La Sagesse dans l’Ancien Testament
aujourd’hui nous, en Italie, célébrons le deuxième dimanche après Noël, la première lecture est du livre du Siracide, c’est pourquoi je mets ce commentaire, du site:
http://www.mariedenazareth.com/13345.0.html
La Sagesse dans l’Ancien Testament
Le mot Sagesse signifie d’abord « saveur, goût, » mais aussi « savoir-vivre » qui donne justement une bonne saveur à la vie…
La sagesse grecque est en quête du bonheur. A l’époque de l’expansion de l’empire grec (Alexandre le grand – 333), la religion biblique s’est ouverte à la perspective de la sagesse grecque, une sorte de synthèse se fait entre cette sagesse et la Torah de Mo?se. (Rappelons que la Torah est tout à la fois histoire, direction, mœurs, la Torah est pédagogue et mène à la vie tandis que le temple est le lieu de la rémission des péchés).
Depuis le second Isa?e, l’origine du monde et de son « temps » comprend dans la pensée « sage » de Dieu le temps où se révèleront sa Parole et le lieu de sa présence au monde (le Temple).
Une conception différente de la temporalité
Certes, la Sagesse grecque se veut intemporelle tandis que le temps de l’Histoire Sainte biblique est le seul milieu où l’homme peut accéder à la compréhension de l’action de la pensée intemporelle de Dieu ; ainsi la prophétie biblique s’inscrit-elle dans l’histoire.
Au moment de la rencontre avec la Sagesse grecque, le Siracide (écrit à Jérusalem entre 200 et 175) affirme que cette Torah de Moïse, prééxistante au monde, doit être le révélateur de ce qui doit être identifié à la Sagesse grecque éternelle ; elle prend sa place :
« La Sagesse fait son propre éloge (…) Tout cela n’est autre que le livre de l’alliance du Dieu Très-Haut, la Loi promulguée par Moïse, laissée en héritage aux assemblées de Jacob. » (Sirac 24,1.23).
La Torah est la Sagesse présente auprès de Dieu lors de la création, prenant ses délices parmi les hommes, et les invitant à l’écouter (Pr 8, 22-32).
Jusqu’ici on avait surtout approfondi la révélation de la parole de Dieu dans les événements de l’histoire sainte. Dans le contact avec les grecs, les Hébreux ont du approfondir la révélation en puissance avant la création de l’univers et justifiant la recherche d’une harmonie cosmique.
Et l’on fait la synthèse entre la Création et l’Histoire, entre la recherche du bonheur présent et l’écoute du projet d’avenir de Dieu, de sa Torah qui donne le sens.
Cela dit, on lit aussi dans le livre de la Sagesse toute l’opposition entre la sagesse du monde « impie » et celle des croyants :
« Car ils disent entre eux, dans leur faux calculs : (…) courte et triste et notre vie, usons des créatures avec l’ardeur de la jeunesse… opprimons le juste qui est pauvre… car ce qui est faible s’avère inutile. (…) tendons des pièges au juste… car son genre de vie ne ressemble pas aux nôtres et ses sentiers sont tout différents et … il se vante d’avoir Dieu pour Père…» (Sg 2,1 -20)
La Sagesse impie a peur de la faiblesse tandis que la Bible sait que Dieu regarde le pauvre.
Différence et dialogue existent aussi sur le terrain philosophique
Le philosophe grec Parménide accéda à l’intuition de l’être et fut ébloui par cette perception globale et spirituelle mais qui éclipsait pour lui le monde ambiant.
Platon concevait un monde des Idées, prototype et modèle immobile des réalités sensibles de notre monde multiple et changeant. Aristote médita sur l’Etre suprême, son unité source du multiple et du mouvement. Mais cet Etre serait-il solitaire et égoïste ?
Sans doute l’une des raisons qui empêchèrent Aristote de définir Dieu comme une personne est ce narcissisme de l’Un. Les philosophes stoïciens, avaient trouvé une demi-solution à ce scandale : Dieu présent à sa création, exerçait une Providence quasi paternelle à l’égard du monde. Mais cette découverte entraîna les stoïciens vers le monisme (c.a.d. une confusion de Dieu et du monde)…
Les livres bibliques (Sg 14,3 ; Dn 6,18 ; 2 M 4,6) précisent cette notion de Providence comme une belle expression synthétique de ce qu’enseignait déjà la Bible. Mais dans la Bible l’approche de l’Unité de Dieu est moins abstraite que chez les Grecs ; elle est ouverte à l’avenir de la Révélation trinitaire car dans la Bible Dieu créateur dit ‘nous’ et non ‘je’ :
« faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance. » (Gn 1,27);
Dieu apparaît à Abraham sous l’apparence de trois visiteurs dont le texte parle en alternant le singulier et le pluriel (Gn, 18,9.13) ; et la Bible adopta le mot Élohim pour désigner Dieu, c’est un pluriel qu’une logique abstraite aurait dû récuser…
Cette ouverture au mystère propre de Dieu préparait la pensée hébraïque à aller plus loin. Dans les livres sapientiaux Dieu « engendre » sa propre Sagesse (Pr. 8,9), profère sa Parole (Si 24) manifeste son esprit [1]. « [La Sagesse] est un miroir sans tache de l’activité de Dieu, l’image de sa bonté » (Sg 7,26).
La Sagesse, mise en rapport immédiat avec la gloire divine, n’est en aucune manière un foyer indépendant, elle se rattache par tout elle-même à sa source lumineuse et irradiante, elle en est le pur reflet, le miroir, elle est l’image de ses vertus.
De manière générale, la Sagesse d’Israël résonne d’une manière différente de celle des Nations [2] : elle est centrée sur le Dieu vivant et non pas seulement sur l’homme. En Israël, la Sagesse et la prophétie iront de pair : par exemple, le livre de la Sagesse a une forte dimension eschatologique : le début du livre traite de l’immortalité que la manne préfigure (Sg 1-6) et la fin du livre relit l’Exode comme une création nouvelle (Sg 19,18-21).
Daniel, qui est un sage [3] possède la compréhension des desseins divins (Dn 5 et suivant). Au premier siècle de notre ère, la sagesse juive et la prophétie tendent à se rejoindre.
La sagesse verse dans l’apocalyptique, et la prophétie se coule dans la sagesse [4]. Dans l’Evangile, Jésus se présente comme la nouvelle Torah et la nouvelle Sagesse, ce qui signifie donc qu’il est préexistant à la création du monde.
La tradition de l’Eglise saluera en Marie le trône de la Sagesse.
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[1] Cf. René LAURENTIN, Dieu notre Père, Fayard, 1998., p. 33-37.
[2] C. LARCHER, Etudes sur le livre de la Sagesse, ed. Gabalda, Paris, 1969, Ibid., p. 386-388
[3] Dn 1, 4.17.20 ; 2,12.13.18
[4] Cf. Charles PERROT, Christ et Seigneur des premiers chrétiens. Descléee 1997. p.189-190
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