Chercher un sens à sa vie c’est « accorder sans cesse son cœur au cœur de

du site Zenith:

2007-03-21

Chercher un sens à sa vie c’est « accorder sans cesse son cœur au cœur de Dieu

Entretien avec le P. N. Buttet, invité au festival « Chercheurs de sens » à Lausanne

ROME, Mercredi 21 mars 2007 (ZENIT.org) A loccasion du festival Chercheurs de sens » organisé pour les jeunes, les 17 et 18 mars à Lausanne, en Suisse par Fondacio et le Chemin Neuf, deux communautés catholiques à vocation œcuménique, Zenit a demandé à lun des intervenants, le père Nicolas Buttet de commenter le thème de cette rencontre.

La manière dont Dieu conduit une personne « à la découverte dun sens de sa vie, est dune ingéniosité complètement folle qui ne cesse de nous émerveiller », affirme le fondateur de la Fraternité « Eucharistein ».

Zenit : Tous les jeunes sont à la recherche de quelque chose. Mais quel est le déclic qui fait qu’il prend un jour conscience que ce qu’il recherche est finalement de donner un ‘vrai’ sens à sa vie. Vous-même étiez promis à une belle carrière d’avocat en Suisse, et c’est finalement à Dieu que vous avez choisi de consacrer votre vie. Comment ce déclic se manifeste-t-il ?

P. Buttet : Je pense quil peut se manifester de plusieurs manières. La manière dont Dieu veut rejoindre une âme et la reconduire à lui, ou la conduire à la découverte dun sens de sa vie, est dune ingéniosité complètement folle qui ne cesse de nous émerveiller.

Il y a de grands classiques. Ce sont dabord des insatisfactions, que ce soit dun point de vue négatif : on se dit par exemple ma vie est vide, ne me comble pas je cherche à la remplir et puis ça reste creux devant tant de faux plaisirs, de faux substituts quon essaie de me donner ; mais ça peut venir aussi de façon plus positive, plus lumineuse, par des témoins que Dieu place sur notre route et qui deviennent véritablement des signes, des balises sur le chemin de la quête de sens, au début, au milieu ou à la fin dun chemin. De manière plutôt interrogative dabord, de manière incitative ensuite, de manière définitive, dans une sorte de capitulation qui amène à accueillir le signe prophétique du témoignage. Et puis, troisièmement, il y a lEsprit Saint qui va guider les cœurs, et qui va donner la lumière et la force dans la liberté de la personne.

Je pense que ce sont ici les trois manières dont une personne peut, petit à petit, se rendre compte quil y a autre chose et quil faut réorienter sa vie par le primat de l « être » sur le « faire », sur lavoir, sur le savoir, et que l « être » seul est capable de combler un cœur.

Zenit : Ceux qui accompagnent les jeunes dans cette recherche de sens sont-ils ou doivent-ils eux-mêmes être en recherche continue ?

P. Buttet : Il est clair que ce nest jamais acquis. Cest une quête permanente, une nécessité permanente dajustement, comme on accorderait un instrument de musique : accorder sans cesse notre cœur au cœur de Dieu ! Il faut avoir aussi une crédibilité personnelle, communautaire. Jaime beaucoup cette phrase de Jean-Paul II qui disait : « Nous sommes tous appelés des évangélisateurs parce que nous-mêmes nous sommes évangélisés, joyeux d’être pour les autres limage irradiante de Jésus Christ ». Je pense que là on peut parler dune exigence permanente du cœur de lhomme, de vérité et de charité, aussi de pouvoir goûter toujours plus le Christ. Donc, le sens on la découvert, cest Jésus Christ, mais on nen a jamais fait le tour.

Ceci demande un travail de conversion, dillumination, et puis de bonheur. Cest laventure permanente. Je crois que cette soif daventure qui habite le cœur des jeunes, qui habite le monde daujourdhui, nest vraiment comblée que dans le Christ. Nous organisons chaque été des voyages avec les jeunes, en Chine, au Tibet, au Vietnam, en Inde, ou plus près de nous, sur les chemins de Saint Jacques et de Rome, à pied, et finalement nous voyons bien que Christ donne un autre sens au voyage sur cette terre.

Ce nest pas une doctrine, ce nest pas une théorie : cest une personne avec qui je chemine, et comme toute personne elle reste un mystère : plus je la connais, plus jai envie de laimer, et plus je laime plus jai envie de la connaître. Et plus jaborde ce mystère et plus il est insondable, plus en même temps il se révèle à moi. Cest le paradoxe de la rencontre.

Zenit : Quels types de repères apportez-vous aux jeunes pour les aider dans leur discernement ?

P. Buttet : Lun des repères déterminants est le réalisme profond car je crois que lon vit dans un monde virtuel, idéaliste, où les gens sont enfermés dans leur tête et dans leurs rêves, dans des projets souvent irréalisables ou utopiques, dans des souvenirs blessés du passé. Mais comment revenir à un réalisme non pas seulement à laujourdhui, qui est capital, car cest à partir du présent que je bâtis mon avenir et que jassume mon passé, mais à un réalisme anthropologique ? Cest-à-dire, quelle est la vision de la personne humaine, du monde ? Et là je crois quune clef de formation est absolument indispensable pour avoir une approche profondément réaliste dabord humaine, ensuite philosophique puis théologique.

Il y a des docteurs ou des professeurs pour aborder cela. Cest du réalisme basic expérimental, mais que lon a tellement oublié face à toutes les idéologies et toutes les caricatures de lhomme que lon peut nous donner aujourdhui. Lautre chose indispensable cest lhumilité, lhumilité de se laisser enseigner. Ce cœur d’écoute dont il est question dans lEcriture sainte. Je crois que cest une attitude essentielle.

Zenit : Un nombre croissant de personnes se tournent vers les psychologues pour tenter de faire face à des situations difficiles sur le plan familial, sur le plan du travail, etc.. Le coaching est également très à la mode. Il y a donc des spécialistes qui s’intéressent à ce ‘mal d’âme’ comme ils disent. Croyez-vous au bénéfice d’expériences cliniques ? Vous y intéressez-vous ?

P. Buttet : Tout ce qui est humain nous intéresse. Il faut bien comprendre lhomme dans ses différentes dimensions : physique, corporelle, psychologique, affective, émotionnelle et spirituelle. Il va falloir aborder les trois dimensions sans les séparer, en les distinguant, mais pour mieux les unir, avec lintelligence et la volonté situées au sommet de tout et qui doivent être les critères déterminants. Je pense que des demandes comme celles-ci peuvent aider, mais dans la mesure où il existe une anthropologie réaliste derrière, et ça cest peut-être la plus grande difficulté dans ces démarches qui sont certainement sincères et honnêtes, mais qui manquent assez régulièrement dune vision objective de la personne humaine. Une vision qui ne soit pas subjective ou idéologique, mais qui permette simplement de remettre lhomme debout, de reconstruire l’être humain dans son unité profonde et dans son intériorité. Il y a probablement des dérives réductionnistes de la personne humaine à une seule dimension.

Plusieurs dimensions de la personne humaine réapparaissent et je crois quaujourdhui on assiste à une redécouverte, y compris dans le milieux de la psychologie, à la nécessité dun au-delà de la psychologie. La psychanalyse a été beaucoup critiquée. Ce sont des réductions de l’être humain à la seule psychologie. Et le grand danger cest justement de réduire !

Lune des confusions qui me paraît importante aujourdhui est la confusion entre la santé et le salut. Les personnes en mal d’être, en mal de vivre un état qui résulte souvent dun mal penser cherchent désespérément la santé, mais en fait cest plus profond, cest celle du salut et cet ordre somato-psycho-spirituel de l’être humain qui doit être retrouvé avec ce qui ordonne tout, cest-à-dire la vie spirituelle. Je côtoie des coach qui me disent limportance quils ont dans la vie des personnes, mais je remarque quil y a comme une démission de la liberté chez certains, quils se remettent entièrement dans les mains dautres personnes. Ce nest pas le but officiel du coaching mais cest parfois lattitude psychologique que lon voit. Or, la grande question est finalement : Comment amener la personne à une grande maturité humaine authentique, à une liberté intérieure authentique ?

La Fraternité Eucharistein, dont le père Nicolas Buttet est le fondateur, a été reconnue officiellement dans l’Eglise catholique et érigée en Association publique de fidèles en juin 2003. Elle offre à des jeunes la possibilité de vivre une année sabbatique de réflexion, de service et de prière, après leur formation professionnelle ou leur maturité. Elle accueille aussi de nombreux jeunes ayant été confrontés à des problèmes de drogue, d’alcool ou de dépression, pour un temps de reconstruction personnelle.
Le père Buttet est également l’inspirateur du projet de l’Institut
Philanthropos
, institut européen d’études anthropologiques, à Bourguillon, en Suisse.

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