Archive pour le 22 mars, 2010
Dietrich BONHOEFFER: La prière d’intercession
22 mars, 2010du site:
http://www.ndweb.org/ecrit/bonhoeffer/bonhoeffer.html
Dietrich BONHOEFFER
La prière d’intercession
Une communauté chrétienne vit de l’intercession de ses membres, sinon elle meurt.
Quand je prie pour un frère, je ne peux plus en dépit de toutes les misères qu’il peut me faire, le condamner ou le haïr. Si odieux et si insupportable que me soit son visage, il prend au cours de l’intercession l’aspect de frère pour lequel le Christ est mort, l’aspect du pécheur gracié. Quelle découverte apaisante pour le chrétien que l’intercession : il n’existe plus d’antipathie, de tension ou de désaccord personnel dont, pour autant qu’il dépend de nous, nous ne puissions triompher. L’intercession est bain de purification où, chaque jour, le fidèle et la communauté doivent se plonger. Elle peut signifier parfois une lutte très dure avec tel d’entre nos frères, mais une promesse de victoire repose sur elle.
Comment est-ce possible ? C’est que l’intercession n’est rien d’autre que l’acte par lequel nous présentons à Dieu notre frère en cherchant à le voir sous la croix du Christ, comme un homme pauvre et pécheur qui a besoin de sa grâce. Dans cette perspective, tout ce qui me le rend odieux disparaît, je le vois dans toute son indigence, dans toute sa détresse, et sa misère et son péché me pèsent comme s’ils étaient miens, de sorte que je ne puis plus rien faire d’autre que prier : Seigneur agis toi-même sur lui, selon Ta sévérité et Ta bonté. Intercéder signifie mettre notre frère au bénéfice du même droit que nous avons reçu nous-mêmes ; le droit de nous présenter devant le Christ pour avoir part à sa miséricorde.
Par là nous voyons que notre intercession est un service que nous devons chaque jour à Dieu et à nos frères. Refuser à notre prochain notre intercession c’est lui refuser le service chrétien par excellence. Nous voyons aussi que l’intercession est, non pas une chose générale, vague, mais un acte absolument concret. Il s’agit de prier pour telles personnes, telles difficultés et plus l’intercession est précise, et plus aussi elle est féconde.
Dietrich BONHOEFFER
Grand théologien de l’Eglise luthérienne allemande, pasteur,
Dietrich Bonhoeffer lutta ouvertement et jusqu’à sa mort contre le nazisme.
(1906 – 1945)
Texte extrait de « De la vie communautaire », Ed : Delachaux et Niestlé, collection « l’actualité protestante », 1947, 141 p, p85 – 87.
Le théologien Dietrich Bonhoeffer
22 mars, 2010du site:
http://www.esprit-et-vie.com/article.php3?id_article=2154
Le théologien Dietrich Bonhoeffer
Esprit & Vie n° 189 – Mars 2008 – 1re quinzaine, p. 17-18.
Le théologien Dietrich Bonhoeffer suscite un intérêt qui ne faiblit pas, ce que prouve l’actualité éditoriale récente. Les éditions Labor et Fides ont vaillamment entrepris une édition renouvelée, que ce soit au niveau de la traduction ou de l’appareil critique, des œuvres du théologien allemand. C’est aujourd’hui le volume n° 5 qui paraît, reprenant une des pièces maîtresses de l’auteur, alors que le n° 8, Résistance et Soumission, ensemble encore inédit en français de lettres et notes de captivité, était déjà sorti en 2006 (voir Esprit & Vie n° 160). On attend alors avec impatience la réédition, annoncée, du Prix de la grâce (Nachfolge) et de L’Éthique… Quelques années auparavant, le même éditeur avait aussi fait paraître le cours d’homilétique de Bonhoeffer à Finkelwalde, sous le titre La Parole de la prédication (Esprit & Vie n° 111). Et c’est à Bayard que l’on doit le récent petit volume, Création et Chute. Exégèse théologique de Genèse 1 à 3 (voir Esprit & Vie n° 170).
De la vie communautaire est un écrit de taille modeste que Bonhoeffer écrivit d’un trait à l’automne 1938, après avoir lui-même vécu avec les jeunes candidats au ministère pastoral dans le séminaire de Finkelwalde entre 1935 et 1937, période qu’il a dit être parmi les plus heureuses de sa vie. Ce livre est celui du théologien qui a connu le plus grand nombre de rééditions, il a été très souvent lu, conseillé, et médité par d’innombrables chrétiens, le plus souvent catholiques d’ailleurs, surtout ceux qui vivent en communauté, y compris des séminaristes (je peux en témoigner !). Il fut écrit à un moment où la montée du péril hitlérien rendait la vie vraiment difficile : ainsi, le 8 septembre 1938, la sœur jumelle de Bonhoeffer, chez qui se trouvait alors Dietrich pour écrire son livre, dut émigrer en Suisse et, de là, en Angleterre, avec son mari Gerhard Leibholz, ce dernier étant considéré par le régime nazi comme « non aryen » ; au même moment, un autre beau-frère de Bonhoeffer, Hans von Dohnanyi préparait un coup d’État contre le dictateur.
Cet ouvrage dit les choses à la fois avec simplicité et profondeur. Il commence, dans un premier chapitre, par des généralités sur la communauté elle-même, toute entière tournée vers le Christ et rassemblée autour de lui, avant de poursuivre dans les chapitres suivants sur de nombreux aspects concrets de la vie communautaire. Le cinquième et dernier chapitre est alors complètement consacré à la confession et à la sainte Cène, se terminant par un très beau développement sur « la communauté eucharistique » (p. 103-104), « accomplissement suprême de la communauté chrétienne » (p. 104). Comme une suite finalement assez logique, puisque la prière des psaumes occupe une place également importante dans la prière communautaire (p. 45-48), Labor et Fides a eu l’excellente idée de compléter le texte de Bonhoeffer par toute une série d’écrits, toujours de sa plume, sur les psaumes, soit une présentation générale, sous le titre « Le livre de prières de la Bible » (p. 105-133), une étude sur « Le Christ dans les psaumes » (p. 135-141) et, pour finir, une belle méditation sur le psaume 119 (p. 143-176). Signalons enfin la nourrissante postface des éditeurs allemands (p. 177-205).
D’un autre côté, quelques décennies après Eberhard Bethge, André Dumas ou René Marle, les ouvrages consacrés à Bonhoeffer sont de plus en plus nombreux depuis quelques années, écrits par Henry Mottu, Arnaud Corbic, Raymond Mengus ou Michel Seonnet. Sans oublier une superbe et épaisse biographie, qui restera longtemps une référence, sous la plume de son compatriote Ferdinand Schlingensiepen, un des fondateurs de la Société Bonhoeffer (Esprit & Vie n° 160), qui prend davantage de distance et dispose de plus d’informations que la seule dont on disposait jusqu’alors, écrite en 1967 par Bethge, neveu par alliance de Bonhoeffer.
Aujourd’hui, vient de paraître en co-édition un recueil des principales contributions à un colloque sur Bonhoeffer qui eut lieu, à l’occasion du centenaire de sa naissance, à la fin de l’été 2006, sous l’égide de l’Association francophone et œcuménique de théologiens pour l’étude de la morale (ATEM). Comme l’explique Denis Müller dans sa brève et lumineuse préface, pleine d’humour, ce colloque « a tenté d’esquisser et de baliser quelques idées nouvelles pour une reprise responsable et pertinente de nos interrogations actuelles sur les questions d’éthique fondamentale, de théologie systématique, de dogmatique et d’ecclésiologie. L’œuvre de Bonhoeffer, en effet, se tient au carrefour de plusieurs disciplines… » (p. 12.) Tous les articles sont intéressants et donnent à penser ; j’ai particulièrement apprécié ceux qui se rapportaient à la fameuse Nachfolge Christi de Bonhoeffer, qu’une traduction pas vraiment exacte rend parfois par le mot « obéissance » : « Nachfolge ou la pauvreté de la foi » par Hans-Christoph Askani (p. 27-46), « Suivre et faire : Structure de l’appel dans Nachfolge de D. Bonhoeffer » par Jean-Daniel Causse (p. 219-228) et « Suivre et faire au temps de l’épreuve » par Marie-Jo Thiel (p. 229-244). Sans surprise, la réflexion finale de Pierre Gisel, hélas ! seulement trop brève, portant sur la référence faite par Bonhoeffer à l’Église et, plus encore, au Christ lui-même, mérite amplement la lecture : « L’avant-dernier, lieu de l’Église et lieu du Christ – Entre sécularité du monde et réalité du religieux » (p. 245-252). Pareil thème avait d’ailleurs déjà été, au cours du colloque, développé plus longuement avec bonheur, dans une approche toutefois un peu différente, par le jeune et brillant théologien alsacien, enseignant aujourd’hui à Heidelberg, Fritz Lienhard : « L’éthique politique et la question des mandats » (p. 91-113). Enfin, signalons la réflexion intéressante d’Alberto Bondolfi : « Autour de la réception catholique de l’éthique politique de Bonhoeffer » (p. 115-125). Il conclut sans barguigner : « Sans les lettres et notes de captivité de [Bonhoeffer], et surtout sans son témoignage jusqu’au martyre, la théologie catholique n’aurait pas atteint ces résultats qui l’ont rendue capable d’un vrai dialogue interconfessionnel et interreligieux à la fin du siècle passé et au début de ce siècle. La convergence presque unanime des théologien(ne)s catholiques après les années 1960 dans l’affirmation du primat de la conscience et contre toute forme d’autoritarisme n’aurait pas été possible sans l’apport et le témoignage du dernier Bonhoeffer. Ses intuitions ont gagné toute la chrétienté, et sont même allées au-delà, portant ainsi des fruits dans les formulations propres à chaque tradition théologique. » (p. 124-125.)
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De la vie communautaire et Le livre de prières de la Bible – Collectif
P. David Roure
Genève, Labor et Fides, coll. « Œuvres de D. Bonhoeffer », 2007. – (14,5×22,5), 240 p., 22 €. Sous la direction d’Alberto Bondolfi, Denis Müller et Simone Romagnoli. Paris, Éd. du Cerf, coll. « Revue d’éthique et de théologie morale », 2007. -
Saint Augustin: La lumière du monde
22 mars, 2010du site:
http://www.levangileauquotidien.org/main.php?language=FR&module=commentary&localdate=20100322
Le lundi de la 5e semaine de Carême : Jn 8,12-20
Commentaire du jour
Saint Augustin (354-430), évêque d’Hippone (Afrique du Nord) et docteur de l’Église
Sermons sur l’évangile de Jean, n°34 (trad. Véricel, l’Évangile commenté, p. 223)
La lumière du monde
Les paroles du Seigneur : « Je suis la lumière du monde » sont claires, à mon avis, pour ceux qui ont que les yeux qui les font avoir part à cette lumière ; mais ceux qui n’ont que les yeux du corps s’étonnent d’entendre dire à notre Seigneur Jésus Christ : « Je suis la lumière du monde. » Peut-être même y en a-t-il qui se disent : Est-ce que le Christ ne serait pas ce soleil qui, par son lever et son coucher, détermine le jour ?… Non, le Christ n’est pas cela. Le Seigneur n’est pas le soleil qui a été fait, mais celui par qui le soleil a été fait. « Car tout a été fait par lui et rien de ce qui a été fait n’a été fait sans lui. » (Jn 1,3) Il est donc la lumière qui a créé cette lumière que nous voyons. Aimons cette lumière, comprenons-la, désirons-la, pour arriver un jour jusqu’à elle, conduits par elle, et pour vivre en elle de manière à ne jamais mourir…
Vous voyez donc, mes frères, vous voyez, si vous avez des yeux qui voient les choses de l’âme, quelle est cette lumière dont le Seigneur déclare : « Qui me suit ne marche pas dans les ténèbres. » Suis ce soleil, et voyons si tu ne marcheras pas dans les ténèbres. Voici qu’il se lève et vient vers toi ; en suivant sa route, il se dirige vers l’occident ; mais toi, tu dois marcher vers le soleil levant qu’est le Christ.