VEILLÉE PASCALE HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI
du site Vatican
VEILLÉE PASCALE HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI
Basilique Vaticane
Samedi Saint, 7 avril 2006
Chers Frères et Sœurs,
Depuis les temps les plus anciens, la liturgie du jour de Pâques commence par ces mots : Resurrexi et adhuc tecum sum – Je suis ressuscité et je me retrouve avec toi. Ta main s’est posée sur moi. La liturgie voit ici les premières paroles du Fils adressées au Père après la résurrection, après son retour de la nuit de la mort dans le monde des vivants. La main du Père l’a soutenu aussi en cette nuit, et ainsi il a pu se relever, ressusciter.Cette parole vient du psaume 138, dans lequel elle a d
’abord un autre sens. Ce psaume est un chant d’émerveillement devant la toute-puissance et l’omni-présence de Dieu, un chant de confiance en Dieu, qui ne nous laisse jamais tomber de ses mains. Et ses mains sont de bonnes mains. L’orant imagine un voyage à travers toutes les dimensions de l’univers – que lui arrivera-t-il ? «Je gravis les cieux : tu es là; je descends chez les morts : te voici. Je prends les ailes de l’aurore et me pose au-delà des mers : même là, ta main me conduit, ta main droite me saisit. J’avais dit : ‘Les ténèbres m’écrasent !’ Mais la nuit devient lumière autour de moi. Même les ténèbres pour toi ne sont pas ténèbres, et la nuit comme le jour est lumière !» (Ps 138 [139], 8-12).
Le jour de Pâques, l’Église nous dit : Jésus Christ a accompli pour nous ce voyage à travers les dimensions de l’univers. Dans la Lettre aux Éphésiens nous lisons qu’il est descendu jusqu’en bas sur la terre et que Celui qui est descendu est le même que Celui qui est aussi monté au plus haut des cieux pour combler tout l’univers (cf. 4, 9-10). Ainsi la vision du psaume est devenue réalité. Dans l’obscurité impénétrable de la mort, il est entré comme la lumière – la nuit devint lumière comme le jour, et les ténèbres devinrent lumière. C’est pourquoi l’Église peut justement considérer ces paroles d’action de grâce et de confiance comme les paroles du Ressuscité adressées au Père : «Oui, j’ai accompli le voyage jusqu’aux profondeurs extrêmes de la terre, dans l’abîme de la mort, et j’ai apporté la lumière; et maintenant je suis ressuscité et je suis pour toujours saisi par tes mains». Mais cette parole du Ressuscité au Père est devenue aussi une parole que le Seigneur nous adresse : «Je suis ressuscité et maintenant je suis pour toujours avec toi», dit-il à chacun d’entre nous. Ma main te soutient. Où que tu puisses tomber, tu tomberas dans mes mains. Je suis présent jusqu’aux portes de la mort. Là où personne ne peut plus t’accompagner et où tu ne peux rien emporter, là je t’attends et je change pour toi les ténèbres en lumière.Cette parole du psaume, lue comme l
’échange du Ressuscité avec nous, est en même temps une explication de ce qui advient dans le Baptême. Le Baptême, en effet, est plus qu’un bain, plus qu’une purification. Il est plus que l’entrée dans une communauté. Il est une nouvelle naissance. Un nouveau commencement de la vie. Le passage de la Lettre aux Romains, que nous venons d’entendre, dit avec des paroles mystérieuses que, dans le Baptême, nous avons été unis dans une mort semblable à celle du Christ. Dans le Baptême nous nous donnons au Christ – Il nous assume en lui, afin que nous ne vivions plus pour nous-mêmes, mais grâce à lui, avec lui et en lui; afin que nous vivions avec lui et ainsi pour les autres. Dans le Baptême, nous renonçons à nous-mêmes, nous déposons notre vie entre ses mains, disant avec saint Paul : «Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi». Si nous nous donnons de cette manière, acceptant une sorte de mort de notre moi, alors cela signifie aussi que la frontière entre la mort et la vie est devenue perméable. En deçà comme au-delà de la mort, nous sommes avec le Christ, et c’est pourquoi, à partir de ce moment-là, la mort n’est plus une vraie limite. Paul nous le dit d’une manière très claire dans sa Lettre aux Philippiens : «En effet, pour moi, vivre c’est le Christ, et mourir est un avantage. Mais si, en vivant en ce monde, j’arrive à faire un travail utile, je ne sais plus comment choisir. Je me sens pris entre les deux : je voudrais bien partir pour être avec le Christ, car c’est bien cela le meilleur; mais, à cause de vous, demeurer en ce monde est encore plus nécessaire» (cf. 1, 21-24). De part et d’autre de la frontière de la mort, il est avec le Christ, il n’y a plus de vraie différence. Oui, c’est vrai : «Tu me devances et me poursuis, tu m’enserres, tu as mis la main sur moi». Aux Romains, Paul écrit : «Aucun … ne vit pour soi-même, et aucun ne meurt pour soi-même : si nous vivons, nous vivons pour le Seigneur, si nous mourons, nous mourons pour le Seigneur» (14, 7-8).
Chers Frères qui allez être baptisés, voilà la nouveauté du Baptême : notre vie appartient au Christ, elle n’est plus à nous. Et c’est pourquoi nous ne sommes plus seuls même dans la mort, mais nous sommes avec lui qui est toujours vivant. Dans le Baptême, unis au Christ, nous avons déjà accompli le voyage cosmique jusqu’aux profondeurs de la mort. Accompagnés par lui, et même accueillis par lui dans son amour, nous sommes libérés de la peur. Il nous enveloppe et il nous porte, où que nous allions, lui qui est la Vie même.Retournons encore à la nuit du Samedi saint. Dans le Credo, nous proclamons, à propos du chemin du Christ : «Il est descendu aux enfers». Qu’est-il arrivé alors ? Puisque nous ne connaissons pas le monde de la mort, nous ne pouvons nous représenter ce processus de victoire sur la mort qu’à travers des images qui restent toujours peu adaptées. Avec toute leur insuffisance, elles nous aident cependant à comprendre quelque chose du mystère. La liturgie applique à la descente de Jésus dans la nuit de la mort la parole du psaume 23 [24]: «Portes, levez vos frontons, élevez-vous, portes éternelles!» La porte de la mort est ferm
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