Archive pour le 28 avril, 2009
par St Louis Marie Grignion de Montfort : Traité de la dévotion à la Sainte Vierge (extrait)
28 avril, 2009du site:
http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/Montfort/Devotion/table.html
Traité de la dévotion à la Sainte Vierge (extrait)
par St Louis Marie Grignion de Montfort
INTRODUCTION
C’est par la très sainte Vierge Marie que Jésus-Christ est venu au monde, et c’est aussi par elle qu’il doit régner dans le monde. Marie a été très cachée dans sa vie; c’est pourquoi elle est appelée par le Saint-Esprit et l’Église Alma Mater… «Mère cachée et secrète»(1). Son humilité a été si profonde qu’elle n’a point eu sur la terre l’attrait plus puissant et plus continuel, que de se cacher à elle-même et à toute créature, pour n’être connue que de Dieu seul.
Dieu, pour l’exaucer dans les demandes qu’elle lui fit de la cacher, appauvrir et humilier, a pris plaisir à la cacher dans sa conception, dans sa naissance, dans sa vie, dans ses mystères, dans sa résurrection et assomption, à l’égard de toutes créatures humaines (2). Ses parents mêmes ne la connaissaient pas (3) et les anges se demandaient souvent les uns aux autres: Quoe est ista?.. « Qui est celle-là? » parce que le Très-Haut la leur cachait; on, s’il leur en découvrait quelque chose, il leur en cachait infiniment davantage.
Dieu le Père a consenti qu’elle ne fit point de miracle dans sa vie, du moins qui éclatât, quoiqu’il lui en est donné la puissance ; Dieu le Fils a consenti qu’elle ne parlât presque point, quoiqu’il lui eût communiqué sa sagesse ; Dieu le Saint-Esprit a consenti que les apôtres et les évangélistes n’en parlassent que très peu, et qu’autant qu’il était nécessaire pour faire connaître Jésus-Christ, quoiqu’elle fût son épouse fidèle (4).
Marie est l’excellent chef-d’oeuvre du Très-Haut, dont il s’est réservé la connaissance et la possession. Marie est la Mère admirable du Fils, qu’il a pris plaisir à humilier et à cacher (5) pendant sa vie pour favoriser son humilité, la traitant du nom de «femme, » mulier, comme une étrangère(6), quoique dans son coeur il l’estimât et l’aimât plus que tous les anges et les hommes. Marie est la fontaine scellée et l’épouse fidèle du Saint-Esprit, ,où il n’y a que lui qui entre. Marie est le sanctuaire et le repos de la sainte Trinité, où Dieu est plus magnifiquement et divinement qu’en aucun lieu de l’univers, sans excepter sa demeure sur les chérubins et les séraphins ; et il n’est permis à aucune créature, quelque pure qu’elle soit, d’y entrer sans un grand privilège (7).
Je dis avec les saints : la divine Marie est le paradis terrestre du nouvel Adam, où il s’est incarné par l’opération. du Saint-Esprit, pour y opérer des merveilles incompréhensibles ; c’est le grand et le divin monde de Dieu, où il y a des beautés et des trésors ineffables ; c’est la magnificence du Très-Haut, où il a caché, comme en son sein, son Fils unique (8), et en lui, tout ce qu’il y a de plus excellent et de plus précieux. Oh ! Oh ! que de choses grandes et cachées ce Dieu puissant a faites en cette créature admirable comme elle est elle-même obligé de le dire, malgré son humilité profonde : Fecit mihi magna qui Potens est (9) ! Le monde ne les connaît pas, parce qu’il en est incapable et indigne.
Les saints ont dit des choses admirables de cette sainte cité de, Dieu ; et ils n’ont jamais été plus éloquents et plus contents, comme ils l’avouent eux-mêmes, que quand ils en ont parlé. Après cela, ils s’écrient que la hauteur de ses mérites, qu’elle a élevés jusqu’au trône de la divinité (10), ne se peut apercevoir ; que la largeur de sa charité, qu’elle a plus étendue que la terre, ne se peut mesurer ; que la grandeur de sa puissance, qu’elle a jusque sur un Dieu même (11), ne se peut comprendre; et enfin que la profondeur de son humilité et de toutes ses vertus et ses grâces, qui sont un abîme, ne se peut sonder.
O hauteur incompréhensible ! O largeur ineffable ! O grandeur démesurée ! O abîme impénétrable ! Tous les jours, d’un bout de la terre à l’autre, dans le plus haut des cieux, dans le plus profond des abîmes, tout pêche, tout publie l’admirable Marie. Les neuf choeurs des anges, les hommes de tous sexes, âges, conditions, religions, bons et mauvais, jusqu’aux diables, sont obligés de l’appeler Bienheureuse, bon gré mal gré, par ]a force de la vérité. Tous les anges, dans les cieux, lui crient incessamment, a dit saint Bonaventure : Sancta, sancta, sancta Maria, Dei Genitrix et Virgo (12); et ils lui offrent des millions de millions de fois tous les jours la salutation des anges, Ave, Maria, etc. En se prosternant devant elle, ils lui demandent pour grâce de les honorer de quelques uns de ses commandements ; jusqu’à saint Michel (13), dit saint Augustin, quoique le prince de toute la cour céleste, est le plus zélé à lui rendre et à lui faire rendre toutes sortes d’honneurs, toujours en attente pour avoir l’honneur d’aller, à sa parole, rendre service à quelqu’un de ses serviteurs.
Toute la terre est pleine de sa gloire, particulièrement chez les chrétiens où elle est prise pour tutélaire et protectrice en plusieurs royaumes, provinces, diocèses et villes ; plusieurs (14) cathédrales consacrées à Dieu sous son nom ; pointd’église sans autel en son honneur ; point de contrée ni de canton où il n’y ait quelqu’une de ses images miraculeuses où toutes sortes de maux sont guéris, et toutes sortes de biens obtenus ; tant de confréries et congrégations en son honneur ; tant de religions(15) sous son nom. et sa protection tant de confrères et soeurs de toutes les confréries et tant de religieux et religieuses de toutes les religions(16), qui publient ses louanges et qui annoncent ses miséricordes. Il n’y a pas un petit enfant qui, en bégayant l’Ave Maria, ne la loue ; il n’y a guère de pécheur qui, en son endurcissement même, n’ait en elle quelque étincelle de confiance; il n’y a pas même de diable dans les enfers qui en la craignant ne la respecte.
Après cela, il faut dire en vérité avec les saints : De Maria nunquam satis… « On n’a point encore assez loué, exalté, honoré, aimé et servi Marie. » Elle a mérité encore plus de louanges, de respects, d’amour et de services.
Après cela, il faut dire avec le Saint-Esprit : Omnis gloria ejus Filiae Regis ab intus… « Toute la gloire de la Fille du Roi est au dedans »; comme si toute la gloire extérieure que lui rendent à l’envi le ciel et la terre n’était rien en comparaison de celle qu’elle reçoit au dedans par le Créateur, et qui n’est point connue des petites créatures (17)qui ne peuvent pénétrer le secret des secrets du Roi.
Après cela, il faut nous écrier avec l’Apôtre : Nec oculus vidit, nec auris audivit, nec in cor hominis ascendit… « Ni l’oeil n’a vu, ni l’oreille n’a entendu, ni le coeur de l’homme n’a compris les beautés, les grandeurs et excellences de Marie, » le miracle des miracles de la grâce, de la nature et de la gloire. Si vous voulez comprendre la Mère, dit un saint, comprenez le Fils (18), car c’est une digne Mère de Dieu. Hic taceat omnis lingua… « Que toute langue demeure muette ici. »
Mon coeur vient de dicter tout ce que je viens d’écrire, avec une joie particulière, pour montrer que la divine Marie a été inconnue jusqu’ici (19) et que c’est une des raisons pourquoi Jésus-Christ n’est point connu comme il doit l’être. Si donc, comme il est certain, le règne de Jésus-Christ arrive dans le monde, ce ne sera qu’une suite nécessaire de la connaissance et du règne de la très sainte Vierge Marie, qui l’a mis au monde la première fois, et le fera éclater la seconde (20)
St Louis Marie Grignion de Montfort, la vie (m.f. aujourd’hui)
28 avril, 2009du site:
http://www.ephphata.net/grignion-de-montfort/resume-de-sa-vie.html
St Louis Marie Grignion de Montfort
La vie de Louis-Marie… à sa plus simple expression.
Avant-Propos…
Ce n’était pas un homme ordinaire. C’était un fou de Dieu. Il aimait beaucoup aussi les hommes, les pauvres surtout. Il a vécu -ou plutôt brûlé- sa vie comme une torche. Il est mort à 43 ans. Mais un tel ami de Dieu et des Hommes peut-il mourir ?
Comment vivrait-il aujourd’hui ? De peu de choses et très simplement.
Que ferait-il ? On le trouverait sans doute à l’église mais aussi parlant de Dieu et de l’Evangile sur un trottoir ou à un carrefour de rue. On le verrait bien parcourant des coins de campagne sans prêtres, rappelant à la population le sens et les engagements du baptême ; peut-être marchant avec des jeunes et des moins jeunes vers quelque lieu de pèlerinage en chantant et en priant. Il serait à l’aise au milieu des migrants, engagé pour quelque temps dans un asile de nuit, aumônier d’hôpital. Sans doute que de temps en temps, il aimerait laisser tout cela pour s’en aller faire retraite en quelque monastère ou quelque coin retiré de la campagne ou de la montagne.
En fait, près de 300 ans nous séparent de lui. En lisant sa vie, tu verras combien son monde était bien différent du nôtre. Pourtant, Louis-Marie de Montfort nous parle encore aujourd’hui : c’est un témoin, un prophète. Son cœur est plein de l’amour de Dieu.
Il a surtout compris combien Dieu nous aime et comment, pour nous faire sentir son amour, il nous a envoyé Jésus. Jésus c’est Dieu tout proche de nous, homme comme nous. Montfort découvre à partir de là la grande place de Marie, la mère de Jésus, la mère des chrétiens.
Il aime la prier pour aller à Jésus. Il est frappé en voyant tout ce que Jésus a souffert pour être fidèle à sa mission et combien il a aimé tout le monde, les petits, les pauvres, les pêcheurs surtout.
Louis-Marie prêchera souvent là-dessus. Il écrit aussi des livres et des cantiques pour aider ceux qui l’écoutent, à vivre et à prier.
Tout cela est tellement important pour lui qu’il sent que Dieu l’appelle à laisser après lui des disciples, des hommes et des femmes qui continuent à vivre et à annoncer l’Evangile comme lui. Ils sont très peu au moment de sa mort : Quelques Sœurs pour l’éducation des enfants pauvres et le soin des malades ; il a voulu qu’elles s’appellent les Filles de la Sagesse. Elles sont environ 3 500 aujourd’hui. Quelques hommes l’ont déjà accompagné et aidé aussi au cours de ses missions. Souvent ils ne sont pas prêtres ; il les appelle frères. Aujourd’hui, les Montfortains ou missionnaires de la Compagnie de Marie (prêtres et non prêtres) sont environ 1 300. Dans la lignée des premiers frères qui accompagnaient Montfort et ses successeurs, faisant le catéchisme et l’école aux enfants pauvres, les Frères de Saint Gabriel, constitués en congrégation autonome par le Père Gabriel Deshayes, sont aussi les disciples de ce grand apôtre du début du XVIIIe siècle. Ils sont environ 1 350 aujourd’hui.
Il n’est donc pas mort, c’est vrai. Son esprit, sa mission continue par ses disciples et bien d’autres groupes et mouvements qui se réclament de lui, en France et un peu partout dans le Monde.
Une belle histoire, une belle vie en effet que celle de Louis-Marie de Montfort.
Lis, et tu trouveras lumière et force pour mieux vivre ce que Jésus attend de nous : aimer et servir aujourd’hui Dieu notre Père et nos frères… les Hommes.
CANONISATION DE CHARBEL MAKHLUOF, HOMÉLIE DU PAPE PAUL VI (1977)
28 avril, 2009du site:
http://www.vatican.va/holy_father/paul_vi/homilies/1977/documents/hf_p-vi_hom_19771009_fr.html
CANONISATION DE CHARBEL MAKHLUOF
HOMÉLIE DU PAPE PAUL VI
Dimanche, 9 octobre 1977
Venerables Frères et chers Fils,
L’Eglise entière, de l’Orient à l’Occident, est invitée aujourd’hui à une grande joie. Notre cœur se turne vers le Ciel, où nous savons désormais avec certitude que saint Charbel Makhlouf est associé au bonheur incommensurable des Saints, dans la lumière du Christ, louant et intercédant pour nous. Nos regards se tournent aussi là où il a vécu, vers le cher pays du Liban, dont Nous sommes heureux de saluer les représentants: Sa Béatitude le Patriarche Antoine Pierre Khoraiche, avec nombre de ses Frères et de ses Fils maronites, les représentants des autres rites catholiques, des orthodoxes, et, au plan civil, la Délégation du Gouvernement et du Parlement libanais que Nous remercions chaleureusement.
Votre pays, chers Amis, avait déjà été salué avec admiration par les poètes bibliques, impressionnés par la vigueur des cèdres devenus symboles de la vie des justes. Jésus lui-même y est venu récompenser la foi d’une femme syro-phénicienne: prémices du salut destiné à toutes les nations. Et ce Liban, lieu de rencontre entre l’orient et l’Occident est devenu de fait la patrie de diverses populations, qui se sont accrochées avec courage à leur terre et à leurs fécondes traditions religieuses. La tourmente des récents événements a creusé des rides profondes sur son visage, et jeté une ombre sérieuse sur les chemins de la paix. Mais vous savez notre sympathie et notre affection constantes: avec vous, Nous gardons la ferme espérance d’une coopération renouvelée, entre tous les fils du Liban.
Et voilà qu’aujourd’hui, nous vénérons ensemble un fils dont tout le Liban, et spécialement l’Eglise maronite, peuvent être fiers: Charbel Makhlouf. Un fils bien singulier, un artisan paradoxal de la paix, puisqu’il l’a recherchée à l’écart du monde, en Dieu seul, dont il était comme enivré. Mais sa lampe, allumée au sommet de la montagne de son ermitage, au siècle dernier, a brillé d’un éclat toujours plus grand, et l’unanimité s’est faite rapidement autour de sa sainteté. Nous l’avions déjà honoré en le déclarant bienheureux le 5 décembre 1965, au moment de la clôture du Concile Vatican II. Aujourd’hui, en le canonisant et en étendant son culte à l’ensemble de l’Eglise, Nous donnons en exemple, au monde entier, ce valeureux moine, gloire de l’ordre libanais maronite et digne représentant des Eglises d’Orient et de leur haute tradition monastique.
Il n’est point nécessaire de retracer en détail sa biographie, d’ailleurs fort simple. II importe du moins de noter à quel point le milieu chrétien de son enfance a enraciné dans la foi le jeune Youssef – c’était son nom de baptème -, et l’a préparé à sa vocation: famille de paysans modestes, travailleurs, unis; animés d’une foi robuste, familiers de la prière liturgique du village et de la dévotion à Marie; oncles voués à la vie érémitique, et surtout mère admirable, pieuse et mortifiée jusqu’au jeûne continuel. Ecoutez les paroles que l’on rapporte d’elle après la séparation de son fils: «Si tu ne devais pas être un bon religieux, je te dirais: Reviens à la maison. Mais je sais maintenant que le Seigneur te veut à son service. Et dans ma douleur d’être séparée de toi, je lui dis, résignée: Qu’il te bénisse, mon enfant, et fasse de toi un saint» (P. PAUL DAHER, Charbel, un homme ivre de Dieu, Monastère S. Maron d’Annaya, Jbail Liban, 1965, p. 63). Les vertus du foyer et l’exemple des parents constituent toujours un milieu privilégié pour l’éclosion des vocations.
Mais la vocation comporte toujours aussi une décision très personnelle du candidat, où l’appel irrésistible de la grâce compose avec sa volonté tenace de devenir un saint: «Quitte tout, viens! Suis-moi!» (Ibid. p. 52; cfr. Marc. 10, 32). A vingt-trois ans, notre futur saint quitte en effet son village de Gégà-Kafra et sa famille pour ne plus jamais y revenir. Alors, pour le novice devenu Frère Charbel, commence une formation monastique rigoureuse, selon la règle de l’ordre libanais maronite de Saint Antoine, au monastère de Notre-Dame de Mayfouk, puis à celui plus retiré de Saint-Maron d’Annaya, après sa profession solennelle, il suit des études théologiques à Saint-Cyprien de Kfifane, reçoit l’ordination sacerdotale en 1859; il mènera ensuite seize ans de vie communautaire parmi les moines d’Annaya et vingt-trois ans de vie complètement solitaire dans l’ermitage des Saints Pierre et Paul dépendant d’Annaya. C’est là qu’il remet son âme à Dieu la veille de Noël 1898, à soixante-dix ans.
Que représente donc une telle vie? La pratique assidue, poussée à l’extrême, des trois vœux de religion, vécus dans le silence et le dépouillement monastiques: d’abord la plus stricte pauvreté pour ce qui est du logement, du vêtement, de l’unique et frugal repas journalier des durs travaux manuels dans le rude climat de la montagne; une chasteté qu’il entoure d’une intransigeance légendaire; enfin et surtout une obéissance totale à ses Supérieurs et même à ses confrères, au règlement des ermites aussi, traduisant sa soumission complète à Dieu. Mais la clé de cette vie en apparence étrange est la recherche de la sainteté, c’est-à-dire la conformité la plus parfaite au Christ humble et pauvre, le colloque quasi ininterrompu avec le Seigneur, la participation personnelle au sacrifice du Christ par une célébration fervente de la messe et par sa pénitence rigoureuse jointe à l’intercession pour les pécheurs. Bref, la recherche incessante de Dieu seul, qui est le propre de la vie monastique, accentuée par la solitude de la vie érémitique.
Cette énumération, que les hagiographes peuvent illustrer de nombreux faits concrets, donne le visage d’une sainteté bien austère, n’est-ce pas? Arrêtons-nous sur ce paradoxe qui laisse le monde moderne perplexe, voire irrité; on admet encore chez un homme comme Charbel Makhlouf une héroïcité hors de pair, devant laquelle on s’incline, retenant surtout sa fermeté au-dessus de la normale. Mais n’est-elle pas «folie aux yeux des hommes», comme s’exprimait déjà l’auteur du livre de la Sagesse? Même des chrétiens se demanderont: le Christ a-t-il vraiment exigé pareil renoncement, lui dont la vie accueillante tranchait avec les austérités de Jean-Baptiste? Pire encore, certains tenants de l’humanisme moderne n’iront-ils pas, au nom de la psychologie, jusqu’à soupçonner cette austérité intransigeante, de mépris, abusif et traumatisant, des saines valeurs du corps et de l’amour, des relations amicales, de la liberté créatrice, de la vie en un mot?
Raisonner ainsi, dans le cas de Charbel Makhlouf et de tant de ses compagnons moines ou anachorètes depuis le début de l’Eglise, c’est manifester une grave incompréhension, comme s’il ne s’agissait que d’une performance humaine; c’est faire preuve d’une certaine myopie devant une réalité autrement profonde. Certes, l’équilibre humain n’est pas à mépriser, et de toute façon les Supérieurs, l’Eglise doivent veiller à la prudence et à l’authenticité de telles expériences. Mais prudence et équilibre humains ne sont pas des notions statiques, limitées aux éléments psychologiques les plus courants ou aux seules ressources humaines. C’est d’abord oublier que le Christ a exprimé lui-même des exigences aussi abruptes pour ceux qui voudraient être ses disciples: «Suis-moi . . . et laisse les morts enterrer leurs morts» (Luc. 9, 59-60). «Si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères, ses sœurs et jusqu’à sa propre vie, il ne peut être mon disciple» (Ibid. 14, 26). C’est oublier aussi, chez le spirituel, la puissance de l’âme, pour laquelle cette austérité est d’abord un simple moyen, c’est oublier l’amour de Dieu qui l’inspire, l’Absolu qui l’attire; c’est ignorer la grâce du Christ qui la soutient et la fait participer au dynamisme de sa propre Vie. C’est finalement méconnaître les ressources de la vie spirituelle, capable de faire parvenir à une profondeur, à une vitalité, à une maîtrise de l’être, à un équilibre d’autant plus grands qu’il n’ont pas été recherchés pour eux-mêmes: « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et sa justice et le reste vous sera donné par surcroît» (Matth. 6, 32).
Et de fait, qui n’admirerait, chez Charbel Makhlouf, les aspects positifs que l’austérité, la mortification, l’obéissance, la chasteté, la solitude ont rendus possibles à un degré rarement atteint? Pensez à sa liberté souveraine devant les difficultés ou les passions de toutes sortes, à la qualité de sa vie intérieure, à l’élévation de sa prière, à son esprit d’adoration manifesté au cœur de la nature et surtout en présence du Saint-Sacrement, à sa tendresse filiale pour la Vierge, et à toutes ces merveilles promises dans les béatitudes et réalisées à la lettre chez notre saint: douceur, humilité, miséricorde, paix, joie, participation, dès cette vie, à la puissance de guérison et de conversion du Christ. Bref l’austérité, chez lui, l’a mis sur le chemin de la sérénité parfaite, du vrai bonheur; elle a laissé toute grande la place à l’Esprit Saint.
Et d’ailleurs, chose impressionnante, le peuple de Dieu ne s’y est pas trompé. Dès le vivant de Charbel Makhlouf, sa sainteté rayonnait, ses compatriotes, chrétiens ou non, le vénéraient, accouraient à lui comme au médecin des âmes et des corps. Et depuis sa mort, la lumière a brillé plus encore au-dessus de son tombeau: combien de personnes, en quête de progrès spirituel, ou éloignées de Dieu, ou en proie à la détresse, continuent à être fascinées par cet homme de Dieu, en le priant avec ferveur, alors que tant d’autres, soi-disant apôtres, n’ont laissé aucun sillage, comme ceux dont parle l’Ecriture (Sap. 5, 10; Epistola ad Missam).
Oui, le genre de sainteté pratiqué par Charbel Makhlouf est d’un grand poids, non seulement pour la gloire de Dieu, mais pour la vitalité de l’Eglise. Certes, dans l’unique Corps mystique du Christ, comme dit saint Paul (Cfr. Rom. 12, 4-8), les charismes sont nombreux et divers; ils correspondent à des fonctions différentes, qui ont chacune leur place indispensable. Il faut des Pasteurs, qui rassemblent le peuple de Dieu et y président avec sagesse au nom du Christ. Il faut des théologiens qui scrutent la doctrine et un Magistère qui y veille. Il faut des évangélisateurs et des missionnaires qui portent la parole de Dieu sur toutes les routes du monde. Il faut des catéchètes qui soient des enseignants et des pédagogues avisés de la foi: c’est l’objet du Synode actuel. Il faut des personnes qui se vouent directement à l’entraide de leurs frères . . . Mais il faut aussi des gens qui s’offrent en victimes pour le salut du monde, dans une pénitence librement acceptée, dans une prière incessante d’intercession, comme Moïse sur la montagne, dans une recherche passionnée de l’Absolu, témoignant que Dieu vaut la peine d’être adoré et aimé pour lui-même. Le style de vie de ces religieux, de ces moines, de ces ermites n’est pas proposé à tous comme un charisme imitable; mais à l’état pur, d’une façon radicale, ils incarnent un esprit dont nul fidèle du Christ n’est dispensé, ils exercent une fonction dont l’Eglise ne saurait se passer, ils rappellent un chemin salutaire pour tous.
Permettez-Nous, en terminant, de souligner l’intérêt particulier de la vocation érémitique aujourd’hui. Elle semble d’ailleurs connaître un certain regain de faveur que n’explique pas seulement la décadence de la société, ni les contraintes que celle-ci fait peser. Elle peut d’ailleurs prendre des formes adaptées, à condition qu’elle soit toujours conduite avec discernement et obéissance.
Ce témoignage, loin d’être une survivance d’un passé révolu, Nous apparaît très important, pour notre monde, comme pour notre Eglise.
Bénissons le Seigneur de nous avoir donné saint Charbel Makhlouf, pour raviver les forces de son Eglise, par son exemple et sa prière. Puisse le nouveau saint continuer à exercer son influence prodigieuse, non seulement au Liban, mais en Orient et dans l’Eglise entière! Qu’il intercède pour nous, pauvres pécheurs, qui, trop souvent, n’osons pas risquer l’expérience des béatitudes qui conduisent pourtant à la joie parfaite! Qu’il intercède pour ses frères de l’ordre libanais maronite, et pour toute I’Eglise maronite, dont chacun connaît les mérites et les épreuves! Qu’il intercède pour le cher pays du Liban, qu’il l’aide à surmonter les difficultés de l’heure, à panser les plaies encore vives, à marcher dans l’espérance! Qu’il le soutienne et l’oriente sur la bonne et juste voie, comme nous le chanterons tout à l’heure! Que sa lumière brille au-dessus d’Annaya, ralliant les hommes dans la concorde et les attirant vers Dieu, qu’il contemple désormais dans la félicité éternelle! Amen!
Il Papa cosi prosegue in lingua italiana.
Sia lode alla Santissima Trinità, che ci ha dato la gioia di proclamare Santo il monaco libanese Charbel Makhlouf, a conferma della perenne, inesausta santità della Chiesa.
Lo spirito della vocazione eremitica che si manifesta nel nuovo Santo, lungi dall’appartenere ad un tempo ormai passato, ci appare molto importante, per il nostro mondo, come per la vita della Chiesa. La vita sociale di oggi è spesso contrassegnata dall’esuberanza, dall’eccitazione, dalla ricerca insaziabile del conforto e del piacere, unita ad una crescente debolezza della volontà: essa non riacquisterà il suo equilibrio se non con un accrescimento del dominio di sé, di ascesi, di povertà, di pace, di semplicità, di interiorità, di silenzio (Cfr. Paolo VI, Discorso ai Monaci di Monte Cassino, del 24 ottobre 1964: AAS 56 (1964) 987). La vita eremitica gliene insegna l’esempio ed il gusto. E nella Chiesa, come pensare di superare la mediocrità e realizzare un autentico rinnovamento spirituale, non contando che sulle nostre forze, senza sviluppare una sete di santità personale, senza esercitare le virtù nascoste, senza riconoscere il valore insostituibile e la fecondità della mortificazione, dell’umiltà, della preghiera? Per salvare il mondo, per conquistarlo spiritualmente, è necessario, come vuole Cristo, essere nel mondo, ma non appartenere a tutto ciò che nel mondo allontana da Dio (Cfr. SALVATORE GAROFALO, Il profumo del Libano, San Sciarbel Makhluf, Roma 1977, p. 216).
bonne nuit
28 avril, 2009Saint Cyrille d’Alexandrie : « C’est mon Père qui vous donne le vrai pain venu du ciel »
28 avril, 2009du site:
http://www.levangileauquotidien.org/main.php?language=FR&module=commentary&localdate=20090428
Le mardi de la 3e semaine de Pâques : Jn 6,30-35
Commentaire du jour
Saint Cyrille d’Alexandrie (380-444), évêque et docteur de l’Église
Sur Isaïe, IV, 1 (trad. Sr Isabelle de la Source, Lire la Bible, Mediaspaul 2000, t. 6, p. 112)
« C’est mon Père qui vous donne le vrai pain venu du ciel »
« Chantez au Seigneur un cantique nouveau ! » (Ps 95,1) Nouveau est le cantique, pour s’accorder aux réalités nouvelles ; Paul l’a écrit : « Si quelqu’un est dans le Christ, il est une créature nouvelle ; le monde ancien s’en est allé, un monde nouveau a été fait » (2Co 5,17). Ceux qui étaient Israélites par le sang ont été libérés de la tyrannie des Égyptiens grâce au médiateur de ce temps-là, le très sage Moïse ; ils ont été libérés de la corvée des briques, des sueurs inutiles des tâches terrestres…, de la cruauté des surveillants, de la dureté inhumaine de Pharaon. Ils ont traversé la mer ; dans le désert, ils ont mangé la manne ; ils ont bu l’eau jaillie du rocher ; ils ont passé le Jourdain à pied sec ; ils ont été introduits dans la Terre de la promesse.
Or, pour nous, tout cela s’est renouvelé, et le monde nouveau est incomparablement meilleur que l’ancien. Nous avons été libérés d’un esclavage, non terrestre, mais spirituel ; nous avons été délivrés non plus des tâches de cette terre, mais de la souillure des plaisirs charnels. Nous avons échappé non aux contremaîtres égyptiens ou au tyran impie et impitoyable, homme comme nous, mais aux démons malins et impurs qui incitent à pécher, et au chef de leur engeance, Satan.
Nous avons traversé les flots de la vie présente, comme une mer, avec son tumulte et ses folles agitations. Nous avons mangé la manne spirituelle, le pain descendu du ciel, qui donne la vie au monde. Nous avons bu l’eau jaillie du rocher, en faisant nos délices des eaux vives du Christ. Nous avons traversé le Jourdain grâce au saint baptême que nous avons été jugés dignes de recevoir. Nous sommes entrés dans la Terre promise aux saints et préparée pour eux, cette terre dont le Seigneur fait mémoire en disant : « Bienheureux les doux, car ils recevront la terre en héritage » (Mt 5,4).