Archive pour le 19 mars, 2008
« L’un de vous va me livrer »
19 mars, 2008du site:
http://levangileauquotidien.org/
Pape Benoît XVI
Audience générale du 18/10/06 (trad. DC n° 2368 © Libreria Editrice Vaticana)
« L’un de vous va me livrer »
Pourquoi Judas a-t-il trahi Jésus ? La question est l’objet de diverses hypothèses. Certains recourent au fait de sa cupidité ; d’autres soutiennent une explication d’ordre messianique : Judas aurait été déçu de voir que Jésus n’insérait pas dans son programme la libération politico-militaire de son pays. En réalité, les textes évangéliques insistent sur un autre aspect : Jean dit expressément que « le démon a inspiré à Judas Iscariote, fils de Simon, l’intention de le livrer » (Jn 13,2). Luc écrit de manière analogue : « Satan entra en Judas, appelé Iscariote, qui était au nombre des Douze » (Lc 22,3). De cette manière, on va au-delà des motivations historiques et on explique l’affaire d’après la responsabilité personnelle de Judas, qui céda misérablement à une tentation du Malin. La trahison de Judas demeure en tout cas un mystère. Jésus l’a traité d’ami (Mt 26,50) mais, dans ses invitations à le suivre sur la voie des Béatitudes, il n’a pas forcé les volontés et ne les a pas prémunies contre les tentations de Satan, respectant la liberté humaine…
Rappelons-nous que Pierre voulut lui aussi s’opposer à Jésus et à ce qui l’attendait à Jérusalem, mais il reçut un très vif reproche : « Tes pensées ne sont pas celles de Dieu mais celles des hommes ! » (Mc 8,32-33). Après sa chute, Pierre s’est repenti et a trouvé pardon et grâce. Judas s’est lui aussi repenti, mais son repentir a dégénéré en désespoir et est ainsi devenu autodestruction… Gardons bien présentes deux choses. La première : Jésus respecte notre liberté. La seconde : Jésus attend notre disponibilité au repentir et à la conversion ; il est riche en miséricorde et en pardon.
Du reste, quand nous pensons au rôle négatif joué par Judas, nous devons l’insérer dans la conduite supérieure des événements de la part de Dieu. Sa trahison a conduit Jésus à la mort, mais celui-ci a transformé cet horrible supplice en un espace d’amour salvifique et en remise de soi à son Père (Ga 2,20;Ep 5,2.25). Le verbe « trahir » est la traduction d’un mot grec qui signifie « remettre, livrer ». Parfois son sujet est même Dieu en personne: c’est lui qui par amour a « livré » Jésus pour nous tous (Rm 8,32). Dans son mystérieux projet salvifique, Dieu saisit le geste inexcusable de Judas comme une occasion de don total du Fils pour la rédemption du monde.
Benoît XVI 2006: Le Triduum pascal
19 mars, 2008du site:
BENOÎT XVI
AUDIENCE GÉNÉRALE
Mercredi 12 avril 2006
Le Triduum pascal
Chers frères et soeurs,
Demain commence le Triduum pascal, qui est le sommet de toute l’année liturgique. Aidés par les saints rites du Jeudi Saint, du Vendredi Saint et de la Veillée pascale solennelle, nous revivrons le mystère de la passion, de la mort et de la résurrection du Seigneur. Il s’agit de journées capables de réveiller en nous un plus vif désir d’adhérer au Christ et de le suivre généreusement, conscients du fait qu’Il nous a aimés jusqu’à donner sa vie pour nous. Que sont, en effet, les événements que le saint Triduum nous repropose, sinon la manifestation sublime de cet amour de Dieu pour l’homme? Apprêtons-nous donc à célébrer le Triduum pascal en accueillant l’exhortation de saint Augustin: « A présent, considère avec attention les trois saints jours de la crucifixion, de la sépulture et de la résurrection du Seigneur. De ces trois mystères, nous accomplissons dans la vie présente ce dont la croix est le symbole, alors que nous accomplissons au moyen de la foi et de l’espérance ce dont la sépulture et la résurrection sont le symbole » (Epistola 55, 14, 24: Nuova Biblioteca Agostiniana (NBA), XXI/II, Rome 1969, p. 477).
Le Triduum pascal s’ouvre demain, Jeudi Saint, avec la Messe vespérale « in Cena Domini », même si le matin a lieu normalement une autre célébration liturgique significative, la Messe chrismale, au cours de laquelle, rassemblé autour de l’Evêque, tout le presbyterium de chaque diocèse renouvelle les promesses sacerdotales, et participe à la bénédiction des huiles des catéchumènes, des malades et du Chrême; et ainsi ferons-nous ici aussi, à Saint-Pierre demain matin. Outre l’institution du sacerdoce, en ce jour saint on commémore l’offrande totale que le Christ a faite de Lui-même à l’humanité dans le sacrement de l’Eucharistie. Au cours de cette même nuit où il fut trahi, Il nous a laissé comme le rappelle l’Ecriture Sainte, le commandement nouveau – « mandatum novum » – de l’amour fraternel, en accomplissant le geste touchant du lavement des pieds, qui rappelle l’humble service des esclaves. Cette journée particulière, évocatrice de grands mystères, se termine par l’Adoration eucharistique, en souvenir de l’agonie du Seigneur dans le jardin de Gethsémani. L’Evangile rapporte que, pris d’une grande angoisse, Jésus demanda aux siens de veiller avec Lui en restant en prière: « Demeurez ici et veillez avec moi » (Mt 26, 38), mais les disciples s’endormirent. Aujourd’hui encore, le Seigneur nous dit: « Demeurez ici et veillez avec moi ». Et nous voyons que nous aussi, disciples d’aujourd’hui, nous dormons souvent. Ce fut pour Jésus l’heure de l’abandon et de la solitude, qui fut suivie, dans le coeur de la nuit, par l’arrestation et le début du chemin douloureux vers le Calvaire.
Centré sur le mystère de la Passion, le Vendredi Saint est un jour de jeûne et de pénitence, entièrement orienté vers la contemplation du Christ sur la Croix. Le récit de la passion est proclamé dans les églises et les paroles du prophète Zacharie retentissent: « Ils lèveront les yeux vers celui qu’ils ont transpercé » (Jn 19, 37). Et nous aussi, le Vendredi Saint, nous voulons réellement tourner notre regard vers le coeur transpercé du Rédempteur dans lequel – écrit saint Paul – sont « cachés tous les trésors de la sagesse et de la connaissance » (Col 2, 3), ou, plus encore, « habite la plénitude de la divinité » (Col 2, 9), c’est pourquoi l’Apôtre peut affirmer de manière décidée ne rien vouloir connaître d’autre « que Jésus Christ, ce Messie crucifié » (1 Co 2, 2). C’est vrai: la croix révèle « la largeur, la longueur, la hauteur, la profondeur » – les dimensions cosmiques, tel est le sens – d’un amour qui dépasse toute connaissance – l’amour va au-delà de ce que l’on connaît – et nous comble de « la plénitude de Dieu » (Ep 3, 18-19). Dans le mystère du Crucifié « s’accomplit le retournement de Dieu contre lui-même, dans lequel il se donne pour relever l’homme et le sauver – tel est l’amour dans sa forme la plus radicale » (Deus caritas est, n. 12). La Croix du Christ, écrit au V siècle le Pape saint Léon le Grand, « est source de toutes les bénédictions, et cause de toutes les grâces » (Disc. 8 sur la passion du Seigneur, 6-8; PL 54, 340-342).
Le Samedi Saint, l’Eglise, s’unissant spirituellement à Marie, reste en prière auprès du sépulcre, où le corps du Fils de Dieu gît inerte, comme dans une attitude de repos après l’oeuvre créatrice de la rédemption, accomplie avec sa mort (cf. He 4, 1-13). La nuit venue commencera la Veillée pascale solennelle, au cours de laquelle, dans chaque Eglise, les chants joyeux du Gloria et de l’Alleluia pascal s’élèveront du coeur des nouveaux baptisés et de toute la communauté chrétienne, joyeuse car le Christ est ressuscité et a vaincu la mort.