Archive pour septembre, 2007

Pages Orthodoxes: Dieu est lumière

12 septembre, 2007

du site:

http://www.pagesorthodoxes.net/pages-choisies/struve-lumiere.htm

Pages Orthodoxes – Pages choisis sur la Vie spèirituelle

Deisis: l’intercession de l’église

Dieu est lumière

par Père Pierre Struve

« Dieu est Lumière et ceux qu’il rend dignes de le voir le voient connue Lumière… Ceux qui n’ont pas vu cette Lumière n’ont pas vu Dieu, car Dieu est Lumière… »

Ce texte, tiré d’un sermon de saint Syméon le Nouveau Théologien, nous introduit au cœur même de la mystique de la Lumière qui constitue, surtout dans l’a mesure où elle est profondément liée à l’hésychasme, l’un des plus remarquables sommets, sinon le sommet même, de la spiritualité orthodoxe.

Spiritualité et théologie sont inséparables pour l’Église orthodoxe et la mystique de la Lumière divine ne fait qu’exprimer au niveau de l’homme l’accent profondément eschatologique d’une théologie centrée sur la transfiguration du monde et la déification de l’homme. Très peu connue, la spiritualité de la Lumière a été souvent mal comprise et mal interprétée en Occident. L’un des buts de ce court articule est d’essayer de dissiper certains malentendus et de montrer en particulier que cette mystique de la Lumière divine est profondément enracinée dans la révélation scripturaire.

Nous commencerons notre étude par un bref survol de l’Ancien Testament. Dans l’Ancien Testament, Yahvé se manifeste le plus souvent sous l’aspect du feu, comme, par exemple, dans l’alliance avec Abraham, dans l’épisode du Buisson Ardent, dans la vision de Moïse sur le Mont Sinaï ou encore dans l’ascension d’Élie. Le fait que le mot feu soit utilisé de préférence au mot lumière souligne le caractère sévère et souvent terrifiant de la vision de Dieu (dans l’Ancien Testament), très différente de la vision d’illumination que nous découvrirons dans le Nouveau Testament. Yahvé n’est d’ailleurs jamais dit être feu ou lumière ; ces deux éléments l’accompagnent, le manifestent, mais ne s’identifient pas avec lui. Dans la théophanie du Mont Sinaï, la vision du feu est la vision de la gloire de Yahvé : « Cette gloire de Yahvé revêtait, aux yeux des enfants d’1srail, l’aspect d’une flamme dévorante couvrant la montagne » (Ex 19,8). Nous retrouvons le même thème dans la vision d’Ézéchiel : « C’était quelque chose ayant l’aspect de la gloire de Yahvé » (Éz 1,27). Le Psaume 103 montre Dieu « revêtu de faste et d’éclat, drapé de lumière comme d’un manteau » (Ps 103,1-2). Pareillement le prophète Habacuc décrit la lumière comme l’éclat de Yahvé et non Yahvé lui-même : « Son éclat est pareil au jour, des rayons jaillissent de ses mains » (Ha 3-4).

Ainsi, pour l’ensemble de l’Ancien Testament, la vision de feu ou de lumière n’est jamais une illumination ou une vision d’union divine, mais la manifestation d’un Dieu qui reste extérieur et incommunicable à l’homme. Il faut cependant mettre à part le Livre de la Sagesse, dans lequel la Sagesse personnifiée est comparée à la lumière de Dieu : « Elle est un reflet de la lumière éternelle… comparée à la lumière, elle l’emporte car la lumière fait place à la nuit… » (Sa 7,26 et 30). Ces versets du dernier auteur inspiré de l’Ancien Testament annoncent déjà la théologie de la lumière de l’Évangile.

Dans le Nouveau Testament, la lumière n’est plus un attribut ou une manifestation de Dieu, elle est Dieu lui-même : « Le Verbe était la lumière véritable qui éclaire tout homme » (Jn 1,9).

Dans l’épisode de la guérison de l’aveugle-né, Jésus dit de lui-même qu’il est la « Lumière du Monde » (Jn 9,5). Dans la première épître de saint Jean, ce n’est même pas uniquement le Christ, mais Dieu qui est dit être Lumière (1 Jn 1,5). Et cette affirmation, qui pourrait paraître purement spéculative, se concrétise, se révèle, s’incarne pour ainsi dire dans la Transfiguration du Christ, qui est l’alpha et l’oméga de toute l’expérience spirituelle de la Lumière : « Et il fut transfiguré devant eux : son visage resplendit comme le soleil et ses vêtements devinrent éblouissants comme la lumière » (Mt 17,2). Cette vision du Christ en gloire ne fut pas une vision spirituelle ou intellectuelle niais une contemplation par la totalité de l’être. Saint Pierre y insiste lorsqu’il écrit dans la deuxième épître que les apôtres ont été les « témoins oculaires de sa majesté » (2 P 1,16). La Transfiguration, pour la tradition orthodoxe, apparaît comme la fête eschatologique par excellence, comme la préfiguration et l’annonce du Royaume qui commence déjà ici-bas, de ce Royaume qui sera l’apothéose de la Lumière divine : « De nuit, il n’y en aura plus ; ils se passeront de lampe et de soleil pour s’éclairer, car le Seigneur Dieu répandra sur eux sa Lumière et ils régneront pour les siècles des siècles » (Ap 22,5).

Si le « jour sans soir », la Lumière éternelle ne nous seront donnés que dans l’unitotalité du Royaume, lorsque Dieu sera tout en tous, son avant-goût, l’expérience momentanée d la vision de lumière peut être accordée par le Seigneur dès cette vie, tout comme elle a été accordée à Pierre, Jacques et Jean sur le Mont Thabor et à Paul sur le chemin de Damas « quand soudain une lumière venue du ciel l’enveloppa de sa clarté » (Actes 9,3). Saint Paul dans ses Épîtres développe le thème de l’appel à l’illumination par le Christ de chaque chrétien : « Jadis vous étiez ténèbres, mais à présent vous êtes lumière dans le Seigneur, conduisez-vous en enfants de lumière » (Ép 5,9).

Ainsi pour le Nouveau Testament, non seulement Dieu est Lumière, mais chaque homme qui s’engage dans le combat de la foi, qui passe par l’illumination du baptême, est appelé à être lumière, non pas lumière autonome et tirant sa source de clarté de lui-même mais « lumière du Seigneur », illuminé par la gloire ineffable de celui qui, seul, est la Lumière véritable.
La spiritualité orthodoxe est essentiellement eschatologique, elle est centrée sur la Résurrection et la Transfiguration et, pour elle, le Christ est avant tout le Roi de gloire, le Triomphateur de la mort, le Seigneur Ressuscité. On comprend que dans une telle perspective, le thème de la Lumière ait été toujours un thème central.

Par contre, ce thème a toujours été assez étranger à la théologie et à la piété occidentales, beaucoup plus centrées sur le mystère de la Croix et de la Passion de Notre Seigneur et pour lesquelles le Christ est avant tout le Crucifié et le Serviteur souffrant. C’est dans une telle vision que prend racines la mystique des stigmates, qui reste totalement inconnue dans le monde orthodoxe.

Il faut certes se méfier beaucoup des schémas traditionnels et des généralisations hâtives – et une confrontation attentive de saint Jean de la Croix et des mystiques orthodoxes serait du plus haut intérêt. Il est incontestable que la « Nuit Mystique » du saint espagnol débouche sur l’aube et sur l’illumination ; seulement, cette illumination est de nature surtout spirituelle, elle est illumination de l’âme et non de l’homme tout entier : « Cette transformation’ n’est autre chose que l’illumination de l’entendement par la Lumière surnaturelle de telle sorte qu’il est uni au divin et devient divin… Il en est de même de la volonté, de la mémoire des affections » et de. tendances. Toutes ces transfigurations… Dieu les accomplit et les réalise dans l’âme par l’intermédiaire de cette Nuit Obscure : il éclaire l’âme et l’embrase divinement du désir de posséder Dieu seul et rien de plus ». À aucun moment, saint Jean ne parle de la participation du corps à cette vision de gloire ; à aucun moment, il ne dit, comme saint Pierre, être « le témoin oculaire » de la Majesté de Dieu.

Les mystiques orthodoxes, eux, se situeront dans la perspective de la Transfiguration telle qu’elle a été vécue par les apôtres, pour qui la vision lumineuse sera toujours celle de la Lumière incréée du Thabor, vécue par l’homme dans son intégrité et non seulement par son âme ou son intellect. Trois grands saints dominent cette spiritualité de la lumière : saint Syméon le Nouveau Théologien à la fin du Xe siècle, saint Grégoire Palamas au XIVe siècle et saint Séraphin de Sarov au début du XIXe siècle.

Saint Syméon le Nouveau Théologien est l’un des rares mystiques orthodoxes qui parlent de leur expérience personnelle : « Souvent je voyais la Lumière, parfois elle m’apparaissait à l’intérieur de moi-même, lorsque mon âme possédait la paix et le silence ou bien elle ne paraissait qu’au loin ou même se cachait tout à fait. Mais dès que je témoignais d’un complet détachement de tout, d’une absolue humilité et obéissance, la Lumière réapparaissait à nouveau » (Serm 90).

La vision de la Lumière divine est antinomique par nature, car elle est vision de l’invisible et seul le vocabulaire apophatique, c’est-à-dire procédant par négation, peut prétendre en donner témoignage : « C’est un feu vraiment divin, incréé et invisible, inextinguible et immortel, incompréhensible, au-delà de tout être créé… »
Le don de Lumière n’est accordé à l’homme qu’après un long chemin de purification et de repentir : « Le repentir est la porte qui conduit de la région des ténèbres à celle de la lumière » (Serm. 79).

La vision de la Lumière divine réalise une véritable union entre Dieu et l’homme dans sa totalité, corps, âme et esprit : « Dieu est Lumière et il communique de sa clarté à ceux qui s’unissent à lui dans la mesure de leur purification. Ô miracle ! L’homme s’unit à Dieu spirituellement et corporellement… Dieu entre en union avec l’homme tout entier » (Serm. 25).

Nous sommes là au cœur du mystère de la déification de l’homme, si central pour la théologie et la spiritualité orthodoxes. Quand saint Pierre parle de la participation à la nature divine (2 P 1,4), il exprime en termes scripturaires cette doctrine de la déification qui, dans la pensée patristique, sera résumée par la phrase de saint Athanase : « Dieu est devenu homme afin que l’homme devienne Dieu ». La véritable nature de l’homme, créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, est non plus la nature humaine déchue, mais sa nature déifiée. L’homme est appelé à être Dieu non par essence mais par grâce et, pour les théologiens orthodoxes, la nature divine à laquelle l’homme est appelé à participer ne sera jamais une surnature, un don surajouté, mais Dieu lui-même, dans la communion duquel s’accomplit la véritable nature de homme, nature qui s’est obscurcie dans la chute et qui ne redevient elle-même que dans la Lumière de la Sainte Trinité.

Déification et transfiguration sont intimement liées et verront leur accomplissement dans le Royaume. Saint Syméon le Nouveau Théologien le décrit avec un grand lyrisme dans son 27e Sermon : « La grâce de ton Esprit Très Saint brillera comme un astre sur les justes et, au milieu d’eux, tu resplendiras, toi, ô Soleil inaccessible. Alors tous ils seront éclairés dans la mesure de leur foi et de leurs œuvres, de leur espérance et de leur charité, dans la mesure de la purification et de l’illumination par ton Esprit, ô Dieu unique d’infinie mansuétude ».
Saint Grégoire Palamas fut au XIVe siècle le grand docteur de la théologie de la Lumière incréée. Attaqué par un moine calabrais du nom de Barlaam qui l’accusait de messalianisme, c’est-à-dire de prétendre voir l’essence divine avec des yeux corporels, saint Grégaire rédigea plusieurs traités et fut amené à expliciter la distinction de l’essence et des énergies en Dieu. L’essence divine reste totalement incommunicable et Dieu s’unit à l’homme dans ses énergies dans lesquelles il est totalement présent : « L’illumination et la grâce divine et déifiante n’est pas l’essence, mais l’énergie de Dieu ». Dans le Traité contre Akindynos, Palamas écrit : « Dieu est appelé Lumière non selon son essence mais selon son énergie ». Une série de conciles échelonnés de 1340 à 1360 donnèrent raison à saint Grégoire et officialisèrent la doctrine de la distinction de l’essence et des énergies divines.

Saint Grégoire distingue trois types de lumière : la lumière sensible, la lumière intellectuelle ou intelligible et la Lumière divine qui est au-delà tant du sensible que de l’intelligible, tout en étant perçue aussi bien par les sens que par l’intelligence. Le Tome hagioritique souligne le caractère mystérieux du mode de la vision de la Lumière divine : «Comment ? Cela n’est connu que de Dieu et de ceux qui ont eu l’expérience de sa grâce ».

Pour Palamas, la Lumière divine est la Lumière incréée du Thabor : « La Lumière divine est non matérielle ; il n’y avait rien de sensible dans la Lumière qui illumina les apôtres sur le Mont Thabor » (Cont. Akind.) Dans la 35e Homélie, il écrit : « La lumière de la Transfiguration du Seigneur n’a pas commencé et n’a pas pris fin ; elle reste circonscrite dans le temps et l’espace et imperceptible pour les sens bien qu’elle fût contemplée… mais par une transmutation des sens, les disciples du Seigneur passèrent de la chair à l’Esprit ».

Ainsi pour Palamas la Lumière divine se révèle à l’homme dans sa totalité mais, au moment de la vision, il y a « transmutation des sens », c’est-à-dire spiritualisation de la chair dans le sens des paroles de saint Paul : « On sème un corps psychique, il ressuscite un corps spirituel , (1 Co 15, 44). C’est donc uniquement dans la mesure ou il y a une transfiguration pneumatique du corps que la vision de la Lumière devient possible ; on ne peut avoir la révélation de la Transfiguration que si l’on y participe soi-même, cette participation tant toujours ineffable et totalement incompréhensible à la raison humaine. Chez Grégoire Palamas tout comme chez saint Syméon le Nouveau Théologien, la vision de la Lumière incréée est intimement liée à la spiritualité hésychaste, dont les racines se perdent dans le IVe siècle, et qui constitue un des courants les plus remarquables de la spiritualité orthodoxe. L’hésychasme est centré sur la prière de Jésus répétée inlassablement. L’invocation du Nom de Jésus devient une oraison permanente qui imprègne l’homme tout entier et le fait participer corps, âme et esprit, à la vie en Christ selon la parole de saint Paul : « Ce n’est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi » (Ga 2,20). Seuls ceux qui demeurent dans cette prière perpétuelle peuvent espérer recevoir la grâce de la vision déifiante. Cependant, et c’est un point sur lequel saint Grégoire insiste, tous sont appelés à y participer : « Cette expérience divine est donnée à chacun selon sa mesure et peut-être plus ou moins grande selon la dignité de ceux qui l’éprouvent » (Hom. 35).

C’est à travers 1a tradition hésychaste que nous allons rejoindre saint Séraphin de Sarov, que près de cinq siècles séparent de saint Grégoire Palamas. Contrairement à ce dernier, saint Séraphin ne fut pas un théologien au sens scientifique du terme. Prêtre et moine, il passa toute sa vie en prière, soit en ermite dans la forêt, soit dans un monastère, le plus souvent seul dans sa cellule. Ce n’est que dans les huit dernières années qu’il accepta d’ouvrir sa cellule aux innombrables pèlerins attirés par le renommée de sa sainteté et qu’il devint leur guide spirituel. Il enseignait que le but de toute vie était « l’acquisition du Saint Esprit » et que cette vie de l’Esprit ne pouvait être obtenue que par la prière perpétuelle et la vie sacramentelle. L’enseignement de saint Séraphim nous est connu surtout par les récits de ses disciples. Le plus célèbre est constitué par les notes de Motovilov, dans lesquelles saint Séraphim apparaît comme l’un des plus grands mystiques de la Lumière.

À la question de Motovilov sur la nature de la vie dans l’Esprit, saint Séraphin répond : « Je vous ai déjà dit, fit le Père Séraphim, que c’est bien simple… Mon ami, nous sommes tous deux en ce moment dans l’Esprit de Dieu… Pourquoi ne voulez-vous pas me regarder ? – Je ne peux pas vous regarder, mon Père, répondis-je, vos yeux. projettent des éclairs, votre visage est devenu plus éblouissant que le soleil et j’ai mal aux yeux en vous regardant. – Ne craignez rien, dit-il, en ce moment, vous êtes devenu aussi clair que moi. Vous êtes aussi à présent dans la plénitude de l’Esprit de Dieu ; autrement, vous ne pourriez me voir tel que vous me voyez… Encouragé par ces paroles, je regardais et je fus saisi d’une frayeur pieuse. Imaginez-vous, au milieu de soleil, dans l’éclat de ses rayons éblouissants de midi, la face de l’homme qui vous parle. Vous voyez le mouvement de ses lèvres, l’expression changeante de ses yeux, vous entendez sa voix, vous sentez ses mains qui vous tiennent par les épaules, mais vous ne voyez ni l’es mains ni le corps de votre interlocuteur, – rien que la lumière resplendissante qui se propage loin, à quelques toises à l’entour, éclairant par son éclat le pré couvert de neige et les flocons blancs qui ne cessent de tomber… ».

Continuant sa description, Motovilov montre que c’est tout son être, sa personne tout entière qui participe à la vision divine : il ressent une paix extraordinaire, une chaleur, bien que l’on soit en plein hiver, un parfum d’une qualité rare.

Ce qui différencie saint Séraphin de Sarov des autres mystiques, c’est l’insistance sur le caractère pneumatique de la lumière divine. La vie en Christ par la prière perpétuelle conduit à l’illumination dans l’Esprit. Saint Séraphin rejoint ici le thème scripturaire du Saint Esprit se révélant comme feu et lumière lors de sa descente sur les apôtres dans la chambre haute de Jérusalem. La Pentecôte, « accomplissement de la promesse et la réalisation de l’espérance », réalise le parachèvement de la révélation trinitaire et, de même que le Christ est Lumière, de même le Saint Esprit est « Lumière et donnant la Lumière », comme le chante un hymne des matines de Pentecôte.

Et si l’illumination ici-bas par le Christ et le Saint Esprit n’est que l’avant-goût de cette Lumière ineffable dans laquelle baignera le Royaume du Père lorsque le Fils à travers le Saint Esprit lui aura tout soumis ; elle est tout de même vision du Royaume conformément à la promesse du Seigneur : « Je vous le dis vraiment, il en est de présents ici même qui ne goûteront pas la mort avant d’avoir vu le Royaume de Dieu » (Lc, 9,27).

Paru dans le Bulletin de l’Amitié
de janvier 1966 « Regards sur l’orthodoxie ».
Reproduit dans Contacts, vol. 21 (1969).

Sandro Magister – Une leçon venue de Vienne: comment chanter la messe

12 septembre, 2007

du site:

http://chiesa.espresso.repubblica.it/articolo/166922?fr=y

Une leçon venue de Vienne: comment chanter la messe

Dans la capitale de l’Autriche, la polyphonie de Haydn et les antiennes grégoriennes de l’ancien missel ont accompagné la messe du pape, célébrée entièrement avec le « regard tourné vers Dieu ». Un modèle pour les liturgies catholiques de rite latin dans le monde entier

par Sandro Magister

ROMA, le 12 septembre 2007 Dans tout ce qua dit et fait Benoît XVI pendant ses deux voyages de début septembre, à Lorette et en Autriche, il y a deux moments qui sont tout à fait caractéristiques de son pontificat.

Ils concernent tous les deux la visibilité de lEglise, sa capacité de communiquer: à propos non pas delle-même mais des « choses den haut ».

A Lorette, au cours de la veillée du samedi 1er septembre, le pape a montré comment il entend agir pour que le monde. et en particulier le monde des jeunes, puisse le voir et lentendre.

En Autriche, Benoît XVI a fait comprendre, à travers la messe quil a célébrée à la cathédrale de Vienne le dimanche 9 septembre, comment il veut que lEglise apparaisse aux hommes au moment où elle est le plus reconnaissable: la célébration de l’eucharistie.

* * *

A Lorette, la veillée avec trois cent mille jeunes venus d’Italie et du monde entier sest déroulée en deux temps: dans laprès-midi, une phase de réflexion et de prière; dans la soirée, une phase musicale, avec des célébrités de la chanson.

Cette soirée musicale, transmise en direct par la première chaîne de la télévision d’état italienne, était conçue par Bibi Ballandi, manager dartistes célèbres et grand organisateur d’événements télévisuels. Cest lui qui, lors dune soirée semblable au cours du congrès eucharistique international de Bologne, en 1997, avait fait chanter Bob Dylan et Adriano Celentano devant Jean-Paul II, présent sur lestrade pendant toute la durée du spectacle.

Cette fois-ci, à Lorette, il y avait Claudio Baglioni, Lucio Dalla et le groupe rock « Vibrazioni ». Mais le pape n’était pas présent pendant que les chanteurs se produisaient. Il priait, dans le sanctuaire, devant la relique de la Sainte Maison de Nazareth.

Au cours de la soirée, une seule liaison télévisée a montré le pape, pendant quelques minutes. Elle la montré à genoux devant la statue de la Vierge et de lEnfant Jésus, alors quil lisait une prière avec recueillement.

De la part de Joseph Ratzinger, il fallait sy attendre. Dans un texte publié en 1998, il avait manifesté son désaccord avec ce qui s’était passé lannée précédente au congrès eucharistique de Bologne: « Bob Dylan et les autres avaient un message complètement différent de celui sur lequel le pape sengage »; cest pourquoi « on pouvait douter de lopportunité de faire intervenir ce genre de prophètes », porteurs dun message « vieilli et pauvre » si on le compare avec celui qua communiqué le pape.

En revanche, à Lorette, Benoît XVI a participé personnellement, dans laprès-midi, à la rencontre avec les jeunes, organisée par les responsables de la pastorale des jeunes à la conférence épiscopale italienne.

Mais, là encore, il a pris ses distances par rapport au scénario. Dun côté il y avait de jeunes acteurs qui récitaient tour à tour, avec une bonne technique théâtrale mais de manière un peu artificielle, les textes, souvent tirés de la Bible, quavaient choisis les organisateurs. De lautre, il y avait le pape qui écartait les textes préparés pour lui par les services de la curie et répondait aux questions des jeunes avec des mots spontanés, improvisés: ses mots à lui, indiscutablement, mais capables, justement pour cette raison, dentrer dans les cœurs. Pendant quil parlait et disait des choses profondes, importantes, touchantes, le silence et lattention de ses trois cent mille jeunes qui l’écoutaient étaient impressionnants.

En tout cas Benoît XVI ne paraissait pas isolé. Garçons et filles étaient en pleine harmonie avec lui. Ils racontaient leur vie, parfois dramatique, et lui posaient des questions. Près de lui se trouvait le missionnaire Giancarlo Bossi, libéré depuis peu après avoir été séquestré par des islamistes aux Philippines. Le père Bossi a parlé peu et simplement mais ses propos pouvaient faire comprendre à tous ce que signifie être un authentique missionnaire de lEvangile de Jésus et non un assistant social ou un activiste altermondialiste.

* * *

Autre musique à Vienne aussi, au sens propre. Par la messe quil a célébrée à la cathédrale Saint- Etienne le dimanche 9 septembre, Benoît XVI a redonné vie à une tradition musicale et liturgique interrompue depuis plusieurs décennies.

De mémoire d’homme, en effet, la dernière célébration pontificale accompagnée de l’exécution intégrale Kyrie, Gloria, Credo, Sanctus, Agnus Dei dune grand-messe polyphonique remonte à la lointaine année 1963. Cette messe avait été célébrée à Saint-Pierre et le compositeur choisi était Giovanni Pierluigi da Palestrina, chef de file de la polyphonie romaine du XVIe siècle.

Cette fois-ci, la messe était célébrée à Vienne et le compositeur était, à juste titre, l’autrichien Franz Joseph Haydn, avec sa magnifique « Mariazeller Messe » de 1782, pour choeur, soli et orchestre.

Le chant grégorien a également fait une importante réapparition au cours de la messe du pape le 9 septembre. Pendant la communion, le choeur a chanté plusieurs fois l’antienne « Vovete », propre à ce dimanche dans le missel de lancien rite, en alternance avec des versets du psaume 76 chantés eux aussi en latin: « Faites des voeux à l’Éternel, votre Dieu, et accomplissez-les! Que tous ceux qui l’environnent apportent des dons au Dieu terrible! Il abat l’orgueil des princes, Il est redoutable aux rois de la terre ».

Un critique musical aurait totalement approuvé la splendide exécution, dirigée par Markus Landerer, maître de chapelle de la cathédrale di Vienne. Mais il sagissait dune messe et pas dun concert. Et Benoît XVI a donné à ce sujet une leçon très claire, à deux moments de la journée.

Lors de l’Angélus, quelques minutes après la fin de la messe, il a commencé ainsi:

« Célébrer avec vous tous le jour du Seigneur, de manière si digne, dans la magnifique cathédrale Saint-Etienne a été pour moi, ce matin, une expérience particulièrement belle. Le rite eucharistique accompli avec le décorum nécessaire nous aide à prendre conscience de limmensité du don que Dieu nous fait dans la sainte messe. Cest vraiment ainsi que nous nous approchons lun de lautre et que nous ressentons la joie de Dieu. Je suis donc reconnaissant à tous ceux qui, par leur contribution active à la préparation et au déroulement de la liturgie ou par leur participation recueillie aux saints mystères, ont créé une atmosphère dans laquelle la présence de Dieu était vraiment perceptible ».

Et laprès-midi, au monastère de Heiligenkreutz où, chaque jour, 80 moines cisterciens célèbrent l’office divin en pur grégorien et entièrement en latin, il a déclaré:

« Dans la beauté de la liturgie, [...] là où, ensemble, nous chantons, louons, exaltons et adorons Dieu, nous faisons apparaître sur terre un petit morceau du ciel. Il nest pas vraiment téméraire de voir, dans une liturgie totalement centrée sur Dieu, dans les rites et dans les chants, une image de l’éternité. [...] Dans toute forme dengagement pour la liturgie, le critère déterminant doit toujours être le regard vers Dieu. Nous sommes devant Dieu: Il nous parle et nous lui parlons. Là où, quand on réfléchit à la liturgie, on se demande seulement comment la rendre attrayante, intéressante et belle, la partie est déjà perdue. Ou bien elle est opus Dei, oeuvre de Dieu, avec Dieu comme sujet spécifique, ou bien elle ne lest pas. Dans ce contexte, je vous le demande: célébrez la liturgie sacrée en ayant le regard tourné vers Dieu dans la communion des saints, de lEglise vivante de tous les lieux et de tous les temps, pour quelle devienne expression de la beauté et de la sublimité du Dieu ami des hommes ».

Benoît XVI a encore dit aux moines de Heiligenkreutz: « Une liturgie qui oublie de tourner son regard vers Dieu est, par là même, sur le point de disparaître ». Haydn, catholique à la spiritualité profonde, n’était pas loin de cette vision du beau dans la liturgie chrétienne quand il écrivait à la fin de chacune de ses compositions musicales: « Laus Deo », louange à Dieu.

Lorsque, dans le Credo de la « Mariazeller Messe » le soliste entonne l’ »Et incarnatus est » et que, dans le Sanctus, on chante le « Benedictus », des éclairs d’éternité jaillissent vraiment. La grande musique liturgique communique mieux que mille mots le mystère de « celui qui vient au nom du Seigneur », du Verbe qui se fait chair, du pain qui devient le corps du Christ.

La liturgie qui a inspiré à Haydn comme à dautres grands compositeurs chrétiens ces mélodies sublimes, étincelantes de joie théologique, était lancienne liturgie tridentine: tout le contraire de cette « sensation de fermé » auquel certains l’associent. Cest la liturgie que Benoît XVI a voulu préserver dans ses richesses par son motu proprio « Summorum Pontificum », du 7 juillet 2007, à côté du rite moderne quil a utilisé pour la messe de Vienne.

Largement diffusées en mondovision, les messes du pape sont un exemple pour les liturgies de lEglise latine du monde entier.

Celle qui a été célébrée à Vienne du 9 septembre a voulu l’être dune manière particulière. Et Benoît XVI l’a remarqué.

On peut regretter que certaines chaînes de télévision chargées de retransmettre cette messe aient fait disparaître ses particularités. Dans la diffusion en direct par la télévision italienne d’état, par exemple, les mélodies grégoriennes de la communion ont été traitées comme ne méritant pas d’être écoutées, et remplacées par un bavardage sans intérêt sur les prétendues « grandes questions » de lEglise et de l’Autriche.

Au Vatican, l’événement liturgique de Vienne sera suivi rapidement par le remplacement du maître des célébrations liturgiques pontificales. A monseigneur Piero Marini qui prendra la présidence du comité pontifical pour les congrès eucharistiques internationaux succèdera l’actuel maître des cérémonies de l’archidiocèse de Gênes, monseigneur Guido Marini. Il est proche de son prédécesseur par le nom, mais de Benoît XVI sur le fond.

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bonne nuit

11 septembre, 2007

bonne nuit dans image bon nuit, jour, dimanche etc. trurl_pagecontent?lp=en_it&trurl=http%3a%2f%2fwww.photosforsouls.com%2fimages%2fNature3%2fThe%2520harvest%2520is%2520truly%2520great..yellow%2520mums

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« Heureux, vous les pauvres »

11 septembre, 2007

Saint Grégoire de Nysse (vers 335-395), moine et évêque
Les Béatitudes, 1 (trad. DDB 1979, p. 33 rev)

« Heureux, vous les pauvres »

Comme presque tous les hommes sont naturellement portés à l’orgueil, le Seigneur commence les Béatitudes en écartant le mal originel de la suffisance et en conseillant d’imiter le vrai Pauvre volontaire qui est vraiment bienheureux — de manière à lui ressembler par une pauvreté volontaire, selon notre pouvoir, pour avoir part à sa béatitude, à son bonheur. « Ayez en vous les sentiments qui ont été ceux du Christ Jésus. Quoique de condition divine, il ne s’est pas prévalu de son égalité avec Dieu, mais il s’est anéanti lui-même et a pris la condition d’esclave » (Ph 2,5-7).

Qu’est-ce qu’il y a de plus misérable pour Dieu que de prendre la condition d’esclave ? Quoi de plus infime pour le Roi de l’univers que de partager notre nature humaine ? Le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs, le Juge de l’univers paie des impôts à César (1Tm 6,17;He 12,23;Mc 12,17). Le Maître de la création embrasse ce monde, entre dans une grotte, ne trouve pas de place dans une hôtellerie et prend refuge dans une étable, en compagnie d’animaux sans raison. Celui qui est pur et immaculé prend sur lui les souillures de la nature humaine, et après avoir partagé toute notre misère, il va jusqu’à faire l’expérience de la mort. Considère la démesure de sa pauvreté volontaire ! La Vie goûte la mort, le Juge est traîné devant le tribunal, le Maître de la vie de tous se soumet à un magistrat, le Roi des puissances célestes ne se soustrait pas aux mains des bourreaux. A cet exemple, dit l’apôtre Paul, se mesure son humilité (Ph 2,5-7).

aujourd’hui: Jean-Gabriel Perboyre (1802-1840) martyr, de la Congrégation de la Mission

11 septembre, 2007

aujourd'hui: Jean-Gabriel Perboyre (1802-1840) martyr, de la Congrégation de la Mission  dans images sacrée

 

Fils d’un laboureur, il est né dans le Quercy. En 1820, il entra chez les Pères Lazaristes. Après avoir été maître des novices, à Paris, rue de Sèvres, il est envoyé en Chine. Il apprend les langues locales, adopte les coutumes chinoises et s’établit au coeur du Kiang-Si, une province montagneuse interdite aux Européens. Après quatre années de prédication, il est arrêté en vertu d’une loi de l’empereur Kien-long qui interdit le christianisme. Fouetté, suspendu par les cheveux à un chevalet, brûlé au fer rouge, on lui grave sur le front : « Propagateur d’une secte abominable. » Tchouan Sie Kao. Ces tourments se prolongent plusieurs mois, lentement et avec raffinement. Sur vingt chrétiens arrêtés en même temps que lui, douze renièrent le Christ. Les bourreaux avaient reçu toute liberté : ils le chargèrent de chaînes, lui broyèrent les pieds dans un étau, lui firent boire du sang de chien, le tourmentèrent jusque dans sa pudeur la plus intime. Alors même qu’il agonisait, les membres écartelés sur une croix, ils lui donnaient encore des coups de pieds dans le ventre. Ils l’achevèrent en l’étranglant.
Jean-Gabriel Perboyre (1802-1840) martyr, de la Congrégation de la Mission Saint Jean-Gabriel PERBOYRE et sa vie sur le site Internet de l’Abbaye Saint Benoît de Port-Valais
Voir aussi 
 Saints du diocèse de Saint-Flour ,

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http://santiebeati.it/immagini/?mode=album&album=76475&dispsize=Original

Homélie de Mgr André Vingt-Trois – Messe des obsèques du cardinal Lustiger

11 septembre, 2007

du site: 

http://catholique-paris.cef.fr/vingttrois/homelies/lustiger-obseques.php

Archevêque et prêtres > L’Archevêque de Paris

Homélie de Mgr André Vingt-Trois,
Archevêque de Paris

Vendredi 10 août 2007,
Messe des obsèques du cardinal Lustiger
Messe en la cathédrale Notre-Dame de Paris

 « Rien n’est impossible à Dieu… »

Cette parole de l’ange Gabriel à Marie, rapportée par l’évangile de saint Luc que nous venons d’entendre, éclaire l’existence de chacun de ceux que Dieu appelle et qu’Il accueille dans son alliance. Elle éclaire particulièrement la vie du cardinal Jean-Marie Lustiger que nous accompagnons aujourd’hui tandis qu’il entre dans la lumière de Dieu et avant que son corps ne repose dans cette cathédrale, sa cathédrale. A travers ce que sa discrétion et sa pudeur ont laissé paraître de son histoire personnelle, nous comprenons que les enchaînements d’une vie peuvent toujours être déchiffrés de manière différente, selon la clé de lecture que l’on utilise. On peut évidemment lire l’histoire de la famille Lustiger dans la seule logique des bouleversements européens du XX° siècle qui conduisirent une famille juive à s’expatrier de Pologne en France, puis à subir la chasse meurtrière des nazis. On peut aussi la lire comme un chemin au long duquel les épisodes douloureux et les épreuves atroces sont comme la partie visible et cruellement éprouvée d’une alliance entre Dieu et l’humanité, entre Dieu et son Peuple élu, entre Dieu et chacun des humains dont Il veut faire ses fils.

Cette lecture croyante de l’histoire d’une vie est celle que Jean-Marie Lustiger a voulu partager dans les quelques ouvrages où il a levé un voile sur son histoire. Ce n’était pas chez lui un besoin de se justifier, moins encore un exercice apologétique. C’était un acte de foi et d’action de grâce : la volonté de témoigner du ressort ultime de son existence. Pouvons-nous quelques instants le suivre sur cette voie de la foi et de l’action de grâce pour évoquer quelques traits de cette personnalité si riche ? Pour ceux qui ont eu la chance de l’approcher et de le connaître personnellement, ce n’est ni son intelligence, ni l’acuité de son esprit, ni l’amplitude de sa culture, toutes réelles qu’elles fussent, qui frappaient d’abord, mais plutôt la vigueur et la force de sa foi. Avant tout, il était un croyant. Que ce soit dans l’accueil de la Parole de Dieu, dans l’expérience vécue des sacrements de l’Église, dans l’annonce de l’Évangile ou dans la conduite quotidienne de sa vie, tout était reçu de Dieu et tout était rapporté à Dieu. Sa découverte et sa rencontre en Jésus-Christ du Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, avaient établi définitivement sa vie dans le régime de la grâce, du don reçu gratuitement et sans autre motif que la miséricorde du Dieu tout-puissant.

Persuadé d’avoir tout reçu gratuitement, il était passionné du désir d’annoncer à tous la surabondance de l’amour de Dieu pour l’humanité et de transmettre l’appel du Christ à vivre de cet amour. Depuis son premier ministère auprès des étudiants jusqu’à ses dernières initiatives apostoliques comme archevêque de Paris, toute son activité, foisonnante et incessante, était animée par ce désir. Des chemins de la Terre Sainte aux routes de Chartres, des appels paroissiaux à « Agir par la Foi » aux initiatives diocésaines couronnées par « Paris-Toussaint 2004 », toutes ces entreprises dans lesquelles il s’est engagé e sans réserve visaient à faire connaître le Christ, Sauveur du monde. Loin de se laisser enfermer dans le monde ecclésiastique, il avait dans la société française et dans le monde entier d’innombrables contacts: dans l’université comme dans le monde économique, dans les milieux politiques comme dans l’univers culturel. Son élection à l’Académie Française établit avec cette illustre compagnie des liens qui n’étaient pas seulement de convenance. Ce tissu serré de relations était comme une sorte de paroisse universelle où il voulait exercer son ministère de prêtre du Christ et de témoin de la foi. Créé cardinal par le regretté Pape Jean-Paul II, il portait avec lui le souci pastoral de l’Église entière en partageant profondément sa vision de l’homme dans le monde de ce temps.

Avec l’encouragement et le soutien de Jean-Paul II, il a posé pour le développement des relations entre les juifs et les chrétiens des actes décisifs que peut-être lui seul pouvait engager. Son histoire personnelle le conduisait à se reconnaître comme un témoin privilégié de la vocation universelle de l’Alliance conclue au Sinaï entre Dieu et son Peuple. Quelles que soient les incompréhensions bien explicables quelles que soient les souffrances secrètes dont il fût blessé, jamais il ne renonçait à ce qu’il comprenait comme sa mission propre. Ce que l’acuité de l’analyse et la perspicacité de l’intelligence lui révélaient comme une fulgurance se traduisait immédiatement en projet d’action et d’évangélisation. Ce qui lui advenait devait servir à l’accomplissement de la mission avec une exigence dont tous ses collaborateurs ont été les témoins et les acteurs sous son impulsion. Dans une période de la vie de l’Église Catholique où les regrets et les lassitudes risquaient de réduire les ambitions apostoliques à la mesure des moyens supposés, il discernait, – et pas seulement pour le plaisir intellectuel du paradoxe -, des opportunités nouvelles , il engageait de nouveaux projets, quitte à perturber la quiétude même des moins timorés. Ce n’était chez lui ni le désir de promouvoir ses œuvres propres, ni l’impatience d’agir, comme certains pouvaient l’en soupçonner. Cette tension permanente vers des objectifs à atteindre relevait de l’espérance raisonnée et d’une lecture des « signes des temps ».

En un quart de siècle cette passion de l’évangélisation s’est exprimée par des fondations qui trouvent peu à peu leur maturité : création de nouvelles paroisses, constructions d’églises, École cathédrale, Radio Notre-Dame, Séminaire diocésain, Fraternité Missionnaire des Prêtres pour la Ville, télévision KTO, Faculté Notre-Dame, Collège des Bernardins sont autant de ces projets dont l’articulation et la cohérence apparaissent à mesure qu’ils se développent. Il faut aussi évoquer les Journées Mondiales de la Jeunesse de Paris en 1997 et leur rayonnement tant en France que dans le monde et le lancement des Congrès pour l’évangélisation dont Budapest sera la prochaine étape en septembre 2007. Cette activité était enracinée dans une vie de communion au Christ. Prêtre, puis évêque d’Orléans et Archevêque de Paris, Jean-Marie Lustiger fut vraiment un maître spirituel. Il ne fut pas seulement un prédicateur talentueux et écouté, il avait le souci de la qualité de la prière dans l’Église, jusque dans la perfection de la mise en œuvre liturgique, conscient que Dieu agit à travers les gestes et les signes donnés aux hommes. Les moins avertis pouvaient bien n’y voir qu’un travers de maniaquerie ; en fait, ce qui l’animait était le souci de vivre par la pureté et la beauté des signes le sens profond des rites et d’aider les fidèles à y entrer. Comment pourrions-nous l’oublier dans cette cathédrale dont il a souhaité et réalisé le réaménagement que nous voyons et où il a si souvent présidé la Messe dominicale, célébré la Messe chrismale, ordonné les prêtres et les diacres du diocèse ?

Si le temps de l’historien n’est pas encore venu, nous sommes déjà dans le temps de l’action de grâce. Nous rendons grâce à Dieu d’avoir envoyé sur notre chemin un témoin tel que Jean-Marie Lustiger. Les fruits de son ministère parmi nous ne révèlent pas seulement une personnalité exceptionnelle ; ils sont à reconnaître comme des signes de l’œuvre de Dieu dans l’histoire humaine. Ils nous encouragent à comprendre comment nos limites et nos faiblesses, les difficultés rencontrées et les épreuves subies, sont autant d’occasions de reconnaître la puissance de Dieu agissant dans la faiblesse de ses serviteurs. Quelle que soit la valeur de la « poterie », pour reprendre l’expression de Paul, c’est de Dieu, – nous en sommes convaincus -, que vient la puissance extraordinaire du trésor qui nous est confié. C’est Dieu Lui-même qui se penche sur la faiblesse de ses serviteurs et de ses servantes pour les couvrir de l’ombre de son Esprit et les associer à l’enfantement mystérieux auquel participe la création tout entière. Le 8 décembre 1979, lors de sa consécration épiscopale à Orléans, la liturgie de la fête de l’Immaculée Conception proposait le récit de l’Annonciation dans l’évangile selon saint Luc. Est-ce cette occasion providentielle ou un choix plus délibéré qui conduisit Jean-Marie Lustiger à prendre le message de l’ange comme une phrase de référence, sinon comme une devise : « Rien n’est impossible à Dieu ! » ? Toujours est-il qu’il aimait revenir à cette profession de foi en la puissance de Dieu à travers la faiblesse des comportements humains. Ses entreprises les plus hardies n’ont-elles pas été marquées par cette confiance que Dieu seul construit et conduit son Église selon sa volonté ? S’il s’émerveillait, ce n’était ni de la notoriété, des charges ou des honneurs, ni non plus des incompréhensions, des jalousies ou des méchancetés, qui constituent la face visible de l’existence de quiconque approche des sommets des organisations humaines. Ce qui était la source de sa joie et de son action de grâce, c’était de voir que la Providence accomplissait son œuvre par des voies qui nous restent souvent mystérieuses mais que la foi apprend à reconnaître. Il ne recherchait pas l’approbation du monde, mais il cherchait toujours avec confiance et obstination à déchiffrer cet itinéraire par lequel Dieu veut conduire son Peuple.

Par le témoignage de sa vie, comme de celle de tant de disciples du Christ depuis deux mille ans, nous avons la preuve quotidienne que, vraiment, « rien n’est impossible à Dieu. » Ce qui a été vrai dans la vie de la Vierge Marie, ce qui a été vrai dans la vie de Jean-Marie Lustiger, est vrai aussi dans chacune de nos existences, et donc chacune et chacun d’entre nous, nous sommes appelés avec lui à reprendre à notre compte la réponse de Marie au message de l’ange : « Voici la servante du Seigneur ; que tout se passe pour moi selon ta parole. »

+ André Vingt-Trois

Archevêque de Paris

P. Lombardi : L’homélie de Mariazell, cœur du pèlerinage de Benoît XVI

11 septembre, 2007

du site: 

http://www.zenit.org/article-16132?l=french

P. Lombardi : L’homélie de Mariazell, cœur du pèlerinage de Benoît XVI

ROME, Lundi 10 septembre 2007 (ZENIT.org) – L’homélie du pape Benoît XVI a été un sommet, au « cœur » du pèlerinage de Benoît XVI en Allemagne, fait remarquer le directeur de la salle de presse du Saint-Siège, le P. Federico Lombardi.

Le P. Lombardi a fait un bilan, au micro de Radio Vatican, du voyage de trois jours du pape en Autriche.

« Le pape a dit souvent, et on le voyait, qu’en Autriche, il se sent chez lui, parce qu’il est originaire d’une terre très proche, frontalière et étroitement unie à l’Autriche d’un point de vue culturel et historique, comme la Bavière », a-t-il expliqué.

« Personnellement, ajoutait-il, j’ai été très frappé, puisque je comprends assez bien l’Allemand, de la prononciation des homélies, des discours. Le pape parlait sa langue, il la parlait avec une grande participation, et avec une grande finesse. A mon avis, l’homélie à Mariazell, même si le discours a été tenu dans des conditions difficiles physiquement, a été l’un des discours que j’ai entendus – au moins personnellement – comme dit par le pape avec le plus de participation et de finesse spirituelle. Cela a donc été pour nous un sommet. Le pape, dans sa langue, a tracé cette synthèse de théologie et de spiritualité, entre foi et expérience spirituelle du regard tourné vers le Christ, avec une intensité qui, selon moi, restera un document particulièrement précieux pour nous ».

A propos de la journée à Mariazell, le P. Lombardi ajoutait : « Je crois que les images de la messe à Mariazell sous la pluie ont été le cœur symbolique de ce voyage, parce qu’on a vu que le peuple chrétien qui est venu en pèlerinage, a fait le pèlerinage avec le Saint-Père, en dépit des difficultés, a été fidèle, s’est engagé, a résisté aux difficultés et a vécu avec enthousiasme ce moment de rencontre avec le pape. Je dirais donc que la messe à Mariazell a été indubitablement ce qui restera le plus longtemps de ce pèlerinage, même si il y a eu d’autres choses très belles, des moments de grand enthousiasme et de grande beauté, comme la liturgie à la cathédrale Saint-Etienne, ou des moments de joie dans la rencontre avec le bénévolat ».

« L’étape de Heiligenkreuz a été de nouveau un moment de magistère spirituel très profond. Le pape a parlé surtout de la prière, des personnes consacrées, de l’office divin, et aussi de la théologie unie à la spiritualité. La rencontre avec le bénévolat a été également très importante, parce qu’elle a été l’élargissement du message chrétien à l’engagement dans la société, le terrain commun de l’engagement gratuit pour les autres, dans une société ainsi dominée aussi par les intérêts et par la recherche de l’intérêt particulier : un thème vraiment fondamental où les chrétiens se rencontrent profondément dans la vie quotidienne, avec toutes les personnes de bonne volonté ».

Le bilan, disait le P. Lombardi, c’est aux évêques et au pape de le faire, mais il ajoutait « et nous savons que c’est un bilan positif ».

« Le pape comme le cardinal Schönborn, avec qui je parlais hier après-midi, étaient très contents de ce voyage. C’était ce qu’ils pouvaient attendre comme résultat et comme réponse des gens, aussi dans un contexte de conditions atmosphériques, si contraires, ces derniers jours. Je pense que l’Eglise autrichienne qui aime le Saint-Père a été très contente. Elle a démontré la participation fidèle et engagée surtout le jour de Mariazell, mais aussi hier matin, sur la place Saint Etienne. Donc, je crois aussi que le fait de pouvoir donner un message d’encouragement, de proximité, de la part du pape à l’Eglise autrichienne a été important. J’espère aussi que les paroles qui ont été dites pour la société autrichienne plus amplement, soit à travers le discours à Hofburg, qui élargissait aussi à l’horizon européen, soit en particulier par la rencontre avec le bénévolat, de dimanche soir, ont porté leurs fruits ».

« Les discours du Saint-Père ont été, comme toujours, mais cela m’a frappé de façon particulière, disait encore le P. Lombardi, d’une grande profondeur, et d’une grande intensité, et aussi d’une grande richesse spirituelle. C’est donc une chose sur laquelle nous pouvons aussi continuer de méditer, surtout en pensant aux thématiques traitées dans le pèlerinage, avec la présentation de cette spiritualité chrétienne, qui regarde vers le Christ et qui trouve là le fondement de la foi de chacun, et aussi l’enthousiasme de la joie de l’action quotidienne dans la charité, qui sont des thèmes qui, selon moi, dureront longtemps ».

 

Sandro Magister: Nouvelles tendances: le retour au confessionnal

11 septembre, 2007

du site:

http://chiesa.espresso.repubblica.it/articolo/165641?fr=y

Nouvelles tendances: le retour au confessionnal

Les signes sont timides mais persistants. Le dernier en date: 12 000 jeunes, encouragés par le pape, ont reçu le sacrement du pardon à Lorette. Et l’on voit réapparaître dans les séminaires les textes permettant d’étudier les « cas de conscience » par Sandro Magister

ROMA, le 6 septembre 2007  

– Un fait inattendu par son intensité et sa dimension s’est produit pendant les deux jours où Benoît XVI a rencontré à Lorette des centaines de milliers de jeunes venus d’Italie et de nombreux pays du monde: une affluence massive vers la confession sacramentelle. Entre le samedi 1er et le dimanche 2 septembre, sur la grande esplanade qui s’étend au bas de la ville et du sanctuaire marial, 350 prêtres ont confessé sans interruption de 14 heures à 7 heures du matin, assiégés par 12 000 jeunes dans l’attente du pardon.

Avant même l’arrivée du pape, de nombreux jeunes ont préparé l’événement par le rite de la pénitence. Les parcours de pèlerinage qui convergeaient vers Lorette comprenaient presque tous l’étape de la confession sacramentelle. C’était le cas à l‘abbaye de Fiastra, transformée par moments en confessionnal géant, ou au sanctuaire de Canoscio, dans les Apennins, toujours avec des dizaines et des dizaines de prêtres qui administraient simultanément le sacrement. Ce n’est pas une vraie nouveauté. Lors des Journées Mondiales de la Jeunesse de l’an 2000 à Rome, les jeunes étaient également très nombreux à se confesser: 120 000 en trois jours, dans l’immense stade de la Rome païenne, le Cirque Maxime, transformé en confessionnal à ciel ouvert.

Mais ce qui a semblé alors n’être qu’un feu de paille s’est ensuite révélé être une tendance durable et même en expansion, en particulier dans les sanctuaires et à l’occasion de grands rassemblements. Bien sûr, le pourcentage de jeunes catholiques qui se confessent est encore très bas. A Lorette, moins que 5% des personnes présentes. Mais l’inversion de tendance est réelle par rapport à la quasi-disparition de la pratique de ce sacrement il y a quelques années. D’ailleurs, plus que les chiffres, ce sont les signes qui parlent. L’image de tous ces jeunes qui se confessent de leur propre gré au cours d’un événement religieux suivi par tous montre bien que la confession n’est plus un sacrement tombé en désuétude. Au contraire, elle est à nouveau pratiquée et aimée.

Benoît XVI encourage résolument cette reprise de la confession, spécialement chez les jeunes. C’est lui qui, cette année, a décidé de consacrer tout un après-midi à la célébration du sacrement de la pénitence à Saint-Pierre, le jeudi avant la Semaine Sainte. Il est descendu en personne dans la basilique pour célébrer le rite, prêcher et confesser. Confession individuelle et non collective. La pratique de l’absolution générale à des groupes entiers de fidèles, après un « mea culpa » tout aussi collectif, s’est en effet spontanément répandue au lendemain de Vatican II, surtout en Europe Centrale, dans les deux Amériques et en Australie.

Rome n’a jamais encouragé cette pratique. L’absolution collective n’est autorisée – même après l’aggiornamento du rite en 1974 – qu’en cas de danger de mort, par exemple pour un bataillon en guerre, ou de manque très important de prêtres par rapport au nombre de pénitents présents. Cependant, celui qui a reçu l’absolution collective doit toujours impérativement se présenter « dès que possible, au plus tard avant un an » devant un prêtre, pour lui confesser individuellement ses péchés graves. Malgré cela, la pratique de l’absolution collective a perduré dans de nombreux diocèses du monde. L’objectif avoué de ses défenseurs, y compris des évêques, était de sauver le sacrement d’un abandon de masse. Mais le résultat a été justement d’accélérer cet abandon.

La confession collective a eu et a encore des partisans dans les séminaires et les facultés de théologie. Un théologien moraliste espagnol, Domiciano Fernandez, de la congrégation des clarétins, s’en est fait le défenseur dans un livre édité en Italie par Queriniana sous le titre « Dio ama e perdona senza condizioni [Dieu aime et pardonne sans condition]« . Avec le concours du liturgiste franciscain Rinaldo Falsini qui a signé la préface. Dans les séminaires, la baisse de la pratique de ce sacrement est allée de pair avec l’abandon d’un enseignement visant à former de bons confesseurs par une préparation pratique. Depuis quelques décennies, les « cas de conscience » ont cessé de faire l’objet de cours.

Là aussi, pourtant, on observe aujourd’hui des signes d’inversion de tendance. Cet été, en Italie, les éditions Ares ont publié un livre de l’éminent théologien moraliste Lino Ciccone, consulteur du conseil pontifical pour la famille, intitulé « L’inconfessabile e l’inconfessato. Casi e soluzioni di 30 problemi di coscienza [L’inconfessable et l’inconfessé: 30 problèmes de conscience et leur solution]« . Comme le titre le laisse entendre, le livre énumère 30 « cas de conscience », suivis par autant de solutions. Les cas sont très ancrés dans la vie réelle. Cela va de l’avortement à la pratique homosexuelle, du divorce à la corruption financière. L’ouvrage a été écrit expressément à l’intention de ceux qui se préparent au sacerdoce, comme « livre d’exercices » à ajouter aux textes de morale générale.

Mais il est également utile à celui qui est déjà prêtre et confesse. Et qui souhaite confesser davantage et mieux.

bonne nuit

11 septembre, 2007

bonne nuit dans image bon nuit, jour, dimanche etc. taleve.violacee.mila.9g

American Purple Gallinule

http://michel.lamarche.oiseaux.net/american.purple.gallinule.6.html

« Jésus s’en alla dans la montagne pour prier »

11 septembre, 2007

Saint Ambroise (vers 340-397), évêque de Milan et docteur de l’Église
Sur l’évangile de St Luc, 5,41 (trad. cf SC 45, p. 198 rev)

« Jésus s’en alla dans la montagne pour prier »

« En ces jours-là, Jésus se retira sur la montagne pour prier, et il passa la nuit à prier Dieu. » Ceux qui prient ne gravissent pas tous la montagne…, mais ceux qui prient bien, ceux qui s’élèvent des biens terrestres aux biens supérieurs, montent sur les sommets de la vigilance et de l’amour d’en haut. Ceux qui se soucient des richesses du monde ou des honneurs ne gravissent pas la montagne ; celui qui convoite les terres d’autrui ne gravit pas la montagne. Ceux qui cherchent Dieu montent ; ceux qui montent implorent l’aide du Seigneur pour leur marche. Toutes les âmes grandes, toutes les âmes élevées gravissent la montagne, car ce n’est pas simplement au premier venu que le prophète dit : « Monte sur une haute montagne, toi qui annonces la bonne nouvelle à Sion. Elève la voix avec force, toi qui donnes la bonne nouvelle à Jérusalem » (Is 40,9). Ce n’est pas par un exploit physique, mais par des actions élevées que tu escaladeras cette montagne. Suis le Christ…; cherche dans l’Évangile, tu trouveras que seuls les disciples ont gravi la montagne avec le Seigneur

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