Canon Romain.
L’Eglise, dans ses textes liturgiques, prend donc à son compte ce que rapporte la tradition ancienne qui, cependant, connaît en son sein des versions différentes. Ici, nous n’avons pas l’intention d’entrer dans le vif des hypothèses récemment avancées par la critique historiographique qui aurait tendance à reporter la date du martyre de saint Laurent au début du IVe siècle et à se démarquer des contours traditionnels pour le caractériser; par exemple, Laurent ne serait pas espagnol mais romain et, à ce propos, la Prefazio della mensa XII del Sacramniario leoniano le présente comme civis romain. Mais, comme le remarque Paolo Toschi, toutes ces nouvelles études « n’enlèvent pas a priori la possibilité qu’il existe, à Rome, une véritable tradition, exposée avec d’évidents embellissements réthoriques par saint Ambroise, sur la tragique capture et la fin de saint Laurent par le feu, supplice qui a été infligé sous Valérien, comme on le sait, à saint Fructuosus et aux diacres Euloge et Augure à Tarragone. D’autre part, le verbe animadvertere utilisé dans le décret de persécution dans la rédaction de Cyprien peut également faire référence à d’autres formes d’exécutions capitales en dehors de la « décapitation » (Bibliotheca Sanctorum, vol….1539).
Nous accueillons ici les données traditionnelles telles qu’elles sont rapportées dans les textes liturgiques, en nous limitant à les proposer de manière plus articulée.
Laurent serait donc né en Espagne, à Osca une petite ville de l’Aragon qui surgit aux pieds des Pyrénées. Afin de compléter ses études humanistiques et liturgiques il fut envoyé, tout jeune encore, dans la ville de Saragosse, où il fit la connaissance du futur pape Sixte II. Ce dernier – originaire de la Grèce -, était investi d’une charge d’enseignant dans l’un des plus importants centres d’études de l’époque et, parmi ses maîtres, le pape était l’un des plus connus et des plus appréciés.
Pour sa part, Laurent, qui devait devenir un jour le chef des diacres de l’Eglise de Rome, s’imposait par ses qualités humaines, par sa délicatesse d’âme et son intelligence. Entre le maître et l’élève s’instaura une communion et une familiarité qui, avec le passage du temps, augmenta et se cimenta; entre temps, l’amour qu’il portaient tous les deux pour Rome, centre de la chrétienté et ville-siège du vicaire du Christ, augmenta au point de suivre un flux migratoire alors très intense et de quitter l’Espagne pour la ville où l’apôtre Pierre avait établi sa chaire et rendu le témoignage suprême. C’est donc à Rome, au cœur de la catholicité, que maître et élève purent réaliser leur idéal d’évangélisation et de mission… jusqu’à l’effusion du sang. Lorsque le 30 août de l’année 257, Sixte II monta sur le trône de Pierre – pour un pontificat qui devait durer moins d’un an – , immédiatement et sans hésiter, il voulut à ses côtés son ancien élève et ami Laurent, en lui confiant la charge délicate de proto diacre.
Les deux hommes, à la fin, scellèrent leur vie de comunion et d’amitié en mourant par les mains du même persécuteur, séparés seulement par quelques jours.
Nous avons des informations sur la fin du pape Sixte II dans une lettre de saint Cyprien, évêque de Carthage. Cyprien, en parlant de la situation de grande incertitude et de malaise dans laquelle versaient les Eglises à cause de l’hostilité croissante à l’égard des chrétiens, remarque: « L’empereur Valérien a envoyé au sénat son rescrit par lequel il a décidé que les évêques, les prêtres et les diacres doivent être immédiatement mis à mort… – le témoignage de Cyprien continue – … je vous communique que Sixte a subi le martyre avec quatre diacres le 6 août, alors qu’il se trouvait dans la zone du cimetière. Les autorités romaines ont pour règle que ceux qui sont dénoncés comme chrétiens doivent être jugés et subir la confiscation de leurs biens au bénéfice du trésor public impérial » (Lettre 80, CSEL 3,839-840).
Le cimetière auquel le saint évêque de Carthage fait allusion est celui de Callixte, où Sixte fut capturé tandis qu’il célébrait la sainte liturgie et où il fut enterré après son martyre.
En revanche, pour le martyre du diacre Laurent, nous possédons un témoignage particulièrement éloquent de saint Ambroise dans De Officiis (1 41, 205-2079), repris ensuite par Prudence et saint Augustin, puis par saint Maxime de Turin, saint Pierre Chrisologue, saint Léon le Grand et, enfin, par certaines formules liturgiques renfermées dans les Sacramentaux romains, dans le Missale gothicum et dans l’Ormionale Visigotico (Bibliotheca Sanctorum, vol. …, 1538-1539).
Ambroise s’étend tout d’abord sur la rencontre et sur le dialogue entre Laurent et le pape, il évoque ensuite la distribution des biens de l’Eglise aux pauvres, il mentionne enfin le gril, l’instrument du supplice, en rapportant la phrase que le proto diacre de l’Eglise de Rome prononça en s’adressant à ses bourreaux: assum est, … versa et manduca (cf. Bibliotheca Sanctorum, vol. … col. 1538-1539).
C’est au texte d’Ambroise tiré du De Officiis (chap. 41, nn. 205-206-207), bouleversant par son intensité et sa force expressive, que nous nous référons; saint Ambroise s’exprime ainsi:
205. « … saint Laurent,… voyant son évêque Sixte conduit au martyre, commença à pleurer non pas parce que celui-ci était conduit à la mort, mais parce qu’il devait lui survivre. Il commença donc à lui dire de vive voix: « Où vas-tu, père, sans ton fils? Où t’empresses-tu, o saint évêque, sans ton diacre? Tu n’offrais jamais le sacrifice sans ministre. Qu’est-ce qui t’as donc déplu en moi, o père? Tu m’as peut-être trouvé indigne? Vérifie au moins si tu as choisi un ministre approprié. Ne désires-tu pas que celui auquel tu as confié le sang du Seigneur, celui que tu as associé à la célébration des mystères sacrés, verse son sang avec toi? Sois attentif à ce que ton discernement ne vacille pas tandis que ta force est louée. Le mépris du disciple porte préjudice au maître. Faut-il rappeler que les grands hommes remportent la victoire par les épreuves victorieuses de leurs disciples plus que par les leurs? Et puis Abraham a offert son fils, Pierre a envoyé Etienne en avant. Toi aussi, o mon père, montre en ton fils ta vertu; offre celui que tu as éduqué, pour obtenir la récompense éternelle en glorieuse compagnie, sûr de ton jugement ».
206. Sixte lui répondit: « Je ne te quitte pas, je ne t’abandonne pas, o mon fils; mais des épreuves plus difficiles te sont réservées. Comme nous sommes vieux, il nous a été donné de parcourir une épreuve plus facile; Comme tu es jeune, tu es destiné à un triomphe plus glorieux sur le tyran. Tu viendras bientôt, cesse de pleurer: tu me suivras dans trois jours. Cet intervalle entre un évêque et un lévite est convenable. Tu n’aurais pas été digne de vaincre sous la conduite de ton maître, comme si tu cherchais une aide. Pourquoi demandes-tu à partager mon martyre? Je t’en laisse l’entière succession. Pourquoi exiges-tu ma présence? Les disciples encore faibles précèdent leur maître, ceux qui sont déjà forts, qui n’ont plus besoin d’enseignements, le suivent pour vaincre sans lui. C’est pourquoi Elie quitta Elisée. Je te confie la succession de ma vertu ».
207. Il existait entre eux une rivalité véritablement digne d’être combattue par un évêque et par un diacre: celui qui, le premier, devait souffrir pour Jésus-Christ. On raconte que lors des représentations tragiques, les spectateurs éclataient en applaudissements bruyants lorsque Pilade disait qu’il était Oreste et Oreste, comme c’était le cas, affirmait qu’il était Oreste, le premier pour être tué à la place d’Oreste, le second pour empêcher que Pilade fut tué à sa place. Mais ces derniers ne devaient pas vivre, car ils étaient tous les deux coupables de parricide: l’un parce qu’il l’avait commis, l’autre parce qu’il était son complice. Dans notre cas, le seul désir qui animait saint Laurent était celui de s’immoler pour le Seigneur. Et lui aussi, trois jours après, ayant ridiculisé le tyran, sera brûlé sur un gril: « Cette partie est cuite, dit-il, retourne-la et mange-la ». Il triomphait ainsi, avec sa force d’âme, de l’ardeur du feu » (saint Ambroise, De Officiis, libri tres, Milan, Bibliothèque ambrosienne, Rome Città Nuova Editrice 1977, pp. 148-151).
Si l’on s’en tient au témoignage de saint Ambroise, le diacre apparaît caractérisé ainsi:
1) comme celui qui, constitué sacramentellement au service de l’offrande (diaconie), vit son ministère diaconal en exprimant dans le martyre le témoignage suprême de Jésus-Christ, le sens théologique du service de la charité, à travers l’accueil de cet amour-charité plus grand qu’est le martyre.
2) comme celui qui, en vertu du lien structurel qui le lie sacramentellement à l’évêque, (premier degré de l’ordre), vit la « communion ecclésiale », à travers un service spécifique à l’épiscopat, à partir de l’eucharistie et en référence à celui-ci.
3) comme celui qui, en vertu du sacrement (c’est-à-dire dans la mesure où il est enraciné dans le premier degré de l’ordre), se consacre au service d’une charité intégrale, à 360 degrés – par conséquent pas seulement une solidarité humaine et sociale -, et manifeste de la sorte le caractère le plus typique de la diaconie.
Examinons l’une après l’autre ces caractéristiques:
1) Le diacre se présente comme celui qui, constitué sacramentellement au service de l’offrande (diaconie), vit son ministère diaconal en exprimant dans le martyre le témoignage suprême de Jésus-Christ, le sens théologique du service de la charité, à travers l’accueil de cet amour-charité plus grand qu’est le martyre.
Si la caractéristique principale qui identifie le diacre, en soi et dans son ministère, est celle d’être ordonné au service de la charité, le martyre – témoignage jusqu’à l’effusion du sang -, doit être considéré comme l’expression d’un amour-charité plus grand, à savoir le service d’une charité qui ne connaît pas de limites. Le ministère de la charité auquel le diacre est délégué à travers l’ordination ne s’arrête donc pas au service des « cantines » ou, comme on avait coutume de dire autrefois, dans un langage catéchétique, aux œuvres de miséricorde corporelles, ni même aux œuvres spirituelles, mais le service diaconal de la charité doit parvenir, par l’inconditionnel don de soi, à l’imitation du Christ, le témoin fidèle par antonomase (cf. Ap 1,5;3,14).
Dans le cas de Laurent – explique Ambroise- « aucun désir ne l’animait sinon le désir de s’immoler pour le Seigneur » (cf. saint Ambroise, De Officiis, I, 41, n. 207); à travers le témoignage rendu face à ses persécuteurs, il apparaît évident que l’exercice du ministère diaconal ne s’identifie pas ici avec le service du prochain, réduit aux seules nécessités matérielles; puisque dans ce geste qui exprime un amour plus grand pour Jésus-Christ et qui porte à donner sa propre vie, Laurent fait en sorte que ses bourreaux puissent également, au sens réel, faire « une certaine » expérience du Verbe incarné qui, en dernière instance, est le destin personnel et commun de tout homme; c’est le service théologique de la charité auquel chaque diacre doit tendre ou, tout au moins, rester disponible.
Ceci ne signifie pas que le diacre épuise dans son ministère le témoignage de la charité qui est, et reste toujours, vocation et mission de toute l’Eglise, mais on entend affirmer qu’en vertu de son ordination, le diacre porte en soi, de manière sacramentelle-spécifique, la « forme Christi » pour le service de la charité; ce qui revient à dire un « exercice ministériel » de la charité qui se réalise envers Jésus-Christ et les frères et qui peut aller jusqu’à exiger le don de soi… jusqu’au sacrifice de la vie. Les mots que Laurent adresse à l’évêque Sixte résonnent clairement: « Et puis Abraham a offert son fils, Pierre a envoyé Etienne en avant. Toi aussi, o mon père, montre en ton fils ta vertu; offre celui que tu as éduqué, pour obtenir la récompense éternelle en glorieuse compagnie, sûr de ton jugement » (saint Ambroise, De Oficiis, I, 41, n. 205).
Il est utile de rappeler, cependant, que le témoignage d’un « amour-charité » plus grand de la part de celui qui est ordonné au service de la charité, ne dispensera jamais l’Eglise-Epouse de s’offrir au Christ-Epoux, dans le don de la « martyria » par lequel, au delà de toute réticence et ambiguité, se manifeste la valeur absolue et l’union inséparable que « vérité » et « charité » revêtent dans la vie du disciple du Seigneur (cf. 1 Cor 13,4-5, Phil 4,15).
A cet effet, il est utile de relire le texte de Lumen Gentium 42, dans lequel on affirme. « … le martyre, par lequel le disciple est rendu semblable au maître qui accepte librement la mort pour le salut du monde, et se conforme à lui dans l’effusion du sang, est estimé par l’Eglise comme le don exeptionnel et la preuve suprême de la charité… si le martyre est accordé à peu, tous doivent cependant être prêts à confesser Jésus-Christ devant les hommes, et à le suivre sur le chemin de la croix à travers les persécutions, qui ne font jamais défaut à l’Eglise » (EV, 1/398).
A présent – malgré l’appel universel à la charité même héroïque -, un fait reste incontestable: dans l’Eglise il existe un « ministère ordonné » spécifique, par conséquent des hommes sacramentellement constitués au service de la charité.
2) Le diacre se présente comme celui qui, en vertu du lien structurel qui le lie sacramentellement à l’évêque, (premier degré de l’ordre), vit la « communion ecclésiale », à travers un service spécifique à l’épiscopat, à partir de l’eucharistie et en référence à celui-ci.
C’est l’autre caractéristique qui ressort du dialogue entre Sixte et Laurent au cimetière de Callixte; le dialogue met en évidence le fait que c’est justement dans le lien sacramentel qui unit le diacre à l’évêque, que le diacre apparaît comme l’ »homme de la communion » à travers le service spécifique qu’il rend à l’évêque; ce service, ensuite, se réalise, concrètement, par l’accomplissement fidèle de ce que l’évêque, en vertu de la plénitude du sacerdoce et du gouvernement qu’il a sur l’Eglise – toujours en communion avec l’évêque de Rome -, exige de son diacre selon les nécessités et les urgences ecclésiales.
Dans le ministère du diacre, enfin, toute chose fait référence à l’autel, dans la mesure où dans l’Eglise toute chose, à commencer par la charité, tire son origine de la S.S. Eucharistie. Voici le point où le témoignage d’Ambroise, à cet égard, se fait particulièrement significatif: « … Laurent,… voyant son évêque Sixte conduit au martyre, commença… à lui dire de vive voix: « Où vas-tu, père, sans ton fils? Où t’empresses-tu, o saint évêque, sans ton diacre? Tu n’offrais jamais le sacrifice sans ministre… ? …Ne désires-tu pas que celui auquel tu as confié le sang du Seigneur, celui que tu as associé à la célébration des mystères sacrés, verse son sang avec toi? » (saint Ambroise, De Officiis, 1.41, n.205).
La communion et l’affection entre l’évêque et le diacre, qui se manifestent dans leur commune dépendance et dans leur lien commun à l’eucharistie, expriment une vision ecclésiale profondémente théologique qui va au delà des conceptions qui abaissent et réduisent l’Eglise-Epouse à une simple dimension politique et sociologique, en l’assimilant, de fait, à l’une des nombreuses institutions humaines; il est donc nécessaire de se libérer de toute perspective secularisée et sécularisante, qui conduit inéluctablement à perdre et à compromettre le sens et la force régénérante du Mystère; le risque est celui de voir aussi bien dans le pape que dans les évêques, les prêtres et les diacres, autant de degrés d’une bureaucratie infinie semblable à celle de l’administration publique et chargée, comme cette dernière, de veiller au bon ordre de l’ensemble guère mieux précisé.
La rencontre du pape Sixte avec le diacre Laurent nous invite, le cas échéant, à renverser une telle vision et à redécouvrir au cœur de l’Institution-Eglise, toujours indispensable, et des structures ecclésiales, pareillement nécessaires, la réalité vive et vivifiante de la grâce qui les anime et, par là même, nous invite à redécouvrir le lien théologique qui les lie au Christ, unique, véritable Evêque, Prêtre et Diacre. D’autre part, dans le Nouveau Testament – dans la lettre aux Philippiens (cf. Phil 1,1) et dans la première lettre à Timothée (cf. Tim 3,1-13) -, nous trouvons associés l’évêque et le diacre; par la suite, leur lien étroit est attesté dans la « Traditio apostolica » – début du IIIe siècle (Hyppolite de Rome) -, où la grâce conférée au diacre par le rite de l’ordination est définie comme « simple service de l’évêque », sans sacerdoce; quelques années après – dans la moitié du IIIe siècle, en Syrie -, la « Didascalie des Apôtres » présente le diacre comme le « serviteur de l’évêque et des pauvres ».
Enfin, la relation qui lie structurellement le diacre à l’évêque aujourd’hui est exprimée de manière transparente à travers la liturgie de l’ordination; dans ce cérémonial, en effet, à la différence de celui de l’ordination des évêques et des prêtres, le geste de l’imposition des mains est réalisé uniquement par l’évêque qui ordonne pour indiquer le lien caractéristique et singulier qui lie le diacre à l’évêque.
3) Le diacre se présente comme celui qui, en vertu du sacrement (c’est-à-dire dans la mesure où il est enraciné dans le premier degré de l’ordre), se consacre au service d’une charité intégrale, à 360 degrés – par conséquent pas seulement une solidarité humaine et sociale -, et manifeste de la sorte le caractère le plus typique de la diaconie.
Dans son témoignage, Ambroise nous présente encore Laurent comme celui qui, en vertu du sacrement reçu, est pleinement consacré au service de la charité dans une situation concrète: la Rome impériale du troisième siècle, tandis que la persécution fait fureur; dans cette conjoncture, Laurent est appelé à réaliser, face à la communauté ecclésiale et au monde, des gestes concrets destinés à se transformer en autant de signes de l’Amour-Charité de Dieu, à savoir de cette Charité dont toute chose provient et vers laquelle toute chose se dirige; et c’est dans ce service que le diacre exprime le ministère le plus typique de sa diaconie qui consiste, justement, dans le service de la charité réalisé en vertu du mandat sacramentel; en définitive une animation qui concerne l’Eglise ou des secteurs de la vie ecclésiale et qui se présente selon les caractères de la catholicité (kat’olon = selon la totalité, sans rien exclure); l’aspiration de ce service est la totalité des hommes sans exeption, le contenu, un bien qui répond à toutes les attentes de l’homme – esprit, âme et corps (cf. I Ts 5,23) – excluant toute partialité et unilatéralité.
En outre, dans le texte ambrosien on relève une allusion qui aide à la réflexion. Sixte, désormais prisonnier, confie à Laurent, le premier de ses diacres, l’Eglise entière et la lui laisse pour une période de trois jours. « … Comme nous sommes vieux, il nous a été donné de parcourir une épreuve plus facile; comme tu es jeune, tu es destiné à un triomphe plus glorieux sur le tyran. Tu viendras bientôt, cesse de pleurer: tu me suivras dans trois jours. Cet intervalle entre un évêque et un lévite est convenable… » (saint ambroise, De Officiis, n.206). Laurent, pendant ces trois jours, et en tant que diacre, en esprit de service et d’obéissance à son évêque – désormais définitivement arraché à son peuple -, devra prendre soin de l’Eglise, et pour la dernière fois il administrera les biens de l’Epouse du Christ en le faisant par un geste qui porte en soi la force d’une définition et qui dit comment, dans l’Eglise, tout est finalisé et prend de la valeur à partir du service de la charité, réalité destinée à perdurer quand tout aura disparu et la scène de ce monde sera passée (cf. 1 Cor 13,8).
Pour ceux qui regardent de loin, de façon approximative – et, somme toute, superficielle -, ce geste peut sembler être exclusivemnet lié aux nécessités matérielles et au temps présent; il s’agit, en effet, de la distribution de biens matériels à des pauvres; en réalité, l’acte que Laurent réalise, en esprit de fidélité au dépôt qu’il a reçu de l’évêque et au ministère ecclésial dans lequel il est constitué, est un acte qui le projette, et avec lui projette toute l’Eglise – qui lui a été confiée jusqu’au moment du martyre -, au-delà de l’histoire, dans l’escathologie, c’est-à-dire dans le « temps » et dans « l’espace » dans lequel Dieu manifeste la plénitude de sa charité et de son amour.
Le diacre laurent, ministre ordonné de la charité, achève la tâche qu’il avait reçue, non seulement dans la mesure où il suit son évêque dans le martyre mais parce qu’à travers le geste par lequel il donne aux pauvres toutes les ressources de la communauté – ici exprimées par des biens matériels -, il montre comment, dans l’Eglise, chaque chose a de la valeur si elle est orientée vers la charité, si elle devient service à la charité, si elle peut se transformer en charité.
Et ce service – comme le rappelle la première lettre aux Théssaloniciens (cf. 1 Ts 5,23) -, s’étend non seulement au « corps » mais aussi à l’ »esprit » et à l’ »âme », pour se manifester en toute clarté dans la prière que – selon la Passio Polychromi (les actes du martyre de Laurent) -, le saint diacre voulut réciter pour la ville de Rome avant de monter sur le gril.
Et la ville, qui lui attribuait la victoire définitive sur le paganisme, le lui rendit en le choisissant comme son troisième patron et en célébrant sa fête dès le IVe siècle, en second, par odre d’importance, après la fête des bienheureux Pierre et Paul et en élevant, en honneur du saint diacre, dans l’antiquité et au moyen-âge, au moins trente quatre églises et chapelles, signe tangible de reconnaissance envers celui qui, fidèle à son ministère, avait été, en son sein, véritable ministre et serviteur de la charité.
A présent, au terme de ces réflexions sur le ministère du diaconat essentiellement envisagé sous sa forme « permanente », nous pouvons dire:
1) il faut savoir considérer avec un esprit critique toutes les perspectives – désormais dépassées, en vérité -, qui, de fait, interprètent et présentent le diaconat comme un ministère qui conduit à la cléricalisation des laïcs et à la laïcisation des clercs, parvenant ainsi à l’affaiblissement de l’identité des uns et des autres.
2) le diacre, qui se distingue des évêques et des prêtres dans la mesure où il n’est pas ordonné « ad sacerdotium, sed ad ministerium », est constitué dans un degré authentique de la hiérarchie et ne peut être compris comme pur accès au sacerdoce.
3) le diacre est habilité au service de la charité en étroite dépendance avec l’Eucharistie et au soin privilégié des pauvres, aussi bien par le service des « cantines » (œuvres de miséricorde corporelles), que par le service de la parole (œuvres de miséricorde spirituelles) en restant ouvert au service d’un amour-charité plus grand, le martyre.
Enfin, l’institution du « diaconat permanent », représente et marque un important enrichissement pour l’Eglise et sa mission, notamment en vue de la nouvelle évangélisation que le Saint-Père rappelle continuellement de ce début du troisième millénaire de l’ère chrétienne; et c’est la beauté, la force et le caractère héroïque de figures de diacres comme saint Laurent qui aident à découvrir et à mieux comprendre la particularité du ministère diaconal.
bonne nuit
9 août, 2010Bella chiesa di Windows Stained di Shari Weinsheimer
http://www.publicdomainpictures.net/browse-category.php?page=120&c=effetti-di-luce&s=9
Sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix [Edith Stein] : « Voici l’époux ! Sortez à sa rencontre »
9 août, 2010du site:
http://www.levangileauquotidien.org/main.php?language=FR&module=commentary&localdate=20100809
Fête de sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix (Edith Stein), vierge et martyre, copatronne de l’Europe : Mt 25,1-13
Commentaire du jour
Sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix [Edith Stein] (1891-1942), carmélite, martyre, copatronne de l’Europe
La Femme et sa destinée (trad. Amiot-Dumont 1956, p. 124)
« Voici l’époux ! Sortez à sa rencontre »
L’union de l’âme avec le Christ est autre chose que la communion entre deux personnes terrestres : commencée par le baptême et constamment renforcée les autres sacrements, elle est une intégration et une poussée de sève –- comme nous le dit déjà le symbole de la vigne et du cep (Jn 15). Cet acte d’union avec le Christ entraîne un rapprochement de membre à membre entre tous les chrétiens. Ainsi l’Eglise prend la figure du corps mystique du Christ. Ce corps est un corps vivant et l’esprit qui l’anime est l’esprit du Christ qui, partant de la tête, s’écoule vers tous les membres ; l’esprit qui émane du Christ est le Saint Esprit et l’Eglise est donc le temple du Saint Esprit (cf 1Co 6,19).
Mais, malgré la réelle unité organique de la tête et du corps, l’Eglise se tient à côté de Christ comme une personne indépendante. Et tant que Fils du Père éternel, le Christ vivait avant le commencement des temps et avant toute existence humaine. Par l’acte de la création, l’humanité vivait avant que le Christ ne prenne sa nature et ne soit intégré à elle. Par son incarnation, il lui a apporté sa vie divine. Par son œuvre de rédemption, il l’a rendu capable de recevoir la grâce… La cellule primitive de cette humanité rachetée, c’est Marie : c’est en elle que s’accomplit pour la première fois la purification et la sanctification par le Christ, c’est elle la première qui a été remplie de l’Esprit Saint. Avant que le Fils de Dieu soit né de Sainte Vierge, il a créé cette Vierge pleine de grâce et, en elle et avec elle, l’Eglise. C’est pourquoi, créature distincte de lui, elle se tient à ses côtés bien qu’indissolublement liée à lui.
Toute âme purifiée par le baptême et élevée à l’état de grâce est, par là même, créée par le Christ et née pour le Christ. Mais elle est créée dans l’Eglise et elle naît par l’Eglise… Ainsi l’Eglise est la mère de tous ceux à qui s’adresse la rédemption. Elle l’est par son union intime avec le Christ, et parce qu’elle se tient à ses côtés en qualité de Sponsa Christi, Epouse du Christ, pour collaborer à son œuvre de rédemption.