Action de grâces et reconnaissance
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Action de grâces et reconnaissance
Abbé Bruno Le Pivain
Dieu aime multiplier les causes secondes, écrivait saint Thomas d’Aquin. C’est d’ailleurs, au cœur du christianisme, l’une des marques les plus éprouvées du régime de l’Incarnation, à commencer par l’humanité du Verbe Incarné. L’action de grâces, sans laquelle la vie s’étiole inexorablement, n’échappe pas à cette règle bienfaisante. Au cours de l’année, l’Église déroule merveilleusement dans sa liturgie, spécialement dans les préfaces, les innombrables motifs de nourrir cette action de grâces, à travers les mystères de la vie du Christ, jusqu’à l’action de grâces essentielle pour la Trinité sainte.
Non moins merveilleusement, la vie, parfois semée d’embûches, jalonne son passage de motifs précis d’action de grâces, si bien qu’il n’est pas possible de cultiver cette respiration de l’âme sans rencontrer ces fameuses causes secondes, instruments de la Providence, qui nous obligent — au sens le plus cordial du terme — à la reconnaissance concrète. Par le fait de l’Incarnation, il n’existe pas d’action de grâces sans reconnaissance pour des personnes. La deuxième permet même d’éduquer et de vérifier la première, non contente de la nourrir. Il faudra y revenir un jour plus avant : c’est parce que le catholicisme est une religion de l’équilibre qu’il peut l’être des sommets.
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De même qu’il existe une action de grâces essentielle, il y a une reconnaissance essentielle, qui s’adresse à ses parents et à ses maîtres, pour ces derniers, ceux que l’expérience nous a montrés durablement comme tels, et qui gardent en commun le caractère de n’avoir pas cherché à s’imposer autrement que par le don de leur personne.
Et vient la litanie des motifs particuliers de reconnaissance, qu’il est bon d’égrener parfois sur la route : l’enthousiasme s’y rafraîchit.
Ce numéro de Kephas est, à sa manière, un acte de reconnaissance pour un cinéaste et son équipe, à travers le dossier consacré au film de Mel Gibson. On n’énumère plus les effets, parfois inattendus, de cette projection sur les esprits, les cœurs et les âmes. Ce film n’est pas l’Évangile, soit, et il peut comme tout autre faire à ce titre l’objet d’une critique attentive et ouverte. S’il n’est pas la Révélation, il fut cependant, à bien des égards, ainsi que le suggère le Fr. Venard dans sa substantielle étude, un révélateur fulgurant en matière de théologie de la Rédemption, de rapport entre l’Église et la culture, entre l’Église et les medias. Plus silencieusement, dans le secret des confessionnaux, le prêtre de paroisse, spécialement dans les longues stations de la Semaine Sainte, a pu constater combien nombreux auront été ceux qui, au-delà d’une impression de passage, auront grandi dans l’amour du Christ à l’occasion de ces séances de cinéma. Il sait aussi lui-même le fruit qu’il a pu en retirer, soit personnellement, soit également, comme l’évoque l’abbé Richard, dans la qualité de prière de l’assistance aux cérémonies de la dite Semaine Sainte. Fait remarquable : chacun aura été frappé par telle scène, tel visage, tel aspect particulier du film. L’Esprit souffle où il veut. Merci, Mel Gibson.
Plus familialement, est-il permis, sans verser dans le mélodrame, d’exprimer sa reconnaissance à tous les collaborateurs de Kephas, pour la flamme avec laquelle ils se donnent à cette entreprise, parce qu’ils y croient (ils semblent avoir raison de le faire). On salue au passage cet ouvrage à paraître, premier rejeton de la collection « Kephas », présenté plus loin (p. 177) : merci au « vieux prof de philo », l’aventure continue…
J’espère enfin que l’équipe, maintenant bien fournie, qui œuvre à Angers avec un désintéressement joyeux aux diverses tâches inhérentes à ce genre d’activités, nonobstant, un emploi du temps déjà bien garni, ne m’écharpera pas si je remercie par ces lignes les uns et les autres, sans avoir pris leur avis. Amis lecteurs, vous aurez remarqué quelques coquilles dans le numéro 9… Déménagement des bureaux et gros problèmes informatiques ont mangé le temps de la relecture : pardon. Mais c’est maintenant une équipe affûtée qui tient l’affaire en main.
Pas d’action de grâces véritable sans reconnaissance… et l’on n’a pas à se forcer en la matière. Il ne suffit pas de le constater, il faut parfois l’exprimer, ce qui est chose faite.
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