20 novembre 2006 Le Pape à la Mosque Blue
18 janvier, 2008Inside the 17th century mosque, the pontiff prayed silently in what was seen as a gesture of reconciliation to the Muslims.
Inside the 17th century mosque, the pontiff prayed silently in what was seen as a gesture of reconciliation to the Muslims.
ce deux post, celui précédent et ceci ils ne rapportent pas tout ce qui a écrit Sandro Magister, ceci est une partie de suivi de ce qu’à écrit et rapporté Magister dans le sien articule, posté auparavant : « L’université de Rome ferme les portes à le Pape. Voilà la leçon qui n’a pas voulu écouter « ; ce est la réponse qu’il a donnée le 6 avril 2006 place Saint-Pierre à un lycéen de 17 ans qui lui avait demandé « comment mettre la science et la foi en harmonie » (voir sous)
sur le site du Magister autres écrits et le link à le teste intégral du discours de le Pape, mais maintenant encore seulemet en italien :
http://chiesa.espresso.repubblica.it/?fr=y
En tant que pape, Benoît XVI n’est jamais intervenu directement sur le sujet. Mais pour comprendre sa pensée, la réponse qu’il a donnée le 6 avril 2006 place Saint-Pierre à un lycéen de 17 ans qui lui avait demandé « comment mettre la science et la foi en harmonie » est d’un très grand intérêt.Voici la réponse du pape:
« LE GRAND GALILÉE A DIT QUE DIEU… »par Benoît XVI
Le grand Galilée a dit que Dieu a écrit le livre de la nature sous la forme du langage mathématique. Il était convaincu que Dieu nous a donné deux livres: celui de l’Ecriture Sainte et celui de la nature. Et le langage de la nature – telle était sa conviction – sont les mathématiques, celles-ci sont donc un langage de Dieu, du Créateur. Réfléchissons à présent sur ce que sont les mathématiques: en soi, il s’agit d’un système abstrait, d’une invention de l’esprit humain, qui comme tel, dans sa pureté, n’existe pas. Il est toujours réalisé de manière approximative, mais – comme tel – c’est un système intellectuel, c’est une grande, géniale invention de l’esprit humain. La chose surprenante est que cette invention de notre esprit humain, est vraiment la clef pour comprendre la nature, que la nature est réellement structurée de façon mathématique et que nos mathématiques, inventées par notre esprit, sont réellement l’instrument pour pouvoir travailler avec la nature, pour la mettre à notre service, pour l’instrumentaliser à travers la technique.
Cela me semble une chose presque incroyable qu’une invention de l’esprit humain et la structure de l’univers coïncident: les mathématiques, que nous avons inventées, nous donnent réellement accès à la nature de l’univers et nous le rendent utilisable. La structure intellectuelle du sujet humain et la structure objective de la réalité coïncident donc: la raison subjective et la raison objective dans la nature sont identiques. Je pense que cette coïncidence entre ce que nous avons pensé et la façon dont se réalise et se comporte la nature est une énigme et un grand défi, car nous voyons que, à la fin, c’est « une » raison qui les relie toutes les deux: notre raison ne pourrait pas découvrir cette autre, s’il n’existait pas une raison identique à la source de toutes les deux.
Dans ce sens, il me semble précisément que les mathématiques – dans lesquelles, en tant que telles, Dieu ne peut apparaître -, nous montrent la structure intelligente de l’univers. Certes, il existe également les théories du chaos, mais elles sont limitées car si le chaos prenait le dessus, toute la technique deviendrait impossible. Ce n’est que parce que notre mathématique est fiable que la technique est fiable. Notre science, qui permet finalement de travailler avec les énergies de la nature, suppose une structure fiable, intelligente, de la matière. Et ainsi, nous voyons qu’il y a une rationalité subjective et une rationalité objective de la matière, qui coïncident. Naturellement, personne ne peut prouver – comme on le prouve par l’expérience, dans les lois techniques – que les deux soient réellement le fruit d’une unique intelligence, mais il me semble que cette unité de l’intelligence, derrière les deux intelligences, apparaisse réellement dans notre monde. Et plus nous pouvons instrumentaliser le monde avec notre intelligence, plus apparaît le dessein de la Création.
A la fin, pour arriver à la question définitive, je dirais: ou Dieu existe, ou il n’existe pas. Il n’existe que deux options. Ou l’on reconnaît la priorité de la raison, de la Raison créatrice qui est à l’origine de tout et est le principe de tout – la priorité de la raison est également la priorité de la liberté – ou l’on soutient la priorité de l’irrationnel, selon laquelle tout ce qui fonctionne sur notre terre ou dans notre vie ne serait qu’occasionnel, marginal, un produit irrationnel – la raison serait un produit de l’irrationalité. On ne peut pas en ultime analyse « prouver » l’un ou l’autre projet, mais la grande option du Christianisme est l’option pour la rationalité et pour la priorité de la raison. Cela me semble une excellente option, qui nous montre que derrière tout se trouve une grande intelligence, à laquelle nous pouvons nous fier.
Mais le véritable problème contre la foi aujourd’hui me semble être le mal dans le monde: on se demande comment il peut être compatible avec cette rationalité du Créateur. Et ici, nous avons véritablement besoin du Dieu qui s’est fait chair et qui nous montre qu’Il n’est pas une raison mathématique, mais que cette raison originelle est également Amour. Si nous regardons les grandes options, l’option chrétienne est également aujourd’hui la plus rationnelle et la plus humaine. C’est pourquoi nous pouvons élaborer avec confiance une philosophie, une vision du monde qui soit fondée sur cette priorité de la raison, sur cette confiance que la Raison créatrice est amour, et que cet amour est Dieu.
du site:
http://chiesa.espresso.repubblica.it/?fr=y
L’université de Rome ferme ses portes au pape. Voici le discours qu’elle n’a pas voulu écouter
par Sandro Magister
ROMA, le 17 janvier 2008 – On l’a accueilli à la Mosquée Bleue d’Istanbul. On lui a offert une chaire à l’université de Ratisbonne. On l’attend à New York pour un discours devant les Nations Unies.
Mais pas à l’université de Rome « La Sapienza ». Elle lui est fermée. Benoît XVI a dû renoncer à lire un discours, le jeudi 17 janvier, dans la principale université du diocèse dont il est l’évêque. L’université qui avait déjà reçu la visite de Paul VI en 1964 et de Jean-Paul II en 1991.
L’annulation inouïe de la visite du pape a été annoncée le mardi 15 janvier à 17 heures dans un bref communiqué de la salle de presse du Vatican.
Le lendemain, le mercredi 16 janvier, le cardinal secrétaire d’état a écrit au recteur de l’université qui avait invité Benoît XVI, le professeur Renato Guarino:
« Les conditions pour un accueil digne et serein ne pouvant pas être assurées, du fait de l’initiative d’un groupe tout à fait minoritaire de professeurs et d’étudiants, il a été jugé opportun de reporter la visite prévue pour enlever tout prétexte à des manifestations qui pourraient s’avérer regrettables pour tous.
« Toutefois, le Saint-Père, conscient du désir sincère de la grande majorité des professeurs et des étudiants de recevoir une parole culturellement significative, dont on peut retirer des indications stimulantes dans son cheminement personnel de recherche de la vérité, a consenti à ce que vous soit envoyé le texte qu’il avait préparé personnellement pour l’occasion, [...] dans l’espoir que tous puissent s’en inspirer pour des réflexions et approfondissements enrichissants ».
Le même jour, dans l’après-midi, sortait « L’Osservatore Romano » avec le texte complet du discours que le pape aurait dû lire le jour suivant à l’université « La Sapienza ».
Un discours dans la ligne de celui qu’avait prononcé Benoît XVI à l’université de Ratisbonne le 12 septembre 2005. Sur la nature et les missions d’une université, sur le rapport entre vérité et liberté, entre foi et raison, entre la philosophie, la théologie et les autres branches du savoir, entre l’Eglise et le monde contemporain.
Un discours d’importance capitale pour comprendre la pensée du pape Joseph Ratzinger. Pour comprendre pourquoi il invite sans cesse la raison « à se mettre à la recherche du vrai, du bien, de Dieu et, dans ce cheminement, à distinguer les lumières utiles qui sont apparues tout au long de l’histoire de la foi chrétienne ».
Le texte original du discours, en italien, est disponible sur le site du Vatican:
> « È per me motivo di profonda gioia incontrare… »
En voici un large extrait, suivi de quelques informations sur les faits qui ont précédé la visite manquée du pape à l’université de Rome:
« Je ne viens pas imposer la foi mais demander du courage pour la vérité »
par Benoît XVI
[...] Que peut et que doit dire le pape lors d’une rencontre avec l’université de sa ville? En réfléchissant à cette question, j’ai senti qu’elle en contenait deux autres, dont la clarification devrait d’elle-même mener à la réponse. Il faut, en effet, se demander: quelle est la nature et la mission de la papauté? Et puis: quelle est la nature et la mission de l’université? [...]
Le pape est avant tout l’évêque de Rome. Comme tel, en vertu du fait qu’il succède à l’apôtre Pierre, il a une responsabilité épiscopale envers l’Eglise catholique toute entière. [...] Mais cette communauté dont l’évêque de Rome prend soin – qu’elle soit petite ou grande – vit dans le monde; son état, son cheminement, son exemple et sa parole ont inévitablement une influence sur tout le reste de la communauté des hommes dans son ensemble. [...] Ainsi, le pape parle en tant que représentant d’une communauté de croyants dans laquelle, au fil de ses siècles d’existence, s’est forgée une connaissance déterminée de la vie. Il parle en tant que représentant d’une communauté qui garde en elle un trésor de connaissance et d’expérience éthique, qui se révèle important pour l’humanité toute entière. En ce sens, il parle en tant que représentant d’une raison éthique.
Deuxième question: qu’est-ce que l’université? Quel est son rôle? [...] Je pense que l’on peut dire que l’université trouve sa véritable et plus profonde origine dans cette soif de connaissance qui est propre à l’homme. Il veut savoir ce qu’est tout ce qui l’entoure. Il veut la vérité.
En ce sens, on peut voir l’interrogation de Socrate comme l’impulsion qui a donné naissance à l’université occidentale. Je pense par exemple – pour ne citer qu’un seul texte – au dialogue avec Euthyphron qui, face à Socrate, défend la religion fondée sur des mythes et sa dévotion. A cela, Socrate répond par une question: « Crois-tu que, entre les dieux, il existe réellement une guerre mutuelle et des inimitiés terribles et des combats? Devons-nous, Euthyphron, dire effectivement que tout cela est vrai? » (6 b-c). Dans cette question, qui semble faire preuve de peu de dévotion – mais qui dérivait chez Socrate d’une religiosité plus profonde et plus pure, de la recherche du Dieu vraiment divin – les chrétiens des premiers siècles se sont reconnus ainsi que leur cheminement. Ils ont accueilli leur foi non pas de manière positiviste ou comme un exutoire à des désirs non assouvis. Ils l’ont comprise comme la dissipation des brumes de la religion fondée sur des mythes qui a fait place à la découverte de ce Dieu qui est Raison créatrice et en même temps Raison-Amour. Par conséquent, interroger sa raison sur le Dieu plus grand et sur la vraie nature et le vrai sens de l’être humain n’était pas pour eux une forme de manque de religiosité pouvant poser problème. Cela faisait partie de l’essence de leur manière d’être religieux. Ils n’avaient donc pas besoin de résoudre ou d’écarter l’interrogation socratique, mais ils pouvaient, et même devaient l’accueillir et reconnaître comme une partie de leur propre identité la recherche laborieuse de la raison pour atteindre la connaissance de la vérité toute entière. C’est ainsi qu’a pu, et même qu’a dû naître l’université, dans le contexte de la foi chrétienne et dans le monde chrétien.
Poursuivons notre raisonnement. L’homme veut connaître, il veut la vérité. La vérité est avant tout une affaire de vision, de compréhension, de théorie, comme l’appelle la tradition grecque. Mais la vérité n’est jamais uniquement théorique. Augustin, faisant un parallèle entre les Béatitudes du Discours sur la Montagne et les dons de l’Esprit mentionnés dans Isaïe 11, a établi une réciprocité entre « scientia » et « tristitia »: le savoir tout seul, dit-il, rend triste. De fait, celui qui voit et apprend seulement tout ce qui se produit dans le monde finit par devenir triste. Mais la vérité va au-delà du savoir: la connaissance de la vérité a comme but la connaissance du bien. Voilà également le sens de cette interrogation socratique: Quel est ce bien qui nous rend vrais? La vérité nous rend bons, et la bonté est vraie: voilà l’optimisme qui vit dans la foi chrétienne, parce que c’est elle qui a reçu la vision du Logos, de la Raison créatrice qui, dans l’incarnation de Dieu, s’est révélée aussi comme le Bien, comme la Bonté même.
Dans la théologie médiévale, il y a eu une discussion approfondie sur le rapport entre théorie et pratique, sur la bonne relation entre la connaissance et l’action – une discussion que nous ne devons pas développer maintenant. De fait, avec ses quatre facultés, l’université médiévale présente cette corrélation.
Commençons par celle qui, selon la vision de l’époque, était la quatrième, la faculté de médecine.
Même si elle était considérée comme un « art » plutôt que comme une science, son intégration dans le cosmos de l’universitas montrait cependant clairement qu’elle relevait du domaine de la rationalité, que l’art de guérir était guidé par la raison et qu’il échappait au domaine de la magie. Guérir est une tâche qui demande toujours plus que la simple raison, mais c’est justement pour cela qu’elle a besoin de la connexion entre le savoir et le pouvoir, qu’elle a besoin d’appartenir à la sphère de la raison.
Inévitablement, la question de la relation entre pratique et théorie, entre connaissance et action apparaît également à la faculté de droit.
Il s’agit de donner sa forme juste à la liberté de l’homme qui est toujours une liberté dans la communion réciproque: le droit est la condition nécessaire à la liberté et non son adversaire. Vient alors cette question: Comment trouver les critères de justice qui permettent une liberté vécue collectivement et qui contribuent à rendre l’homme bon?
A ce stade, un saut dans le temps présent est nécessaire: il s’agit de savoir comment l’on peut trouver un ensemble de règles juridiques qui organise la liberté, la dignité humaine et les droits de l’homme. Une question qui nous occupe aujourd’hui dans les processus démocratiques de formation de l’opinion et qui, en même temps, nous tourmente comme enjeu pour l’avenir de l’homme.
Jürgen Habermas exprime, à mon avis, un large consensus de la pensée actuelle, lorsqu’il affirme que la légitimité d’une charte constitutionnelle, en tant que condition nécessaire à la légalité, aurait deux sources: une participation politique égalitaire de tous les citoyens et une manière raisonnable de résoudre les conflits politiques.
Il précise à propos de cette « manière raisonnable » qu’il ne peut s’agir seulement d’une lutte pour des majorités arithmétiques, mais qu’elle doit être définie comme un « processus d’argumentation sensible à la vérité » (wahrheitssensibles Argumentationsverfahren). C’est bien dit, mais c’est quelque chose de très difficile à transformer en une pratique politique. Les représentants de ce « processus d’argumentation » public sont – nous le savons – principalement les partis, en tant que responsables de la formation de la volonté politique. De fait, leur objectif principal sera immanquablement avant tout la constitution de majorités et ils se consacreront donc presque inévitablement à des intérêts qu’ils promettent de satisfaire. Toutefois, de tels intérêts sont souvent particuliers et ne servent pas vraiment la collectivité. La sensibilité à la verité est sans cesse dominée par la sensibilité aux intérêts. Je trouve significatif le fait qu’Habermas parle de la sensibilité à la vérité comme d’un élément nécessaire du processus d’argumentation politique. Il réinsère ainsi le concept de vérité dans le débat philosophique et dans le débat politique.
Mais alors on ne peut pas éviter la question de Pilate: qu’est-ce que la vérité? Et comment la reconnaît-on? Si, pour y répondre, on renvoie à la « raison publique », comme le fait John Rawls, il s’ensuit nécessairement une autre question: qu’est-ce qui est raisonnable? Comment démontre-t-on qu’une raison est vraie? En tout cas, sur cette base, il devient évident que, dans la recherche du droit de la liberté, de la vérité, de la cohabitation convenable, il faut écouter des instances autres que les partis et groupes d’intérêt, sans pour autant vouloir contester si peu que ce soit leur importance.
Nous revenons ainsi à la structure de l’université médiévale. A côté de celle de droit, il y avait les facultés de philosophie et de théologie, à qui était confiée la recherche sur l’être humain dans sa totalité et, avec cela, le devoir de tenir éveillée la sensibilité à la vérité.
En fait, on pourrait dire que c’est la raison d’être permanente et vraie des deux facultés: être les gardiennes de la sensibilité à la vérité, ne pas permettre que l’homme soit détourné de la recherche de la vérité. Mais comment peuvent-elles répondre à cette attente? C’est une question sur laquelle il faut sans cesse se pencher et qui n’est jamais posée ni résolue définitivement. C’est pourquoi, à ce point de la réflexion, je ne peux pas, moi non plus, proposer une réponse précise, mais plutôt une invitation à continuer à étudier cette question – à continuer comme les grands esprits qui, tout au long de l’histoire, ont lutté et cherché, avec leurs réponses et leur inquiétude pour la vérité – qui renvoie sans cesse au-delà de chaque réponse.
Théologie et philosophie forment en cela un duo particulier, dont les deux éléments ne peuvent être totalement séparés l’un de l’autre, même si chacun doit conserver son rôle et son identité.
C’est le mérite historique de saint Thomas d’Aquin d’avoir mis en évidence – face à la réponse différente des Pères de l’Eglise, due au contexte historique – l’autonomie de la philosophie et, avec elle, le droit et la responsabilité propres de la raison qui s’interroge sur la base de ses propres forces.
A la différence des philosophies néoplatoniciennes, pour lesquelles religion et philosophie étaient inséparablement entremêlées, les Pères avaient présenté la foi chrétienne comme la vraie philosophie, soulignant également que cette foi correspond aux exigences de la raison à la recherche de la vérité; que la foi est le « oui » à la vérité, par rapport aux religions fondées sur des mythes, devenues de simples coutumes. Mais plus tard, au moment de la naissance des universités, ces religions n’existaient plus en Occident, seul le christianisme subsistait. C’est pourquoi il fallait souligner d’une nouvelle manière la responsabilité propre de la raison, qui n’est pas absorbée par la foi.
Il se trouve que Thomas a agi à un moment privilégié: pour la première fois, les écrits philosophiques d’Aristote étaient accessibles dans leur intégralité; les philosophies juive et arabe étaient présentes, comme des appropriations et des continuations spécifiques de la philosophie grecque. C’est ainsi que le christianisme, dans un nouveau dialogue avec la raison des autres, qu’il rencontrait, a dû lutter pour affirmer son bien-fondé. La faculté de philosophie qui, sous le nom de « faculté des arts », n’avait été jusqu’à ce moment qu’une propédeutique pour la théologie, est alors devenue une faculté pleine et entière, une partenaire autonome de la théologie et de la foi in que celle-ci reflétait.
Nous ne pouvons pas, ici, nous arrêter sur la passionnante confrontation qui en a découlé. Je pense que l’idée de saint Thomas sur le rapport entre philosophie et théologie pourrait être exprimée par la formule trouvée par le Concile de Chalcédoine pour la christologie: philosophie et théologie doivent établir entre elles un rapport « sans confusion et sans séparation ».
« Sans confusion », cela veut dire que chacune des deux doit conserver sa propre identité. La philosophie doit rester vraiment une recherche de la raison dans sa liberté et dans sa responsabilité; elle doit voir ses limites et par là même sa grandeur et son étendue. La théologie doit continuer à puiser dans un trésor de connaissances qu’elle n’a pas inventé elle-même, qui la dépasse toujours et qui, n’étant jamais complètement épuisable par la réflexion, relance constamment la pensée, précisément pour cette raison.
A côté du « sans confusion » il y a aussi le « sans séparation »: la philosophie ne repart pas à chaque fois du point zéro du sujet pensant de manière isolée, mais elle se place dans le grand dialogue de la sagesse historique, qu’elle accueille et développe toujours de nouveau, de manière à la fois critique et docile. Mais elle ne doit pas non plus se refermer devant ce que les religions – et en particulier la foi chrétienne – ont reçu et donné à l’humanité comme indication du chemin.
L’histoire a montré la fausseté de différentes choses dites par des théologiens au cours de l’histoire ou mises en pratique par les autorités ecclésiastiques: aujourd’hui elles nous embarrassent. Mais en même temps il est vrai que l’histoire des saints, l’histoire de l’humanisme qui s’est développé à partir de la foi chrétienne démontre la vérité de cette foi dans son noyau essentiel, ce qui en fait aussi une instance de la raison publique. Certes, une grande part de ce que disent la théologie et la foi ne peut être perçu qu’à l’intérieur de la foi et ne peut donc pas se présenter comme une exigence pour ceux à qui cette foi reste inaccessible. En même temps, toutefois, il est vrai que le message de la foi chrétienne n’est jamais une simple « comprehensive religious doctrine » au sens où l’entend Rawls, mais une force purificatrice pour la raison elle-même, qu’elle aide à être plus elle-même. Le message chrétien, en raison de son origine, devrait toujours être un encouragement à rechercher la vérité et, par là, une force contre la pression du pouvoir et des intérêts.
Jusqu’à présent je n’ai parlé que de l’université médiévale, mais en cherchant à laisser transparaître la nature permanente de l’université et de son rôle. Aux temps modernes, on a découvert de nouvelles dimensions du savoir, que l’université valorise surtout dans deux grands domaines: tout d’abord dans les sciences naturelles, qui se sont développées sur la base d’une combinaison d’expérimentation et de rationalité supposée de la matière; en second lieu, dans les sciences historiques et humaines, par lesquelles l’homme, en examinant le miroir de son histoire et en clarifiant les dimensions de sa nature, cherche à mieux se comprendre lui-même.
Non seulement ce développement a ouvert à l’humanité une quantité immense de savoir et de pouvoir mais il a aussi augmenté la connaissance et la reconnaissance des droits et de la dignité de l’homme. Nous ne pouvons qu’en être reconnaissants.
Mais on ne peut jamais dire que l’homme est arrivé au bout de son chemin et le danger de la chute dans l’inhumanité n’est jamais simplement conjuré: c’est ce que nous montre le panorama de l’histoire actuelle! Le danger qui menace le monde occidental – pour ne parler que de cela – est qu’aujourd’hui l’homme, justement en raison de l’étendue de son savoir et de son pouvoir, capitule devant la question de la vérité. Cela signifie en même temps que la raison, en fin de compte, cède à la pression des intérêts et à l’attraction de l’utilité, qu’elle est contrainte à reconnaître comme critère ultime.
Dit du point de vue de la structure de l’université: il y a le danger que la philosophie, ne se sentant plus capable d’accomplir son véritable devoir, se dégrade en positivisme; que la théologie, son message étant tourné vers la raison, soit confinée à la sphère privée d’un groupe plus ou moins nombreux. Toutefois si la raison – soucieuse de sa pureté présumée – devient sourde au grand message qui lui vient de la foi chrétienne et de sa sagesse, elle se dessèche comme un arbre dont les racines n’atteignent plus l’eau qui lui donne la vie. Elle perd le courage de chercher la vérité et rapetisse au lieu de grandir.
Appliqué à notre culture européenne cela signifie que, si celle-ci ne veut que se construire toute seule sur la base du cercle de ses propres arguments et de ce qui lui paraît convaincant à un moment donné et si – préoccupée de sa laïcité – elle se détache des racines qui la font vivre, alors elle ne devient pas plus raisonnable et plus pure, mais elle se décompose et elle se brise en morceaux.
Je reviens maintenant à mon point de départ. Qu’est-ce que le pape a à faire ou à dire à l’université? Il ne doit sûrement pas chercher à imposer aux autres, de manière autoritaire, la foi, qui ne peut être donnée qu’en toute liberté. Au-delà de son ministère de pasteur de l’Eglise et sur la base de la nature intrinsèque de ce ministère pastoral, son rôle est de tenir éveillée la sensibilité à la vérité; d’inviter sans cesse la raison à se mettre à la recherche du vrai, du bien, de Dieu et, sur ce chemin, de l’inciter à entrevoir les lumières utiles qui sont apparues tout au long de l’histoire de la foi chrétienne et à percevoir ainsi Jésus-Christ comme la Lumière qui éclaire l’histoire et aide à trouver le chemin vers l’avenir.
suite de l’article sur le post au-dessus
17-01-2008, du site:
http://www.zenit.org/article-17065?l=french
La semaine de prière pour l’unité a cent ans, par le cardinal Kasper
Cent ans « très riches, sous l’impulsion de l’Esprit Saint »
ROME, Jeudi 17 janvier 2008 (ZENIT.org) – La semaine de pri
ère pour l’unité des chrétiens a cent ans, cent ans « très riches, sous l’impulsion de l’Esprit Saint », souligne aujourd’hui au micro de Radio Vatican le cardinal Walter Kasper, président du conseil pontifical pour la Promotion de l’unité des chrétiens.
Ce soir, le cardinal Kasper a inauguré la semaine pour l’unité, lors des vêpres à Rome, place Farnèse, en l’église des religieuses de Sainte-Brigitte, avec une délégation guidée par l’évêque luthérien finlandais de Turku, Kari Makinen.
Il évoquait cet après midi l’anniversaire de l’initiative lancée par le Père Paul Wattson, en 1908, aux Etats-Unis (cf. Zenit du 16 janvier).
« Ces cent années ont été des années très riches, sous l’impulsion de l’Esprit Saint. Et cette semaine de prière a été très aidée, parce que l’œcuménisme, ce n’est pas notre œuvre, mais c’est l’œuvre de l’Esprit Saint, et sans Lui, l’unité n’est pas possible. Cette prière s’est beaucoup diffusée pendant ces cent ans, et elle est célébrée dans le monde entier. Ces dernières années surtout, des réseaux de prière se sont constitués, entre monastères, communautés spirituelles, évêques, prêtres, laïcs. Le mouvement œcuménique est donc vraiment un mouvement de prière ».
Le cardinal Kasper constate ainsi qu’aujourd’hui, « les chrétiens sont plus unis » : « Aujourd’hui, ils ne se considèrent plus comme des ennemis, mais comme des frères et des sœurs en Jésus Christ, ensemble sur la route vers la pleine communion ».A propos du th
ème de cette année – « Priez sans cesse » – le cardinal Kasper a fait observer que « le mouvement œcuménique remonte, en dernière analyse au Cénacle, où Jésus a prié afin que tous soient un ». « Et l’œcuménisme, ajoutait-il, cela signifie faire sienne cette prière de Jésus. Le thème de cette année synthétise tout le mouvement œcuménique de ces cent dernières années. Un mouvement que de nombreux saints avaient déjà préparé pendant le XIXe siècle : Vincent Pallotti, don Orione. Ils avaient alors suggéré cette prière pour l’unité. Et aujourd’hui, nous suivons les pas de ces grands saints de l’Eglise catholique ».Pour ce qui est de l’inauguration de la semaine avec la délégation luthérienne, le cardinal Kasper précise : « Nous avons des relations spéciales avec l’Eglise luthérienne de Finlande parce que cette Eglise se sent très proche de l’Eglise catholique, et qu’une dèlégation est présente chaque année pour la fête de leur saint patron national, saint Henri. Chaque année nous commençons cette semaine avec eux et avec les sœurs de Sainte-Brigitte et c’est toujours pour moi une joie d’être présent à cette célébration des vêpres ».
Anita S. Bourdin
Salvator Dali – Die heilige Bibel (1964-1967)
IN THE BEGINNING GOD CREATED HEAVEN AND EARTH
du site:
http://levangileauquotidien.org/
Saint Pierre Chrysologue (vers 406-450), évêque de Ravenne, docteur de l’Église
Sermon 50 ; CCL 24, 276 ; PL 52, 339 (trad. Matthieu commenté, DDB 1985, p. 71 rev.)
« Voyant leur foi »
« Il vint dans sa ville ; et voici qu’on lui présentait un paralytique couché sur un lit » (Mt 9,1). Jésus, dit l’Evangile, voyant la foi de ces gens, dit au paralytique : « Courage, mon enfant ! Tes péchés te sont remis ». Le paralytique entend ce pardon et reste muet. Il ne répond par aucun merci. Il désirait la guérison de son corps plutôt que celle de son âme. Il déplorait les maux passagers de son corps malade, mais les maux éternels de son âme, plus malade encore, il ne les pleurait pas. C’est qu’il jugeait la vie présente plus précieuse pour lui que la vie future.
Le Christ a eu raison de tenir compte de la foi de ceux qui lui présentent le malade et de ne tenir aucun compte de la sottise de celui-ci. A la faveur de la foi d’autrui, l’âme du paralytique allait être guérie avant son corps. « Voyant la foi de ces gens », dit l’Evangile. Remarquez ici, frères, que Dieu ne se soucie pas de ce que veulent les hommes insensés, qu’il ne s’attend pas à trouver de la foi chez les ignorants, qu’il n’analyse pas les sots désirs d’un infirme. Par contre, il ne refuse pas de venir au secours de la foi d’autrui. Cette foi est un cadeau de la grâce et elle s’accorde avec la volonté de Dieu.
17-01-2008, du site:
http://www.zenit.org/article-17063?l=french
Discours que le pape aurait dû prononcer à « La Sapienza » de Rome (I)
Texte intégral
ROME, Jeudi 17 janvier 2008 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous la première partie du discours que le pape Benoît XVI avait préparé pour sa visite à l’Université « La Sapienza » de Rome. Cette visite a été annulée en raison des protestations d’un petit groupe d’enseignants et d’étudiants.
Monsieur le Recteur Magnifique,
Mesdames et Messieurs les Représentants des Autorités politiques et civiles,
Illustres professeurs et membres du personnel technique et administratif,
Chers jeunes étudiants !
C’est pour moi un motif de profonde joie de rencontrer la communauté de la « Sapienza – Université de Rome », à l’occasion de l’inauguration de l’Année académique. Depuis désormais plusieurs siècles cette Université marque le chemin et la vie de la ville de Rome, en faisant fructifier les meilleures énergies intellectuelles dans tous les domaines du savoir. Que ce soit à l’époque où, après sa fondation voulue par le Pape Boniface VIII, l’institution dépendait directement de l’Autorité ecclésiastique, ou successivement, lorsque le Studium Urbis s’est développé comme institution de l’Etat italien, votre communauté universitaire a conservé un haut niveau scientifique et culturel, qui l’inscrit parmi les universités les plus prestigieuses du monde. L’Eglise de Rome regarde depuis toujours avec sympathie et admiration ce centre universitaire, reconnaissant son engagement, parfois difficile et laborieux, pour la recherche et la formation des nouvelles générations. Ces dernières années, des moments significatifs de collaboration et de dialogue n’ont pas manqué. Je voudrais rappeler, en particulier, la rencontre mondiale des Recteurs à l’occasion du Jubilé des Universités, qui a vu votre communauté prendre en charge non seulement l’accueil et l’organisation, mais surtout la proposition prophétique et complexe de l’élaboration d’un « nouvel humanisme pour le troisième millénaire ».J’ai
à cœur, en cette circonstance, d’exprimer ma gratitude pour l’invitation qui m’a été adressée à venir dans votre université pour y tenir une leçon. Dans cette perspective, je me suis tout d’abord posé la question : que peut et que doit dire un Pape en une occasion comme celle-ci ? Dans ma leçon à Ratisbonne, j’ai parlé, bien sûr, en tant que Pape, mais j’ai surtout parlé en qualité d’ancien professeur de cette université, en cherchant à relier les souvenirs et l’actualité. A l’Université la « Sapienza », l’antique université de Rome, je suis cependant invité en tant qu’Evêque de Rome, et je dois donc parler comme tel. Certes, la « Sapienza » était autrefois l’Université du Pape, mais aujourd’hui c’est une université laïque avec cette autonomie qui, à partir de son concept même de fondation, a toujours fait partie de l’université, qui doit exclusivement être liée à l’autorité de la vérité. Dans sa liberté à l’égard de toute autorité politique et ecclésiastique, l’université trouve sa fonction particulière, précisément aussi pour la société moderne, qui a besoin d’une institution de ce genre.
Je reviens à ma question de départ : que peut et que doit dire le Pape au cours de la rencontre avec l’université de sa ville ? En réfléchissant à cette question, il m’a semblé qu’elle en contenait deux autres, dont la clarification devrait toute seule conduire à la réponse. En effet, il faut se demander : quelle est la nature de la mission de la papauté ? Et encore : Quelle est la nature de la mission de l’université ? Je ne voudrais pas, en ce lieu, vous retenir par de longs discours sur la nature de la papauté. Une brève explication suffira. Le Pape est tout d’abord l’évêque de Rome et, comme tel, en vertu de la succession à l’Apôtre Pierre, il possède une responsabilité épiscopale à l’égard de l’Eglise catholique tout entière. Le terme « évêque-episkopos », qui dans sa première signification renvoie à l’idée de « surveillant», a déjà été fondue dans le Nouveau Testament avec le concept biblique de Pasteur : il est celui qui, d’un point d’observation surélevé, regarde l’ensemble, en prenant soin du bon chemin et de la cohésion de l’ensemble. C’est pourquoi cette définition de sa tâche oriente tout d’abord le regard vers l’intérieur de la communauté des croyants. L’Evêque – le Pasteur – est l’homme qui prend soin de cette communauté ; celui qui la conserve unie en la gardant sur le chemin vers Dieu, indiqué selon la foi chrétienne par Jésus – mais pas seulement indiquée : Il est lui-même le chemin pour nous. Mais cette communauté dont l’Evêque prend soin – qu’elle soit grande ou petite – vit dans le monde ; ses conditions, son chemin, son exemple et sa parole influent inévitablement sur tout le reste de la communauté humaine dans son ensemble. Plus celle-ci est grande, plus ses bonnes conditions ou sa dégradation éventuelle se répercuteront sur l’ensemble de l’humanité. Nous voyons aujourd’hui très clairement de quelle manière les conditions des religions et la situation de l’Eglise – ses crises et ses renouvellements – agissent sur l’ensemble de l’humanité. C’est pourquoi le Pape, précisément comme Pasteur de sa communauté, est également devenu toujours plus une voix de la raison éthique de l’humanité.Une objection appara
ît cependant immédiatement ici, selon laquelle le Pape, de fait, ne parlerait pas vraiment sur la base de la raison éthique, mais tirerait ses jugements de la foi et ne pourrait donc pas prétendre qu’ils soient valables pour ceux qui ne partagent pas cette foi. Nous devrons encore revenir sur ce thème, car c’est la question absolument fondamentale qui est posée là : qu’est-ce que la raison ? Comment une affirmation – surtout une norme morale – peut-elle se démontrer « raisonnable » ? A ce point, je ne voudrais pour le moment que brièvement observer que John Rawls, bien que niant à des doctrines religieuses compréhensives le caractère de la raison « publique », voit toutefois dans leur raison « non publique » au moins une raison qui ne pourrait pas, au nom d’une rationalité endurcie par le sécularisme, être simplement méconnue par ceux qui la soutiennent. Il voit un critère de cet aspect raisonnable, entre autres, dans le fait que de telles doctrines dérivent d’une tradition responsable et motivée, dans lesquelles au cours des temps ont été développées des argumentations suffisamment valables pour soutenir la doctrine relative. Dans cette affirmation, il me semble important de reconnaître que l’expérience et la démonstration au cours de générations, le fond historique de la sagesse humaine, sont également un signe de son caractère raisonnable et de sa signification durable. Face à une raison a-historique qui cherche à se construire toute seule uniquement dans une rationalité a-historique, la sagesse de l’humanité comme telle – la sagesse des grandes traditions religieuses – est à valoriser comme une réalité que l’on ne peut pas impunément jeter au panier de l’histoire des idées.
Revenons à la question de départ. Le Pape parle comme le représentant d’une communauté de croyants dans laquelle, au cours des siècles de son existence, a mûri une sagesse déterminée de la vie ; il parle comme le représentant d’une communauté qui conserve en soi un trésor de connaissance et d’expérience éthiques, qui est important pour l’humanité tout entière : en ce sens, il parle comme le représentant d’une raison éthique.Mais on doit alors se demander : qu’est-ce que l’universit
é ? C’est une question immense, à laquelle, encore une fois, je ne peux chercher à répondre qu’en style presque télégraphique, en effectuant quelques observations. Je pense que l’on peut dire que la véritable origine profonde de l’université se trouve dans la soif de connaissance qui est propre à l’homme. Il veut savoir ce qu’est tout ce qui l’entoure. Il veut la vérité. C’est dans ce sens que l’on peut voir l’interrogation de Socrate comme l’impulsion à partir de laquelle est née l’université occidentale. Je pense, par exemple – pour ne mentionner qu’un texte – au dialogue avec Euthyphron, qui, face à Socrate défend la religion mythique et sa dévotion. Socrate oppose à ce point de vue la question suivante : « Tu crois sérieusement qu’entre les dieux il y a des querelles, des haines, des combats… Euthyphron, devons-nous recevoir toutes ces choses comme bonnes ? » (6 b – c). Dans cette question apparemment peu pieuse – qui chez Socrate dérivait cependant d’une religiosité plus profonde et plus pure, de la recherche du Dieu vraiment divin – les chrétiens des premiers siècles se sont reconnus eux-mêmes, ainsi que leur chemin. Ils n’ont pas accueilli leur foi de manière positiviste, ou comme une issue à des désirs non satisfaits ; ils l’ont comprise comme la dissipation du brouillard de la religion mythologique, pour faire place à la découverte de ce Dieu qui est Raison créatrice et, dans le même temps, Raison-Amour. C’est pourquoi, l’interrogation de la raison sur le Dieu le plus grand, ainsi que sur la véritable nature et le véritable sens de l’être humain n’était pas pour eux une forme problématique de manque de religiosité, mais faisait partie de l’essence de leur façon d’être religieux. Ils n’avaient donc pas besoin de répondre à l’interrogation socratique, ou de la mettre de côté, mais ils pouvaient et devaient même accueillir et reconnaître comme une partie de leur identité la recherche difficile de la raison, pour parvenir à la connaissance de la vérité tout entière. C’est ainsi que pouvait et devait même naître dans le cadre de la foi chrétienne, dans le monde chrétien, l’université.
Il est nécessaire d’accomplir un pas supplémentaire. L’homme veut connaître, il veut la vérité. La vérité est avant tout un élément en relation avec le fait de voir, de comprendre, avec la theoría, comme l’appelle la tradition grecque. Mais la vérité n’est jamais seulement théorique. Augustin, en établissant une corrélation entre les Béatitudes du Discours sur la Montagne et les dons de l’Esprit mentionnés dans Isaïe 11, a affirmé une réciprocité entre « scientia » et « tristitia »: le simple savoir, dit-il, rend triste. Et de fait – celui qui voit et qui apprend seulement tout ce qui a lieu dans le monde, finit par devenir triste. Mais la vérité signifie davantage que le savoir : la connaissance de la vérité a pour objectif la connaissance du bien. Tel est également le sens de l’interrogation socratique : quel est le bien qui nous rend vrais ? La vérité nous rend bons, et la bonté est vraie : tel est l’optimisme qui est contenu dans la foi chrétienne, car à celle-ci a été accordée la vision du Logos, de la Raison créatrice qui, dans l’incarnation de Dieu, s’est en même temps révélée comme le Bien, comme la Bonté elle-même.