Le Prophéte Isaïe (Cappella Sistina)
11 décembre, 2007Il Profeta Isaia, 1510-1511
Volta della Cappella Sistina
Vaticano, Roma
Il Profeta Isaia, 1510-1511
Volta della Cappella Sistina
Vaticano, Roma
du site:
http://www.aelf.org:591/bibledelaliturgie/intro/FMPro?-db=at.fm5&-lay=base&-format=Is.html&-view
Ancien Testament
Les Prophètes
Au long des « livres historiques », spécialement dans Samuel et les Rois (voir p. 87), nous avons rencontré des figures prestigieuses de prophètes. Voici maintenant ceux qu’on appelle parfois les « prophètes écrivains » : en fait, ce sont plutôt leurs disciples qui ont recueilli leurs oracles pour en composer des livres.
Les prophètes d’Israël sont avant tout des hommes appelés pour dire à leur peuple les exigences et les promesses de Dieu. On devient prophète par vocation, par cette certitude qui s’impose un jour à un homme d’être saisi par la main de Dieu et envoyé. Dès lors, et parfois comme malgré lui, le prophète témoigne par ses paroles, par ses gestes, par toute sa vie. Il affronte les rois, dénonce le péché du peuple et de ses chefs, appelle à la conversion et au repentir. Ce qu’il exige au nom du Seigneur, c’est d’une part la fidélité au Dieu unique malgré la séduction de toutes les idoles, et d’autre part le respect de l’homme, et particulièrement la défense des plus pauvres et des plus démunis. Ces valeurs centrales de respect de Dieu et de respect des hommes s’approfondissent à travers la prédication des prophètes ; Israël découvre ainsi des dimensions nouvelles de sa foi traditionnelle et se prépare à accueillir l’approfondissement bien plus grand encore qu’apportera le Christ.
Témoin passionné des exigences du Seigneur, le prophète proclame qu’il faut changer son coeur pour éviter le châtiment divin. Mais quand, malgré ses avertissements, la colère de Dieu a sévi sur le peuple « à la nuque raide », il appelle de nouveau à l’espérance et affirme que Dieu ne saurait renoncer à son Alliance, même si le peuple, lui, y a manqué. C’est ainsi que les prophètes annoncent l’avenir prestigieux du peuple enfin sauvé, et parfois évoquent la figure du Messie, le roi descendant de David, qui viendra donner la justice et la paix sans limite à Israël, voire à l’univers entier.
La vocation prophétique s’est exprimée de façon très diverse suivant la personnalité des différents prophètes. Certains ont été prophètes pendant une longue existence mouvementée, d’autres durant une période très courte, parfois même à l’occasion d’un seul événement. Certains livres prophétiques sont tout entiers du même auteur ; d’autres ont eu une histoire plus complexe, des oracles d’auteurs plus tardifs étant venus se regrouper autour du noyau primitif.
Quand la Bible s’est constituée, les livres prophétiques y ont été regroupés d’une manière assez artificielle : d’abord les « grands », ceux dont les livres sont les plus longs : Isaïe, Jérémie, Ézéchiel (auxquels la bible grecque et latine ajoute Daniel, qui n’est pas prophète – voir p. 301), puis les « douze petits » dont les livres sont plus courts. En outre, deux livres assez différents figurent à la suite de Jérémie : les Lamentations et Baruc. Cet ordre, on le voit, n’a pas grand chose à voir avec l’ordre chronologique. On pourra retrouver celui-ci en consultant le tableau chronologique, à la fin du volume. Isaïe
Isaïe vit à Jérusalem au VIIIe siècle, dans le royaume du Sud gouverné par des rois souvent médiocres et peu ardents au service du Seigneur, au moment où le royaume du Nord divisé, sans force, miné par l’idolâtrie, s’écroule sous les coups des Assyriens (voir 2 Rois 17 Õ 118). Il est hanté par les menaces qui pèsent sur son peuple. Au jour de sa vocation, Dieu s’est révélé à lui comme le Saint, le Tout-Puissant, l’inégalable Dieu de l’univers (ch. 6 Õ 219). Tout au long de sa vie, Isaïe sera inspiré par ce souvenir.
Prophète de la sainteté de Dieu, il dénonce avec vigueur toutes les infidélités et les injustices qui sont un scandale pour sa foi et qui attirent la colère divine. Cependant, prophète de la fidélité du Seigneur, il annonce qu’un « reste » subsistera, et qu’un jour le Messie régnera dans la paix et dans la justice sur un Israël transformé qui rassemblera autour de lui toutes les nations.
Vers la fin de sa vie, sous Ézékias, Isaïe voit grandir la menace assyrienne : Jérusalem est assiégée ; mais le jour de la colère de Dieu n’est pas encore venu, et Dieu, cette fois encore, sauve son peuple (voir 2 Rois 19 Õ 119).
L’admiration universelle pour le grand prophète du VIIIe siècle amena les Juifs (beaucoup moins préoccupés que nous de garder intact le texte des grands auteurs) à mettre sous son nom et sous son patronage un grand nombre d’oracles ou de poèmes écrits bien après lui.
On en trouve quelques-uns dispersés au long du livre, par exemple ceux de l’« Apocalypse d’Isaïe » (ch. 24 à 26) et ceux du chapitre 35, qui décrivent un monde de bonheur, où Dieu libérera les siens de toute oppression et les introduira dans la joie définitive. D’autres oracles ajoutés occupent les chapitres 40 à 66, qu’on appelle souvent le « deuxième Isaïe » (40 à 55) et le « troisième Isaïe » (56 à 66).
Dans le « deuxième Isaïe » ou « livre de la Consolation d’Israël », un auteur inconnu, vivant à la fin de l’exil, médite sur la victoire de Cyrus, roi de Perse, qui est en train d’anéantir l’empire babylonien. Sans le savoir, le conquérant est l’instrument de la puissance du Seigneur et de son amour pour Israël : le Dieu du monde entier a choisi un peuple et reste fidèle à son Alliance ; le « Saint d’Israël » rachète son peuple esclave et lui rend la liberté ; il prépare, pour le ramener sur la terre qu’il lui a jadis donnée, un nouvel exode plus beau que celui du temps de Moïse ; une ère de bonheur va commencer.
du site:
MESSAGE DE SA SAINTETÉ
BENOÎT XVI
POUR LA CÉLÉBRATION DE LA
JOURNÉE MONDIALE DE LA PAIX
1er JANVIER 2008
FAMILLE HUMAINE, COMMUNAUTÉ DE PAIX
1. AU COMMENCEMENT d’une nouvelle année, je désire faire parvenir mes vœux fervents de paix, ainsi qu’un chaleureux message d’espérance, aux hommes et aux femmes du monde entier. Je le fais en proposant à la réflexion commune le thème par lequel j’ai ouvert ce message et qui me tient particulièrement à cœur: Famille humaine, communauté de paix
. De fait, la première forme de communion entre des personnes est celle que l’amour suscite entre un homme et une femme décidés à s’unir de façon stable pour construire ensemble une nouvelle famille. Mais les peuples de la terre sont aussi appelés à instaurer entre eux des relations de solidarité et de collaboration, comme il revient aux membres de l’unique famille humaine: « Tous les peuples — a déclaré le Concile Vatican II — forment ensemble une seule communauté, ont une seule origine, puisque Dieu a fait habiter tout le genre humain sur toute la surface de la terre (cf. Ac 17, 26), et ont une seule fin dernière, qui est Dieu ».(1)
Famille, société et paix
2. La famille naturelle, en tant que profonde communion de vie et d’amour, fondée sur le mariage entre un homme et une femme,(2) constitue « le lieu premier d’‘humanisation’ de la personne et de la société »,(3) le « berceau de la vie et de l’amour ».(4) Aussi, est-ce avec raison que la famille est qualifiée de première société naturelle, « une institution divine qui constitue le fondement de la vie des personnes, comme le prototype de tout ordre social ».(5)
3. En effet, dans une saine vie familiale, on fait l’expérience de certaines composantes fondamentales de la paix: la justice et l’amour entre frères et sœurs, la fonction d’autorité manifestée par les parents, le service affectueux envers les membres les plus faibles parce que petits, malades ou âgés, l’aide mutuelle devant les nécessités de la vie, la disponibilité à accueillir l’autre et, si nécessaire, à lui pardonner. C’est pourquoi, la famille est la première et irremplaçable éducatrice à la paix
. Il n’est donc pas étonnant que la violence, si elle est perpétrée en famille, soit perçue comme particulièrement intolérable. Par conséquent, quand on affirme que la famille est « la cellule première et vitale de la société »,(6) on dit quelque chose d’essentiel. La famille est aussi un fondement de la société pour la raison suivante: parce qu’elle permet de faire des expériences déterminantes de paix. Il en découle que la communauté humaine ne peut se passer du service que la famille remplit. Où donc l’être humain en formation pourrait-il apprendre à goûter la « saveur » authentique de la paix mieux que dans le « nid » originel que la nature lui prépare? Le lexique familial est un lexique de paix; c’est là qu’il est nécessaire de toujours puiser pour ne pas perdre l’usage du vocabulaire de la paix. Dans l’inflation des langages, la société ne peut pas perdre la référence à cette « grammaire » que tout enfant apprend des gestes et des regards de sa mère et de son père, avant même que de l’apprendre de leurs paroles. 4. Puisqu’elle a le devoir d’
éduquer ses membres, la famille est détentrice de droits spécifiques. La Déclaration universelle des droits de l’homme elle-même, qui constitue un acquis de civilisation juridique de valeur vraiment universelle, affirme que « la famille est l’élément naturel et fondamental de la société et a droit à la protection de la société et de l’État ».(7) Pour sa part, le Saint-Siège a voulu reconnaître une dignité juridique spéciale à la famille en publiant la Charte des droits de la famille. Dans le Préambule on lit: « Les droits de la personne, bien qu’exprimés en tant que droits de l’individu, ont une dimension foncièrement sociale qui trouve dans la famille son expression innée et vitale ».(8) Les droits énoncés dans la Charte sont une expression et une explicitation de la loi naturelle, inscrite dans le cœur de l’être humain et manifestée à lui par la raison. La négation ou même la restriction des droits de la famille, obscurcissant la vérité sur l’homme, menacent les fondements de la paix eux-mêmes.
5. Par conséquent, celui qui, même inconsciemment, entrave l’institution familiale rend fragile la paix dans la communauté tout entière, nationale et internationale, parce qu’il affaiblit ce qui, de fait, est la principale «agence» de paix
. C’est là un point qui mérite une réflexion particulière: tout ce qui contribue à affaiblir la famille fondée sur le mariage d’un homme et d’une femme, ce qui directement ou indirectement freine sa disponibilité à accueillir de manière responsable une nouvelle vie, ce qui entrave son droit à être la première responsable de l’éducation des enfants, constitue un obstacle objectif sur le chemin de la paix. La famille a besoin de logement, de travail et d’une juste reconnaissance de l’activité domestique des parents, de l’école pour les enfants, de l’assistance médicale de base pour tous. Quand la société et la politique ne s’engagent pas à aider la famille dans ces domaines, elles se privent d’une ressource essentielle au service de la paix. En particulier, les moyens de communication sociale, par les potentialités éducatives dont ils disposent, ont une responsabilité spéciale pour promouvoir le respect de la famille, pour illustrer ses attentes et ses droits, pour mettre en évidence sa beauté.
L’humanité est une grande famille
6. Pour vivre en paix, la communauté sociale est aussi appelée à s’inspirer des valeurs sur lesquelles se fonde la communauté familiale. Cela vaut pour les communautés locales comme pour les communautés nationales; cela vaut plus encore pour la communauté des peuples elle-même, pour la famille humaine qui vit dans la maison commune qu’est la terre
. Dans cette perspective cependant, on ne peut oublier que la famille naît du « oui » responsable et définitif d’un homme et d’une femme, et qu’elle vit du « oui » conscient des enfants qui viennent peu à peu en faire partie. Pour prospérer, la communauté familiale a besoin de l’accord généreux de tous ses membres. Il est nécessaire que cette conscience devienne aussi une conviction partagée par ceux qui sont appelés à former la commune famille humaine. Il faut savoir dire son propre « oui » à la vocation que Dieu a inscrite dans notre nature elle-même. Nous ne vivons pas les uns à côté des autres par hasard; nous parcourons tous un même chemin comme hommes et donc comme frères et sœurs. Aussi est-il essentiel que chacun s’engage à vivre sa propre existence dans une attitude de responsabilité devant Dieu, reconnaissant en Lui la source originaire de sa propre existence comme de celle d’autrui. C’est en remontant à ce Principe suprême que peut être perçue la valeur inconditionnelle de tout être humain, et que peuvent être ainsi posées les conditions pour l’édification d’une humanité pacifiée. Sans ce Fondement transcendant, la société est seulement un conglomérat de voisins, non une communauté de frères et de sœurs, appelés à former une grande famille.
Famille, communauté humaine et environnement
7. La famille a besoin d’une maison, d’un milieu à sa mesure où puissent se tisser des relations entre ses membres. S’agissant de la famille humaine, cette maison c’est la terre, le milieu que Dieu Créateur nous a donné pour que nous y habitions de manière créative et responsable. Nous devons avoir soin de l’environnement: il a été confié à l’homme pour qu’il le garde et le protège dans une liberté responsable, en ayant toujours en vue, comme critère d’appréciation, le bien de tous. L’être humain a évidemment une primauté de valeur sur toute la création. Respecter l’environnement ne veut pas dire que l’on considère la nature matérielle ou animale comme plus importante que l’homme. Cela veut plutôt dire que l’individu peut la considérer de manière égoïste comme étant à l’entière disposition de ses propres intérêts, car les générations à venir ont aussi le droit de tirer des bénéfices de la création, mettant en œuvre, ce faisant, la même liberté responsable que nous revendiquons pour nous- mêmes. Il ne faut pas non plus que les pauvres soient oubliés, eux qui, en bien des cas, sont exclus de la destination universelle des biens de la création. De nos jours, l’humanité s’inquiète pour l’avenir de l’équilibre écologique. À cet égard, il convient que les évaluations se fassent avec prudence, dans un dialogue entre experts et sages, sans précipitations idéologiques vers des conclusions hâtives et surtout en recherchant ensemble un modèle de développement durable qui garantisse le bien-être de tous dans le respect des équilibres écologiques. Si la protection de l’environnement a des coûts, il faut qu’ils soient répartis de manière juste, en tenant compte des différences de développement des divers pays et de la solidarité avec les générations futures. Agir avec prudence ne signifie pas ne pas prendre en main ses responsabilités et renvoyer à plus tard les décisions; cela veut plutôt dire s’engager à prendre ensemble ces décisions, non sans avoir au préalable examiné, de manière responsable, la voie à emprunter, dans le but de renforcer l’alliance entre l’être humain et l’environnement, qui doit être le miroir de l’amour créateur de Dieu, de qui nous venons et vers qui nous allons.
8. Il est fondamental à cet égard de « penser » la terre comme « notre maison commune » et, pour qu’elle soit au service de tous, d’opter, quand il s’agit de la gérer, pour la voie du dialogue plutôt que pour celle des choix unilatéraux. Si cela est nécessaire, on peut accroître les lieux institutionnels au niveau international, pour mener à bien, de manière concertée, le gouvernement de cette « maison » qui est nôtre; toutefois, il importe d’abord de faire mûrir dans les consciences la conviction qu’il nous faut collaborer ensemble de manière responsable. Les problèmes qui se profilent à l’horizon sont complexes et urgents. Pour affronter cette situation avec efficacité, il convient d’agir de manière concertée. Il est un domaine où il serait en particulier nécessaire d’intensifier le dialogue entre les nations, c’est celui de la gestion des ressources énergétiques de la planète
. À cet égard, les pays technologiquement avancés sont confrontés à une double urgence: il faut, d’une part, qu’ils revoient leurs habitudes exagérées en matière de consommation, liées au modèle actuel de développement et que, d’autre part, ils pourvoient aux investissements adaptés en vue de la diversification des sources d’énergie et de l’amélioration de son utilisation. Les pays émergents ont de grands besoins énergétiques, mais il arrive que ces besoins soient satisfaits au détriment des pays pauvres qui, à cause de l’insuffisance de leurs infrastructures même sur le plan technologique, sont obligés de vendre à bas prix les ressources énergétiques dont ils disposent. Parfois, leur liberté politique elle-même est mise en cause par des formes de protectorat ou tout au moins de conditionnement qui apparaissent clairement humiliantes.
Famille, communauté humaine et économie
9. Une condition essentielle de la paix dans chaque famille réside dans le fait que cette dernière s’appuie sur le fondement solide de valeurs spirituelles et éthiques communes. Mais il faut aussi ajouter que la famille fait une authentique expérience de paix quand chacun de ses membres est assuré d’avoir le nécessaire et quand le patrimoine familial — fruit du travail de certains, de l’épargne d’autres et de l’active collaboration de tous — est bien géré, dans la solidarité, sans excès ni gaspillage. Pour qu’il y ait la paix dans la famille, il faut donc que, d’une part, il y ait une ouverture à un patrimoine transcendant de valeurs et que, d’autre part — et cela n’est pas moins important —, il y ait en même temps une bonne gestion tant des biens matériels que des relations entre les personnes. Négliger ces aspects a pour conséquence que la confiance réciproque est compromise en raison des incertitudes qui menacent l’avenir du noyau familial.
10. On peut appliquer ces réflexions à l’autre grande famille qu’est l’humanité dans son ensemble. Alors qu’elle connaît aujourd’hui une unité plus grande du fait de la mondialisation, la famille humaine a, elle aussi, besoin, en plus du fondement de valeurs communes, d’une économie qui puisse répondre vraiment aux exigences d’un bien commun de dimension planétaire. À cet égard, la référence à la famille naturelle se révèle aussi particulièrement significative. Il faut promouvoir des relations justes et sincères entre les individus et entre les peuples, afin que, sur un plan d’égalité et de justice, tous puissent être en mesure de collaborer. En même temps, il faut que l’on mette tout en œuvre pour assurer une sage utilisation des ressources
et une distribution équitable des richesses. En particulier, les aides données aux pays pauvres doivent répondre à des critères d’une saine logique économique, en évitant les gaspillages qui, finalement, conduisent surtout au maintien d’appareils bureaucratiques coûteux. Il convient encore de ne pas perdre de vue l’exigence morale, faisant en sorte que l’organisation économique ne résulte pas seulement des lois rigoureuses du gain immédiat, qui peuvent s’avérer inhumaines.
Famille, communauté humaine et loi morale
11. Une famille vit en paix si tous ceux qui la composent se plient à une norme commune: cela permet de contrecarrer l’individualisme égoïste et de créer des liens entre chacun de ses membres, favorisant ainsi leur coexistence harmonieuse et leur collaboration dans un but commun. En soi évident, ce critère vaut aussi pour les communautés plus larges: allant du niveau local, national, jusqu’à la communauté internationale elle-même. Pour qu’il y ait la paix, il faut une loi commune, qui permette à la liberté d’être vraiment elle-même, et non pas un arbitraire aveugle, et qui protège le faible des abus du plus fort. Dans la famille des peuples, on observe de nombreux comportements arbitraires, que ce soit à l’intérieur des États ou dans les relations mutuelles entre les États. Il existe en outre bien des situations où le faible est obligé de s’incliner non pas devant les exigences de la justice mais devant la seule force de celui qui a plus de moyens que lui. Répétons-le: la force doit toujours être disciplinée par la loi et cela doit se vérifier aussi dans les relations entre États souverains.
12. À bien des reprises, l’Église s’est prononcée sur la nature et la fonction de la loi: la norme juridique
, qui régule les rapports entre les personnes, en disciplinant les comportements extérieurs et en prévoyant aussi des sanctions pour ceux qui transgressent ces dispositions, a comme critère la norme morale fondée sur la nature des choses. La raison humaine est en outre capable de la discerner au moins au niveau des exigences fondamentales, en remontant à la Raison créatrice de Dieu, qui est à l’origine de tout. Cette norme morale doit réguler les choix des consciences et orienter tous les comportements des êtres humains. Existe-t-il des normes juridiques pour les rapports entre les nations qui forment la famille humaine? Et, si elles existent, sont-elles efficaces? La réponse est oui, ces normes existent, mais pour qu’elles soient vraiment efficaces il faut remonter à la norme morale naturelle, fondement de la norme juridique, sinon cette dernière reste soumise à des consensus fragiles et éphémères.
13. La connaissance de la norme morale naturelle n’est pas réservée à l’homme qui rentre en lui-même et qui, face à sa destinée, s’interroge sur la logique interne des aspirations les plus profondes qu’il discerne en lui. Non sans perplexité ni incertitudes, il peut arriver à découvrir, au moins dans ses lignes essentielles, cette loi morale commune qui, au-delà des différences culturelles, permet aux êtres humains de se comprendre entre eux en ce qui concerne les aspects les plus importants du bien et du mal, du juste et de l’injuste. Il est indispensable de revenir à cette loi fondamentale et de consacrer à cette recherche le meilleur de nos énergies intellectuelles, sans se laisser décourager par les équivoques ou les sous-entendus. De fait, des valeurs enracinées dans la loi naturelle, même si c’est de manière fragmentaire et pas toujours cohérente, sont présentes dans les accords internationaux, dans les formes d’autorité universellement reconnues, dans les principes du droit humanitaire reçus dans les législations des États ou dans les statuts des Organismes internationaux. L’humanité n’est pas « sans loi ». Il est toutefois urgent de poursuivre le dialogue sur ces questions, faisant en sorte que les États parviennent dans leurs législations à une reconnaissance convergente des droits humains fondamentaux. Le progrès de la culture juridique dans le monde dépend entre autre de l’engagement visant à rendre plus effectives les normes internationales ayant un contenu profondément humain, afin d’éviter qu’elles ne se réduisent à des procédures faciles à contourner pour des motifs égoïstes ou idéologiques.
Dépassement des conflits et désarmement
14. De nos jours, l’humanité vit malheureusement de grandes divisions et de durs conflits qui jettent de sombres perspectives sur son avenir. De vastes régions de la planète connaissent des tensions croissantes, et le danger que de plus en plus de pays deviennent détenteurs de l’arme nucléaire suscite de légitimes appréhensions chez toute personne responsable. On assiste encore aujourd’hui à de nombreuses guerres civiles dans le continent africain, même si l’on y observe, pour un certain nombre de pays, des progrès dans la liberté et dans la démocratie. Le Moyen-Orient reste le théâtre de conflits et d’attentats qui ont des conséquences sur les nations et les régions limitrophes, risquant de les entraîner dans la spirale de la violence. D’une manière plus générale, on doit constater avec regret que le nombre des États qui sont pris dans la course aux armements est en augmentation: même des nations en voie de développement consacrent une part importante de leur maigre produit intérieur à l’achat d’armes. Ce funeste commerce se développe grâce à de multiples responsabilités: il y a les pays du monde industrialisé, qui tirent de gros profits de cette vente d’armes et il y a les oligarchies dominantes en de nombreux pays pauvres, qui veulent renforcer leur position par l’achat d’armes toujours plus sophistiquées. En des temps si difficiles, il est vraiment nécessaire que se mobilisent toutes les personnes de bonne volonté pour que soient trouvés des accords concrets en vue d’une démilitarisation efficace, surtout en ce qui concerne les armes nucléaires. Alors que le processus de non-prolifération nucléaire se voit ralenti, je me sens obligé d’exhorter les Autorités à reprendre avec une détermination plus ferme les négociations visant au démantèlement progressif et concerté des armes nucléaires existantes. En renouvelant cet appel, je sais que je me fais l’écho du vœu que forment tous ceux qui ont à cœur l’avenir de l’humanité.
15. Il y a pratiquement soixante ans l’Organisation des Nations unies rendait solennellement publique la Déclaration universelle des Droits de l’homme
(1948-2008). Par ce document, la famille humaine a voulu réagir aux horreurs de la Deuxième Guerre mondiale en reconnaissant son unité fondée sur l’égale dignité de tous les hommes et en mettant au centre de la convivialité humaine le respect des droits fondamentaux de tout individu et de tout peuple: ce fut là un pas décisif sur le difficile et exigeant chemin vers la concorde et la paix. Il est bon aussi de mentionner la célébration du 25e anniversaire de l’adoption par le Saint-Siège de la Charte des droits de la famille (1983-2008), ainsi que le 40e anniversaire de la célébration de la première Journée mondiale de la Paix (1968-2008). Fruit d’une intuition providentielle du Pape Paul VI, poursuivie avec une grande conviction par mon vénéré prédécesseur le Pape Jean-Paul II, la célébration de cette Journée a permis à l’Église, au fil des années, de développer, à travers les Messages publiés à cette occasion, une doctrine lumineuse en faveur de ce bien humain fondamental. À la lumière de ces célébrations significatives, j’invite tous les hommes et toutes les femmes à prendre une conscience plus claire de leur appartenance commune à l’unique famille humaine et à s’employer pour que la convivialité sur la terre soit toujours davantage le reflet de cette conviction, dont dépend l’instauration d’une paix véritable et durable. J’invite aussi les croyants à implorer Dieu inlassablement, pour qu’il accorde le grand don de la paix. Quant aux chrétiens, ils savent qu’ils peuvent se confier à l’intercession de Celle qui, étant la Mère du Fils de Dieu qui s’est fait chair pour le salut de l’humanité tout entière, est notre Mère à tous.
À tous, j’offre mes vœux d’heureuse année nouvelle!
Du Vatican, le 8 décembre 2007.
BENEDICTUS PP. XVI
du site:
http://www.zenit.org/article-16836?l=french
L’Eglise en Asie, entre « persécutions du monde » et « consolations du ciel »
Le manque de « liberté religieuse » en Asie, communiqué du « synode »
ROME, Lundi 10 d
écembre 2007 (ZENIT.org) – Les joies et les souffrances de l’Eglise en Asie, prise entre les « persécutions du monde » et les « consolations du ciel », ont fait l’objet d’un communiqué publié à l’issue de la 11e réunion du conseil spécial du secrétariat général du synode des évêques qui s’est tenu au Vatican le 20 décembre sous la présidence de Mgr Nikola Eterovic, secrétaire général. Il souligne le manque de « liberté religieuse ».
L’Eglise qui est en Asie, vit son « pèlerinage entre les persécutions du monde et les consolations du ciel », a souligné Mgr Eterovic : « La souffrance est comme un poids inévitable à porter lorsque l’on affronte la prédication apostolique, conformément à l’exemple du Seigneur ».
Manque de liberté religieuse «
Les premières victimes frappées par les persécutions sont, indique le communiqué, les minorités, dont les chrétiens qui sont souvent contraints à abandonner leurs pays d’origine, et subissent aussi des violences de groupes fondamentalistes. Le manque de liberté religieuse se manifeste sous différentes formes : limites à la communication entre évêques et entre ceux-ci et le saint-Père, évêque de Rome, impossibilité d’ériger des conférences épiscopales, difficultés à obtenir des visas pour les agents pastoraux, limitation de la construction de lieux de culte, empêchement à la présence dans la vie publique. Les catastrophes naturelles, comme l’ouragan qui a fait récemment de nombreuses victimes au Bangladesh, sont un défi pour la charité chrétienne en Asie et dans le monde ».
Floraison de vocations
Pour ce qui est des « consolations », le communiqué souligne qu’elles « découlent des tant de réalités bienfaisantes comme l’accueil fraternel des chrétiens qui ont fui pour sauver leur vie, l’augmentation des catholiques dans des régions dans lesquelles ils étaient jusqu’ici peu nombreux. La fidélité jusqu’au don de leur vie, comme ce fut le cas de quatre prêtres tués en Asie en 2006, dont le sacrifice, uni à celui d’autres chrétiens, promet une nouvelle vitalité de la vie chrétienne, le sang des martyrs étant une semence de chrétiens. On note en effet une augmentation des vocations au sacerdoce et à la vie consacrée si bien que les chrétiens d’Asie deviennent des missionnaires auprès d’autres Eglises particulières en Asie et sur d’autres continents ».
L’Eglise ouverte au dialogue«
L’Eglise, souligne la même source, continue à être ouverte au dialogue avec les grandes religions de l’Asie, en offrant une contribution notable à la tolérance et à la concorde civile, à la consolidation de l’Etat de droit, et du processus de démocratisation de la société. L’influence de l’Eglise, du fait de son activité sociale dans les écoles, dans les hôpitaux, en faveur de la promotion humaine, s’étend aussi en dehors de la communauté des chrétiens, qui sont comme le germe d’une nouvelle société fondée sur les valeurs de la paix, de la justice, de la liberté et de la charité ».
Liberté de conscience
La réunion a également évoqué les conséquences des guerres, de la course aux armements, des conflits ethniques, des répressions, de différentes « limites mises à la liberté de conscience ».
Inculturation
Enfin, le communiqué souligne que l’inculturation du christianisme dans les pays d’Asie présuppose « une bonne connaissance » des besoins pastoraux des Eglises particulières, dans « la fidélité à la Sainte Ecriture et à la Tradition de l’Eglise » ainsi qu’une « adhésion sincère au magistère ».
La prochaine et 12e réunion du conseil post-synodal se tiendra les 11 et 12 décembre 2008.
Saint Claude la Colombière (1641-1682), jésuite
Sermon prêché à Londres devant la duchesse d’York (trad. Christus, 1959 / Orval)
Le Fils de Dieu vient à notre recherche
Représentez-vous la désolation d’un pauvre berger dont la brebis s’est égarée. On n’entend dans toutes les campagnes voisines que la voix de ce malheureux qui, ayant abandonné le gros du troupeau, court dans les bois et sur les collines, passe à travers les fourrés et les buissons, en se lamentant et criant de toute sa force et ne pouvant se résoudre à rentrer qu’il n’ait retrouvé sa brebis et qu’il ne l’ait ramené à la bergerie.
Voilà ce qu’a fait le Fils de Dieu lorsque les hommes s’étaient soustraits par leur désobéissance à la conduite de leur Créateur ; il est descendu sur la terre et n’a épargné ni soins ni fatigues pour nous rétablir dans l’état duquel nous étions déchus. C’est ce qu’il fait encore tous les jours pour ceux qui s’éloignent de lui par le péché ; il les suit, pour ainsi dire, à la trace, ne cessant de les rappeler jusqu’à ce qu’il les ait remis en voie de salut. Et certes, s’il n’en usait pas de la sorte, vous savez que c’en serait fait de nous après le premier péché mortel ; il nous serait impossible d’en revenir. Il faut que ce soit lui qui fasse toutes les avances, qu’il nous présente sa grâce, qu’il nous poursuive, qu’il nous invite à avoir pitié de nous-mêmes, sans quoi nous ne songerions jamais à lui demander miséricorde…
L’ardeur avec laquelle Dieu nous poursuit est sans doute un effet d’une très grande miséricorde. Mais la douceur dont ce zèle est accompagné marque une bonté encore plus admirable. Nonobstant le désir extrême qu’il a de nous faire revenir, il n’use jamais de violence, il n’emploie pour cela que les voies de la douceur. Je ne vois nul pécheur, en toute l’histoire de l’Évangile, qui ait été invité à la pénitence autrement que par des caresses et par des bienfaits.