La performance est incontournable mais pas à n’importe quel prix (I)

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La performance est incontournable mais pas à n’importe quel prix (I)

L’Eglise et la société ensemble à la 6ème édition des entretiens de Valpré

ROME, Mercredi 10 octobre 2007 (ZENIT.org) – La compétition et la performance sont des moteurs puissants pour l’entreprise, créatrice de richesses et lieu d’intégration sociale. Mais comment développer, conquérir et gagner sans dérives ? C’est la question qui sera débattue lundi 15 octobre lors de la 6ème édition des entretiens de Valpré, à Lyon, sur le thème : « La performance… à quel prix ».

Organisés à l’initiative de la Congrégation des Augustins de l’Assomption, les entretiens de Valpré réuniront quelque 500 décideurs, cadres dirigeants et spécialistes du monde de l’entreprise autour du cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon.

Durant cette journée annuelle de réflexion, une quinzaine de tables rondes sont prévues sur des thèmes aussi divers que: « Le sport peut-il être un modèle pour l’entreprise ? », « Faut-il soumettre le personnel politique à une évaluation de ses performances », « Comment créer et maintenir un haut niveau de performance dans une entreprise », ou encore « la religion encourage-t-elle la performance ? ».

Ghislain Lafont est le président des entretiens de Valpré, au titre de ses fonctions de responsable des activités temporelles de la Congrégation des Assomptionnistes. Dans cet entretien à Zenit, il décrit le contexte de ce grande rendez-vous annuel au cœur de la France.

L’un des objectifs de Valpré est « de mettre à la portée des personnes l’esprit de la doctrine sociale de l’Eglise, à partir de témoignages de vie », explique-t-il.

Les participants sont accueillis « par une congrégation religieuse dans un lieu neutre où on les fait réfléchir sur, au fond, le mode d’emploi de l’homme et leur mode d’emploi à eux, là où ils sont », précise-t-il.

Zenit – Cela fait six ans qu’ont lieu les entretiens de Valpré à Lyon, des entretiens qui prennent de plus en plus de visibilité. Comment expliquez-vous que ces entretiens séduisent autant ?

G. Lafont – Je crois que ce qui séduit les gens c’est cette rencontre entre l’Eglise et la société, mais surtout la société vue du côté du prisme de l’entreprise ; c’est de voir le cardinal Barbarin, cardinal archevêque de Lyon, Primat des gaules, qui a 55 ans, ouvert sur le monde, et pour lequel la rencontre avec les chefs d’entreprise et les dirigeants est quelque chose d’essentiel.

Je pense que les personnes sont curieuses de voir comment le cardinal Barbarin débat, écoute, donne des points de vue vis-à-vis des chefs d’entreprise extrêmement connus, puisqu’ils ont en général une aura nationale, voire internationale, ou vis-à-vis de personnes qui ont été des représentants d’organisations syndicales très puissantes comme Nicole Nottat de la CFDT par exemple, ou des chercheurs en médecine, ou en génétique comme le professeur Axel Khan. C’est ça qui intéresse le public.

Et puis ils sont également intéressés par nos ateliers qui réunissent entre 20 et 30 personnes, avec deux animateurs chacun, qui font se rencontrer des gens qui ont besoin de raconter leurs expériences et de s’enrichir auprès des autres, dans un climat d’écoute mutuelle et de paix qui touche les gens.

Zenit : Pour leur 6eme édition, les Entretiens de Valpré ont choisi cette année de mettre l’accent sur le thème de la performance… ‘La performance à quel prix ?’ Pourquoi ce choix ?

G. Lafont – L’année dernière, on avait choisi comme thème : « Parler vrai, un impossible défi ». Nous étions alors en pleine campagne électorale et avions tous été assez perturbés par un manque de simplicité, de vérité, d’un certain nombre de candidats. Et lorsque nous avons commencé à nous réunir, nous sommes très vite tombés sur cette notion de performance. C’était une époque de tensions chez Renault, d’un certain nombre de conflits, la mondialisation, l’importance prise par l’industrie en Chine, en Inde, le fait que les industries européennes étaient sous pression etc. On est très vite arrivé à se dire : Mais au fond, tout ça pourquoi ? Pourquoi être performant ?
La performance est indispensable, incontournable. Une entreprise qui n’est pas performante perd des parts de marché, perd de la rentabilité et elle en arrivera à mettre la clef sous la porte à plus ou moins longue échéance. Mais si cette performance, rien que pour la performance, arrive à détruire des gens, à détruire des équipes et à faire que les personnes soient déprimées ou se trouvent dans des états de stress important, ce n’est plus possible. Donc, jusqu’où faut-il aller ?

Zenit : Et on le voit en ce moment avec certains scandales…

G. Lafont – Oui, par exemple avec le scandale de l’EADF, ce délit d’initié organisé par une vingtaine ou une trentaine de cadres dirigeants qui ont su avant tout le monde qu’Airbus aurait eu des difficultés et qui ont vendu leurs titres, sachant très bien qu’ils le faisaient parce que leurs titres allaient chuter. Et puis il y a aussi le fameux plan de réduction d’effectifs qui a été lancé par Louis Gallois. Alors, nous nous disons : la performance c’est très bien, mais à quel prix, quand on voit où on en est aujourd’hui. C’est exactement au cœur du débat.

Zenit : Est-ce que vous faites une distinction entre la « performance » et la « compétition » ? Et est-ce que performance et compétitivité peuvent aller de pair de façon positive ?

G. Lafont – Oui, je pense que la performance est une performance financière et économique, ce qui est indispensable pour l’aspect de la rentabilité et le fait de reconstituer et augmenter des fonds propres pour faire face à un développement, c’est-à-dire pour assurer la pérennité de l’entreprise, son développement et donc l’emploi. En revanche, pour moi, la compétition c’est quelque chose de beaucoup plus positif que la performance. La compétition c’est vraiment être le meilleur ou un des meilleurs, un des leaders dans son segment de marché. Et je pense par exemple que lorsque M. Thierry de la Tour d’Artaise, [Président-directeur général de SEB, ndlr] va nous expliquer qu’il a racheté quasiment une entreprise de la même taille que SEB, en Chine, on est vraiment dans une logique de compétition qui est de tirer le produit par le haut. Et il y a d’autres exemples.

Quant à savoir s’il peut y avoir synthèse entre performance et compétitivité, il y a un exemple qui me vient à l’esprit et qui est celui du groupe Michelin : Michelin est le premier pneumaticien mondial. C’est à la fois une des meilleures rentabilités sur le plan des performances financières, technologiques, mais ils ont chez Michelin toute cette dynamique aussi de la compétition pour être les meilleurs, autrement dit tirer les gens par le haut, tirer le centre de recherche par le haut. Pour moi, cela est remarquable.

Donc la performance pour la performance, sans la compétition positive qui fait que toutes ces personnes se sentent dans une culture d’entreprise et qu’elles partagent des vraies valeurs, cela n’a pas de sens. C’est d’ailleurs ce que l’on va essayer de traiter dans ces entretiens. La performance, si c’est pour que l’homme se retrouve sur le bas-côté, cela ne vaut pas le coup.

Zenit : Les entretiens de Valpré sont rythmés par une douzaine d’ateliers dont un est centré sur « la religion encourage-t-elle la performance » ? En quoi la religion est-elle directement concernée ?

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