L’hommage de la nation au cardinal Lustiger
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L’hommage de la nation au cardinal Lustiger
LE MONDE | 10.08.07 | 11h29 • Mis à jour le 10.08.07 | 12h56
Porté par six séminaristes, le cercueil traverse la foule présente sur le parvis de Notre-Dame de Paris, sa cathédrale, avant d’être posé sur le pavé. C’est la première image des obsèques, vendredi matin 10 août, de Jean-Marie Lustiger. Le cardinal, qui avait lui-même réglé le détail de la cérémonie, voulait ainsi saluer une dernière fois son « peuple » – fidèles, parisiens, étrangers – quand son « peuple » saluerait son défunt.
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Il avait voulu faire de ses funérailles un acte d’alliance des deux religions issues d’Israël. Son arrière-petit cousin, Jonas Moses-Lustiger, lit en hébreu et en français un psaume, dépose sur le cercueil un vase de terre ramassée à Jéricho et Jérusalem, transportée au Mur des lamentations et au Saint-Sépulcre. Comment mieux résumer l’enracinement dans la Terre sainte et le parcours si singulier de ce « prince de l’Eglise » qui n’avait jamais renié son judaïsme? Toujours sur le parvis, penché sur le cercueil, l’historien Arno Lustiger, son cousin, récite en araméen le « kaddish des endeuillés », la prière juive des défunts, accompagné de rabbins et de personnalités juives venus rendre hommage à leur « frère » archevêque. « Dieu, que ton Royaume vienne. Que ton nom soit loué pour les siècles des siècles » : ces paroles ne sont pas étrangères à des oreilles chrétiennes. Certains ont regretté que le kaddish n’ait pas été récité à l’intérieur de la cathédrale. « Il ne fallait pas choquer. Le cardinal lui-même n’aimait pas le mélange des genres », répond un prêtre parisien.
Puis la maîtrise de Notre-Dame entonne le Requiem. Porté cette fois par six prêtres en étole violette, le cercueil remonte la nef de la cathédrale. La cérémonie tourne à l’hommage de toute une nation, au-delà de ses communautés et croyances, pour une haute figure morale et spirituelle. Arlette Lustiger, sœur du défunt, et sa famille, Mgr André Vingt-Trois, son successeur à Paris, conduisent le deuil. Au premier rang, le chef de l’Etat, Nicolas Sarkozy, revenu de ses vacances aux Etats-Unis, exprime la sympathie de la République. François Fillon, de nombreux ministres, Bernadette Chirac, Bertrand Delanoë, la France officielle sont là. La communauté juive aussi, conduite par Richard Prasquier, président du CRIF et d’autres amis du cardinal comme Ady Steg, le président de l’alliance israélite universelle ou Serge Klarsfeld, qui a eu le privilège de le voir peu de temps avant sa mort.
Le cercueil est posé à même la dalle de pierre devant le maître-autel, pour signifier le dépouillement. Des religieuses allument quatre cierges en signe d’espérance de la Résurrection. Les insignes de l’évêque – la crosse, la mitre – et du prêtre – l’aube et l’étole – sont disposés sur le cercueil ou autour. Le cardinal avait aussi choisi les textes de sa messe de funérailles, notamment l’Evangile de l’Annonciation à Marie qui avait été celui de sa consécration comme évêque à Orléans en 1979, dans lequel figure cette formule « Rien n’est impossible à Dieu », dont il avait fait sa devise épiscopale. C’est ce thème que développera Mgr Vingt-Trois dans son homélie.UN MESSAGE DU PAPE
L’armée des célébrants qui bénissent le corps et montent à l’autel est impressionnante. Image de l’Eglise universelle dont l’archevêque de Paris fut l’un des « ténors » pendant un quart de siècle. Une quarantaine de ses amis évêques et cardinaux, français et étrangers, sont là, venus de Pologne (Franciszek Macharski, Josef Glemp, Josef Zycinski), de Vienne (Christophe Schönborn), de Rome (Camillo Ruini), de Bruxelles (Godfried Danneels), de Washington (Theodor Mac Carrick), de Westminster (Cormac Murphy O’Connor), de Cologne (Joachim Meissner), etc. Ils ont « rendu grâce » pour l’homme de foi, le passeur de frontières que fut le cardinal Lustiger.
Le Vatican est représenté par le cardinal Paul Poupard, président du conseil pour la culture, envoyé personnel du pape, et Jean-Louis Tauran, chargé à la Curie du dialogue interreligieux. Le premier devait lire un message de Benoît XVI, dont il était proche, louant à son tour « une grande figure de l’Eglise, respectée de tous (…), passionnée par la recherche de Dieu et par l’annonce de l’Evangile ». Le dernier intervenant devait être Maurice Druon, secrétaire perpétuel de l’Académie française.
Henri Tincq
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