Signification des nouvelles « Normes sur les délits les plus graves »

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Signification des nouvelles « Normes sur les délits les plus graves »

Note du Père Federico Lombardi

ROME, Jeudi 15 juillet 2010 (ZENIT.org) – Le directeur de la salle de presse du Saint-Siège, le P. Federico Lombardi, S.J., a publié aujourd’hui cette réflexion sur la « Signification de la publication des nouvelles ‘Normes sur les délits les plus graves’ » par la Congrégation pour la doctrine de la foi. Une réflexion accompagnée d’un résumé de cette analyse.

Note du Père Federico Lombardi

Jean-Paul II avait promulgué en 2001 un document de grande importance, le Motu Proprio intitulé Sacramentorum Sanctitatis Tutela, attribuant à la Congrégation pour la doctrine de la foi la compétence pour traiter et juger selon le droit canon une série de délits particulièrement graves qui relevaient jusque là de la compétence d’autres dicastères ou pour lesquels la compétence était floue. Le Motu Proprio ( la « loi » au sens strict) était accompagné d’une série de mesures et de normes procédurales regroupées sous le titre de Normae de Gravioribus Delictis. L’expérience des neuf années suivantes a justifié la mise à jour de ces mesures, de manière à simplifier et rendre plus efficaces les procédures et à tenir compte de nouvelles problématiques. Cela a pu se faire parce que le Pape a attribué à la Congrégation pour la Doctrine de la foi de nouvelles facultés qui n’avaient pas été intégrées dans la version initiale des Normes. C’est à présent chose faite, dans le cadre justement d’une révision systématique de ces Normes.

Les délits les plus graves auxquels se référaient les Normes concernent les réalités centrales de la vie de l’Eglise que sont les sacrements de l’Eucharistie et de la Pénitence, mais aussi les abus sexuels commis sur mineurs de moins de 18 ans par des clercs. Le grand écho que ces derniers délits ont récemment eu dans l’opinion publique a entraîné un vaste débat sur les normes et les procédures appliquées par l’Eglise pour juger et punir les coupables. Il est donc juste de faire toute la clarté sur le dispositif en vigueur en la matière, et que ces normes soient présentées de manière détaillée pour faciliter l’orientation de quiconque devra traiter de ces questions. Un premier éclaircissement, principalement destiné à la presse, fut fourni il y a peu avec la publication sur le site Internet du Saint-Siège d’un bref « Guide pour la compréhension des procédures de base de la Congrégation pour la doctrine de la foi face aux accusations d’abus sexuels ». Mais la publication des nouvelles Normes est d’une tout autre dimension car elle offre un texte juridique officiel mis à jour et valable pour toute l’Eglise.

Afin d’en faciliter la lecture à un large public non spécialisé, principalement intéressé à la question des abus sexuels, cherchons à en présenter les quelques aspects principaux :

Par rapport aux précédentes, les nouvelles normes permettent des procédures accélérées, notamment la possibilité de ne pas suivre la « procédure judiciaire » mais de procéder par « décret extra judiciaire », ou bien celle de présenter au Pape dans des circonstances particulières les cas les plus graves en vue de la réduction du prêtre à l’état laïque. Une autre norme adoptée en vue de simplifier les problèmes précédents et pour tenir compte de l’évolution de la situation dans l’Eglise, concerne la possibilité d’accueillir comme membres des tribunaux des avocats et des procureurs non plus seulement ecclésiastiques mais aussi laïques. De la même manière, le titre de docteur en droit canon ne sera plus indispensable pour occuper ces fonctions, mais la compétence requise peut être validée par exemple par un titre de licence.

Par ailleurs, la prescription passe de dix à vingt ans, avec toujours la possibilité de dérogation au-delà de cette période de temps. Significatif aussi le fait que les handicapés mentaux soient assimilés à des mineurs et que la pédopornographie soit ajoutée à la liste des délits. Elle est ainsi définie : « l’acquisition, la détention et la diffusion » par un membre du clergé « de quelque façon et moyen, de matériel pornographique ayant pour objet des mineurs de 14 ans ». Par ailleurs, en vue de garantir la dignité de toutes les personnes concernées, les normes sur la confidentialité des procès sont maintenues.

Il est un point qui n’est pas abordé, bien qu’il ait fait l’objet de récents débats : la collaboration avec les autorités civiles. Appartenant à l’ordonnancement pénal de l’Eglise, qui se suffit à lui même, ces normes ici publiées sont distinctes de celles du droit pénal des Etats. On notera toutefois que le Guide, cité précédemment et publié sur le site du Saint-Siège, spécifie qu’il faut toujours suivre les dispositions de la loi civile en ce qui concerne le traitement des crimes par les instances judiciaires compétentes. Cette disposition est insérée dans la section des procédures préliminaires. En clair, la Congrégation pour la doctrine de la foi propose d’agir dans les temps pour obtempérer aux lois du pays, et non durant la procédure canonique ou après celle-ci.

La publication des nouvelles normes contribue à la clarté et à la certitude du droit dans un domaine où l’Eglise est aujourd’hui fortement engagée à agir avec rigueur et transparence, de façon à répondre pleinement aux justes attentes pour une garantie de la cohérence morale et de la sainteté évangélique que les fidèles comme l’opinion publique réclament de l’Eglise, et que le Saint-Père ne cesse d’appeler de ses vœux.

Bien sûr, bien d’autres mesures et initiatives seront également nécessaires au niveau des diverses instances ecclésiales. La Congrégation étudie maintenant le moyen d’aider les épiscopats à appliquer de manière cohérente et efficace les directives relatives au traitement des cas d’abus sexuels sur mineurs de la part de membres du clergé dans le cadre d’activités ou d’institutions liées à l’Eglise, avec une attention à la situation et aux problèmes de la société au sein de laquelle ils opèrent. Ceci représentera un autre pas en avant décisif pour que l’Eglise traduise dans les faits, de manière permanente et avec une prise de conscience continue, les fruits des enseignements et des réflexions qui ont vu le jour au cours de cette douloureuse expérience de la « crise » issue des abus sexuels de la part de membres du clergé.

Pour compléter cette brève présentation des principales nouveautés contenues dans le document, il faut souligner que les Normes concernent aussi des délits d’une autre nature, pour lesquels il ne s’agit pas tant de décisions nouvelles en substance que de mise en ordre de mesures déjà en vigueur, afin de disposer d’un appareil juridique plus articulé face aux délits graves du ressort de la Congrégation pour la doctrine de la foi. Les nouvelles normes touchent aux délits contre la foi (hérésie, apostasie et schisme), pour lesquels sont compétents les évêques diocésains mais dont l’appel revient à la Congrégation, elles concernent aussi l’enregistrement et la divulgation malicieuses de confessions sacramentelles, sujettes déjà à un décret de condamnation en 1988, et enfin toute tentative d’ordination sacerdotale de femmes, condamnée là aussi par un décret de 2007.

[Texte original: Italien, Traduction française distribuée par la salle de presse du Saint-Siège]

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