Rosh Hashana, nouvel an juif entre gravité et douceur

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Rosh Hashana, nouvel an juif entre gravité et douceur 

par Jean-Marie Allafort

Le nouvel an juif – Rosh Hashana – marque le début de l’année 5770 selon le calendrier hébraïque. Cette fête, qui durant deux jours, est célébrée avec grande solennité dans toutes les communautés juives, a de multiples significations. Rosh Hashana marque le début de trois semaines de festivités. En Israël, c’est le mois où l’on compte le plus de jours fériés. En 2009, le nouvel an juif, qui tombe les 19 et 20 septembre, coïncide avec le dernier jour du Ramadan et le début des festivités de ’Id al-Fitr marquant la rupture du jeûne chez les musulmans. A Jérusalem, ce dernier vendredi du Ramadan rassemble une foule particulièrement importante sur l’Esplanade des Mosquées. En contrebas, les juifs sont aussi particulièrement nombreux à prier au Mur des lamentations en cette veille du Nouvel an juif.

Rosh Hashana marque le nouvel an juif, c’est un fait connu de beaucoup. Mais les choses sont plus compliquées que cette formulation laconique. D’une part, le Nouvel an est célébré durant non pas une journée, mais deux, à savoir les deux premiers jours du mois de Tishri. D’autre part, cette fête tombe au septième mois de l’année hébraïque selon le calendrier biblique. Ainsi, l’origine de la fête de Rosh Hashana se trouve dans la Bible (Lévitique 23, 23-25). Le texte sacré demande aux fils d’Israël de se reposer le premier jour du 7ème mois et de « faire une acclamation ». Car selon l’Ecriture, le premier mois de l’année est non pas celui de Tishri mais celui de Nissan qui a vu le miracle de la sortie d’Egypte, acte de naissance du peuple d’Israël. Les rabbins interpréteront la Bible en distinguant le début de l’année liturgique – le 1er du mois de Nissan – et celui de l’année civile – le 1er de Tishri- à partir duquel on calcule les années sabbatiques (tous les 7 ans) et les jubilés (chaque 49 ans). Peu à peu, seul Rosh Hashana sera véritablement fêté.

La Bible ne donne aucune explication sur le sens de « l’acclamation » qui est demandée au peuple ce jour-là. Mais les rabbins eux accordent à cette expression de multiples significations. Le mot « acclamation » (terouahen hébreu) peut renvoyer à la sonnerie du shofar – corne de bélier utilisée comme instrument à vent par les juifs au sein du Temple de Jérusalem. Entendre le shofar est devenu un commandement important de Rosh Hashana. Un fidèle sonne donc le shofar à plusieurs reprises pendant les offices de la fête à la synagogue. Le but de ce geste liturgique, explique les rabbins, est de briser les cœurs et de les remuer pour provoquer le repentir. En effet, Rosh Hashana est d’abord et avant tout le jour où Dieu juge le monde. Selon le Talmud, tous les hommes défilent un à un devant la Créateur comme les brebis défilent devant le berger. Au terme du jugement le sort de chaque individu est scellé pour l’année qui commence.

La tradition juive distingue trois catégories de personnes : les justes, les mécréants et les « moyens ». Pour cette dernière (vraisemblablement la plus nombreuse), un sursis est accordé. Ils ont dix jours jusqu’à Kippour – le Grand Pardon – pour faire pénitence et revenir dans le droit chemin. Pour cette raison, le nouvel an juif revêt un caractère grave. Rien à voir avec les festivités de la saint Sylvestre !

Pour quelle raison le jugement s’effectue-t-il à Rosh Hashana ? Selon les textes de la tradition juive, la création fut achevée au 1er jour de Tishri. Dieu décida en ce jour de diriger le monde avec justice. Il est ailleurs écrit dans le Talmud que c’est aussi ce jour-là qu’Adam fut jugé, qu’il se repentit et qu’il fut pardonné. Dieu aurait alors dit : « Que ce soit un signe pour tes enfants, de la même manière que toi, tu as été jugé et pardonné en ce jour, eux aussi seront jugés et pardonnés. »

Rosh Hashana est appelé également dans les sources juives « le jour du souvenir » : mémorial de la création, mémorial du jour où le premier homme fut jugé et gracié et jour où Dieu fait mémoire des œuvres de chacun. L’homme invite aussi Dieu à se souvenir de ses actions en faveur de son peuple, par amour pour lui. C’est une manière de Lui demander sa miséricorde. Ainsi le jour du jugement est adouci par le jour du souvenir et devrait même l’emporter sur lui.

Sur le plan rituel, la fête de Rosh Hashana est particulièrement riche. En dehors de la sonnerie du shofar à la synagogue qui est le commandement principal de la fête, notons la richesse des prières liturgiques et poèmes spécialement composés pour cette occasion. Une grande solennité règne durant les offices où les fidèles sont en principe habillés de blanc, symbole de l’humilité et la pureté. Le blanc rappelle qu’il est nécessaire de se purifier pour se rapprocher de Dieu. La tenture de l’armoire sainte, du pupitre et parfois même les étoffes enveloppants les rouleaux de la Torah sont eux aussi blancs.

Une autre coutume particulièrement populaire est la cérémonie du Tashlikh : le premier jour de la fête en fin d’après midi, les fidèles se rendent près d’un cours d’eau, d’un étang ou au bord de la mer pour y vider leurs poches. Par ce geste symbolique, ils veulent jeter leurs péchés dans la mer. Ils récitent alors le passage biblique de Michée 7, 18-20 : « De nouveau, il nous manifestera sa miséricorde, il piétinera nos péchés. Tu jetteras (tashlikh) toutes leurs fautes au fond de la mer. »

Comme pour les autres fêtes juives, de nombreuses traditions se sont développées au cours des siècles autour de la table familiale. Chaque communauté a ses propres rites, usages et spécialités culinaires. La coutume plus populaire aujourd’hui consiste à tremper de la pomme dans du miel, en demandant à Dieu d’accorder une année de bienfaits et de douceur et en se souhaitant une « bonne et douce année ».

vendredi 18 septembre 2009

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