Cardinal Joseph Ratzinger: « Un homme avait deux fils »
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Commentaire du jour
Cardinal Joseph Ratzinger [Pape Benoît XVI]
Retraite prêchée au Vatican, 1983 (trad. Le Ressuscité, DDB 1986, p. 58)
« Un homme avait deux fils »
En méditant cette parabole, on ne doit pas oublier la figure du fils aîné. En un certain sens, elle n’est pas moins importante que celle de son cadet, au point qu’on pourrait aussi, et peut-être à plus juste titre, parler de la parabole des deux frères. Avec la figure des deux frères, le texte se situe au coeur d’une longue histoire biblique, commencée avec l’histoire de Caïn et Abel, reprise avec les frères Isaac et Ismaël, Jacob et Ésaü, et interprétée en différentes paraboles de Jésus. Dans la prédication de Jésus, les figures des deux frères reflètent surtout le problème Israël-païens… En découvrant que les païens sont appelés sans être soumis aux obligations de la Loi, Israël exprime son amertume : « Voici tant d’années que je t’ai servi et que je n’ai jamais transgressé un seul de tes commandements. » Par les paroles : « Mon fils, tu es toujours avec moi et tout ce qui est à moi est à toi », la miséricorde de Dieu invite Israël à entrer.
Mais la signification de ce frère aîné est encore plus large. En un certain sens, il représente l’homme dévot, c’est-à-dire tous ceux qui sont restés avec le Père sans désobéir à ses commandements. Au moment du retour du pécheur, se réveille la jalousie, ce venin jusqu’alors caché au fond de leur âme. Pourquoi cette jalousie? Elle montre que beaucoup de « dévots » tiennent eux aussi caché dans leur coeur le désir du pays lointain et de ses appâts. La jalousie révèle que ces personnes n’ont pas réellement compris la beauté de la patrie, le bonheur du « tout ce qui est à moi est à toi », la liberté d’être fils et propriétaire. Il apparaît ainsi qu’elles aussi désirent secrètement le bonheur du pays lointain… Et, à la fin, elles n’entrent pas dans la fête ; à la fin, elles restent dehors…
La figure du frère aîné nous oblige à un examen de conscience ; cette figure nous permet de comprendre la réinterprétation des dix commandements dans le Sermon sur la Montagne (Mt 5,28). Ce n’est pas seulement l’adultère extérieur, mais aussi celui de l’intérieur qui nous éloigne de Dieu : il est possible de rester à la maison et en même temps de partir. De cette manière, il nous faut aussi comprendre l’« abondance », la structure de la justice chrétienne : elle se traduit par un « non » à la jalousie et un « oui » à la miséricorde divine.
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