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Jeudi Saint, Cène (5/4) : Commentaire

4 avril, 2007

 du site:

http://www.portstnicolas.org/spip.php?article2092

Jeudi Saint, Cène (5/4) : Commentaire

Depuis que la réforme liturgique a redonné aux jours saints leur caractère éminemment pascal, le Jeudi saint a retrouvé su véritable « mystique », la célébration de ce quil y a de plus central, dunique dans notre foi : le passage (la Pâque) de la mort à la résurrection.

Laspect mort, mais dune mort libératrice est déjà indiqué dans la première lecture où la libération juive est scellée dans le sacrifice dun agneau, agneau qui préfigure le Christ, lAgneau de Dieu qui enlève le péché (laliénation) du monde et qui nous donne ainsi notre vraie liberté. Mais cest surtout Paul qui met en valeur le lien étroit entre leucharistie et la mort du Christ en croix, quand il cite les mots de Jésus : ceci est mon corps, mais son corps qui est (livré) pour vous ; cette coupe est la nouvelle Alliance, mais en mon sang versé sur la croix. Et Paul de conclure : Chaque fois que vous mangerez ce pain et que vous boirez à cette coupe, vous proclamerez la mort du Seigneur. Enfin la méditation culmine dans cet étrange récit du lavement des pieds qui semble être un hors-doeuvre ici, mais dont le geste renvoie au don entier jusquau bout du Christ en croix.L

Eucharistie est donc en relation directe avec la mort du Christ. Mais elle lest tout autant avec la résurrection de Jésus. Sans doute, ce soir là, historiquement parlant, Jésus nétait pas encore glorifié. Mais nous qui célébrons aujourdhui la Cène, nous la célébrons avec le Christ de gloire. Cest le Ressuscité qui est parmi nous et cest dans lEsprit qui la glorifié que nous le recevons. Cest le repas de notre libération glorieuse que nous prenons.

De notre libération ! Oui, cest elle que nous célébrons dès ce soir, comme nous la célébrerons encore demain et dans la Nuit pascale. Le grand motif daction de grâce, la raison de célébrer, les voilà : Christ ta libéré de labsurde dune vie qui finit dans la mort. Christ ta introduit dans une réussite unique dont su résurrection est le point de départ.Cette libération, Christ te la donne. Encore te faut-il l

accepter. Te laisser libérer. Quil est difficile de quitter nos sécurités, de laisser tomber nos chaînes dorées, dabandonner nos petits projets pour nous exposer au grand vint, au souffle de lEsprit ! Ne crains pas de sortir de toi-même pour entrer dans lAmour. Laisse les « nourritures terrestres », prend le Pain de vie. Dégage-toi, engage-toi. Voilà la vraie liturgie de la grande Pâque.

Pour peu qui nous réalisions ce que nous célébrons en ce Jeudi saint (et à chaque messe) notre coeur frémit dune grande joie mêlée de crainte. Longtemps le Jeudi saint ne fut quun jour de préparation au triduum pascal et surtout à la Nuit de Pâques. On y pratiquait la réconciliation des pêcheurs publics pour leur permettre la communion pendant la Nuit sainte. On y consacrait les huiles nécessaires aux baptêmes de la Veillée pascale.Aujourd

hui la réconciliation se fait tout au long du Carême et la messe chrismale se célèbre, elle aussi, plus tôt, le Jeudi saint étant déjà surchargé pour lévêque et ses prêtres. Loffice se présente comme une polyphonie où se chevauchent plusieurs mélodies :

Il y a dabord le chant de lAgneau pascal : Jésus est maintenant cet agneau immolé, libérateur, donné en nourriture (première lecture). Il y a le thème du sacerdoce : cest le jour où Jésus dit à toute son Eglise : Faîtes ceci en mémoire de moi ; mais il choisit les Douze auxquels il confie la communauté et, particulièrement, son Eucharistie. Il y a enfin la mélodie de lAmour. Il est significatif que la liturgie nous donne – au lieu du récit de la Cène elle-même quon serait endroit dattendre ici – celui du lavement des pieds, geste situé dans lamour jusquau bout. Lorigine de la messe, cest le sacrifice du Christ jusquà lextrême. La fin, le but de la messe, cest encore le don, loubli de nous-mêmes dans le service et lamour de nos frères. Le lavement des pieds exprime éloquemment lun et lautre.

Les lectures forment un ensemble cohérent sur lhistoire du salut dans ses célébrations. LAncien Testament nous rapporte comment se célébrait la Pâque juive : Paul nous raconte la célébration de la Pâque du Christ et lévangile nous indique comment nous devons célébrer notre Pâque.

Première lecture : Ex 12,1-8.11-14

Cette lecture contient les prescriptions rituelles pour le repas pascal juif, repas dont on raconte et les origines historiques et la signification.

La libération dEgypte sest faite grâce au sang dun agneau mis sur les portes des maisons juives qui furent ainsi épargnées lors de la Pâque, du passage de lange exterminateur. Le repas rituel en sera le mémorial. Ce repas a un caractère familial, cest la famille qui se réunit pour manger lagneau immolé dans toute lassemblée de la communauté dIsraël. Cest un repas à la hâte, la ceinture aux reins, les sandales aux pieds, le bâton à la main, prêt pour la route. Quand on sait enfin, par des textes liturgiques juifs, que la dominante était laction de grâce pour la libération, on est en possession de tous les éléments majeurs de ce repas rituel dont Jésus garde la structure, mais change la signification. Ce repas juif est ainsi devenu notre messe.

Un mémorial dune libération bien plus profonde, celle acquise par le sang de Jésus, le vrai Agneau pascal. La nouvelle famille, la nouvelle assemblée dIsraël, cest notre communauté, lEglise chrétienne. Elle se rassemble pour faire action de grâce et prendre le viatique, le pain pour la route, cheminant vers Dieu les reins ceints… attendant sa venue dans la gloire. On voit ici combien Ancien et Nouveau Testaments se tiennent, la célébration du premier introduisant la liturgie du second. Aussi gagne-t-on à lire cette page en regard de la deuxième lecture ou encore dun récit évangélique de la Cène, chez Matthieu 26,26 par exemple. On lève la coupe et on dit : Nous tenons à remercier, à louer, à glorifier, à vanter, à exalter, à célébrer, à bénir, à élever et à magnifier Celui qui a fait toutes ces merveilles pour nos pères et pour nous. Desclaves il a fait de nous des hommes libres, il nous a fait passer de laffliction à la joie, du deuil à la fête, des ténèbres à la lumière éclatante, de la servitude à la délivrance. Récitons-lui un cantique nouveau. Alléluia. (Haggadah de Pessach, Rituel de la Pâque juive).

Les évangiles prennent soin de montrer que laction de grâce de la Pâque juive a été relayée par celle de Jésus, lui qui nous a donné une bien autre libération dans « le sang de lAlliance nouvelle et éternelle ».

Psaume : Ps 115

Comment te rendrai-je grâce, Seigneur, sinon par cette coupe du salut qui nous communique la libération de ton Fils. Cette eucharistie nous rappelle que Jésus a dû mourir et quil est ressuscité : tu as brisé ses chaînes. Je toffrirai donc le sacrifice daction de grâce et, avec le Christ dans et par lequel je prie, jinvoquerai ton nom pour te louer.

Deuxième lecture : 1 Co 11,23-26

La première lettre aux Corinthiens ayant été écrite vers 56, soit environ 25 ans après les faits et bien avant les évangiles, nous sommes ici en présence du récit le plus ancien de la Cène de Jésus. On ne le lit pas sans émotion quand on sait, de plus, que Paul a le souci non dinventer, mais de transmettre ce qui est déjà tradition et qui vient directement du Seigneur.

On y trouve la merveilleuse trilogie : la mémoire du Christ livré, donnant son corps pour nous ; la présence (quand vous en mangez et en buvez vous me recevez, car ceci est mon corps et mon sang) et lannonce de lachèvement (dans lespérance de sa venue). Lacclamation après la consécration sinspire directement de ce passage qui nous aide à embrasser dun seul coup doeil toute lhistoire du Salut.Chaque fois que vous boirez de cette coupe, faites cela en mémoire de moi. Simple souvenir ? Sûrement pas. L

alliance nouvelle est à refaire à chaque eucharistie. Quel engagement ! De quoi hésiter, pour peu quon y réfléchisse. Le souci de Paul de mettre la Cène en relation avec la passion du Christ (corps donné pour vous, coupe de lalliance) doit nous aider à saisir le caractère dynamique de leucharistie : elle est plus que simple présence du Christ, elle est présence libératrice pour nous – et nous devons être, nous-mêmes, présence libératrice pour les autres.

Si vous ne mangez… Si vous ne buvez : Quand donc se décidera-t-on, pour les fêtes du moins, à laisser les fidèles communier sous les deux espèces ? Même un prêtre seul peut présenter coupe et calice ; les fidèles prennent la sainte hostie et la trempent dans le précieux sang. Est-ce compliqué ? Anti-hygiénique ?

Évangile : Jn 13,1-15

Jésus, avant de laisser les apôtres à eux-mêmes, et prévoyant leurs faiblesses, leurs disputes pour les honneurs ainsi que le danger dabuser de leur position de chefs, shumilie devant eux, se fait leur serviteur en leur lavant les pieds afin de leur donner, en cette heure suprême, lexemple du service, lui le Maître et le Seigneur. Si cette leçon vaut particulièrement pour les disciples appelés à être « maîtres » dans lEglise, elle vaut évidemment pour tout disciple du Christ. Qui ne se sentirait concerné ?

Mais il y a plus que cette leçon de service. Le cadre indique autre chose : le lavement des pieds a lieu avant la fête de la Pâque, où est immolé lagneau pascal ; cest lheure de Jésus, celle de sa passion, lheure de passer de ce monde à son Père : déjà Judas a lintention de le livrer. Alors il donne à ses disciples un signe de ce quil va faire dans quelques heures, un signe de cet amour jusquau bout, un signe de son abaissement extrême sur la croix. En versant de leau sur les pieds des disciples, il exprime ce quil va faire : verser son sang. Pierre ne comprend pas, ce nest quaprès les faits, plus tard, à la résurrection, quil saisira la portée de ce mime étrange : sabaisser, se donner jusquau bout. Comme Pierre, nous ne comprenons pas maintenant (avec notre raison).Alors nous protestons avec un : non, tu ne me laveras pas les pieds, non jamais ! Manque de simplicité ou refus inconscient de suivre Jésus dans son jusqu

au bout ? Jésus répond : Si je ne te lave pas les pieds, tu nauras pas de part avec moi. Oui, pour Jésus il sagit davoir part à son abaissement, à son amour jusquau bout. – si nous voulons avoir part avec lui, à sa gloire.

Cest un exemple que je vous ai donné, afin que vous fassiez vous aussi comme jai fait pour vous. Voilà qui dépasse, et de loin, les petits services et la gentillesse des rapports. Allez, vous aussi, jusquau don entier de vous-mêmes, comme jai fait, sur la croix, pour vous. Pour celui qui nest pas familier du style de Jean, celle deuxième interprétation semble tirée par les cheveux. Mais, sans elle, tout le cadre de la passion, la réaction de Pierre et la réponse de Jésus perdent leur sens.

Doux récits étroitement imbriqués dans un seul geste à double signification : lun moral (lhumble service), lautre théologique (labaissement du Christ dans sa passion) ; lun nous presse de servir humblement nos frères, lautre nous dispose à comprendre – un peu – limpossible folie de lamour, pour que nous fassions de même. Que lon ne sétonne pas de voir Jean « oublier » linstitution de lEucharistie. Outre quil consacre un chapitre entier (le 6e) au Christ pain de vie, il exprime ici, dans le geste de sabaisser, de shumilier pour laver les pieds des disciples, un aspect majeur de lEucharistie : rappeler lhumiliation, labaissement du Christ dans sa mort. Jésus na pas fait de discours sur labolition de lesclavage, alors un pilier de la société. Mais Il a renversé les rôles, il sest fait serviteur et esclave. Il a ainsi miné le système de lintérieur. Rien de plus efficace.

Lavement des pieds

Après lhomélie, les rites prévoient, sans limposer, le lavement des pieds, geste familier et fréquent au temps de Jésus. Une certaine gêne, le sentiment dun geste artificiel ne permettent pas, dans beaucoup de cas, de donner au rite une expressivité pastorale… sauf pour celui qui fait ou laisse faire sur lui ce geste dhumilité.

Il faut, en tout cas, préserver le rite dun simple effet de curiosité ou du théâtral. La communauté doit être préparée.

Après tout, Jésus na pas demandé que les disciples lavent physiquement les pieds des autres, mais quils prennent exemple sur son abaissement pour trouver des gestes de respect, daccueil, dhumilité envers leurs frères, et de préférence envers ceux qui sont moins bien placés queux. Servir une personne âgée, laver son corps, son linge, lentourer de respect… sengager pour les classes pauvres, les marginaux… sont des manières – parmi dautres – de traduire en notre temps le geste de Jésus. Une procession doffrandes où lon verse son carême de partage, des dons en nature… la participation des enfants qui présentent la tirelire de leur privations volontaires… exprimeraient lamour fraternel qui, tel le parfum de Madeleine, devrait remplir cette eucharistie.

Communion et procession de la sainte réserve

La communion doit, ce soir, revêtir une chaude solennité : lumières, fleurs, nappes, un rassemblement plus compact des fidèles, si possible autour dune longue table ou en cercle autour de lautel, avec du pain et du vin suffisants pour une communion sous la deux espèces, un geste de paix, avant la communion, plus démonstratif quà laccoutumée ; surtout une ambiance dintimité, de joie contenue – des chants dignes, beaucoup de silence… bref le souci de faire saisir avec plus dintensité ce qui souvent est fait par habitude.

Après la communion le célébrant porte en procession, au lieu prévu, la sainte réserve qui servira à la communion du Vendredi saint. Il est incongru de faire de ce lieu un tombeau au Christ. Parce que la présence eucharistique est une présence glorieuse, et parce que, le jeudi soir, le Christ nest pas encore au tombeau. Il est souhaitable que les fidèles poursuivent ladoration pendant une partie de la nuit : celui qui a partagé la Cène avec Jésus est aussi appelé à veiller avec lui. Un silence priant, parfois entrecoupé dextraits du discours des adieux, de chants, dintercessions vaut mieux que les explications, bavardages. Demeurez avec moi et veillez.L

Eglise garde certains mots plus difficiles, parce quils ont une base scripturaire et sont irremplaçables. Ainsi les mots Mémoire et Mémorial. Quand Jésus dit : « Faites ceci en mémoire de moi », on ne peut traduire « en souvenir de moi » sans trahir un aspect important. Le mot biblique mémoire exprime le souvenir, mais plus que cela. Un peu comme lorsque des époux célèbrent leurs noces dor ou dargent, ils se souviennent du jour de leur mariage, mais cet engagement dalors nest pas du simple passé, il vit encore, il est là, présent, actualisé. Ainsi quand nous faisons leucharistie en mémoire de Jésus, nous faisons plus que nous souvenir de la Cène ou de la passion : le Christ ressuscité est présent parmi nous avec toutes ses actions dalors et il nous y fait communier. Cest dans ce sens plus profond que nous faisons mémoire et que la messe est un mémorial. Parfois on utilise léquivalent grec anamnèse. 

Réflexions matinales sur le lavement des pieds.

4 avril, 2007

du Blog:

http://giboulee.blogspot.com/2006/04/lavement-des-pieds-et-buisson-ardent.html  Lavement des pieds et buisson ardent. 

Catherine Lestang  jeudi 13 avril 2006 Jeudi Saint. 

Réflexions matinales sur le lavement des pieds.  Quand Jésus lave les pieds des disciples il fait un geste bien différent du lavage des mains des pharisiens avant de prendre le repas, tout repas. Il enseigne quelque chose et il révèle qui Il est. Ce geste m’a fait penser à ce qui se passe pour Moïse: « enlève tes sandales car le sol que tu foules est saint » quand il s’approche de ce buisson qui brûle sans se consumer. D’une certaine manière, c’est ce qui va se passer pour Jésus qui semble brûlé par la passion, mais qui redevient autrement vivant après la résurrection. Jésus temple de la présence de l’Esprit est le buisson ardent. 

Et ce qu’Il va créer au cours de ce repas, même si ce n’est pas rapporté par Jean, c’est bien aussi de donner quelque chose qui ne se consume (consomme) pas, qui d’une certaine manière ne se dégrade pas, qui demeure.  Le buisson ardent, c’était le signe de la « présence de YHWH », et ne pas se consumer est totalement en opposition avec les lois de notre univers. Pour Jésus il en va de même. Si on admet qu’Il se rend présent sous ces espèces du pain azyme et du vin, il est bien présence de Dieu parmi les hommes et le fait de la purification est une nécessité pour les humains que nous sommes. Mais là c’est Jésus qui initie le geste, ce qui change peut-être la donne. C’est Lui qui introduit dans un lieu où la vie est présente. 

Pour en revenir à ce geste, il me semble qu’il délimite un dedans et un dehors ou un avant et un après. Pour pénétrer dans le dedans qui va être comme révélation de la présence de dieu (du divin), un geste est nécessaire. A la limite ce lavement des pieds est presque une sorte de baptême (d’ailleurs c’est ce que demande Pierre); le contact de l’eau, mais surtout de Jésus rend pur (comme le lépreux est purifié par le contact avec Jésus).  Avant de rentrer dans le sanctuaire, le saint des saints, le grand prêtre doit procéder à toute une série de purifications pour lui. Or Jésus n’a pas besoin de cela. Mais ceux qui seront ses lieu- tenants en ont besoin, même s’ils ne comprennent pas. 

Ce geste accompli par Jésus renvoie au symbolisme de toute purification. Laver les pieds, enlever la poussière ramassée sur la route, les cailloux, nettoyer peut-être les blessures occasionnées par la marche. Cela peut aussi s’entendre comme « entrer en laissant dehors les scories de la vie », lâcher les préoccupations qui nous prennent la tête, à défaut des pieds. Il s’agit d’évacuer toutes ces préoccupations qui nous encombrent, tout ce faire, tout cet agir, qui nous remplissent en permanence, qui font comme une carapace rigide qui nous empêche de bouger, d’être vivants.  Mais il y a aussi les mots de Jésus pour commenter ce geste : « vous m’appelez maître et Seigneur et vous avez raison… vous devez vous laver les pieds les uns les autres ». Jésus qui a été le roi d’un jour en entrant à Jérusalem, affirme qu’il est à la fois maître (rabbi, savant, enseignant, initiateur, éveilleur) et Seigneur, c’est-à-dire Chef, lui qui est d’origine populaire, qui n’est pas oint par les autorités. 

Et pour entrer dans cet autre lieu il faut être purifié par Lui, mais aussi renoncer aux prérogatives du pouvoir, du « être servi ».  Si l’on repense à la demande des fils de Zébédée juste après la transfiguration, c’est bien cela le désir caché des apôtres et le nôtre si nous sommes un peu objectifs! C’est peut-être aussi parce que Judas a compris que cela ne sera pas, qu’il se décide à partir, à trahir. 

Alors une fois ce geste fait, la reprise du repas peut se faire, mais même si Jean ne le dit pas, la tonalité est autre, comme si c’était une autre table, un autre repas. Un repas c’est un partage. Ce repas là est par définition un mémorial. On va passer d’un mémorial de libération de l’esclavage en Egypte à un autre mémorial, une autre libération.  Il y a le partage du pain, le pain azyme; (pain du pauvre, du fuyard, rappel de la manne) et le partage de la coupe (sang répandu sur les linteaux qui permet à Israël d’échapper à la perte de sa descendance). Ce soir là, c’est comme séparé. Mais bientôt cela va être réuni dans un corps qui se donne et qui se vide, qui perd son esprit. 

Le faire mémoire remplace le mémorial de Moïse. Mais cela ne devient réellement plénitude que dans l’après coup de la résurrection, où ce qui est séparé, mortel et signe de mort redevient vie.  Là l’important c’est que comme dans une sorte de testament Jésus donne une tâche, un « faire » à ceux qui sont ses frères. Et cela est facteur d’union, alors que la désunion est sur le point de se produire. Peut-être faut-il aussi pour rester un peu dans la problématique du buisson ardent, présence de Dieu parmi les hommes, prendre ce mémorial comme la réalisation de l’amour qui unit, qui donne vie, comme le pain et le vin (sang) qui vont devenir la nourriture permettant d’accéder au divin.  

Jean-Paul II dans la « maison du Père » : certitude de Benoît XVI

4 avril, 2007

du site Zenith: 

2007-04-03 

Jean-Paul II dans la « maison du Père » : certitude de Benoît XVI 

Homélie, messe de suffrage 

ROME, Mardi 3 avril 2007 (ZENIT.org) – Benoît XVI affirme qu’il est « certain » de la présence de Jean-Paul II « dans la Maison du Père », et qu’il « s’est véritablement endormi dans le Seigneur ».

Le pape Benoît XVI a présidé une messe en mémoire du serviteur de Dieu Jean-Paul II, le lundi 2 avril à 17 h 30, place Saint-Pierre à l’occasion du deuxième anniversaire de la mort du pape Wojtyla, décédé à 21 h 37 le 2 avril 2005 au palais apostolique du Vatican tandis que la foule l’accompagnait en priant le chapelet place Saint-Pierre.

Au début de la célébration, des jeunes ont scandé en italien « Saint tout de suite », « Santo subito ».

« Nous en sommes certains »
Dans son homélie, en commentant le psaume, le pape a affirmé sa certitude en disant : « Dans la communion des saints, il nous semble les écouter de la voix même du bien-aimé Jean-Paul II, qui de la maison du Père — nous en sommes certain — ne cesse d’accompagner le chemin de l’Eglise: «Espère le Seigneur, sois fort et prends courage; espère le Seigneur» (Ps26, 13-14). Oui, que notre cœur prenne courage, chers frères et sœurs, et qu’il brûle d’espérance! »

La route du don de nous-mêmes au Christ
« Cette invitation dans le cœur, ajoutait le pape, nous poursuivons la célébration eucharistique, en regardant déjà la lumière de la résurrection du Christ, qui brillera lors de la veillée pascale après l’obscurité dramatique du Vendredi Saint. Que le « Totus tuus » du bien-aimé pontife nous incite à le suivre sur la route du don de nous-mêmes au Christ par l’intercession de Marie, et que ce soit précisément Elle, la Vierge Sainte, qui nous l’obtienne, alors que nous confions à ses mains maternelles notre père, notre frère et notre ami afin qu’il repose en Dieu et qu’il se réjouisse dans la paix »
.

Notre action de grâce
D’emblée, Benoît XVI avait rendu grâces à Dieu pour le don de Jean-Paul II à l’Eglise et au monde en disant : « A travers cette célébration, nous voulons avant tout renouveler à Dieu notre action de grâce pour nous l’avoir donné pendant près de 27 ans, en tant que père et guide sûr dans la foi, pasteur zélé et prophète courageux d’espérance, témoin inlassable et serviteur passionné de l’amour de Dieu »
.

Témoignage éloquent
A partir du geste de l’onction de Marie de Béthanie, le pape affirmait : « Il évoque le témoignage lumineux que Jean-Paul II a offert d’un amour pour le Christ sans réserve et sans s’épargner. Le «parfum» de son amour «a empli la maison» (Jn 12, 3), c’est-à-dire toute l’Eglise. Certes, nous en avons profité, nous qui avons été proches de lui et nous en rendons grâces à Dieu, mais tous ceux qui l’ont connu de loin ont également pu en profiter, parce que l’amour du Pape Wojtyla pour le Christ s’est déversé, pourrait-on dire, dans toutes les régions du monde, tant il était fort et intense. L’estime, le respect et l’affection que les croyants lui ont exprimé à sa mort n’en sont-ils pas le témoignage éloquent? »

Intense et fructueux ministère
« C’est bien vrai: l’intense et fructueux ministère pastoral, et plus encore le calvaire de l’agonie et la mort sereine de notre bien-aimé Pape, ont fait connaître aux hommes de notre temps que Jésus Christ était véritablement son «tout». »
, insistait le pape.

Le parfum répandu dans le monde
Reprenant l’image du parfum, le pape Benoît XVI soulignait l’universalité du message de Jean-Paul II : « Le parfum de la foi, de l’espérance et de la charité du Pape emplit sa maison, emplit la Place Saint-Pierre, emplit l’Eglise et se répandit dans le monde entier. Ce qui est arrivé après sa mort a été, pour ceux qui croient, l’effet de ce «parfum» qui est parvenu à chacun, qu’il soit proche ou lointain, et qui l’a attiré vers un homme que Dieu avait progressivement configuré à son Christ. C’est pourquoi nous pouvons lui appliquer les paroles du premier Poème du Serviteur du Seigneur, que nous avons écouté dans la première Lecture: «Voici mon serviteur que je soutiens, / mon élu en qui mon âme se complaît. J’ai mis sur lui mon esprit, / il présentera aux nations le droit…» (Is 42, 1) »
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Béatification
Le pape se réjouissait de l’avancée du procès de béatification, sous les applaudissements de la foule : «Serviteur de Dieu»: voilà ce qu’il fut et, à présent, nous l’appelons ainsi dans l’Eglise, alors qu’avance rapidement son procès de béatification, dont ce matin l’enquête sur la vie, les vertus et la réputation de sainteté a précisément été close »
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Une participation jamais vue dans l’histoire
Mais le pape rappelait aussi la façon inouïe dont les foules ont témoigné leur attachement à Jean-Paul II après sa mort : « «Serviteur de Dieu»: un titre particulièrement approprié pour lui. Le Seigneur l’a appelé à son service sur la route du sacerdoce et il lui a ouvert peu à peu des horizons toujours plus vastes: de son diocèse jusqu’à l’Eglise universelle. Cette dimension d’universalité a atteint son sommet au moment de sa mort, un événement que le monde entier a vécu avec une participation jamais vue dans l’histoire »
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Peu à peu dépouillé de tout
Benoît XVI indiquait la source d’une telle fécondité en disant : « La fécondité de ce témoignage, nous le savons, dépend de la Croix. Dans la vie de Karol Wojtyla la parole «croix» n’a pas été qu’un mot. Dès son enfance et sa jeunesse, il connut la douleur et la mort. En tant que prêtre et en tant qu’Evêque, et surtout Souverain Pontife, il prit très au sérieux ce dernier appel du Christ ressuscité à Simon Pierre, sur la rive du lac de Galilée: «Suis-moi… Mais toi, suis-moi» (Jn 21, 19.22). En particulier avec la progression lente, mais implacable, de la maladie, qui l’a peu à peu dépouillé de tout, son existence est entièrement devenue une offrande au Christ, annonce vivante de sa passion, dans l’espérance remplie de foi de la résurrection »
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Pour le conduire à la maison du Père
« Son pontificat s’est déroulé sous le signe de la «prodigalité», du don généreux sans réserve, continuait Benoît XVI. Qu’est-ce qui le soutenait, si ce n’est l’amour mystique pour le Christ, pour Celui qui, le 16 octobre 1978, l’avait fait appeler, selon les paroles du cérémonial: «Magister adest et vocat te — Le Maître est ici et il t’appelle»? Le 2 avril 2005, le Maître revint l’appeler, cette fois sans intermédiaire, pour le conduire à la maison, à la maison du Père. Et Lui, encore une fois, répondit promptement avec un cœur courageux, et murmura: «Laissez-moi aller au Seigneur» (cf. S. Dziwisz, « Une vie avec Karol », p. 223) »
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Véritablement endormi dans le Seigneur
Benoît XVI citait le testament de Jean-Paul II en indiquant comment le « départ » a été préparé au fil des ans : « Il se préparait depuis longtemps à cette dernière rencontre avec Jésus, comme le montrent les diverses rédactions de son Testament. Au cours des longues stations dans sa Chapelle privée il parlait avec Lui, s’abandonnant totalement à sa volonté, et il se confiait à Marie, en répétant : « Totus tuus ». Comme son divin Maître, il a vécu son agonie en prière. Au cours du dernier jour de sa vie, veille du Dimanche de la Divine Miséricorde, il demanda qu’on lui lise précisément l’Evangile de Jean. Avec l’aide des personnes qui l’assistaient, il voulut prendre part à toutes les prières quotidiennes et à la Liturgie des Heures, suivre l’adoration et la méditation. Il est mort en priant. Il s’est véritablement endormi dans le Seigneur