Archive pour le 13 novembre, 2009
LA MANNE DE LA TENDRESSE
13 novembre, 2009du site:
http://www.pagesorthodoxes.net/liturgie/liturgie.htm#manne
LA MANNE DE LA TENDRESSE
par Saint Nicolas Cabasilas
L’efficacité de l’Eucharistie consiste, pour ceux qui y prennent part à ce que rien ne leur manque. Conformément à sa promesse, nous demeurons en Christ en communiant à cette table et Christ demeure en nous, car il est écrit : Qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui (Jn 6,57).Si Christ demeure en nous, de quoi avons-nous besoin ? Que nous manque-t-il ? Si nous demeurons en Christ, que pouvons-nous désirer de plus ? Il est notre hôte et notre demeure. Heureux sommes-nous d’être Sa maison ! Quelle joie d’être nous-mêmes la demeure d’un tel habitant !
Que manque-t-il à tant de bonheur ? Qu’ont-ils à voir avec le mal, ceux qui resplendissent d’une telle lumière ? Quel mal peut résister à tant de bien ? Plus rien ne peut demeurer ou venir assaillir notre cœur, quand Christ Se manifeste ainsi, en nous. Il nous entoure et pénètre le plus profond de nous-mêmes.
Il est notre refuge. Il nous enserre de tous côtés, pour qu’aucune des flèches qu’on nous lance ne nous atteigne. S’il trouve en nous quelque imperfection, il la repousse et l’expulse. Christ réside en notre demeure et l’emplit totalement de sa présence. Nous participons non à quelque chose de lui, mais à lui-même tout entier. Ce ne sont pas quelques rayons et un peu de lumière que nous recevons, mais bien le disque solaire lui-même. Ainsi, nous l’habitons et lui nous habite au point de ne former avec lui qu’un seul esprit. Immédiatement, âme, corps et toutes nos facultés deviennent » spirituels « , car ils lui sont intimement unis. Notre âme est unie à son âme, notre corps à son corps et notre sang à son sang.
Le résultat ? C’est que le meilleur l’emporte sur l’inférieur et que le divin éclipse l’humain. Il se produit, alors, ce que Paul dit de la Résurrection : Ce qui est mortel est absorbé par la vie (2 Co 5,4). Plus loin, il ajoute : Si je vis, ce n’est plus moi, mais Christ qui vit en moi (Ga 2,20). Ô grandeur des mystères !
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L’homme de Dieu, Denys [auteur de plusieurs textes mystiques, fin V
siècle], nous dit que les autres sacrements seraient incomplets et sans capacité de produire leurs propres effets, si on ne leur ajoutait le banquet sacré. Il est donc impossible que les efforts et la justice des hommes puissent les libérer du péché. Ils ne peuvent non plus leur en procurer les autres résultats. Lorsque les pécheurs se repentent de leurs fautes et les confessent aux prêtres, ils se sentent affranchis de tout châtiment de Dieu, leur juge. Ils ne peuvent, cependant, bénéficier pleinement de l’efficacité de cette confession qu’après s’être assis à la Table du banquet.
C’est pourquoi nous sommes baptisés une seule fois alors que nous approchons fréquemment de la Table. Étant hommes, en effet, nous offensons Dieu quotidiennement. Ceux qui veulent être délivrés du péché ont besoin de faire pénitence, il leur faut peiner et triompher du mal. Or, ils ne pourront obtenir cela qu’en y joignant le seul remède à opposer aux péchés des hommes.
Lorsque l’olivier sauvage a été greffé, le bon olivier l’assimile tout entier. Ses fruits ne sont plus alors ceux d’un olivier sauvage. Ainsi, la justice des hommes, par elle-même, ne sert à rien mais dès qu’ils sont unis au corps et au sang du Christ, en y communiant, ils en reçoivent aussitôt les plus grands bienfaits : la rémission des péchés et l’héritage du Royaume : ce sont les fruits de la justice de Christ. De même qu’à la sainte Table nous recevons le corps du Christ, corps puissant à vaincre, de même s’ensuit-il que notre justice se modèle en Christ.
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Ce mystère est une Lumière pour ceux qui ont déjà été purifiés. C’est un moyen de se purifier pour ceux qui le veulent. C’est une onction pour ceux qui engagent le combat contre le Mauvais et les passions. Les premiers n’ont plus qu’à recevoir la Lumière du monde, l’œil débarrassé de ses humeurs. Quant à ceux qui ont encore besoin d’être purifiés, de quel autre moyen peuvent-ils avoir besoin ? Car le sang du Fils de Dieu nous guérit de tout péché (1 Jn 1,7), selon le mot de Jean, le disciple bien-aimé du Christ. En ce qui concerne la victoire sur le Mauvais, qui ne sait que, seul, Christ l’a vaincu ? Son corps est dressé comme seul trophée de victoire sur le péché. Par son corps, Il est à même de secourir ceux qui luttent car c’est en ce corps qu’Il a lui-même souffert et triomphé quand Il fut tenté.
Voilà pourquoi nous avons toujours besoin de cette chair ! Voilà pourquoi nous participons à cette Table ! Ceci, afin que la loi de l’Esprit soit active en nous, et que la vie selon la chair n’ait plus de place et qu’elle ne puisse saisir aucune occasion pour retomber à terre, comme des corps pesants, privés de leur soutien. Pour toutes ces raisons, ce mystère eucharistique est parfait. Ceux qui y communient n’ont pas à chercher ailleurs ce qu’il fournit excellemment.
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Beaucoup s’étonnent : ce mystère qui est plus parfait que les autres semble être moins efficace que le baptême pour libérer du péché. Le baptême nous purifie sans effort de notre part, tandis que l’eucharistie exige notre labeur. Rien ne distingue ceux qui sont purifiés dans le baptême de ceux qui n’ont jamais été souillés. Alors que beaucoup qui communient au banquet eucharistique portent les traces du péché.
Dans les péchés commis, nous remarquons quatre éléments : celui qui a commis le péché, l’acte mauvais, la sanction encourue et l’inclination au mal ainsi introduite en l’âme. Spontanément, en se hâtant vers le baptême, le pécheur doit renoncer au péché. Le reste, la culpabilité et l’attirance pour le mal, est enlevé sans effort par la purification baptismale. Quant au pécheur lui-même, il meurt, pourrait-on dire, dans l’eau baptismale et c’est un homme nouveau que rend le bain.
Le coeur brisé et contrit parce que nous sommes pécheurs, nous recevons le Pain sacré. C’est lui qui libère de la sanction et de la faute, et qui lave notre coeur de son inclination au mal. L’eucharistie ne fait pas mourir le pécheur car elle n’a pas reçu la force de créer à nouveau ! Ainsi, l’eucharistie est sans effet sur un seul des éléments du péché : le pécheur lui-même. Elle lui permet de subsister non plus en tant que justiciable mais comme auteur de son péché. Certains même portent encore les signes de leur maladie et les cicatrices des anciennes blessures ; car ils ne s’en sont pas suffisamment souciés et leur préparation a été insuffisante pour recevoir l’énergie du remède. La purification de l’eucharistie diffère de celle du baptême, car elle ne noie pas le pécheur et ne le recrée pas. Elle purifie certes, en laissant vivre le pécheur et cette purification suppose un effort de sa part. Cela n’est pas dû au sacrement mais à la nature même des choses qui fait que les pécheurs sont purifiés au baptême en étant lavés et dans l’eucharistie, en étant nourris.
Ici, je voudrais parler de l’effort qui nous est demandé. Lors de notre baptême, nous étions dans un état informe et dépourvus de la force requise pour avancer vers le bien. Ce mystère réalise ses effets en nous, comme un don gratuit ! Il ne requiert rien de notre part, car nous ne pouvons rien apporter. La Table sainte, au contraire, est servie alors que nous sommes déjà formés. Nous vivons et nous sommes aptes à nous diriger nous-mêmes. L’eucharistie nous permet d’utiliser l’énergie et les armes qui nous ont été fournies. Grâce à elle, nous pouvons poursuivre le bien, sans y être obligés ou tirés. Nous nous élançons dès lors spontanément comme des athlètes exercés pour la course…
Maintenant que le Soleil s’est levé et que, par ses mystères, sa lumière éclate de toutes parts, rien ne doit retarder notre action et nos efforts. Nous devons manger notre pain à la sueur de notre visage (Gn 3,19). Ce pain, rompu pour nous (1 Co 11,24), est uniquement destiné aux seuls êtres raisonnables. Le Seigneur dit : Travaillez pour la nourriture qui demeure ((Jn 6,27), et par ses paroles, il nous ordonne de ne pas rester oisifs et inactifs, mais de venir à son banquet en travaillant. Paul est formel quand il écarte les paresseux de la table corruptible de cette vie : Si quelqu’un ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas non plus (2 Th 3,10). Quelles oeuvres devons-nous produire si nous sommes invités à la Table sainte ?
Il nous faut être, personnellement, animés des dispositions requises, et d’abord nous purifier avant de participer à ce sacrement. Cela découle de ce que nous venons d’exposer. L’eucharistie n’est pas inférieure aux autres mystères. Elle l’emporte sur tous par son efficacité.
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Christ rend saints et justes ceux qui lui sont fortement unis. Il les instruit en leur apprenant ce qui est indispensable. Il exerce leur âme à la vertu, transformant en actes ce que le discernement leur fait percevoir, mais plus encore en devenant lui-même pour eux : sagesse, justice, sanctifications (1 Co 1,30).
Ainsi, les fidèles deviennent bienheureux et saints à cause du Bienheureux qui leur est uni. Par lui, eux qui étaient morts ressuscitent et ils deviennent sages, d’insensés qu’ils étaient. Ils sont saints, justes et fils de Dieu au lieu d’être impurs, pervers et esclaves. D’eux-mêmes, par leur nature ou leurs efforts, rien ne leur permettrait de s’attribuer ces titres. En fait, ils sont saints à cause de Celui qui est saint. Ils sont justes et sages à cause de Celui qui est juste et sage et qui demeure en eux. Voilà pourquoi nous devons vivre la vie nouvelle en Christ et faire preuve de droiture. Ce serait obligation impossible si nous n’étions rendus aptes spécialement pour cette vie nouvelle en Christ : Nous avons été ensevelis avec lui par le baptême […] afin que nous vivions, nous aussi, dans une vie nouvelle (Rm 6.4).
Extrait de Daniel Coffigny,
Nicolas Cabasilas, La Vie en Christ,
Éditions du Cerf, 1993
SAINT SILOUANE L’ATHONITE: LE REPENTIRE
13 novembre, 2009du site:
http://www.pagesorthodoxes.net/metanoia/silouane-repentir.htm
SAINT SILOUANE L’ATHONITE: LE REPENTIRE
Mon âme t’a connu, Seigneur, et j’annonce ta miséricorde à ton peuple. Peuples de la terre, ne vous laissez pas écraser par la dureté de la vie. Luttez seulement contre le péché et demandez l’aide du Seigneur ; il vous la donnera, car il est miséricordieux et nous aime.
Ô peuples de la terre ! C’est avec des larmes que j’écris ces lignes. Mon âme désire que vous connaissiez le Seigneur et que vous contempliez sa miséricorde et sa Gloire. J’ai soixante-douze ans ; je vais bientôt mourir et j’écris pour vous sur la miséricorde de Dieu que le Seigneur m’a donné de connaître par le Saint-Esprit ; et le Saint Esprit m’a appris à aimer tous les hommes. Oh ! que je voudrais vous placer sur une haute montagne pour que, de son sommet, vous, puissiez voir le Visage doux et miséricordieux du Seigneur, et que vos coeurs exultent de joie. Je vous dis la vérité : je ne trouve rien de bon en moi et j’ai commis de nombreux péchés, mais la grâce du Saint-Esprit les a effacés. Et je sais qu’à ceux qui luttent avec le péché, le Seigneur accorde non seulement le pardon, mais encore, la grâce du Saint-Esprit lui réjouit l’âme et lui donne une paix douce et profonde.
Ô Seigneur, tu aimes ta créature. Qui peut comprendre ton amour ou en goûter la douceur, si tu ne m’instruis pas toi-même par ton Esprit Saint !
Je te prie, Seigneur : répands sur les hommes la grâce du Saint-Esprit pour qu’ils puissent connaître ton amour. Réchauffe les coeurs abattus des hommes pour qu’ils te glorifient dans la joie et oublient les douleurs de la terre.
Ô Consolateur béni, je te le demande, les larmes aux yeux : console les âmes attristées des hommes. Donne à tous les peuples d’entendre ta voix leur disant avec douceur : » Vos péchés vous sont pardonnés « . Oui, Seigneur, il est en ton pouvoir d’accompli des miracles, et il n’y a pas de plus grand miracle que d’aimer le pécheur dans sa chute. Il est facile d’aimer un saint : il en est digne. Oui, Seigneur, écoute la prière de la terre. Tous les peuples sont plongés dans la souffrance ; tous, ils sont abattus par le péché ; tous, ils sont privés de ta grâce et demeurent dans les ténèbres.
Ô peuples de toute la terre ! Invoquons le Seigneur, et notre prière sera exaucée, car le Seigneur se réjouit du repentir des hommes ; toutes les Puissances célestes nous attendent pour que, nous aussi, nous jouissions de la douceur de l’amour de Dieu et puissions voir la beauté de sa Face.
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Lorsque les hommes gardent la crainte de Dieu, la vie sur terre est paisible et douce. Mais, de nos jours, les hommes se sont mis à vivre à leur gré et selon leur propre raison, et ils ont délaissé les saints commandements. Ils pensent trouver la joie sur terre en se passant du Seigneur, ne sachant pas que seul le Seigneur est notre joie et que l’âme de l’homme ne trouve le bonheur que dans le Seigneur. Il réchauffe et vivifie l’âme comme le soleil réchauffe les fleurs des champs, et, comme le vent qui les berce, il leur donne la vie. Le Seigneur nous a tout donné pour que nous lui rendions Gloire. Mais le monde ne le comprend pas. Et comment pourrait-on comprendre ce qu’on n’a ni vu ni goûté ! Moi aussi, lorsque j’étais dans le monde, je pensais que là était le bonheur : jouir de la santé, être beau, riche et aimé des autres. Et j’en étais devenu vaniteux. Mais lorsque je connus le Seigneur par le Saint-Esprit, je me suis mis à regarder tout le bonheur du monde comme de la fumée que le vent emporte. Mais la grâce du Saint-Esprit réjouit l’âme et la remplit d’allégresse, et, dans une paix profonde, elle contemple le Seigneur, oubliant la terre.
Seigneur, fais que les hommes se tournent vers toi, pour que tous ils connaissent ton amour, et que, dans le Saint-Esprit, ils puissent voir ton doux visage ; que tous, déjà sur terre, ils jouissent de cette vision et, voyant comment tu es, deviennent semblables à toi.
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Gloire au Seigneur de ce qu’il nous a donné le repentir, et par le repentir nous serons tous sauvés, sans exception. Seuls ne seront pas sauvés ceux qui ne veulent pas se repentir : c’est en cela que je vois leur désespoir, et je pleure beaucoup par compassion pour eux. Ils n’ont pas connu par le Saint-Esprit combien est grande la miséricorde divine. Mais si toute âme connaissait le Seigneur, savait combien il nous aime, alors personne ne désespérerait et même ne murmurerait jamais. Toute âme qui a perdu la paix doit se repentir, et le Seigneur lui pardonnera ses péchés. Alors la joie et la paix régneront de nouveau dans l’âme. On n’a pas besoin d’autres témoins, car le Saint-Esprit lui-même témoigne que les péchés sont pardonnés. Voici un signe du pardon des péchés : si tu hais le péché, c’est que le Seigneur t’a pardonné tes péchés.
Et qu’attendrions-nous encore ! Que quelqu’un du haut des Cieux nous chante un chant céleste ! Mais au Ciel tout vit par Saint-Esprit, et sur terre le Seigneur nous a donné le même Saint-Esprit. Dans les églises, les services divins sont accomplis par Saint-Esprit ; dans les déserts, sur les montagnes, dans les cavernes et partout, les ascètes du Christ vivent par le Saint-Esprit ; et si nous le gardons, nous serons libres de toutes ténèbres, et la vie éternelle sera dans nos âmes dés ici-bas.
Si tous les hommes se repentaient et gardaient les commandements divins, alors le Paradis serait sur terre, car le » Royaume Dieu est au-dedans de nous « . Le Royaume de Dieu, c’est le Saint-Esprit, et le Saint-Esprit est le même au Ciel et sur la terre.
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À celui qui se repent, le Seigneur donne le Paradis et le Royaume éternel, et il se donne lui-même. Dans sa grande miséricorde, il ne se souviendra pas de nos péchés, comme il ne s’est pas souvenu de ceux du larron crucifié a côté de lui.
Seigneur, grande est ta miséricorde. Qui saura te rendre grâce comme il convient, de nous avoir donné sur terre le Saint-Esprit ?
Seigneur, grande est ta justice. Tu as promis a tes Apôtres : » Je ne vous laisserai pas orphelins « . Maintenant, en effet, nous expérimentons cette miséricorde, et notre âme sent que le Seigneur nous aime. Mais celui qui ne le sent pas, qu’il se repente et vive selon volonté de Dieu, et alors le Seigneur lui donnera sa grâce qui guidera son âme. Mais si tu vois un homme qui pèche, et que tu n’as pas de compassion pour lui, alors la grâce t’abandonnera.
Il nous a été commandé d’aimer ; l’amour du Christ a pitié de tous les hommes, et le Saint-Esprit apprend à l’âme à observer les commandements divins, et lui donne les forces pour accomplir le bien.
Esprit Saint, ne nous abandonne pas. Quand tu es avec nous, l’âme entend ta présence et elle trouve en Dieu sa béatitude, car tu nous enflammes d’amour pour Dieu.
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Le Seigneur a tant aimé les hommes qu’il les a sanctifiés par le Saint-Esprit et les a rendus semblables à lui. Le Seigneur est miséricordieux, et à nous aussi le Saint-Esprit donne le pouvoir d’être miséricordieux. Frères, humilions-nous et gagnons par le repentir un coeur compatissant. Alors nous verrons la Gloire du Seigneur , c’est par la grâce du Saint-Esprit que l’âme et l’esprit la connaissent.
Celui qui se repent vraiment est prêt a supporter toutes sortes de souffrances : faim et dénuement, froid et chaleur, maladie et pauvreté, mépris et persécution, injustice et calomnie, – car son âme s’élance vers le Seigneur dans une prière pure, oubliant ce qui est sur terre. Mais celui qui est attaché à ses biens et à l’argent ne pourra jamais avoir l’esprit pure en Dieu, parce que dans son âme se trouve cette constante préoccupation : que faire de cet argent ? S’il ne se repent pas sincèrement et ne s’afflige pas d’avoir offensé Dieu, il mourra dans sa passion sans avoir connu Dieu.
Lorsqu’on te prend ce que tu as, donne-le, car amour divin ne peut rien refuser ; mais celui qui n’a pas connu l’amour ne peut être miséricordieux, parce que la joie de l’Esprit Saint n’est pas dans son âme.
Si, par ses souffrances, le Seigneur nous a donné sur terre le Saint-Esprit de la part du Père, nous a donné son Corps et son Sang, il est évident qu’il nous donnera aussi tout le reste dont nous avons besoin. Abandonnons-nous à la volonté de Dieu ; nous verrons alors la Providence divine, et le Seigneur nous donnera même ce que nous n’attendons pas. Mais celui qui ne s’abandonne pas a la volonté de Dieu, ne pourra jamais voir sa Providence à notre égard.
N’allons pas nous affliger de la perte de nos biens : l’affaire n’en vaut pas la peine. C’est mon propre père qui m’a appris cela. Quand un malheur arrivait à la maison, il restait calme. Un jour, notre maison brûla et les gens disaient : » Ivan Petrovitch, cet incendie t’a ruiné « . Mais, lui il répondait : » Avec l’aide de Dieu, je m’en remettrai « . Un jour que nous longions notre champ, je lui dis : » Regarde, on nous a volé des gerbes de blé « , et il me répondit : » Eh quoi ! mon petit, le Seigneur a fait pousser le blé pour nous ; nous en avons assez. Mais si quelqu’un vole, c’est qu’il a besoin de manger « . Il m’arrivait de lui dire : » Tu donnes beaucoup d’aumônes, mais là-bas, ils vivent mieux que nous et donnent moins « . Mais il me répondait : » Eh bien ! le Seigneur nous donnera ce qu’il faut. » Et le Seigneur n’a pas déçu son espérance.
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Dès qu’un homme miséricordieux se repent, le Seigneur lui pardonne ses péchés. Celui qui est miséricordieux ne se souvient pas du mal. Même si on l’offense ou si on lui prend ce qui lui appartient, il reste calme, car il connaît la miséricorde du Seigneur; et cette miséricorde du Seigneur, personne ne peut nous en priver, car elle vient d’en haut, elle est auprès de Dieu.
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Tous les hommes chastes et humbles, obéissants, sobres et se repentant de leurs péchés sont montés aux Cieux ; ils voient notre Seigneur Jésus Christ dans la Gloire, entendent les hymnes des Chérubins et ne se souviennent plus de la terre. Mais nous, sur terre, nous sommes agités comme la poussière que soulève le vent, et notre esprit reste attaché aux choses terrestres.
Oh ! que mon esprit est faible ! Comme une petite bougie, un léger souffle suffit pour l’éteindre ; mais l’esprit des Saints était enflammé comme le Buisson ardent, et ne craignait aucun vent. Qui me donnera une ferveur telle que, ni le jour, ni la nuit, l’amour du Seigneur ne me laisse de repos ! L’amour du Seigneur est brûlant. Pour lui, les saints supportaient toutes les souffrances et obtenaient le pouvoir d’accomplir des miracles. Ils guérissaient les malades, ressuscitaient les morts, marchaient sur les eaux, étaient soulevés dans les airs à l’heure de la prière ; par leur prière, ils faisaient tomber la pluie du ciel. Mais moi, ce n’est que l’humilité et l’amour du Christ que je voudrais apprendre, afin de ne blesser personne et de prier pour tous les hommes comme pour moi-même.
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Malheur à moi ! Moi qui aime si peu Dieu, j’écris sur l’amour de Dieu. C’est pourquoi je suis triste et affligé comme Adam lorsqu’il fut chassé du Paradis ; je sanglote et je crie :
» Aie pitié de moi, ô Dieu, aie pitié de ta créature tombée. Combien de fois m’as-tu donné ta grâce, mais à cause de ma vanité je ne l’ai pas gardée. Pourtant mon âme te connaît, toi, mon Créateur et mon Dieu. C’est pourquoi je te cherche en pleurant, comme Joseph qui pleurait son père Jacob sur la tombe de sa mère, lorsqu’il fut emmené comme esclave en Égypte.
» Je t’offense par mes péchés, tu te retires de moi, et mon âme languit après toi.
» Ô Esprit Saint, ne m’abandonne pas. Lorsque tu t’éloignes, de mauvaises pensées s’approchent de moi, et mon âme tout en larmes languit après toi.
» Ô Toute-Sainte Souveraine, Mère de Dieu, tu vois ma tristesse : j’ai offensé le Seigneur et il m’a abandonné. Mais j’implore ta bonté : sauve-moi, moi qui suis une créature de Dieu tombée dans le péché ; sauve-moi, ton serviteur « .
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Si tu penses du mal d’autrui, c’est le signe qu’un esprit mauvais vit en toi et qu’il t’inspire ces mauvaises pensées contre les gens. Et si quelqu’un meurt sans se repentir et sans pardonner à son frère, alors son âme descendra là où séjourne l’esprit mauvais qui la domine.
Nous avons cette loi : si tu pardonnes, cela signifie que le Seigneur t’a pardonne ; mais si tu ne pardonnes pas à ton frère, cela signifie que ton péché demeure en toi.
Le Seigneur veut que nous aimions notre prochain. Si tu penses que le Seigneur l’aime, cela veut dire que l’amour du Seigneur est avec toi. Si tu penses que le Seigneur aime beaucoup sa créature, si, toi-même, tu as de la compassion pour toute créature et aimes tes ennemis, et si, en même temps, tu t’estimes le pire des hommes, cela indique que la grande grâce du Saint-Esprit est avec toi.
L’homme qui porte en lui le Saint-Esprit, même si ce n’est pas en plénitude, souffre pour tous les hommes jour et nuit ; son coeur est plein de compassion pour toute créature de Dieu et surtout pour les hommes qui ne connaissent pas Dieu ou s’opposent à lui, et qui, pour cette raison, iront dans le feu des tourments. Il prie pour eux jour et nuit, plus que pour lui-même, afin que tous se repentent et connaissent le Seigneur.
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Le Christ a prié pour ceux qui le crucifiaient : » Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font « . Étienne, le premier diacre, priait pour ceux qui le lapidaient afin que le Seigneur ne leur compte pas ce péché. Et nous, si nous voulons garder la grâce, nous devons prier pour les ennemis. Si tu n’as pas de compassion pour le pécheur qui sera tourmenté dans le feu, c’est le signe que ce n’est pas la grâce du Saint-Esprit qui est en toi, mais bien un esprit mauvais ; et tant que tu es encore en vie, efforce-toi, par le repentir, de te libérer de lui.
Extrait de Starets Silouane : Moine du Mont Athos -
Vie – Doctrine – Écrits, par l’Archimandrite Sophrony
(Éditions Présence, Sisteron, 1973).
bonne nuit
13 novembre, 2009Saint Benoît: « Eveille-toi, toi qui dors » (Ep 5,14)
13 novembre, 2009du site:
http://www.levangileauquotidien.org/main.php?language=FR&module=commentary&localdate=20091113
Le vendredi de la 32e semaine du temps ordinaire (de la férie) : Lc 17,26-37
Commentaire du jour
Saint Benoît (480-547), moine
Règle, Prologue, 8-22
« Eveille-toi, toi qui dors » (Ep 5,14)
Levons-nous donc enfin ; l’Écriture ne cesse de nous éveiller en disant : « L’heure est venue de nous lever du sommeil » (Rm 13,11). Ouvrons les yeux à la lumière divine. Écoutons d’une oreille attentive la voix puissante de Dieu qui chaque jour nous presse en disant : « Aujourd’hui, si vous entendez sa voix, n’endurcissez pas votre coeur » (Ps 94,8). Et encore : « Celui qui a des oreilles pour entendre, qu’il écoute ce que l’Esprit dit aux Églises » (Ap 2,7). Et que dit-il ? « Venez, fils, écoutez-moi, je vous enseignerai la crainte du Seigneur. » (Ps 33,12) « Courez tant que vous avez la lumière de la vie, pour que les ténèbres de la mort ne vous enveloppent pas. » (Jn 12,35)
Cherchant son ouvrier dans la foule du peuple à qui il lance cet appel, le Seigneur dit encore : « Quel est l’homme qui aime la vie et désire voir des jours heureux ? » (Ps 33,13) Entendant cela, si tu réponds : Moi, Dieu te dit : Veux-tu avoir la vraie vie, l’éternelle ? Alors « garde ta langue du mal et tes lèvres des paroles trompeuses : détourne-toi du mal et fais le bien, cherche la paix et poursuis-la » (Ps 33,14-15). Quand vous aurez fait cela, je poserai les yeux sur vous et prêterai l’oreille à vos prières et « avant même que vous ne m’appeliez, je vous dirai : Me voici » (Is 58,9).
Quoi de plus doux, frères bien-aimés, que cette voix du Seigneur qui nous invite ? Voici que, dans sa tendresse, le Seigneur nous indique le chemin de la vie. Ceints de la foi et de la pratique des bonnes actions, et guidés par l’Évangile, allons donc par les voies qu’il nous trace pour être admis à voir celui qui nous a appelés dans son royaume (1Th 2,12). Si nous voulons habiter dans la demeure de son royaume, hâtons-nous par de bonnes actions, sinon nous n’y parviendrons jamais.