Archive pour février, 2008

Auteur : Olivier Clément : Gloire du visage, gloire du regard

23 février, 2008

du site:

http://users.skynet.be/prier/textes/PR0927.HTM

Gloire du visage, gloire du regard
Auteur : Olivier Clément

Dans mon enfance, je n’avais jamais entendu parler
ni de Dieu, ni du Christ.
Dans mon éducation, le mystère n’avait pas de place.
Pourtant, très tôt, les visages me hantaient.
Je sentais obscurément que
quelque chose d’autre habitait en eux :
d’où venaient-ils ?
d’où venait la lumière qui, par instants, les transfigure
et les faits si beaux qu’on a envie de pleurer..
Le reste de l’univers m’apparaissait
de plus en plus impersonnel, glacial,
plus froid que la clarté qui tombe des étoiles.

A seize ans, on est capable
des plus profonds désespoirs de sa vie :
j’avais résolu de me tuer.
(Le démon de nos coeurs s’appelle  »à quoi bon »).
Pétrifié par l’absence intérieure
qui faisait de moi un  »mort vivant »,
je suis monté dans le car qui devait me ramener en ville.
Et j’ai senti tout à coup, qu’on me regardait:
quand on est vraiment regardé, ça se pressent;
ça fait comme une brûlure,
ou comme une main posée sur l’épaule.
Une petite fille – de 4 ou 5 ans- me regardait.
Je ne l’avais jamais vue, je ne l’ai jamais revue.
Elle me regardait avec la douce insistance
- pleine de pudeur et de gravité -
de ceux qui comprennent sans qu’il soit besoin de rien dire.
Elle m’a souri…
Et ce sourire a effacé le drame, il l’a balayé.
Au sens le plus fort du mot, il m’a  »sauvé la vie ».
J’ai compris que la lumière venue de ces yeux-là
ne pouvait pas mentir;
elle était plus réelle et plus vaste que l’océan des peines
elle parlait plus haut que l’aveugle silence
du ciel noyé d’étoiles.
L’océan intérieur de ces yeux-là était plus réel que la mort.
Et leur promesse était de celles
qui sont faites pour être tenues.
Il devenait urgent de …vivre.

dimanche III de carême, P. Raniero Cantalamessa: La Samaritaine, ou de la vie éternelle

23 février, 2008

P. Raniero Cantalamessa, ofmcap

du site:

http://www.cantalamessa.org/fr/omelieView.php?id=270

Dimanche 24 février
A – 2008-02-24

La Samaritaine, ou de la vie éternelle

Jean 4, 5-42

Dans l’Evangile de ce dimanche, Jésus fait une proposition radicale à la Samaritaine et à tous ceux qui, d’une certaine manière, se reconnaissent dans ce qu’elle vit : chercher une autre « eau », donner un sens nouveau et un nouvel horizon à leur vie. Un horizon éternel ! « L’eau que je lui donnerai deviendra en lui source jaillissante pour la vie éternelle ». Le mot éternité est un mot tombé en « désuétude ». Il est devenu une sorte de tabou pour l’homme moderne. On se dit que cette pensée peut détourner les gens de leur engagement historique et concret à changer le monde, que c’est un moyen de s’évader, une manière de « gaspiller au ciel les trésors destinés à la terre », comme le disait Hegel.Mais quel en est le résultat ? La vie, la souffrance humaine, tout devient immensément plus absurde. On a perdu la mesure. Sans le contrepoids de l’éternité, toute souffrance, tout sacrifice, apparaît absurde, démesuré, ils nous « déséquilibrent », nous jettent à terre. Saint Paul a écrit : « Car la légère tribulation d’un instant nous prépare, jusqu’à l’excès, une masse éternelle de gloire ». Par rapport à l’éternité de la gloire, le poids de la peine lui semble « léger » (lui qui dans la vie a tant souffert !) précisément parce qu’il est momentané (« d’un instant »). Il ajoute : « les choses visibles en effet n’ont qu’un temps, les invisibles sont éternelles » (2 Co 4, 17-18).

Le philosophe Miguel de Unamuno (qui était pourtant un penseur « laïc »), répondait en ces termes à un ami qui lui reprochait sa recherche d’éternité, comme s’il y voyait de l’orgueil et de la présomption : « Je ne dis pas que nous méritons un au-delà, et que la logique nous le démontre, je dis que nous en avons besoin, que nous le méritions ou pas, c’est tout. Je dis que ce qui passe ne me satisfait pas, que j’ai soif d’éternité, et que sans cela, tout m’est indifférent. Sans cette éternité, il n’y a plus aucune joie de vivre… C’est trop facile de dire : ‘Il suffit de vivre, il suffit de se contenter de cette vie’. Et ceux qui ne s’en contentent pas ? » Ce n’est pas celui qui désire l’éternité qui prouve ne pas aimer la vie, mais celui qui ne la désire pas, dans la mesure où il se résigne aussi facilement à la pensée que celle-ci doive prendre fin.

L’Eglise, mais aussi la société, aurait beaucoup à gagner à redécouvrir le sens de l’éternité. Cela l’aiderait à retrouver un équilibre, à relativiser les choses, à ne pas tomber dans le désespoir face aux injustices et à la souffrance qui existent dans le monde – tout en les combattant -, à vivre de manière moins frénétique.
Toute personne a, dans sa vie, à un moment donné, une intuition de l’éternité, une sensation, même si celle-ci est confuse… Il faut veiller à ne pas chercher l’expérience de l’infini dans la drogue, dans le sexe effréné et dans d’autres choses, porteuses, en définitive, uniquement de désillusion et de mort. « Tout homme qui boit de cette eau aura encore soif », dit Jésus à la Samaritaine. Il faut chercher l’infini vers le haut, et non vers le bas ; au-delà de la raison, non pas en deçà, dans l’ébriété irrationnelle.

Il est clair qu’il ne suffit pas de savoir que l’éternité existe, il faut aussi savoir comment l’atteindre. Il faut se demander, comme le jeune homme riche de l’Evangile : « Maître, que dois-je faire pour avoir la vie éternelle ? ». Dans le poème « L’Infini », Leopardi parle d’une haie qui « dérobe au regard tant de pans de l’extrême horizon ». Que représente pour nous cette « haie »? L’obstacle qui nous empêche de porter notre regard vers l’extrême horizon, l’horizon éternel ? Ce jour-là, la Samaritaine comprit que quelque chose devait changer dans sa vie si elle voulait obtenir la « vie éternelle », car nous la retrouvons peu après transformée, en train d’évangéliser, racontant à tous, sans complexe, ce que Jésus lui a dit.

bonne nuit

23 février, 2008

bonne nuit dans image bon nuit, jour, dimanche etc. rosmarinus_officinalis_trusty

Rosmarinus officinalis ‘Trusty’

http://www.ubcbotanicalgarden.org/potd/2005/12/

« Ici, je meurs de faim ! Je vais retourner chez mon père »

23 février, 2008

du site: 

http://levangileauquotidien.org/

Saint André de Crète (660-740), moine et évêque
Grand canon de la liturgie orthodoxe pour le carême, 1ère ode (trad. Clément, DDB 1982, p. 111s)

« Ici, je meurs de faim ! Je vais retourner chez mon père »

Par où commencer à pleurer les oeuvres de ma vie ?
Quels seront les premiers accents de ce chant de deuil ?
Accorde-moi, ô Christ, dans ta miséricorde, le pardon de mes péchés…

Tel le potier pétrissant l’argile,
tu m’as donné, mon Créateur, chair et os, souffle et vie.
Seigneur qui m’as créé, mon juge et mon Sauveur,
aujourd’hui ramène-moi vers toi.

O mon Sauveur, devant toi je confesse mes fautes.
Je suis tombé sous les coups de l’Ennemi,
Voici les plaies dont mes pensées meurtrières,
comme des brigands, ont meurtri mon âme et mon corps (Lc 10,30s).

J’ai péché, Sauveur, mais je sais que tu aimes l’homme.
C’est ta tendresse qui nous châtie
et ta miséricorde est ardente.
Tu me vois pleurer et tu viens à moi
comme le Père accueille le fils prodigue.

Dès ma jeunesse, ô mon Sauveur, j’ai méprisé tes commandements.
J’ai passé ma vie dans les passions et l’inconscience.
Je crie vers toi : avant que vienne la mort,
sauve-moi…

Dans le vide j’ai dissipé le patrimoine de mon âme.
Je n’ai pas les fruits de la ferveur, et j’ai faim.
Je crie : Père, plein de tendresse, viens à moi,
prends moi dans ta miséricorde.

Celui que les voleurs ont assailli (Lc 10,30s),
c’est moi au milieu de l’égarement de mes pensées.
Elles me frappent, elles me blessent.
Mais penche-toi sur moi, Christ Sauveur, et guéris-moi.

Le prêtre me vit et se détourna.
Le lévite me vit, nu et souffrant, mais passa outre.
Mais toi, Jésus né de Marie,
Tu t’arrêtes et tu me secours…

Je me jette à tes pieds, Jésus,
j’ai péché contre ton amour.
Décharge-moi de ce fardeau trop lourd
et dans ta miséricorde, accueille-moi.

N’entre pas eu jugement avec moi,
ne dévoile pas mes actions,
ne scrute pas motifs et désirs.
Mais dans ta compassion, ô Tout Puissant,
ferme les yeux sur mes fautes et sauve-moi.

Voici le temps du repentir. Je viens à toi.
Décharge-moi du lourd fardeau de mes péchés
et, dans ta tendresse, donne-moi les larmes du repentir.

Saint Polycarpe

22 février, 2008

Saint Polycarpe dans images sacrée

http://santiebeati.it/immagini/?mode=album&album=22900&dispsize=Original

Ô Vierge Pure, Souveraine, Immaculée et Mère de Dieu.

22 février, 2008

du site:

http://membres.lycos.fr/phos/prieres.htm

Prières de l’Eglise orthodoxe

Hymne « Vierge pure… »

de saint Nectaire d’Egine (+ 1920)

1

Ô Vierge Pure, Souveraine, Immaculée et Mère de Dieu.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Ô Vierge Mère Reine, Toison couverte de rosée.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Plus élevée que les cieux, plus brillante que le soleil.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Ô joie des vierges surpassant les choeurs angéliques.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Plus splendide que les cieux, plus pure que la lumière.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Plus sainte que les multitudes des armées célestes.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

2

Marie toujours Vierge, la Souveraine de l’univers.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Epouse Vierge Immaculée, très sainte Reine toute pure.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Marie Epouse Souveraine, la Source de notre joie.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Ô jeune Vierge vénérable, très sainte Mère Impératrice.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Plus vénérable que les Chérubins et combien plus glorieuse

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Que les Séraphins incorporels. Plus élevée que les Trônes.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

3

Réjouis-Toi, chant des Chérubins. Réjouis-Toi, hymne des Anges.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Cantique des Séraphins. Réjouis-Toi, joie des Archanges.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Réjouis-Toi, Paix et Joie. Réjouis-Toi, Port du Salut.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Du Verbe sainte Chambre nuptiale, Fleur d’incorruptibilité.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Réjouis-Toi, Paradis de joie de l’éternelle vie.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Réjouis-Toi, Arbre de vie et source d’immortalité.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

4

Je Te prie, ô Souveraine, je t’invoque maintenant.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Je Te prie, ô Reine du monde, j’implore Ta grâce.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Ô Vierge pure, vénérable, très sainte Souveraine.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Avec ferveur je Te supplie, ô Temple sanctifié.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Secours-moi, délivre-moi de celui qui me fait la guerre.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

Et fais de moi un héritier de la vie éternelle.

Réjouis-Toi, Epouse inépousée.

23 février – Saint Polycarpe

22 février, 2008

23 février – Saint Polycarpe

http://nominis.cef.fr/contenus/saint/690/Saint-Polycarpe.html

Evêque et martyr.
Dans sa jeunesse, il connut l’apôtre saint Jean dont il est devenu le disciple. Evêque de Smyrne, il transmettra la tradition johannique au jeune
Irénée, le futur évêque de Lyon. Lorsqu’éclate la persécution commandée par Marc-Aurèle, l’empereur-philosophe, saint Polycarpe est très âgé. Il est plein de noblesse devant le proconsul : »Voilà bientôt quatre-vingt six ans que je sers le Christ, et il ne m’a fait aucun mal. Comment pourrais-je outrager mon roi et mon sauveur ? » Il est alors brûlé vif, « comme un pain dans le four » selon son expression.

http://www.abbaye-saint-benoit.ch/martyrs/martyrs0001.htm#_Toc90633630

MARTYRE DE SAINT POLYCARPE, EVEQUE DE SMYRNE

L’Église de Dieu établie à Smyrne, à l’Église de Dieu établie à Philomelicum et à toutes les parties de l’Église sainte et catholique répandue dans le monde entier : que la miséricorde, la paix et la charité de Dieu le Père et de Notre-Seigneur Jésus-Christ surabonde en vous.

Mes frères, nous vous écrivons au sujet de nos martyrs et du bienheureux Polycarpe, dont le martyre, comme le sceau d’un homme puissant, a mis fin à l’état de persécution. Presque tout ce qui l’a précédé est arrivé afin que Dieu eût occasion de nous témoigner combien ce martyre était en conformité avec l’Évangile. Car Polycarpe a attendu d’être trahi, comme l’a été le Seigneur lui-même, afin que nous soyons ses imitateurs u et que chacun regarde plutôt l’intérêt des autres que le sien propre ». C’est en effet le propre d’une charité véritable et profonde que de chercher à procurer non seulement son salut, mais encore celui de ses frères

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Tous les témoignages rendus furent heureux et courageux, ils sont arrivés selon qu’il a plu à Dieu. Il convient que dans notre grande ferveur nous attribuions à Dieu la force des événements. Qui donc n’admirerait pas leur vaillance, leur patience et leur amour pour Dieu ? Ils étaient tellement déchirés par les fouets que leurs veines, leurs artères, tout le dedans de leur corps était à nu. Ils furent si fermes, néanmoins, que les assistants s’attendrissaient et pleuraient tandis qu’eux-mêmes ne faisaient entendre ni un murmure ni une plainte, nous montrant à tous qu’à cet instant où on les torturait, les martyrs du Christ étaient ravis hors du corps, ou plutôt, que le Christ lui-même les assistait et causait avec eux. Impatients de la grâce du Christ, ils méprisaient les tourments, et en une heure ils se rachetaient de la mort éternelle. Le feu leur faisait l’effet d’une fraîcheur délicieuse. Leur pensée était occupée de ce feu éternel et inextinguible, auquel ils échappaient ainsi ; leur coeur considérait les biens que l’oreille n’a jamais entendus, que l’oeil n’a pas vus, que l’esprit de l’homme n’a pu concevoir, qui sont réservés à ceux qui auront souffert. Le Christ les leur faisait entrevoir, et cela suffisait à les enlever à l’humanité pour en faire des anges par avance. Enfin livrés aux bêtes, ils subirent d’effroyables tortures, furent traînés sur un sable composé de coquillages pointus, et plusieurs autres horreurs leur furent infligées comme pour arracher l’apostasie à leur lassitude. Le diable s’ingénia à raifiner contre eux. Grâce à Dieu, il n’en put vaincre aucun. Germanicus, vaillant entre tous, relevait par des paroles intrépides le courage des autres ; son combat contre les bêtes fut sublime. Le proconsul le conjurait d’avoir pitié de lui-même, de son jeune âge, mais lui, avide de sortir d’un monde pervers, marcha droit à la bête et la frappa. La foule entière, confondue par cette bravoure, hurla : « A mort les athées ! Qu’on cherche Polycarpe ! »

Un seul faiblit, c’était un Phrygien nommé Quintus,

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récemment sorti de sa province. A la vue des bêtes, il se mit à trembler. Et c’était justement celui qui avait poussé es autres à venir se dénoncer avec lui. Le proconsul vint à bout de lui faire prêter serinent et de sacrifier. C’est pourquoi, mes frères, nous ne louons pas ceux qui vont s’offrir d’eux-mêmes ; l’Évangile d’ailleurs n’enseigne rien de pareil. L’admirable Polycarpe ne s’émut point et même ne voulut pas quitter la ville, quoiqu’on fît auprès de lui de vives instances pour qu’il s’éloignât. Enfin il céda, et se retira avec quelques compagnons dans une petite maison de campagne, située non loin de la ville ; il y passa les jours et les nuits dans une prière continuelle, selon sa coutume, pour l’Église universelle. Tandis qu’il priait, il aperçut dans une vision son oreiller qui brûlait. Il vint à ses compagnons et leur dit : « Je serai brûlé vif. » Ceci se passait trois jours avant son arrestation.

Averti de l’approche de la police, il changea de retraite. Les gens de police, n’ayant rien trouvé, mirent la main sur deux jeunes esclaves; l’un deux, mis à la torture, trahit son maître. Il ne pouvait plus songer à se dérober, maintenant que c’était son propre entourage qui le livrait. L’irénarque Hérode voulait le faire conduire dans le stade, afin qu’il pût achever sa vie en véritable disciple du Christ. Quant aux traîtres, ils partageraient le sort de Judas.

Un des deux jeunes gens consentit à servir de guide à une escouade de gens d’armes à pied et à cheval que l’on aurait pu croire à la poursuite de quelque bandit. C’était un vendredi — 22 février — à l’heure du dîner. Vers le soir ils arrivèrent à sa nouvelle retraite. Polycarpe pouvait encore fuir ; il ne le voulut pas : « Que la volonté de Dieu soit faite », dit-il. Les gens le trouvèrent dans la chambre haute d’une maisonnette; il s’était couché. Averti de leur arrivée par le bruit qu’ils faisaient, il descendit et se mit à causer avec les soldats. Sa vieillesse et son sang-froid les frappèrent d’admiration, ils ne s’expliquaient pas qu’on se

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fût donné tant de mal pour prendre ce vieillard. Polycarpe leur fit servir à boire et à manger à volonté, et demanda seulement une heure pour prier librement. Ils y consentirent. Deux heures durant il pria, debout et à hante voix. Ses auditeurs étaient stupéfaits, plusieurs éprouvèrent des remords d’avoir marché contre un si saint vieillard.

Après qu’il eut terminé sa prière, dans laquelle il recommandait au Seigneur tous ceux qu’il avait connus dans sa longue vie, petits et grands, illustres et obscurs, et toute l’Eglise catholique répandue dans le monde, l’heure du départ arriva. On le mit sur un âne et l’on prit la route qui conduisait à Smyrne; c’était le jour du grand sabbat, samedi 23 février.

Chemin faisant, on rencontra l’irénarque Hérode et son père Nicetas, qui firent monter Polycarpe dans leur voiture. Ils le mirent au milieu d’eux et essayèrent de le gagner : « Quel mal y a-t-il à dire Kyrios Kaesar, à faire un sacrifice et le reste et à se sauver ainsi ? » D’abord Polycarpe ne répondit pas; puis sur leurs instances, il dit ces seules paroles : « Je ne ferai pas ce que vous me conseillez. » Ses deux compagnons, désappointés, lui dirent des paroles outrageantes et le poussèrent si- brutalement hors de la voiture qu’il tomba sur la route et s’écorcha la jambe. Il se releva, et, toujours leste et de bonne humeur, suivit à pied avec les soldats. On se dirigea vers le stade. Le peuple y était déjà rassemblé. C’était un vacarme infernal.

Au moment où Polycarpe fut introduit dans le stade, le tumulte était indescriptible, mais les chrétiens ne laissèrent pas d’entendre ces paroles qui semblaient venir du ciel : « Sois fort, sois viril, Polycarpe. » On mena l’évêque au proconsul, qui lui demanda s’il était Polycarpe. Sur sa réponse affirmative, le proconsul l’importunait pour lui faire renier sa foi : « Au nom du respect que tu dois à ton âge », lui disait-il et d’autres choses de ce genre qui sont

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ordinaires en pareille circonstance, « jure par le Génie de César, repens-toi ; crie : Plus d’athées. »

Polycarpe alors, promenant un regard sévère sur la foule qui couvrait les gradins, la montra de la main : « Oui, certes, dit-il, plus d’athées ! » Et il leva les yeux au ciel et poussa un profond soupir.

Statius Quadratus lui dit : « Jure et je te renvoie, insulte le Christ. »

Polycarpe répondit : « Il y a quatre-vingt-six ans que je le sers, et il ne m’a jamais fait de mal, comment pourrais-je insulter mon Roi et mon Sauveur ? »

Le proconsul revint à la charge et dit : « Jure par le Génie de César »

Polycarpe répondit : « Si tu te fais un point d’honneur de me faire jurer par le Génie de César, comme tu t’appelles ; et si tu feins d’oublier qui je suis, écoute : Je suis chrétien. Veux-tu savoir ce qu’est la religion chrétienne ? Accorde-moi un jour de répit et prête-moi attention. »

Le proconsul : « Persuade le peuple. »

Polycarpe : « Avec toi, cela vaut la peine de discuter. Nous avons pour maxime de rendre aux puissances et aux autorités établies par Dieu les honneurs qui leurs sont dus, pourvu que ces marques de respect n’aient rien de blessant pour notre conscience. Quant à ces gens-là, je ne daignerai jamais entrer en explication avec eux.

— J’ai des bêtes féroces, je vais te faire jeter à elles si tu ne te repens.

— Fais-les venir. Nous ne reculons pas, nous autres, pour aller du mieux au pire ; il m’est bon, au contraire, de passer des maux de cette vie à la suprême justice.

— Puisque tu méprises les bêtes, je te ferai brûler, si tu ne changés d’avis.

— Tu me menaces d’un feu qui brûle une heure, et s’éteint aussitôt ; ne sais-tu pas qu’il y a le feu du juste jugement et de la peine éternelle, qui est réservé aux

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impies ? Vraiment pourquoi tous ces retards ? Apporte ce que tu voudras ! »

Polycarpe dit ces choses et d’autres encore avec une fermeté et une joie débordantes ; la grâce divine illuminait son visage, à ce point que ce n’était pas lui que l’interrogatoire avait troublé, mais le proconsul. Celui-ci confondu envoya le héraut au milieu du stade crier par trois fois : «Polycarpe s’est avoué chrétien. »

Aussitôt la foule des païens et des Juifs très nombreux à Smyrne hurla : « Le voilà, le docteur de l’Asie, le père des chrétiens, le destructeur de nos dieux, celui qui enseigne à pas sacrifier, à ne pas adorer ! »

En même temps ils demandaient à Philippe de Tralles, asiarque en exercice, de lancer un lion sur Polycarpe. Philippe s’en défendit; les jeux d’animaux étaient terminées. « Au feu donc ! » cria-t-on de toutes parts. C’était la vision des jours précédents qui allait s’accomplir, lorsqu’après avoir vu le coussin sur lequel il reposait la tête entouré de flammes, il avait dit aux fidèles qui l’entouraient : « Je serai brûlé vif. »

Tout cela se passa en moins de temps qu’on n’en met à le dire, la foule se répandit dans les boutiques et les bains pour y chercher du bois et des fagots ; les Juifs montraient à cette besogne, selon leur habitude, un zèle tout particulier. Quand le bûcher fut prêt, Polycarpe se dépouilla de tous ses vêtements, ôta sa ceinture, essaya aussi de se déchausser. Il ne le fit pas sans quelque difficulté.; car, en temps ordinaire, les fidèles qui l’entouraient avaient coutume de s’empresser pour lui éviter cette peine, tant ils étaient jaloux du privilège de toucher son corps vénérable. Même avant le martyre on l’honorait déjà à cause de sa sainteté. On le plaça au milieu de l’appareil qui servait à fixer le patient et on allait l’y clouer, mais il dit : « Laissez-moi. Celui qui me donne la force de supporter le feu m’accordera aussi la force de rester immobile sur le

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bûcher, sans qu’il soit besoin pour cela de vos clous. »

On ne le cloua donc pas, mais on le lia. Debout contre un poteau, les mains attachées derrière le dos, il semblait un bélier de choix pris dans le troupeau et destiné à l’oblation. Il leva les yeux au ciel et dit :

« Seigneur Dieu tout-puissant, Père de Jésus-Christ, fils aimé et béni, par lequel nous avons appris à te connaître, Dieu des anges, des puissances, de toute créature, et de toute la race des justes qui vivent sous ton regard; je te bénis, parce qu’en ce jour, à cette heure même, tu as daigné m’admettre, avec tes martyrs, à boire le calice de ton Christ, afin que je ressuscite à la vie éternelle de l’âme et du corps, incorruptible par le Saint-Esprit. Daigne me recevoir aujourd’hui parmi eux en ta présence, comme un sacrifice abondant et agréable ; puisque le sort que tu me réservais et que tu m’as montré dans une vision s’accomplit en ce moment, ô Dieu, qui dis la vérité, et ne connais pas le mensonge. C’est pourquoi je te loue, je te bénis, je te rends gloire pour tous les bienfaits par le Pontife éternel et céleste, par Jésus-Christ, ton Fils tant aimé, par lequel à Toi avec Lui et l’Esprit-Saint, gloire maintenant et dans les siècles futurs. Amen. »

Après qu’il eut dit Amen et qu’il eut achevé sa prière, les valets du bourreau mirent le feu au bois. Dès que la flamme commença à briller, nous fûmes témoins d’un miracle; et nous avons été épargnés afin que nous puissions en faire aux autres le récit. La flamme sembla s’arrondir en voûte au-dessus du corps du martyr et présenter l’aspect d’une voile de navire gonflée par le vent. Le vieillard, placé au centre de cette chapelle ardente, nous apparaissait non comme une chair qui brûle, mais comme un pain doré dans le four ou comme un lingot d’or ou d’argent dans la fournaise. Nous sentions pendant ce temps une odeur délicieuse comme celle de l’encens ou des plus précieux parfums.

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Cependant les impies voyaient que les flammes ne consumaient point le condamné ; on donna ordre au confector d’aller lui donner un coup de couteau. Le sang jaillit avec tant d’abondance que le brasier en fut éteint. Et le peuple voyait avec étonnement la différence qu’il y a entre les infidèles et les élus. Parmi ces derniers nous comptons l’incomparable martyr Polycarpe, qui fut parmi nous notre docteur tout rempli de l’esprit des apôtres et des prophètes, évêque de l’Église catholique de Smyrne. Toute parole sortie de sa bouche a été ou sera accomplie.

Cependant l’ennemi, haineux et méchant, l’adversaire de la race des justes voyait ce glorieux martyre, il savait la pureté irréprochable du saint dès son enfance, et ne pouvait douter qu’il eût reçu la couronne immortelle et la récompense promise; aussi s’efforça-t-il de nous priver de ses reliques, quoique un grand nombre voulussent les recueillir et souhaitassent de posséder ses précieux restes. Le démon suggéra donc à Nicétas, père d’Hérode et frère d’Alcé, d’aller trouver le proconsul afin qu’on refusât aux chrétiens l’autorisation d’enlever le corps du martyr, de crainte, ajoutait-il, qu’ils n’abandonnassent pour lui le Crucifié. Tout ceci se passait à l’instigation des Juifs, qui, montant la garde auprès du bûcher, avaient aperçu les chrétiens qui s’empressaient de retirer ce qui pouvait l’être de ce saint corps. Ces malheureux ignoraient que nous ne pouvons délaisser le Christ, qui, pour le salut de tous ceux qui seront sauvés, a souffert malgré son innocence à la place des coupables, et que nous ne pouvons adorer que lui. Nous l’adorons comme Fils de Dieu; pour les martyrs, nous les honorons comme disciples et imitateurs du Christ, et à cause de leur incomparable tendresse pour le Roi et Maître.

Daigne le Seigneur nous faire les compagnons de leur sort et de leur fidélité !

Le centurion, voyant la turbulence des Juifs, fit replacer

Le martyre de saint Polycarpe

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le corps sur le bûcher et, comme c’était l’usage, fit brûler le cadavre. Nous vînmes recueillir les os, plus précieux pour nous que les pierres précieuses et l’or le plus pur, et ils furent déposés dans un lieu convenable. C’est là que nous nous réunirons dès que nous le pourrons, dans l’allégresse et la joie, et Dieu nous fera la grâce de célébrer le jour anniversaire de son martyre, pour honorer, d’une part, la mémoire de ceux qui ont déjà combattu, et de l’autre, former et préparer les générations suivantes à faire de même.

Voici tout ce que nous savons touchant Polycarpe, qui souffrit le martyre à Smyrne avec onze compagnons originaires de Philadelphie. Toutefois sa mémoire est l’objet de plus de vénération que celle des autres martyrs, à ce point qu’il n’est pas de lieu où les païens eux-mêmes ne s’entretiennent de ce docteur incomparable, de ce martyr fameux dont nous souhaitons tous d’imiter la confession tout imprégnée de l’esprit de l’Évangile. Après avoir affronté un juge inique, il fut vainqueur et reçut la couronne d’immortalité ; réuni aux apôtres et à tous les justes, il glorifie Dieu le Père tout-puissant, rend grâces à Jésus-Christ, au Sauveur de nos âmes, au Maître de notre corps et au Pasteur de l’Église catholique répandue dans le monde entier.

Vous nous aviez demandé le récit détaillé des événements, nous vous envoyons un tableau abrégé de la situation de notre frère Marcion. Après que vous aurez lu la lettre, faites-la parvenir aux frères les plus éloignés, afin qu’eux aussi rendent gloire à Dieu de ce qu’il a fait un choix parmi ses serviteurs.

A Celui qui peut nous conduire tous par sa grâce et sa miséricorde dans son éternel royaume par son Fils unique Jésus-Christ, à Lui, gloire, honneur, puissance, majesté dans les siècles. Saluez tous les saints en notre none.

Ceux qui sont avec nous et le scribe lui-même, Evariste, avec toute sa famille vous saluent.

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Polycarpe souffrit le martyre le second jour du mois de Xanthice, sept jours avant les calendes de mars, le jour du grand sabbat, à la huitième heure. Il fut fait prisonnier par Hérode, sous le pontificat do Philippe de Tralles. Statius Quadratus était proconsul de la province d’Asie et Notre-Seigneur Jésus-Christ régnait dans tous les siècles, à

qui soit gloire, honneur, majesté, royauté éternelle pendant toutes les générations. Amen !

Nous vous en prions, mes frères, allez, marchez dans la parole évangélique de Jésus-Christ, avec qui gloire soit au

Père et au Saint-Esprit à cause du salut des saints qu’il a appelés, comme il a accordé le martyre au bienheureux Polycarpe. Puissions-nous à sa suite parvenir dans le royaume de Jésus-Christ!

Caius a écrit tout ceci d’après la copie qui appartenait à Irénée, disciple de Polycarpe, avec qui il vécut longtemps

Moi Socrate, Corinthien, j’ai transcrit sur la copie de Caius. La grâce pour tous.

Et moi Pione, j’ai écrit tout ceci d’après l’exemplaire qui vient d’être ainsi signalé. Je l’avais cherché, mais le bienheureux Polycarpe m’en fit révélation comme je le dirai ailleurs. J’ai recueilli ces faits dont le temps avait presque amené la disparition, afin que Notre-Seigneur Jésus-Christ me réunisse moi aussi avec ses élus dans son royaume céleste. A lui, avec le Père et le Saint-Esprit, gloire dans les siècles des siècles. Amen.

bonne nuit

22 février, 2008

bonne nuit dans Pape Benoit paintbrush_close_red

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http://people.uleth.ca/~holzmann/photos/

« Sur cette pierre je bâtirai mon Eglise »

22 février, 2008

du site: 

http://levangileauquotidien.org/

Saint Léon le Grand (?-vers 461), pape et docteur de l’Église
4e sermon pour l’anniversaire de son ordination, PL 54, 14a (trad. cf SC 200, p. 269)

« Sur cette pierre je bâtirai mon Eglise »

Rien n’échappait à la sagesse et à la puissance du Christ : les éléments de la nature étaient à son service, les esprits lui obéissaient, les anges le servaient… Et pourtant dans tout l’univers, Pierre seul est choisi pour présider à l’appel de tous les peuples, à la direction de tous les apôtres et de tous les Pères de l’Église. Ainsi, bien qu’il y ait dans le peuple de Dieu beaucoup de prêtres et beaucoup de pasteurs, Pierre en personne les gouvernerait tous, alors que le Christ les gouverne aussi à titre de chef…

Le Seigneur demande à tous les apôtres quelle est l’opinion des hommes à son sujet. Et ils disent tous la même chose aussi longtemps qu’ils exposent les doutes venus de l’ignorance humaine. Mais lorsque le Seigneur exige de connaître le sentiment des disciples eux-mêmes, le premier à confesser le Seigneur est celui qui est le premier dans la dignité d’apôtre. Comme il avait dit : « Tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant », Jésus lui répond : « Heureux es-tu, Simon, fils de Yonas, car ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est aux cieux ». C’est-à-dire : Heureux es-tu parce que c’est mon Père qui t’a enseigné ; l’opinion de la terre ne t’a pas égaré, mais c’est une inspiration du ciel qui t’a instruit ; ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont permis de me découvrir, mais celui dont je suis le Fils unique.

« Et moi, je te le déclare », c’est-à-dire : De même que mon Père t’a manifesté ma divinité, de même moi je te fais connaître ta supériorité. « Tu es Pierre », c’est-à-dire : Moi je suis le rocher inébranlable, la pierre d’angle qui de deux peuples n’en fait qu’un seul (Ep 2,14), le fondement en dehors duquel personne ne peut en poser d’autre (1Co 3,11), mais toi aussi, tu es pierre, car tu es solide par ma force, et ce que j’ai en propre par ma puissance, tu l’as en commun avec moi du fait que tu y participes. « Sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise ». Sur la solidité de ce fondement, dit-il, je construirai un temple éternel, et mon Eglise, dont le sommet doit être introduit au ciel, s’élèvera sur la fermeté de cette foi.

Basilique de Saint Pierre apôtre – Saint Pierre

21 février, 2008

Basilique de Saint Pierre apôtre - Saint Pierre dans images sacrée

http://www.santiebeati.it/dettaglio/20800

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