« Un travail d’herménetique en vue d’un dialogue vrai »
24 octobre, 2006Fredric Manns a été mon professeur à Rome, maintenant il est messager apostolique en Turquie, je crois, parce que je l’ai laissé de Rome qu’il allait à Antioche chargée par le vaticano; l’article n’est pas récent, mais en les traitant d’une personne si valide je les crois je puisse reporter aujourd’hui aussi;
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Un travail d’herméneutique en vue d’un dialogue vrai. SBF Dialogue
Les médias se sont enflammés à la suite de la conférence du Pape Benoît 16 à Ratisbonne. Tirée de son contexte, la phrase sur l’Islam a été instrumentalisée par les journalistes. Le Dr Minervi, sur Qol Israel, en a profité pour faire une attaque en règle contre l’Eglise qui elle-même a succombé plus d’une fois à la tentation de la violence. Or, ce que le pape avait à coeur d’affirmer c’était un refus clair de la motivation religieuse de la violence. Le Cardinal Bertone et le Père Lombardi l’ont répété pour éviter toute équivoque.
Le pape a posé dans son discours les bases d’un véritable dialogue: « La juste considération de la dimension religieuse est en effet un préliminaire essentiel pour un dialogue fructueux avec les grandes cultures et religions du monde ».
A la fin de son discours Benoît 16 a affirmé que « les cultures profondément religieuses du monde voient justement dans l’exclusion du divin de l’universalité de la raison une attaque à leurs convictions les plus intimes. Une raison qui devant le divin est sourde et repousse la religion dans le contexte des sous-cultures est incapable de s’insérer dans le dialogue des cultures ». Mais combien de journalistes ont lu le discours du pape?La volonté du Pape n’est autre que de cultiver une attitude de respect et de dialogue envers toutes les autres religions et cultures. La crise de la foi et de la mémoire des racines chrétiennes de l’Europe sécularisée préoccupe les autorités religieuses de l’Eglise. Aux yeux de Benoît 16, la foi sans la raison court à la dérive, et la raison est le meilleur antidote contre la maladie de toute religion : le fondamentalisme. Il faut donc distinguer clairement entre Islam et Islamisme. Pas plus que le christianisme, l’Islam n’est un bloc. Cette religion peut être capable de beauté, de charité, comme de violence et de guerre. Tout dépend de celui qui l’interprète. Un théologien ou un juriste peut puiser dans le Coran les versets qui prêchent la paix, tandis qu’un autre va faire dire l’inverse au texte. Le Coran ne dit ni plus ni moins que ce que l’interprète lui fait dire. Ce qui est fondamental, c’est l’interprétation qu’on en fait. Au nom du même texte sacré, on peut faire les plus grandes réalisations du monde et on peut commettre des crimes. L’histoire le prouve.Il est clair que Benoît 16 n’entend pas dialoguer à la manière de Jean Paul II, qui encourageait les assemblées de prière comme celle d’Assise. Depuis vingt ans déjà ces rencontres de prière qui ont engendré le relativisme chez beaucoup de gens n’ont pas rapproché les croyants en profondeur. Benoît 16 mesure mieux les impasses d’une caricature de dialogue: absence d’interlocuteurs représentatifs, dialogue théologique impossible, interdiction de tout culte chrétien dans certains pays musulmans, en Arabie Saoudite, en particulier. En outre, le pape ne peut rester muet devant la situation des chrétiens en terre d’Islam : en Turquie, trois prêtres ont été tués depuis l’affaire des caricatures de Mahomet, tandis qu’au Pakistan, en Egypte et au Nigeria on brûle des églises chaque année. Les chrétiens font des concessions et autorisent les conversions, pas les musulmans. La réciprocité ne joue pas en matière de liberté d’accès aux lieux de culte. Avant de prétendre dialoguer avec l’Islam, il faut exiger des principaux représentants de l’Islam le respect des droits de l’homme, en particulier de la liberté religieuse et du respect de la femme. Personne ne conteste que l’Islam a eu des rapports fructueux dans le passé avec la raison et l’a même conquise par la philosophie, les mathématiques, l’histoire et les autres disciplines. Les grands penseurs chrétiens ou juifs au Moyen Age ont eu accès à la philosophie grecque traduite grâce aux Arabes de Bagdad. Le respect des cultures en Andalousie fut un cas de collaboration religieuse unique dans l’histoire dont il reste des témoins: la mosquée de Cordoue et l’Alhambra de Grenade, sans parler du travail d’irrigation réalisé en Espagne. Le passé, tout glorieux qu’il fût, doit ouvrir cependant au présent et à l’avenir.
En conclusion, il faut revenir sur la remarque du pape refusant la motivation religieuse de la violence. Ce rappel est fondé pour qui vit en terre d’Islam. A la différence de l’Occident, la raison est restée limitée aux sphères intellectuelles de l’Islam. Elle n’a pas pénétré les couches d’une orthodoxie méfiante face à tout apport extérieur. Au niveau du quotidien, dans l’Islam, la tradition critique n’a jamais été une discipline significative. L’Islam repose solidement sur une triple base: les « guerriers » qui se réclament du djihad, les « théologiens » qui leur fournissent des arguments coraniques, et les « marchands » qui financent les entreprises. Au sommet de cette structure règne le calife. Les intellectuels sont relégués prudemment en marge d’elle. Mais à l’extérieur du cercle se situent l’étranger, le juif, le chrétien. Si le dialogue entre Islam et christianisme est bloqué pour un certain temps, ce sera l’occasion d’un temps de réflexion. L’un et l’autre pourront redéfinir les conditions et les exigences d’un vrai dialogue.
Frédéric Manns
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