Archive pour le 16 juin, 2009

Sacred heart of Jesus/

16 juin, 2009

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Discours de Benoît XVI à la Communauté du Séminaire français de Rome

16 juin, 2009

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Discours de Benoît XVI à la Communauté du Séminaire français de Rome

ROME, Dimanche 7 juin 2009 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte du discours que le pape Benoît XVI a adressé ce samedi 6 juin aux membres de la Communauté du Séminaire pontifical français de Rome, à l’occasion de la passation de pouvoir entre la Congrégation du Saint-Esprit, qui fonda le séminaire en 1853 et la Conférence des évêques de France.

* * *

Messieurs les Cardinaux,

Chers frères dans l’Episcopat,

Monsieur le Recteur,

Chers prêtres et séminaristes,

C’est avec joie que je vous accueille à l’occasion des célébrations qui marquent ces jours-ci un moment important de l’histoire du Séminaire pontifical français de Rome. La Congrégation du Saint-Esprit qui, depuis sa fondation, en avait jusqu’alors assumé la tutelle la remet à présent, après un siècle et demi de fidèle service, à la Conférence des Évêques de France.

Nous devons rendre grâce au Seigneur pour le labeur accompli dans cette institution où, depuis son ouverture, près de 5000 séminaristes ou jeunes prêtres ont été préparés à leur future vocation. En saluant le travail des membres de la Congrégation du Saint-Esprit, Pères et Frères, je souhaite confier d’une manière particulière au Seigneur les apostolats que la Congrégation fondée par le vénérable Père Liberman conserve et développe à travers le monde – et plus particulièrement en Afrique – à partir de son charisme qui n’a rien perdu de sa force et de sa justesse. Puisse le Seigneur bénir la Congrégation et ses missions.

La tâche de former des prêtres est une mission délicate. La formation proposée au séminaire est exigeante, car c’est une portion du peuple de Dieu qui sera confié à la sollicitude pastorale des futurs prêtres, ce peuple que le Christ a sauvé et pour lequel il a donné sa vie. Il est bon que les séminaristes se souviennent que si l’Église se montre exigeante avec eux, c’est parce qu’ils devront prendre soin de ceux que le Christ s’est si chèrement acquis. Les aptitudes demandées aux futurs prêtres sont nombreuses : la maturité humaine, les qualités spirituelles, le zèle apostolique, la rigueur intellectuelle … Pour atteindre ces vertus, les candidats au sacerdoce doivent pouvoir non seulement en être les témoins chez leurs formateurs, mais plus encore ils doivent pouvoir être les premiers bénéficiaires de ces qualités vécues et dispensées par ceux qui ont la charge de les faire grandir. C’est une loi de notre humanité et de notre foi que nous ne soyons capables, le plus souvent, de donner que ce que nous avons au préalable reçu de Dieu à travers les médiations ecclésiales et humaines qu’il a instituées. Qui reçoit charge de discernement et de formation doit se rappeler que l’espérance qu’il a pour les autres, est en premier lieu un devoir pour lui-même.

Ce passage de témoin coïncide avec le début de L’année du Sacerdoce. C’est une grâce pour la nouvelle équipe de prêtres formateurs réunie par la Conférence des Évêques de France. Alors qu’elle reçoit sa mission, il lui est donné, comme à toute l’Église, la possibilité de scruter plus profondément l’identité du prêtre, mystère de grâce et de miséricorde. Il me plaît ici de citer l’éminente personnalité que fut le Cardinal Suhard, disant à propos des ministres du Christ : « Eternel paradoxe du prêtre. Il porte en lui les contraires. Il concilie, au prix de sa vie, la fidélité à Dieu et la fidélité à l’homme. Il a l’air pauvre et sans force… Il n’a en mains ni les moyens politiques, ni les ressources financières, ni la force des armes, dont d’autres se servent pour conquérir la terre. Sa force à lui, c’est d’être désarmé et de ‘pouvoir tout en Celui qui le fortifie’ » (Ecclesia n°141, p.21, Décembre 1960). Puissent ces paroles qui évoquent si bien la figure du saint Curé d’Ars retentir comme un appel vocationnel pour de nombreux jeunes chrétiens de France qui désirent une vie utile et féconde pour servir l’amour de Dieu.

La particularité du Séminaire français est d’être situé dans la ville de Pierre ; pour reprendre le vœu de Paul VI (cf. Discours aux anciens du Séminaire français, 11 septembre 1968), je souhaite qu’au cours de leur séjour à Rome, les séminaristes puissent de façon privilégiée se familiariser avec l’histoire de l’Église, découvrir l’ampleur de sa catholicité et sa vivante unité autour du successeur de Pierre et qu’ainsi soit à jamais fixé en leur cœur de pasteur l’amour de l’Église.

En invoquant sur vous tous d’abondantes grâces du Seigneur par l’intercession de la Bienheureuse Vierge Marie, de sainte Claire et du Bienheureux Pie IX, je vous accorde à tous de grand cœur ainsi qu’à vos familles, aux Anciens qui n’ont pu venir et au personnel laïc du Séminaire, la Bénédiction apostolique.

[Texte original: Français]

Fête du Saint-Sacrement : Homélie de Benoît XVI

16 juin, 2009

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Fête du Saint-Sacrement : Homélie de Benoît XVI

ROME, Vendredi 12 juin 2009 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte de l’homélie prononcée par Benoît XVI lors de la messe qu’il a présidée à l’occasion de la fête du Corpus Domini (fête du Saint-Sacrement), le 11 juin devant la basilique romaine de Saint-Jean de Latran.

* * *

« Ceci est mon corps, ceci est mon sang »

Chers frères et sœurs,

Ces paroles que Jésus prononça au cours de la Dernière Cène, sont répétées à chaque fois que se renouvelle le Sacrifice eucharistique. Nous les avons écoutées il y a peu de temps dans l’Evangile de Marc et elles retentissent avec une puissance évocatrice particulière aujourd’hui, en la solennité du Corpus Domini. Elles nous conduisent idéalement au Cénacle, elles nous font revivre le climat spirituel de la nuit lorsque, célébrant la Pâque avec les siens, le Seigneur dans le mystère anticipa le sacrifice qui devait se consumer le lendemain sur la croix. L’institution de l’Eucharistie nous apparaît ainsi comme une anticipation et une acceptation de la part de Jésus de sa mort. Saint Ephrem de Syrie écrit à ce propos : Au cours de la Cène, Jésus s’immola ; sur la croix, Il fut immolé par les autres (cf.Hymne sur la crucifixion, 3, 1).

« Ceci est mon sang ». Ici la référence au langage sacrificiel d’Israël est claire. Jésus se présente comme le sacrifice véritable et définitif, dans lequel se réalise l’expiation des péchés qui, dans les rites de l’Ancien Testament, n’avait jamais été totalement accomplie. A cette expression s’en ajoutent deux autres très significatives. Tout d’abord, Jésus-Christ dit que son sang « est versé pour la multitude » avec une référence compréhensible aux chants du Serviteur, qui se trouvent dans le livre d’Isaïe (cf. chap. 53). Avec l’ajout  – « sang de l’alliance » -, Jésus manifeste en outre que, grâce à sa mort, se réalise la prophétie de la nouvelle alliance fondée sur la fidélité et sur l’amour infini du Fils fait homme, une alliance donc plus forte que tous les péchés de l’humanité. L’antique alliance avait été établie sur le Sinaï à travers un rite sacrificiel d’animaux, comme nous l’avons écouté dans la première lecture, et le peuple élu, libéré de l’esclavage d’Egypte, avait promis d’accomplir tous les commandements donnés par le Seigneur (cf. Ex 24, 3).

En vérité, dès le début, Israël, en construisant le veau d’or, se montra incapable de rester fidèle au pacte divin, qu’elle transgressa même très souvent par la suite, adaptant à son cœur de pierre la Loi qui aurait dû lui enseigner le chemin de la vie. Mais le Seigneur ne manqua pas à sa promesse et, à travers les prophètes, se préoccupa de rappeler la dimension intérieure de l’alliance, et annonça qu’il en aurait écrit une nouvelle dans le cœur de ses fidèles (cf. Jr 31, 33), les transformant par le don de l’Esprit (cf. Ez 36, 25-27). Et ce fut au cours de la Dernière Cène qu’il établit avec les disciples et avec l’humanité cette nouvelle alliance, la confirmant non pas à travers des sacrifices d’animaux, comme cela avait eu lieu par le passé, mais par son sang, devenu « sang de la nouvelle alliance ». Il la fonda donc sur son obéissance, plus forte, comme je l’ai dit, que tous nos péchés.

Cela est bien mis en évidence dans la deuxième lecture, tirée de la Lettre aux Hébreux, dans laquelle l’auteur sacré déclare que Jésus est « médiateur d’une nouvelle alliance » (9, 15). Il l’est devenu grâce à son sang, ou, plus exactement, grâce au don de lui-même, qui donne sa pleine valeur à l’effusion de son sang. Sur la croix, Jésus est dans le même temps victime et prêtre: victime digne de Dieu car sans tache, et prêtre suprême qui s’offre lui-même, sous l’impulsion de l’Esprit Saint, et intercède pour toute l’humanité. La Croix est donc le mystère d’amour et de salut qui nous purifie – comme le dit la Lettre aux Hébreux – des «œuvres mortes», c’est-à-dire des péchés, et elle nous sanctifie en gravant l’alliance nouvelle dans notre cœur; l’Eucharistie, en rendant présent le sacrifice de la Croix, nous rend capables de vivre fidèlement la communion avec Dieu.

Chers frères et sœurs – que je salue avec affection, en commençant par le Cardinal-Vicaire et les autres cardinaux et évêques ici présents – comme le peuple élu réuni dans l’assemblée du Sinaï, nous aussi, nous voulons répéter ce soir notre fidélité au Seigneur. Il  y a quelques jours, en inaugurant le Congrès diocésain annuel, j’ai rappelé l’importance de demeurer, comme Eglise, à l’écoute de la Parole de Dieu dans la prière et en scrutant les Ecritures, en particulier à travers la pratique de la lectio divina, c’est-à-dire la lecture méditée et adorante de la Bible. Je sais que de nombreuses initiatives ont été promues à cet égard dans les paroisses, dans les séminaires, dans les communautés religieuses, au sein des confraternités, des associations et des mouvements apostoliques, qui enrichissent notre communauté diocésaine. Aux membres de ces multiples organismes ecclésiaux, j’adresse mon salut fraternel. Votre présence nombreuse à cette célébration, chers amis, met en lumière le fait que notre communauté, caractérisée par une pluralité de cultures et d’expériences diverses, est façonnée par Dieu comme «son» peuple, comme l’unique Corps du Christ, grâce à notre participation sincère à la double table de la Parole et de l’Eucharistie. Nourris du Christ, nous, ses disciples, recevons la mission d’être « l’âme » de notre ville (cf. Lettre à Diognète, 6: ed. Funk, I, o. 400; voir également LG, 38) ferment de renouveau, pain « rompu » pour tous, en particulier pour ceux qui vivent dans des situations de difficulté, de pauvreté, de souffrance physique et spirituelle. Devenons témoins de son amour.

Je m’adresse en particulier à vous, chers prêtres, que le Christ a choisis afin qu’avec Lui, vous puissiez vivre votre vie comme sacrifice de louange pour le salut du monde. Ce n’est que de l’union avec Jésus que vous pouvez tirer la fécondité spirituelle qui engendre l’espérance dans votre ministère pastoral. Saint Léon le grand rappelle que « notre participation au corps et au sang du Christ ne tend à rien d’autre qu’à devenir ce que nous recevons » (Sermo12, Depassione3, 7, PL 54). Si cela est vrai pour tout chrétien, cela l’est à plus forte raison pour nous, prêtres. Devenir Eucharistie! Que cela soit précisément notre désir et notre engagement constant, afin qu’au don du corps et du sang du Seigneur que nous faisons sur l’autel,s’accompagne le sacrifice de notre existence. Chaque jour, nous puisons du Corps et du Sang du Seigneur l’amour libre et pur qui fait de nous de dignes ministres du Christ et des témoins de sa joie. C’est ce que les fidèles attendent du prêtre: c’est-à-dire l’exemple d’une authentique dévotion pour l’Eucharistie; ils aiment le voir passer de longs moments de silence et d’adoration devant Jésus comme le faisait le saint curé d’Ars, que nous rappellerons de façon particulière lors de l’Année sacerdotale, désormais imminente.

Saint Jean Marie Vianney aimait dire à ses paroissiens: « Venez à la communion… Il est vrai que vous n’en êtes pas dignes, mais vous en avez besoin » (Bernard Nodet; le curé d’Ars. Sa pensée – Son cœur, éd. Xavier Mappus, Paris 1995, p. 119). Avec la conscience d’être inadéquats à cause des péchés, mais ayant besoin de nous nourrir de l’amour que le Seigneur nous offre dans le sacrement eucharistique, nous renouvelons ce soir notre foi dans la présence réelle du Christ dans l’Eucharistie. Il ne faut pas considérer cette foi comme acquise! Aujourd’hui, il existe le risque d’une sécularisation latente également au sein de l’Eglise, qui peut se traduire en un culte eucharistique formel et vide, dans des célébrations privées de la participation du cœur qui s’exprime dans la vénération et le respect de la liturgie. La tentation est toujours forte de réduire la prière à des moments superficiels et hâtifs, en se laissant submerger par les activités et par les préoccupations terrestres. Lorsque, dans peu de temps, nous répéterons le Notre Père, notre prière par excellence, nous dirons: « Donne-nous aujourd’hui notre pain quotidien », en pensant naturellement au pain de chaque jour pour nous et pour tous les hommes. Mais cette demande contient également quelque chose de plus profond. Le terme grec epioúsios, que nous traduisons par « quotidien », pourrait également faire référence au pain « supra-substantiel », au pain « du monde à venir ». Certains Pères ont vu ici une référence à l’Eucharistie, le pain de la vie éternelle, du nouveau monde, qui nous est déjà donné aujourd’hui dans la Sainte Messe, afin que dès à présent, le monde futur commence avec nous. Avec l’Eucharistie donc, le ciel descend sur terre, le demain de Dieu se fond avec le présent et le temps est comme embrassé par l’éternité divine.

Chers frères et sœurs, comme chaque année, au terme de la Messe, se déroulera la traditionnelle procession eucharistique et nous élèverons, à travers nos prières et nos chants, une imploration commune au Seigneur présent dans l’hostie consacrée. Nous lui dirons au nom de toute la Ville: reste avec nous Jésus, fais-nous don de ta personne et donne-nous le pain qui nous nourrit pour la vie éternelle ! Libère ce monde du poison du mal, de la violence et de la haine qui empoisonne les consciences, purifie-le par la puissance de ton amour miséricordieux. Et toi, Marie, qui as été femme « eucharistique » toute ta vie durant, aide-nous à marcher unis vers l’objectif céleste, nourris par le Corps et par le Sang du Christ, pain de vie éternelle et médecine de l’immortalité divine. Amen !

Audience générale du 10 juin 2009 : Jean Scot Erigène

16 juin, 2009

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Audience générale du 10 juin 2009 : Jean Scot Erigène

Texte intégral

ROME, Mercredi 10 juin 2009 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte intégral de la catéchèse prononcée ce mercredi par le pape Benoît XVI au cours de l’audience générale, place Saint-Pierre.

* * *

Chers frères et sœurs,

Je voudrais parler aujourd’hui d’un penseur important de l’Occident chrétien : Jean Scot Erigène, dont les origines restent toutefois obscures. Il venait certainement d’Irlande, où il était né au début du IXe siècle, mais nous ne savons pas quand il a quitté son île pour traverser la Manche et prendre ainsi pleinement part au monde culturel qui renaissait autour des carolingiens, et en particulier autour de Charles le Chauve, dans la France du IXe siècle. De même qu’on ignore la date exacte de sa naissance, on ignore également l’année de sa mort qui, selon les experts, devrait toutefois se situer aux alentours de l’an 870.
Jean Scot Erigène possédait une culture patristique, tant grecque que latine, remarquable : il connaissait en effet directement les écrits des Pères latins et grecs. Il connaissait bien, entre autres, les œuvres d’Augustin, d’Ambroise, de Grégoire le grand, grands Pères de l’Occident chrétien, mais il connaissait tout aussi bien la pensée d’Origène, de Grégoire de Nysse, de Jean Chrysostome, et d’autres Pères chrétiens d’Orient non moins importants. C’était un homme exceptionnel, qui maîtrisait à cette époque également la langue grecque. Il révéla une attention toute particulière pour saint Maxime le Confesseur et surtout pour Denys l’aréopage. Sous ce pseudonyme se cache un écrivain ecclésiastique du Ve siècle, de Syrie, mais tout le Moyen Age, et avec lui Jean Scot Erigène, était convaincu que cet auteur était le même qu’un disciple direct de saint Paul, dont on parlait dans les Actes des Apôtres (17, 34). Scot Erigène, convaincu de cette apostolicité des écrits de Denys, le qualifiait d’« Auteur divin » par excellence ; ses écrits furent donc une source éminente de sa pensée. Jean Scot traduisit ses œuvres en latin. Les grands théologiens médiévaux, comme saint Bonaventure, ont connu les œuvres de Denys à travers cette traduction. Il se consacra toute sa vie à approfondir et développer sa pensée, en puisant à ces écrits, au point qu’aujourd’hui encore, il peut parfois être difficile de distinguer lorsque nous sommes en présence de la pensée de Scot Erigène ou lorsqu’au contraire, il ne fait que reproposer la pensée du Pseudo-Denys.

En vérité, le travail théologique de Jean Scot ne connut pas beaucoup de succès. Non seulement la fin de l’ère carolingienne relégua ses œuvres dans l’oubli, mais une censure de la part des autorités ecclésiastiques jeta également une ombre sur sa figure. En réalité, Jean Scot représente un platonisme radical, qui semble parfois s’approcher d’une vision panthéiste, même si ses intentions personnelles et subjectives furent toujours orthodoxes. Certaines œuvres de Jean Scot Erigène, parmi lesquelles méritent d’être rappelés, en particulier, le traité « sur la division de la nature» et les «Expositions sur la hiérarchie céleste de saint Denys », sont parvenues jusqu’à nous. Il y développe des réflexions théologiques et spirituelles stimulantes, qui pourraient suggérer d’intéressants approfondissements également aux théologiens contemporains. Je me réfère, par exemple, à ce qu’il écrit sur le devoir d’exercer un discernement approprié sur ce qui est présenté comme auctoritas vera, ou sur l’engagement à continuer de rechercher la vérité jusqu’à ce que l’on parvienne à en faire une quelque expérience dans l’adoration silencieuse de Dieu.

Notre auteur dit : « Salus nostra ex fide inchoat : notre salut commence avec la foi ». Nous ne pouvons donc pas parler de Dieu en partant de nos inventions, mais de ce que Dieu dit de lui-même dans les Ecritures Saintes. Mais, étant donné que Dieu ne dit que la vérité, Scot Erigène est convaincu que l’autorité et la raison ne peuvent jamais être en opposition l’une avec l’autre ; il est convaincu que la véritable religion et la véritable philosophie coïncident. Dans cette perspective, il écrit : « Tout type d’autorité qui n’est pas confirmée par une véritable raison devrait être considérée comme faible… Il n’est, en effet, de véritable autorité que celle qui coïncide avec la vérité découverte en vertu de la raison, même s’il devait s’agir d’une autorité recommandée et transmise par les saints Pères pour la postérité » (1, PL122, col 513BC). Par conséquent, il avertit : « Qu’aucune autorité ne t’intimide ni ne te distraie de ce que te fait comprendre la persuasion obtenue grâce à un comportement droit et rationnel. En effet, l’autorité authentique ne contredit jamais la juste raison, pas plus que cette dernière ne peut jamais contredire une véritable autorité. L’une et l’autre proviennent sans aucun doute de la même source, qui est la sagesse divine » (I, PL 122, col 511B). Nous voyons ici une courageuse affirmation des valeurs de la raison, fondée sur la certitude selon laquelle l’autorité véritable est raisonnable, car Dieu est la raison créatrice.

L’Ecriture elle-même n’échappe pas, selon Erigène, à la nécessité d’être étudiée en utilisant le même principe de discernement. En effet, l’Ecriture – soutient le théologien irlandais en reproposant une réflexion déjà présente chez saint Jean Chrysostome – bien que provenant de Dieu, ne serait pas nécessaire si l’homme n’avait pas péché. Il faut donc en déduire que l’Ecriture fut donnée par Dieu dans une intention pédagogique et par miséricorde afin que l’homme puisse se rappeler de tout ce qui avait été gravé dans son cœur dès le moment de sa création « à l’image et ressemblance de Dieu » (cf. Gn 1, 26) et que le péché originel lui avait fait oublier. Erigène écrit dans les Expositiones : « Ce n’est pas l’homme qui a été créé pour l’Ecriture, dont il n’aurait pas eu besoin s’il n’avait pas péché, mais c’est plutôt l’Ecriture – tissée de doctrine et de symboles – qui a été donnée pour l’homme. En effet, grâce à elle, notre nature rationnelle peut être introduite dans les secrets de l’authentique et pure contemplation de Dieu » (II, PL 122, col 146C). La parole de l’Ecriture Sainte purifie notre raison quelque peu aveugle et nous aide à revenir au souvenir de ce que nous portons, en tant qu’image de Dieu, dans notre cœur, rendu hélas vulnérable par le péché.

De là découlent certaines conséquences herméneutiques, en ce qui concerne la façon d’interpréter l’Ecriture qui peuvent indiquer aujourd’hui encore la juste voie pour une lecture correcte de l’Ecriture Sainte. Il s’agit en effet de découvrir le sens caché dans le texte sacré et cela présuppose un exercice intérieur particulier, grâce auquel la raison s’ouvre au chemin certain vers la vérité. Cet exercice consiste à cultiver une disponibilité constante à la conversion. Pour parvenir, en effet, à la vision profonde du texte, il est nécessaire de progresser simultanément dans la conversion du cœur et dans l’analyse conceptuelle de la page biblique, qu’elle soit à caractère universel, historique ou doctrinal. C’est en effet uniquement grâce à la purification constante tant de l’œil du cœur que de l’œil de l’esprit, que l’on peut en acquérir une compréhension exacte.

Ce chemin d’un accès difficile, exigeant et enthousiasmant, fait de conquêtes constantes et de relativisations du savoir humain, conduit la créature intelligente jusqu’au seuil du Mystère divin, là où toutes les notions révèlent leur faiblesse et leur incapacité et imposent donc, avec la simple force libre et douce de la vérité, d’aller toujours au-delà de tout ce qui est continuellement acquis. La reconnaissance adorante et silencieuse du Mystère, qui débouche sur la communion unificatrice, se révèle donc comme l’unique voie d’une relation avec la vérité qui est à la fois la plus intime possible et la plus scrupuleusement respectueuse de l’autre. Jean Scot – utilisant également dans ce contexte un vocabulaire cher à la tradition chrétienne de langue grecque – a appelé cette expérience à laquelle nous tendons « theosis » ou divinisation, à travers des affirmations hardies au point qu’il fut possible de le soupçonner de panthéisme hétérodoxe. Quoi qu’il en soit, l’émotion demeure profonde face à des textes comme celui-ci, où, ayant recours à l’antique métaphore de la fusion du fer, il écrit : « Ainsi, de même que tout le fer devenu brûlant se liquéfie au point qu’il ne semble plus y avoir que le feu, et toutefois les substances de l’un et de l’autre demeurent distinctes, ainsi, il faut accepter qu’après la fin de ce monde, toute la nature, tant corporelle qu’incorporelle, manifeste uniquement Dieu et demeure toutefois intègre de façon telle que Dieu puisse être d’une certaine façon com-pris tout en reste in-compréhensible et la créature elle-même soit transformée, avec une merveille ineffable, en Dieu» (V, PL 12, col 451B).

En réalité, la pensée théologique de Jean Scot est la démonstration la plus évidente de la tentative d’exprimer le dicible de l’indicible Dieu, en se fondant uniquement sur le mystère du Verbe incarné en Jésus de Nazareth. Les nombreuses métaphores qu’il utilise pour indiquer cette réalité ineffable démontrent combien il est conscient de l’insuffisance absolue des termes avec lesquels nous parlons de ces choses. Il demeure toutefois l’enchantement et cette atmosphère d’authentique expérience mystique que l’on peut de temps à autre toucher du doigt dans ses textes. Il suffit de citer, pour le démontrer, une page du De divisione naturae qui touche en profondeur également notre âme de croyants du XXIe siècle : « Il ne faut rien désirer d’autre – écrit-il – que la joie de la vérité qui est le Christ, ni rien éviter que Son absence. Celle-ci, en effet, devrait être considérée comme l’unique cause de tristesse totale et éternelle. Ote-moi le Christ, et il ne me restera aucun bien, et rien ne m’affligera plus que son absence. Le plus grand tourment d’une créature rationnelle est la privation et l’absence de Lui » (V, PL 122, col 989a). Ce sont des paroles que nous pouvons faire nôtres, en les traduisant en prière à Celui qui constitue également le désir ardent de notre cœur.

Le pape a ensuite résumé sa catéchèse en plusieurs langues. Voici ce qu’il a dit en français :

Chers frères et sœurs,

J’évoque aujourd’hui pour vous un penseur important de l’Occident chrétien : Jean Scot Erigène. Probablement né en Irlande au tout début du neuvième siècle, il rejoint le continent où il va prendre part, dans la France de Charles le Chauve, au mouvement de la renaissance carolingienne.

Jean Scot Erigène se distinguait par une grande connaissance des Pères de l’Eglise aussi bien latins que grecs, avec une prédilection particulière pour le Pseudo-Denys dont il cherchera à prolonger les intuitions. Sa théologie est tout entière tendue vers un au-delà d’elle-même où l’effort conceptuel trouve sa récompense et ses limites : la contemplation et l’adoration silencieuse de Dieu.

Si sa pensée n’a pas fait école, elle offre néanmoins encore aujourd’hui d’intéressantes perspectives en particulier pour la lecture de l’Ecriture sainte. Celle-ci, rappelle-t-il, a été donnée par miséricorde à l’homme consécutivement au péché afin que l’homme puisse retrouver tout ce qui était inscrit en son cœur au moment de sa création «à l’image et à la ressemblance de Dieu». Cela signifie qu’il ne peut y avoir de compréhension de la Parole de Dieu sans, à la fois, une analyse rigoureuse du texte biblique et une disponibilité permanente à la conversion. La clairvoyance de l’intelligence ne peut pas jamais séparée de la purification du cœur.

* * *

Je suis heureux de souhaiter la bienvenue aux pèlerins francophones. J’adresse un cordial salut aux nombreux membres du Variété Club de France et aux évêques qui les accompagnent, ainsi qu’aux pèlerins canadiens, suisses et français. Que l’Esprit Saint donne à chacun le désir de toujours chercher le Christ et la grâce de le découvrir présent dans la création et dans vos frères ! Bon pèlerinage à tous !

Traduction : Zenit

bonne nuit

16 juin, 2009

bonne nuit dans image bon nuit, jour, dimanche etc. rosa_434
http://www.floralimages.co.uk/prosa.htm

Saint Augustin: « Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait »

16 juin, 2009

du site:

http://www.levangileauquotidien.org/main.php?language=FR&module=commentary&localdate=20090616

Le mardi de la 11e semaine du Temps Ordinaire : Mt 5,43-48
Commentaire du jour
Saint Augustin (354-430), évêque d’Hippone (Afrique du Nord) et docteur de l’Église
Commentaire sur la 1ère lettre de saint Jean, n°1,9  (trad. SC 75, p. 134 ; Bouchet, Lectionnaire, p. 291)

« Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait »

      « À ce signe nous reconnaissons que nous sommes en Dieu : si en lui nous sommes parfaits. » Jean veut dire ici : parfaits dans l’amour (1Jn 4,17). Quelle est la perfection de l’amour ? D’aimer nos ennemis et de les aimer à ce point qu’ils deviennent nos frères. Notre amour, en effet, ne doit pas être selon la chair. Aime donc tes ennemis en souhaitant qu’ils deviennent tes frères ; aime tes ennemis de sorte qu’ils soient appelés à entrer en communion avec toi.

      Ainsi aima en effet celui qui, pendu sur la croix, disait : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23,34). Il voulait les arracher à la mort éternelle par une prière toute pleine de miséricorde et une puissance très forte. Nombre d’entre eux ont cru d’ailleurs, et ils ont été pardonnés d’avoir versé le sang du Christ. Ils l’avaient versé en s’acharnant contre lui ; ils l’ont bu ensuite lorsqu’ils ont cru. « À ce signe nous savons que nous sommes en lui : si en lui nous sommes parfaits. » C’est à cette perfection de l’amour des ennemis que le Seigneur nous invite lorsqu’il dit : « Soyez donc parfaits comme votre Père céleste est parfait ».