Je vous propose de la vie de Saint Thomas D’Aquin la première partie de la vie, Du site :
http://www.abbaye-saint-benoit.ch/saints/thomas/003.htm#_Toc66451840
CHAPITRE PREMIER.
LA MAISON D’AQUIN.
Elegit eum Dominus ex omni carne. ECCLI., XLV, 4.
Le Seigneur l’a choisi parmi toute chair.
Sur les confins de
la Campanie, ancienne Terre de Labour, dans une plaine baignée par le Garigliano, non loin d’Arpinum, patrie de Marius et de Cicéron, est élégamment assise la ville d’Aquin. Jadis colonie romaine, dont Tacite, Pline, Ptolémée parlent avec éloge (1), berceau de l’empereur Pescennius Niger et du poète Juvénal, elle fut plus tard érigée en comté à cause de son importance, et subsista dans sa splendeur jusqu’à l’année 1251.
(1) Tacit., Hist. liv. I. Plin., liv. III, Ptol., liv. III.
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Aujourd’hui bien déchue, réduite à une population de trois mille âmes et vivant des souvenirs de son passé, la petite ville d’Aquin, par sa position pittoresque, ne laisse pas d’attirer l’attention et de piquer la curiosité du voyageur. De beaux arbres l’encadrent, et fournissent à ses habitants, durant l’été, un délicieux ombrage; ses environs abondent en sources fraîches et limpides, qui ont valu probablement à la ville le nom qu’elle porte; des traces de constructions antiques, jetées çà et là, témoignent des diverses dominations qu’elle a subies. Siège épiscopal, Aquin possède un Chapitre dont les chanoines, au nombre de dix, ont le privilège de porter la mitre et les autres insignes pontificaux.
Dans la première moitié du XIIIe siècle, on apercevait à une faible distance, près du torrent de Melfi, qui coule des Apennins, un château féodal appelé Rocca-Secca. Placée sur un rocher abrupt, sa masse imposante se dressait en face de la célèbre abbaye du Mont-Cassin, éloignée d’environ deux lieues. C’était la résidence habituelle des comtes d’Aquin, puissants seigneurs qui possédaient de nombreux domaines, et prenaient aussi les titres de comtes de Lorette et de Belcastro.
D’après d’anciennes chroniques (1), ils descendaient des princes lombards, et leurs ancêtres s’étaient illustrés sous les drapeaux de Charlemagne, en combattant les Sarrasins.
Vers 1220,
la Maison d’Aquin avait pour chef Landolphe, fils du célèbre Thomas de Sommacle, ancien favori de l’empereur Frédéric Barberousse, et lieutenant-général de ses armées. Voulant récompenser d’importants services, Barberousse avait donné en mariage au comte de Sommacle
(1) Malvenda, p. 595.
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sa propre soeur, Françoise de Souabe, avec le fief d’Acerre pour apanage.
Landolphe avait épousé Théodora, fille du comte de Théate, de la famille des Caraccioli. Les Caraccioli eux-mêmes remontaient aux fameux chefs normands, Guiscard, Roger, Bohémond, Tancrède, dont la vaillante épée chassa de la péninsule les Sarrasins et les Grecs, et fonda le royaume des Deux-Siciles. Maîtres du territoire, ils avaient fait hommage au Saint-Siège de leur conquête, et la possession leur en avait été confirmée, à titre de fief, par les papes Léon IX et Nicolas II.
De plus, la famille d’Aquin était alliée aux maisons royales d’Aragon et de Castille; même elle avait, au témoignage du cardinal Duperron, des liens de parenté avec le roi de France.
De cette lignée devait sortir le Saint dont nous entreprenons d’écrire l’histoire.
Dieu, qui souvent « tire le pauvre de la poussière pour le placer parmi les princes de son peuple, » choisit au contraire pour le Docteur angélique une des premières familles d’Italie, comme jadis il avait pris dans la plus haute noblesse d’Espagne saint Dominique, dont Thomas d’Aquin devait être, en Religion, le plus illustre fils.
Cette conduite de
la Providence cachait un mystère. Saint Thomas. était destiné à donner l’exemple d’une correspondance héroïque à l’appel divin dans la voie du détachement religieux: sa naissance élevée allait entourer cet exemple d’un éclat sans pareil. En outre, il devait illuminer le monde par la supériorité incomparable de sa science et la splendeur de son génie; or, qui ne sait combien (36) l’influence d’une éducation exquise, commencée au berceau, favorise le développement des dons de nature et de grâce, là où Dieu les a largement départis?
Mais à la noblesse du sang, la famille d’Aquin joignait une noblesse plus précieuse encore: celle d’une foi sans ombre et d’une vertu sans tache. Brave et loyal chevalier, Landolphe était en. même temps chrétien généreux, et Théodora laissa une mémoire tout embaumée de suavité. « C’était, remarque Guillaume de Tocco, une dame de grande dévotion et de rigoureuse abstinence; la continuité de ses prostrations et de ses génuflexions lui avait durci les genoux; elle n’eût pas mérité d’avoir un fils tel que saint Thomas, si sa prière n’eût été agréable à Dieu. » Disons-le toutefois, Théodora avait une fermeté de caractère poussée même à l’excès. Ce qui expliquera l’attitude que; nous lui verrons prendre dans le cours de cette histoire.
Huit enfants furent le fruit de son union avec Landolphe. Des cinq filles que le ciel lui donna, deux seulement ont fixé l’attention des auteurs, à cause du rôle qu’elles jouèrent: dans la vocation de notre Saint. L’une, du nom de Marietta, se fit Bénédictine au monastère de Sainte-Marie de Capoue, et mourut dans les fonctions d’abbesse, après avoir vécu très saintement. L’autre, appelée Théodora, comme sa mère, épousa Roger, comte de Marsico et de Salerne, auquel elle apporta en dot le comté de Saga-Severino. Sa vie au milieu du siècle fut celle d’une véritable religieuse. Inépuisable dans sa charité, elle employait aux oeuvres de miséricorde tout son superflu, parfois même une partie du nécessaire. Discrète, prévoyante, sévère pour elle-même, passant en prières et en austérités le temps que les autres accordent au sommeil, elle excellait en toute sorte de vertus. Quelques années après son heureux (37) trépas, lorsqu’on voulut transférer ses restes dans l’église des Frères Prêcheurs de Salerne, son corps fut trouvé intact, exhalant un parfum dont tous les assistants furent pénétrés.
Quant aux deux fils aînés du comte et de la comtesse d’Aquin, fidèles aux traditions chevaleresques de leur race, ils suivirent la profession des armes, et exercèrent des emplois distingués dans l’armée de Frédéric II, leur parent. Mais bientôt, obéissant à la, voix de leur conscience, ils abandonnèrent le parti d’un prince devenu traître à l’Eglise et frappé de ses anathèmes. Cet acte de courageuse indépendance leur attira de cruelles vexations. Conrad, fils de Frédéric II, héritier de sa malice en même temps que de sa couronne, conçut contre eux une telle fureur qu’il mit à feu et à sang la ville d’Aquin, rasa le château de Rocca-Secca, bannit à perpétuité Landolphe, l’aîné, et fit périr le second, Raynald, dans les horreurs d’un cachot.
Malgré cette persécution et bien d’autres vicissitudes dans les âges suivants, la maison d’Aquin, grâce à d’illustres alliances, conserva durant cinq siècles l’éclat de son antique noblesse. Les deux derniers descendants directs furent un Dominicain et un Evêque, qui laissèrent à la maison du prince de Castiglione leurs titres et leurs biens. Mais, dit un écrivain moderne (1), cette branche finit en 1799, dans la personne de Vincente d’Aquin, épouse du duc Montfort-Laurito.
Maintenant la famille d’Aquin nous est connue; étudions la vie de celui qui en a immortalisé 1e nom.
(1) Mgr Salzano, des FF. Prêcheurs, ministre d’Etat sous Ferdinand II, roi de Naples.