Archive pour le 6 avril, 2007
Liturgie des hures e lecture de ce matin, vendredi saint
6 avril, 2007Liturgie des heures et lecture de ce matin, du site:
http://www.prieravecleglise.fr/
Office des Lectures du vendredi 06 avril 2007
Vendredi saint
V/ Dieu, viens à mon aide,
R/ Seigneur, à notre secours.
Gloire au Père, et au Fils et au Saint-Esprit,
au Dieu qui est, qui était et qui vient,
pour les siècles des siècles.
AMEN
Hymne Auteur : CFC / Éditeur : CNPL
La Parole en silence
se consume pour nous.
L’espoir du monde
a parcouru sa route.
Voici l’heure où la vie
retourne à la source :
dernier labeur de la chair
mise en croix.
serviteur inutile,
les yeux clos désormais,
le Fils de l’homme
a terminé son œuvre.
la lumière apparue
rejoint l’invisible,
la nuit s’étend sur le corps
Jésus meurt.
Maintenant tout repose
dans l’unique oblation.
Les mains du Père
ont recueilli le souffle.
Le visage incliné
s’apaise aux ténèbres,
le coup de lance a scellé
la passion.
le rideau se déchire
dans le Temple désert.
La mort du juste
a consommé la faute,
et l’Amour a gagné
l’immense défaite :
demain, le Jour surgira
du tombeau.
Antienne : Peuples et nations se sont ligués contre ton serviteur Jésus, ton Messie.
PSAUME 2 1Pourquoi ce tumulte des nations,
ce vain murmure des peuples ?
2Les rois de la terre se dressent,
les grands se liguent entre eux
contre le Seigneur et son messie :
3« Faisons sauter nos chaînes,
rejetons ces entraves ! »
4Celui qui règne dans les cieux s’en amuse,
le Seigneur les tourne en dérision ;
5puis il leur parle avec fureur
et sa colère les épouvante :
6« Moi, j’ai sacré mon roi
sur Sion, ma sainte montagne. »
7le proclame le décret du Seigneur ! +
il m’a dit : « Tu es mon fils ;
moi, aujourd’hui, je t’ai engendré.
8Demande, et je te donne en héritage les nations,
pour domaine la terre tout entière.
9Tu les détruiras de ton sceptre de fer,
tu les briseras comme un vase de potier. »
10Maintenant, rois, comprenez,
reprenez-vous, juges de la terre.
11Servez le Seigneur avec crainte,
rendez-lui votre hommage en tremblant.
12Qu’il s’irrite et vous êtes perdus :
soudain sa colère éclatera.
heureux qui trouve en lui son refuge !
Gloire au Père, et au Fils, et au Saint-Esprit,
pour les siècles des siècles. Amen
Antienne : Ils me percent les mains et les pieds ; je peux compter tous mes os.
PSAUME 212Mon Dieu, mon Dieu,
pourquoi m’as-tu abandonné ? *
Le salut est loin de moi,
loin des mots que je rugis.
3Mon Dieu, j’appelle tout le jour,
et tu ne réponds pas ; *
même la nuit,
je n’ai pas de repos.
4Toi, pourtant, tu es saint,
toi qui habites les hymnes d’Israël !
5C’est en toi que nos pères espéraient,
ils espéraient et tu les délivrais.
6Quand ils criaient vers toi, ils échappaient ;
en toi ils espéraient et n’étaient pas déçus.
7Et moi, je suis un ver, pas un homme,
raillé par les gens, rejeté par le peuple.
8Tous ceux qui me voient me bafouent,
ils ricanent et hochent la tête :
9« Il comptait sur le Seigneur : qu’il le délivre !
Qu’il le sauve, puisqu’il est son ami ! »
10C’est toi qui m’as tiré du ventre de ma mère,
qui m’a mis en sûreté entre ses bras.
11A toi je fus confié dès ma naissance ;
dès le ventre de ma mère, tu es mon Dieu.
12Ne sois pas loin : l’angoisse est proche,
je n’ai personne pour m’aider.
13Des fauves nombreux me cernent,
des taureaux de Basan m’encerclent.
14Des lions qui déchirent et rugissent
ouvrent leur gueule contre moi.
15Je suis comme l’eau qui se répand,
tous mes membres se disloquent.
Mon coeur est comme la cire,
il fond au milieu de mes entrailles.
16Ma vigueur a séché comme l’argile,
ma langue colle à mon palais.
Tu me mènes à la poussière de la mort. +
17Oui, des chiens me cernent,
une bande de vauriens m’entoure.
Ils me percent les mains et les pieds ;
18je peux compter tous mes os.
Ces gens me voient, ils me regardent. +
19ils partagent entre eux mes habits
et tirent au sort mon vêtement.
20Mais toi, Seigneur, ne sois pas loin :
ô ma force, viens vite à mon aide !
21Préserve ma vie de l’épée,
arrache-moi aux griffes du chien ;
22sauve-moi de la gueule du lion
et de la corne des buffles.
Tu m’as répondu ! +
23Et je proclame ton nom devant mes frères,
je te loue en pleine assemblée.
24Vous qui le craignez, louez le Seigneur, +
glorifiez-le, vous tous, descendants de Jacob,
vous tous, redoutez-le, descendants d’Israël.
25Car il n’a pas rejeté,
il n’a pas réprouvé le malheureux dans sa misère ;
il ne s’est pas voilé la face devant lui,
mais il entend sa plainte.
26Tu seras ma louange dans la grande assemblée ;
devant ceux qui te craignent, je tiendrai mes promesses.
27Les pauvres mangeront : ils seront rassasiés ;
ils loueront le Seigneur, ceux qui le cherchent :
« A vous, toujours, la vie et la joie ! »
28La terre entière se souviendra
et reviendra vers le Seigneur,
chaque famille de nations se prosternera devant lui :
29« Oui, au Seigneur la royauté,
le pouvoir sur les nations ! »
30Tous ceux qui festoyaient s’inclinent ;
promis à la mort, ils plient en sa présence.
31Et moi, je vis pour lui : ma descendance le servira ;
on annoncera le Seigneur aux générations à venir.
32On proclamera sa justice au peuple qui va naître :
Voilà son oeuvre !
Gloire au Père, et au Fils, et au Saint-Esprit,
pour les siècles des siècles. Amen
Antienne : Amis et compagnons se tiennent à distance.
PSAUME 37
2Seigneur, corrige-moi sans colère
et reprends-moi sans violence.
3Tes flèches m’ont frappé,
ta main s’est abattue sur moi.
4Rien n’est sain dans ma chair sous ta fureur,
rien d’intact en mes os depuis ma faute.
5Oui, mes péchés me submergent,
leur poids trop pesant m’écrase.
6Mes plaies sont puanteur et pourriture :
c’est là le prix de ma folie.
7Accablé, prostré, à bout de forces,
tout le jour j’avance dans le noir.
8La fièvre m’envahit jusqu’aux moelles,
plus rien n’est sain dans ma chair.
9Brisé, écrasé, à bout de forces,
mon coeur gronde et rugit.
10Seigneur, tout mon désir est devant toi,
et rien de ma plainte ne t’échappe.
11Le coeur me bat, ma force m’abandonne,
et même la lumière de mes yeux.
12Amis et compagnons se tiennent à distance,
et mes proches, à l’écart de mon mal.
13Ceux qui veulent ma perte me talonnent,
ces gens qui cherchent mon malheur ;
ils prononcent des paroles maléfiques,
tout le jour ils ruminent leur traîtrise.
14Moi, comme un sourd, je n’entends rien,
comme un muet, je n’ouvre pas la bouche,
15pareil à celui qui n’entend pas,
qui n’a pas de réplique à la bouche.
16C’est toi que j’espère, Seigneur :
Seigneur mon Dieu, toi, tu répondras.
17J’ai dit : «Qu’ils ne triomphent pas,
ceux qui rient de moi quand je trébuche ! »
18Et maintenant, je suis près de tomber,
ma douleur est toujours devant moi.
19Oui, j’avoue mon péché,
je m’effraie de ma faute.
20Mes ennemis sont forts et vigoureux,
ils sont nombreux à m’en vouloir injustement.
21Ils me rendent le mal pour le bien ;
quand je cherche le bien, ils m’accusent.
22Ne m’abandonne jamais, Seigneur,
mon Dieu, ne sois pas loin de moi.
23Viens vite à mon aide,
Seigneur, mon salut !
Gloire au Père, et au Fils, et au Saint-Esprit,
pour les siècles des siècles. Amen
V/Contre moi se sont levés de faux témoins,
ne respirant que violence.
Lettre aux Hébreux (He 9, 11-28)
Le Christ, grand prêtre, entre au sanctuaire du ciel
En offrant sa propre vie, le Christ crée une situation nouvelle, irréversible: il anéantit le péché et instaure une alliance, définitive.
Christ est survenu, grand prêtre des biens à venir. C’est par une tente plus grande et plus parfaite, qui n’est pas oeuvre des mains – c’est-à-dire qui n’appartient pas à cette création-ci -,
et par le sang, non pas des boucs et des veaux, mais par son propre sang, qu’il est entré une fois pour toutes dans le sanctuaire et qu’il a obtenu une libération définitive.
Car si le sang de boucs et de taureaux et si la cendre de génisse répandue sur les êtres souillés les sanctifient en purifiant leur corps,
combien plus le sang du Christ, qui, par l’esprit éternel, s’est offert lui-même à Dieu comme une victime sans tache, purifiera-t-il notre conscience des oeuvres mortes pour servir le Dieu vivant.
Voilà pourquoi il est médiateur d’une alliance nouvelle, d’un testament nouveau; sa mort étant intervenue pour le rachat des transgressions commises sous la première alliance, ceux qui sont appelés peuvent recevoir l’héritage éternel déjà promis.
Car là où il y a testament, il est nécessaire que soit constatée la mort du testateur.
Un testament ne devient valide qu’en cas de décès; il n’a pas d’effet tant que le testateur est en vie.
Aussi la première alliance elle-même n’a-t-elle pas été inaugurée sans effusion de sang.
Lorsque Moïse eut proclamé à tout le peuple chaque commandement conformément à la loi, il prit le sang des veaux et des boucs, puis de l’eau, de la laine écarlate et de l’hysope, et il en aspergea le livre lui-même et tout le peuple,
en disant: Ceci est le sang de l’alliance que Dieu a ordonnée pour vous;
puis il aspergea aussi avec le sang la tente et tous les ustensiles du culte,
et c’est avec du sang que, d’après la loi, on purifie presque tout, et sans effusion de sang, il n’y a pas de pardon.
Si donc les images de ce qui est dans les cieux sont purifiées par ces rites, il est nécessaire que les réalités célestes elles-mêmes le soient par des sacrifices bien meilleurs.
Ce n’est pas, en effet, dans un sanctuaire fait de main d’homme, simple copie du véritable, que Christ est entré, mais dans le ciel même, afin de paraître maintenant pour nous devant la face de Dieu.
Et ce n’est pas afin de s’offrir lui-même à plusieurs reprises, comme le grand prêtre qui entre chaque année dans le sanctuaire avec du sang étranger.
Car alors il aurait dû souffrir à plusieurs reprises depuis la fondation du monde. En fait, c’est une seule fois, à la fin des temps, qu’il a été manifesté pour abolir le péché par son propre sacrifice.
Et comme le sort des hommes est de mourir une seule fois, après quoi vient le jugement,
ainsi le Christ fut offert une seule fois pour enlever les péchés de la multitude et il apparaîtra une seconde fois, sans plus de rapport avec le péché, à ceux qui l’attendent pour le salut.
(Traduction oecuménique de la Bible)
R/Rédemption éternelle par ton sang,
Jésus Sauveur du monde !
Le Christ s’est offert lui-même à Dieu,
comme une victime sans tâche.
Il a offert sa vie en expiation,
il verra une postérité, il prolongera ses jours.
Après les épreuves de son âme,
il verra la lumière et sera comblé.
SERMON DE SAINT LEON LE GRAND POUR LA PASSION
(Editeur : Sources Chrétiennes)
Gloire et puissance de la croix.
Le Seigneur est livré à ceux qui le haïssent. Pour insulter sa dignité royale, on l’oblige à porter lui-même l’instrument de son supplice. Ainsi s’accomplissait l’oracle du prophète Isaïe: Il a reçu sur ses épaules le pouvoir. En se chargeant ainsi du bois de la croix, de ce bois qu’il allait transformer en sceptre de sa force, c’était certes aux yeux des impies un grand sujet de dérision mais, pour les fidèles, un mystère étonnant: Le vainqueur glorieux du démon, l’adversaire tout-puissant des puissances du mal, présentait sur ses épaules, avec une patience invincible, le trophée de sa victoire, le signe du salut, à l’adoration de tous les peuples.
Comme la foule allait avec Jésus au lieu du supplice, on rencontra un certain Simon de Cyrène, et on fit passer le bois de la croix des épaules du Seigneur sur les siennes. Ce transfert préfigurait la foi des nations, pour qui la croix du Christ devait devenir, non un opprobre, mais une gloire. En vérité, le Christ, notre Pâque, a été immolé. Il s’est offert au Père en sacrifice nouveau et véritable de réconciliation, non dans le Temple, dont la dignité avait déjà pris fin, mais à l’extérieur et hors du camp, pour qu’à la place des victimes anciennes dont le mystère était aboli, une nouvelle victime fût présentée sur un nouvel autel, et que la croix du Christ fût cet autel, non plus du temple, mais du monde.
Devant le Christ élevé en croix, il nous faut dépasser la représentation que s’en firent les impies, à qui fut destinée la parole de Moïse : Votre vie sera suspendue sous vos yeux, et vous craindrez jour et nuit, sans pouvoir croire à cette vie. Pour nous, accueillons d’un coeur libéré la gloire de la croix qui rayonne sur le monde. Pénétrons d’un regard éclairé par l’Esprit de vérité le sens de la parole du Seigneur annonçant l’imminence de sa Passion: C’est maintenant le jugement du monde, c’est maintenant que le prince de ce monde va être jeté dehors. Et moi, une fois élevé de terre, j’attirerai tout à moi.
O admirable puissance de la croix! O gloire inexprimable de la Passion! En elle apparaît en pleine lumière le jugement du monde et la victoire du Crucifié! Oui, Seigneur, tu as tout attiré à toi! Alors que tu avais tendu les mains tout le jour vers un peuple rebelle, le monde entier comprit qu’il devait rendre gloire à ta majesté. Tu as tout attiré à toi, Seigneur, puisque, le voile du temple déchiré, le saint des saints devenu béant, la figure a fait place à la réalité, la prophétie à son accomplissement, la Loi à l’Evangile. Tu as tout attiré à toi, Seigneur, puisque la piété de toutes les nations célèbre partout, au vu et au su de tous, le mystère qui jusqu’alors était voilé sous des symboles dans un temple unique de Judée.
Ta croix, ô Christ, est la source de toutes les bénédictions, la cause de toute grâce. Par elle, les croyants tirent de leur faiblesse la force, du mépris reçu la gloire, et de la mort la vie. Désormais, l’unique offrande de ton corps et de ton sang donne leur achèvement à tous les sacrifices, car tu es, ô Christ, le véritable Agneau de Dieu, toi qui enlèves le péché du monde. L’ensemble des mystères trouve en toi seul son sens plénier: au lieu d’une multitude de victimes, il n’y a plus qu’un unique sacrifice.
Ces hommes méprisés, Stance
ces femmes humiliées,
ces enfants que tout rejette,
ces meurtris, ces torturés,
tous ces visages bafoués :
Seigneur Jésus,
c’est toi qui me regardes.
R/Oserons-nous reconnaître
celui qui fut transpercé ?
Comme un surgeon,
il grandît devant nous,
comme une racine en terre aride.
Il n’a ni beauté, ni éclat,
homme des douleurs,
rebut d’humanité.
Mais ce sont nos souffrances qu’il porte,
nos misères dont il est accablé.
Le châtiment qui nous rend la paix est sur lui,
et c’est grâce à ses plaies
que nous sommes guéris.
Oraison : Regarde, Seigneur, nous t’en prions, la famille qui t’appartient : c’est pour elle que Jésus, le Christ, notre Seigneur, ne refusa pas d’être livré aux mains des méchants ni de subir le supplice de la croix. Lui qui règne.
Que le Seigneur nous bénisse,
qu’il nous garde de tout mal,
et nous conduise à la vie éternelle. Amen.
Messe chrismale : Homélie de Benoît XVI
6 avril, 2007
du site Zenith:
2007-04-05
Messe chrismale : Homélie de Benoît XVI
ROME, Jeudi 5 avril 2007 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte de l’homélie que le pape Benoît XVI a prononcée ce jeudi matin, lors de la messe chrismale, en la Basilique Saint-Pierre. Au cours de la célébration, après le renouvellement des promesses sacerdotales, a eu lieu la bénédiction de l’huile des catéchumènes, de l’huile des malades et du Saint Chrême.
* * *
Chers frères et sœurs,
L’écrivain russe Léon Tolstoï raconte, dans un court récit, l’histoire d’un souverain sévère qui demanda à ses prêtres et à ses sages de lui montrer Dieu afin qu’il puisse le voir. Les sages ne furent pas en mesure de satisfaire son désir. Alors un pasteur, qui était à peine rentré des champs, se proposa d’assumer la tâche des prêtres et des sages. Le roi apprit de lui que ses yeux n’étaient pas suffisants pour voir Dieu. Il voulut alors, cependant, au moins savoir ce que Dieu faisait. « Pour pouvoir répondre à ta question — dit le pasteur au souverain — nous devons échanger nos vêtements ». Avec hésitation, mais toutefois poussé par la curiosité pour l’information attendue, le souverain y consentit ; il remit ses vêtements royaux au pasteur et se fit revêtir du simple habit de l’homme pauvre. Et voilà alors la réponse qu’il entendit : « C’est cela que Dieu fait ». De fait, le Fils de Dieu — vrai Dieu né du vrai Dieu — a abandonné sa splendeur divine : «…il se dépouilla lui-même, en prenant la condition de serviteur. Devenu semblable aux hommes et reconnu comme un homme à son comportement, il s’est abaissé lui-même… jusqu’à mourir sur une croix » (cf. Ph 2, 6sq). Dieu a accompli — comme le disent les Pères — le sacrum commercium, l’échange saint : il a assumé ce qui était à nous, afin que nous puissions recevoir ce qui était à lui, devenir semblables à Dieu.
Saint Paul, à propos de ce qui se passe lors du Baptême, utilise explicitement l’image du vêtement : « En effet, vous tous que le baptême a unis au Christ, vous avez revêtu le Christ » (Gal 3, 27). Voilà ce qui s’accomplit dans le Baptême : nous nous revêtons du Christ, Il nous donne ses vêtements et ceux-ci ne sont pas quelque chose d’extérieur. Cela signifie que nous entrons dans une communion existentielle avec Lui, que son être et le nôtre confluent, s’interpénètrent réciproquement. « Ce n’est plus moi qui vit, mais le Christ qui vit en moi » — c’est ainsi que saint Paul décrit l’événement de son baptême dans la Lettre aux Galates (2, 2). Le Christ a mis nos vêtements : la douleur et la joie de l’être humain, la faim, la soif, la fatigue, les espérances et les déceptions, la peur de la mort, toutes nos angoisses jusqu’à la mort. Et il nous a donné ses « vêtements ». Ce qu’il expose dans la Lettre aux Galates comme simple « fait » du Baptême — le don du nouvel être — Paul nous le présente dans la Lettre aux Ephésiens comme un devoir permanent : « Il s’agit de vous défaire de votre conduite d’autrefois, de l’homme ancien qui est en vous… Adoptez le comportement de l’homme nouveau, créé saint et juste dans la vérité, à l’image de Dieu. Débarrassez-vous donc du mensonge, et dites toute la vérité à votre prochain, parce que nous sommes membres les uns des autres. Si vous êtes en colère ne tombez pas dans le péché…» (Ep 4, 22-26).
Cette théologie du Baptême revient de manière nouvelle et avec une nouvelle insistance dans l’Ordination sacerdotale. De même que dans le baptême est effectué un « échange de vêtements », un échange de destin, une nouvelle communion existentielle avec le Christ, de même dans le sacerdoce a lieu un échange : dans l’administration des sacrements le prêtre agit et parle désormais « in persona Christi ». Dans les saints mystères, il ne se présente pas lui-même et ne parle pas en s’exprimant lui-même, mais il parle pour l’Autre — pour le Christ. Ainsi, dans les Sacrements devient visible de manière dramatique ce que signifie être prêtre en général ; ce que nous avons exprimé avec notre « Adsum — je suis prêt », au cours de la consécration sacerdotale : je suis ici pour que tu puisses disposer de moi. Nous nous mettons à la disposition de Celui « qui est mort pour tous, afin que les vivants n’aient plus leur vie centrée sur eux-mêmes…» (2 Co 5, 15). Nous mettre à la disposition du Christ signifie que nous nous laissons attirer dans son « pour tous » : en étant avec Lui, nous pouvons être véritablement « pour tous ».
In persona Christi — au moment de l’Ordination sacerdotale, l’Eglise a rendu visible et tangible pour nous cette réalité des « vêtements nouveaux », même extérieurement, car nous avons été revêtus des ornements liturgiques. Dans ce geste extérieur, celle-ci veut mettre pour nous en évidence l’événement intérieur et la tâche qui en découle pour nous : revêtir le Christ ; se donner à Lui comme Il s’est donné à nous. Cet événement, « se revêtir du Christ », est toujours représenté à nouveau lors de chaque Messe à travers le fait que nous nous revêtons des ornements liturgiques. Les mettre doit représenter plus qu’un fait extérieur pour nous : c’est entrer toujours à nouveau dans le « oui » de notre charge — dans ce « non plus moi » du baptême que l’Ordination sacerdotale nous donne de manière nouvelle et, dans le même temps, nous demande. Le fait que nous soyons à l’autel, revêtus des parements liturgiques, doit immédiatement rendre visible aux personnes présentes et à nous-mêmes que nous sommes là « en la personne d’un Autre ». Les habits sacerdotaux, tels qu’ils se sont développés au cours du temps, sont une profonde expression symbolique de ce que signifie le sacerdoce. Chers confrères, je voudrais donc expliquer en ce Jeudi Saint l’essence du ministère sacerdotal en interprétant les ornements liturgiques qui, pour leur part, veulent précisément illustrer ce que signifie « se revêtir du Christ », parler et agir « in persona Christi ».
L’acte de revêtir les vêtements sacerdotaux était autrefois accompagné par des prières qui nous aident à mieux comprendre chaque élément du ministère sacerdotal. En commençant par l’amict. Par le passé — et aujourd’hui encore dans les ordres monastiques —, il était tout d’abord placé sur la tête, comme une sorte de capuche, devenant ainsi un symbole de la discipline des sens et de la concentration de la pensée nécessaire pour une juste célébration de la Messe. Les pensées ne doivent pas errer ici et là derrière les préoccupations et les attentes de ma vie quotidienne; mes sens ne doivent pas être attirés par ce qui, à l’intérieur de l’église, voudrait fortuitement attirer les yeux et les oreilles. Mon cœur doit docilement s’ouvrir à la parole de Dieu et être recueilli dans la prière de l’Eglise, afin que ma pensée reçoive son orientation des paroles de l’annonce et de la prière. Et le regard de mon cœur doit être tourné vers le Seigneur qui est parmi nous : voilà ce que signifie ars celebrandi — la juste façon de célébrer. Si je suis ainsi avec le Seigneur, alors avec mon écoute, ma façon de parler et d’agir, j’attire également les autres personnes dans la communion avec Lui.
Les textes de la prière qui interprètent l’aube et l’étole vont tous deux dans la même direction. Ils évoquent le vêtement de fête que le maître donne au fils prodigue revenu à la maison, sale et en haillons. Lorsque nous nous approchons de la liturgie pour agir en la personne du Christ, nous nous apercevons tous combien nous sommes loin de Lui ; combien il existe de saleté dans notre vie. Lui seul peut nous donner le vêtement de fête, nous rendre digne de présider à sa table, d’être à son service. Ainsi, les prières rappellent également les paroles de l’Apocalypse selon lequel les vêtements des 144.000 élus, non par leurs mérites, étaient dignes de Dieu. L’Apocalypse commente qu’ils avaient lavé leurs vêtements dans le sang de l’Agneau et que, de cette façon, ils étaient devenus blancs comme la lumière (cf. Ap 7, 14). Dès l’enfance, je me suis demandé : mais lorsqu’on lave une chose dans le sang, elle ne devient certainement pas blanche ! La réponse est : le « sang de l’Agneau » est l’Amour du Christ crucifié. C’est cet amour qui rend propres nos vêtements sales ; qui rend vrai notre esprit obscurci et l’illumine ; qui, malgré toutes nos ténèbres, nous transforme en « lumière du Seigneur ». En revêtant l’aube, nous devrions nous rappeler : Il a souffert pour moi aussi. Ce n’est que parce que son amour est plus grand que tous mes péchés, que je peux le représenter et être témoin de sa lumière.
Mais avec le vêtement de lumière que le Seigneur nous a donné lors du Baptême et, de manière nouvelle, lors de l’Ordination sacerdotale, nous pouvons aussi penser au vêtement nuptial, dont Il nous parle dans la parabole du banquet de Dieu. Dans les homélies de saint Grégoire le Grand, j’ai trouvé à ce propos une réflexion digne d’intérêt. Grégoire distingue entre la version de Luc de la parabole et celle de Matthieu. Il est convaincu que la parabole de Luc parle du banquet nuptial eschatologique, alors que — selon lui — la version transmise par Matthieu traiterait de l’anticipation de ce banquet nuptial dans la liturgie et dans la vie de l’Eglise. En effet, chez Matthieu — et seulement chez Matthieu — le roi vient dans la salle remplie de monde pour voir ses hôtes. Et voilà qu’au sein de cette multitude, il trouve aussi un hôte sans habit nuptial, que l’on jette ensuite dehors dans les ténèbres. Alors Grégoire se demande : « Mais quelle espèce d’habit lui manquait-il ? Tous ceux qui sont réunis dans l’Eglise ont reçu l’habit nouveau du baptême et de la foi ; autrement ils ne seraient pas dans l’Eglise. Que manque-t-il donc encore ? Quel habit nuptial doit encore être ajouté ? ». Le Pape répond : « Le vêtement de l’amour. Et, malheureusement, parmi ses hôtes auxquels il avait donné l’habit nouveau, le vêtement blanc de la renaissance, le roi en trouve certains qui ne portent pas le vêtement de couleur pourpre du double amour envers Dieu et envers le prochain. « Dans quelle condition voulons-nous nous approcher de la fête du ciel, si nous ne portons pas l’habit nuptial — c’est-à-dire l’amour, qui seul peut nous rendre beaux ? », demande le Pape. Sans l’amour, une personne est obscure intérieurement. Les ténèbres extérieures, dont parle l’Evangile, ne sont que le reflet de la cécité intérieure du cœur (cf. Hom. 38, 8-13).
A présent, alors que nous nous apprêtons à célébrer la Messe, nous devrions nous demander si nous portons cet habit de l’amour. Demandons au Seigneur d’éloigner toute hostilité en nous, de nous ôter tout sens d’autosuffisance et de nous revêtir véritablement du vêtement de l’amour, afin que nous soyons des personnes lumineuses, qui n’appartiennent pas aux ténèbres.
Pour finir, encore quelques mots à propos de la chasuble. La prière traditionnelle, lorsque l’on revêt la chasuble, voit représenté en celle-ci le joug du Seigneur qui, en tant que prêtres, nous a été imposé. Et elle rappelle la parole de Jésus qui nous invite à porter son joug et à apprendre de Lui, qui est « doux et humble de cœur » (Mt 11, 29). Porter le joug du Seigneur signifie tout d’abord : apprendre de Lui. Etre toujours disposés à aller à son école. De Lui, nous devons apprendre la douceur et l’humilité — l’humilité de Dieu qui se montre dans son être homme. Saint Grégoire de Nazianze s’est demandé une fois pourquoi Dieu avait voulu se faire homme. La partie la plus importante, et pour moi la plus touchante de sa réponse est : « Dieu voulait se rendre compte de ce que signifie pour nous l’obéissance et il voulait tout mesurer sur la base de sa propre souffrance, de la création de son amour pour nous. De cette façon, Il peut directement connaître en lui-même ce que nous ressentons — combien il nous est demandé, combien d’indulgence nous méritons — en calculant, sur la base de sa souffrance, notre faiblesse » (Discours 30; Disc. théol. IV, 6). Nous voudrions parfois dire à Jésus : Seigneur, ton joug n’est pas du tout léger. Il est même terriblement lourd dans ce monde. Mais, ensuite, en Le regardant, Lui qui a tout porté — qui a éprouvé en lui l’obéissance, la faiblesse, la douleur, toute l’obscurité —, toutes nos plaintes se taisent. Son joug est d’aimer avec Lui. Et plus nous L’aimons, plus nous devenons avec Lui des personnes qui aiment, plus son joug apparemment lourd devient léger pour nous.
Prions-le de nous aider à devenir avec Lui des personnes qui aiment, pour ressentir ainsi toujours davantage comme il est beau de porter son joug. Amen.
Messe de la dernière Cène : Homélie de Benoît XVI
6 avril, 2007
du site EAQ:
2007-04-05
Messe de la dernière Cène : Homélie de Benoît XVI
ROME, Jeudi 5 avril 2007 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte de l’homélie que le pape Benoît XVI a prononcée ce jeudi après-midi, lors de la messe de la Cène du Seigneur, en la Basilique Saint-Jean-de-Latran. Au cours de la célébration, le pape a, comme de coutume le Jeudi Saint, lavé les pieds à douze hommes.
* * *
Chers frères et sœurs,
Dans la lecture du Livre de l’Exode, que nous venons à peine d’écouter, est décrite la célébration de la Pâque d’Israël, telle qu’elle était réglementée dans la Loi mosaïque. A l’origine, il a pu y avoir une fête de printemps des nomades. Pour Israël, toutefois, cela s’était transformé en une fête de commémoration, d’action de grâce et, dans le même temps, d’espérance. Au centre de la Cène pascale, ordonnée selon des règles liturgiques déterminées, se trouvait l’agneau comme symbole de la libération de l’esclavage en Egypte. C’est pourquoi la haggadah pascale était une partie intégrante du repas à base d’agneau : le souvenir narratif que c’était Dieu lui-même qui avait libéré Israël « la main haute ». Lui, le Dieu mystérieux et caché, s’était révélé plus fort que le pharaon avec tout le pouvoir qu’il avait à sa disposition. Israël ne devait pas oublier que Dieu avait personnellement pris en main l’histoire de son peuple et que cette histoire était sans cesse fondée sur la communion avec Dieu. Israël ne devait pas oublier Dieu.
La parole de la commémoration était entourée par des paroles de louange et d’action de grâce tirées des Psaumes. Rendre grâce et bénir Dieu atteignait son sommet dans la berakha, qui en grec est appelée eulogia ou eucharistia : bénir Dieu devient une bénédiction pour ceux qui le bénissent. L’offrande donnée à Dieu revient bénie à l’homme. Tout cela élevait un pont entre le passé et le présent et vers l’avenir : la libération d’Israël n’était pas encore accomplie. La nation souffrait encore comme petit peuple dans le cadre des tensions entre les grandes puissances. Se rappeler avec gratitude de l’action de Dieu par le passé devenait ainsi dans le même temps une supplication et une espérance : Mène à bien ce que tu as commencé ! Donne-nous la liberté définitive !
C’est cette cène aux multiples significations que Jésus célébra avec les siens le soir avant sa Passion. Sur la base de ce contexte nous devons comprendre la nouvelle Pâque, qu’Il nous a donnée dans la Sainte Eucharistie. Dans les récits des évangélistes il existe une contradiction apparente entre l’Evangile de Jean, d’une part, et ce que, de l’autre, nous communiquent Matthieu, Marc et Luc. Selon Jean, Jésus mourut sur la croix précisément au moment où, dans le temple, étaient immolés les agneaux pascals. Sa mort et le sacrifice des agneaux coïncidèrent. Cela signifie cependant qu’Il mourut la veille de Pâques et qu’il ne put donc pas célébrer personnellement la cène pascale — c’est tout au moins ce qu’il semble. En revanche, selon les trois Evangiles synoptiques, la Dernière Cène de Jésus fut une cène pascale. Dans la forme traditionnelle de cette cène il a inséré la nouveauté du don de son corps et de son sang. Cette contradiction semblait insoluble jusqu’il y a quelques années encore. La plupart des exégètes était de l’avis que Jean n’avait pas voulu nous communiquer la véritable date historique de la mort de Jésus, mais avait choisi une date symbolique pour rendre ainsi évidente la vérité la plus profonde : Jésus était le nouvel et véritable agneau qui a répandu son sang pour nous tous.
La découverte des écrits de Qumrân nous a entre-temps conduits à une possible solution convaincante qui, bien que n’ayant pas encore été acceptée par tous, est hautement probable. Nous sommes à présent en mesure de dire que ce que Jean a rapporté est historiquement précis. Jésus a réellement versé son sang la veille de la Pâque, à l’heure de l’immolation des agneaux. Il a cependant célébré la Pâque avec ses disciples probablement selon le calendrier de Qumrân, donc au moins un jour avant — il l’a célébrée sans agneau, comme la communauté de Qumrân, qui ne reconnaissait pas le temple d’Hérode et qui était en attente du nouveau temple. Jésus a donc célébré la Pâque sans agneau – non, pas sans agneau : au lieu de l’agneau il s’est donné lui-même, son corps et son sang. Il a ainsi anticipé sa mort de manière cohérente avec sa parole : « Personne n’a pu me l’enlever [ma vie] : je la donne de moi-même » (Jn 10, 18). Au moment où il présentait à ses disciples son corps et son sang, Il accomplissait réellement cette affirmation. Il a offert lui-même sa vie. Ce n’est qu’ainsi que l’antique Pâque atteignait son véritable sens.
Saint Jean Chrysostome, dans ses catéchèses eucharistiques a un jour écrit : Que dis-tu, Moïse ? Le sang de l’agneau purifie les hommes ? Il les sauve de la mort ? Comment le sang d’un animal peut-il purifier les hommes, sauver les hommes, avoir du pouvoir contre la mort ? De fait — poursuit Chrysostome — l’agneau ne pouvait constituer qu’un geste symbolique et donc l’expression de l’attente et de l’espérance en Quelqu’un qui aurait été en mesure d’accomplir ce que le sacrifice d’un animal n’était pas capable de faire. Jésus célébra la Pâque sans agneau et sans temple et, toutefois, non sans agneau et sans temple. Il était lui-même l’Agneau attendu, le véritable, comme l’avait annoncé Jean Baptiste au début du ministère public de Jésus : « Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde » (Jn 1, 29). Et c’est lui-même qui est le véritable temple, le temple vivant, dans lequel Dieu habite et dans lequel nous pouvons rencontrer Dieu et l’adorer. Son sang, l’amour de Celui qui est en même temps Fils de Dieu et véritable homme, l’un de nous, ce sang peut sauver. Son amour, cet amour dans lequel Il se donne librement pour nous, est ce qui nous sauve. Le geste nostalgique, d’une certaine manière privé d’efficacité, qui était l’immolation de l’agneau innocent et immaculé, a trouvé une réponse dans Celui qui est devenu pour nous à la fois Agneau et Temple.
Ainsi, au centre de la Pâque nouvelle de Jésus se trouvait la Croix. De la croix venait le don nouveau apporté par Lui. Et ainsi, celle-ci demeure toujours dans l’Eucharistie, dans laquelle nous pouvons célébrer avec les Apôtres au fil du temps, la nouvelle Pâque. Le don vient de la croix du Christ. « Personne n’a pu me l’enlever [ma vie] : je la donne de moi-même ». Maintenant, c’est à nous qu’il la donne. La haggadah pascal, la commémoration de l’action salvifique de Dieu est devenue mémoire de la croix et résurrection du Christ – une mémoire qui ne rappelle pas simplement le passé mais nous attire en la présence de l’amour du Christ. Et ainsi, la berakha, la prière de bénédiction et d’action de grâce d’Israël, est devenue notre célébration eucharistique, dans laquelle le Seigneur bénit nos dons – pain et vin – pour se donner lui-même à travers eux. Prions le Seigneur de nous aider à comprendre toujours plus profondément ce merveilleux mystère, à l’aimer toujours davantage et par là même à l’aimer Lui-même toujours davantage. Prions-le de nous attirer toujours davantage en lui avec la sainte communion. Prions-le de nous aider à ne pas garder notre vie pour nous-mêmes mais à la Lui donner et ainsi à agir avec Lui, afin que les hommes trouvent la vie – la vie véritable qui ne peut venir que de Celui qui est Lui-même le Chemin, la Vérité et la Vie. Amen.