un commentaire auxlecture de dimanche 15 octobre XXVIII T.O.

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28e dim. ordinaire (15/10) :

Commentaire

Pendant cette eucharistie, Christ veut me parler. Si je l’écoute vraiment, sa parole va me percer (deuxième lecture). Christ, tu me demandes plus que de belles intentions, tu me demandes de tout laisser pour te suivre. Ah ! que je n’esquive pas cet appel dans une fuite qui me rendrait triste (évangile) ! Que j’aie la sagesse qui me fera voir où se trouvent mes vraies chances (première lecture). Alors je recevrai, dès aujourd’hui le centuple (évangile).   

Première lecture : Sg 7,7-11

En préparation à l’évangile du jeune homme riche, nous lisons une méditation d’un juif pieux (premier siècle avant J.C.) sur la véritable richesse qu’il appelle Sagesse.

La méditation exalte la valeur de cette Sagesse. Elle est au-dessus des trônes et des sceptres, de la richesse, de l’or… qui pourtant donnent tant d’avantages ; au-dessus de la santé, de la beauté que même l’argent ne peut donner ; et même au-dessus de la lumière du soleil sans laquelle, pourtant, on ne saurait vivre.

Cette Sagesse n’est pas explicitement décrite. Par des parallèles, on peut déduire qu’elle est plus que simple prudence humaine ; elle est éminemment religieuse : lumière intérieure qui fait voir et estimer les choses « autrement ». Elle est donnée par Dieu, on l’obtient par la prière et la supplication.

Mon Dieu, je te prie, je te supplie : donne-moi cette Sagesse. Sois toi-même ma richesse, ma santé, ma beauté, ma lumière !

Psaume : Ps 89

Seigneur, reviens pendant cette eucharistie. Apprends-nous, par ta sainte Parole, la vraie et courte mesure de nos jours et que nos coeurs pénètrent ta Sagesse. Fais mieux connaître à tes serviteurs ton oeuvre : ta création si belle, ta splendeur, et ta « ré-création » en Jésus. Rassasie-nous de cette Sagesse, de ton Fils incarné que nous recevons dans le pain eucharistique. Que nous passions cette célébration et tous nos jours ici-bas dans la joie reconnaissante et les chants d’action de grâce !

Deuxième lecture : He 4,12-13

Des paroles, de la parlote. C’est ce que nous suggère le mot parole. Mais quand deux se disent leur amour, quand un juge prononce une sentence ou que l’on annonce à un père la naissance de son enfant – c’est alors que nous expérimentons ce qu’est la parole. Ce n’est plus de la phrase, le mot change le cours de notre vie.

Dieu parle à notre communauté. Que celle-ci existe est déjà le résultat de sa Parole : c’est elle qui nous a faits Eglise (du grec ek-kaleo : je convoque par ma parole). Cette Parole n’est pas un message neutre ; elle nous provoque, nous bouscule, énergique et vivante. Elle ne nous parle pas de la pluie et du beau temps, mais touche nos racines, elle pénètre au plus profond de l’âme, jusqu’aux jointures et jusqu’aux moelles. Il n’y a pas d’échappatoire, tout est nu devant elle, jusqu’aux intentions et aux pensées du coeur les plus secrètes. On ne trompe pas Dieu. Selon que nous lui répondons, notre vie change de direction. Nous aurons à lui rendre des comptes.

Jésus lui-même est la Parole vivante. Si la Bible dit souvent : La parole de Dieu fut adressée à Jérémie, à Jean Baptiste… jamais elle ne le dit du Christ. Il est lui-même la Parole de Dieu. Il est le Verbe, expression divine du Père, que l’Apocalypse nous présente, selon une saisissante image, comme celui de la bouche duquel sort une épée coupante, à deux tranchants (1,16 ; 19,15).

Notre texte si bref a quelque chose de terrifiant. Il a été écrit pour une communauté lasse, afin de la secouer de sa torpeur. Il doit être équilibré par les paroles du Christ qui sont une Bonne Nouvelle, qui réconfortent le coeur, ses paroles de pardon, ses béatitudes. Mais que Dieu nous garde de nous habituer aux audacieux mots d’amour qu’il nous a dits : on ne joue pas avec de tels mots. L’amour est grave, nous aurons à lui rendre des comptes.

Tous les dimanches, quand cette Parole nous est proclamée, le Christ lui-même nous parle. Pénètre-t-elle jusqu’aux jointures et aux moelles ? Et puissent ceux dont le ministère est de la servir la proclamer – par leur bouche, qu’elle soit entendue – et par leur vie, qu’elle soit convaincante !

Evangile : Mc 10,17-30

Jésus se mettait en route vers Jérusalem, quand un homme accourut vers lui. C’est donc dans le contexte de la montée vers la croix que se situe cet épisode. L’homme court, il a quelque chose d’important à demander. Il ne manque pas de manières, se met à genoux et dit : Bon Maître. Ce titre, qui n’appartient qu’à Dieu seul, Jésus le refuse comme doit le faire tout juif pieux. Pourquoi m’appelles-tu bon ? Dieu seul est bon. De plus, dans Marc surtout, Jésus cherche volontiers à cacher sa véritable identité, parce que les esprits ne sont pas encore prêts à accepter l’inouï.

Que dois-je faire pour avoir en héritage la vie éternelle ? Rien d’intéressé. Cet homme ne demande que la vie éternelle : être avec Dieu. Jésus lui récite le catéchisme juif, les commandements. Curieusement, il omet les commandements envers Dieu auxquels on s’attendrait d’abord, les devoirs religieux, pour insister sur les commandements envers le prochain, sans doute parce qu’il a à faire à un homme fortuné. D’où aussi la recommandation supplémentaire : ne fais de tort à personne.

Maître, j’ai observé tout cela depuis ma jeunesse. C’est un homme honnête, religieux. Mais Jésus a bien senti en lui un quelque chose, un désir de plus. Il avait couru ! Cet homme lui est sympathique, il le regarda ; littéralement : « il regarda dedans », d’un regard qui va jusqu’au fond – et il l’aima. Imaginez la scène, et ce regard qui trahit les sentiments de Jésus.

Une seule chose te manque ! Va, vends tout ce que tu as, puis viens, suis-moi. Les commandements ne suffisent donc pas ? Même en les observant, il manque une chose. C’est ici ou jamais qu’il faut prendre l’évangile à la lettre. Nous pensons : « Ceci n’est pas pour moi, c’est pour les moines ». Comme si l’évangile avait une partie obligatoire, les dix commandements, et une partie conseillée, les Béatitudes. Et nous voilà, les disciples, stupéfaits… de plus en plus déconcertés.

Quelle est donc cette seule chose, qui nous manque ? La radicalité. Le commandement se limite à des actions qui, une fois accomplies, nous laissent quittes. Jésus veut tout. Sans doute, ce « plus », ce tout varie avec chacun. Jésus ne demande pas à tous de vendre leur bien, comme il l’a demandé à cet homme. Mais à nous tous il dit : Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il renonce à lui-même, prenne sa croix et qu’il me suive (Mc 8,34). Le tournant décisif, c’est le moment où nous passons d’un christianisme correct, de l’observance des commandements – à la suite généreuse du Christ. D’un côté, le Tu connais les commandements ; de l’autre. Viens et suis-moi.

A ces mots, l’homme devint sombre et s’en alla tout triste. Ne l’accusons pas trop, car nous lui ressemblons. Ne sommes-nous pas, nous aussi, désireux de plus, mais peu désireux d’y mettre le prix ? D’où notre religion triste, sombre, si peu épanouie.

L’homme une fois parti, Jésus se laisse aller à la confidence. Par deux fois, il dit : Comme il est difficile d’entrer dans le royaume de Dieu ! Difficile, a un riche surtout, mais difficile de toute façon, car il y a encore bien d’autres cas de refus, mais la richesse est le cas-type. Et Jésus de servir un de ces proverbes si expressifs qu’on ne les oublie plus : il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le royaume de Dieu.

Alors, pour les riches, c’est foutu ? En soi, oui. Amasser de l’argent et vivre les béatitudes, c’est aussi inconciliable que l’eau et le feu. Notre Occident riche le sent bien, qui n’arrive pas à se désengluer pour aider le Tiers-monde. Comme c’est difficile à ceux qui possèdent !

Mais Jésus ajoute, d’une façon plus générale : Comme il est difficile, de toute façon, d’entrer dans le royaume des dieux ! Alors les disciples, qui se sentent concernés, sont de plus en plus déconcertés. Ils saisissent que les richesses ne sont qu’une des formes d’attaches qui empêchent l’accès au royaume. Alors ils discutent, ils se demandent entre eux : Mais alors, qui peut être sauvé ? Jésus les regarda (encore ce regard !) : Pour les hommes, cela est impossible, aussi impossible que fut pour Abraham (Gn 18,4) et pour Elisabeth (Lc 1,37) la naissance d’un enfant dans leur grand âge. Qui de nous peut se hausser jusqu’à Dieu ? De ses propres forces ? Mais la force de Dieu, sa grâce, peut vaincre cet impossible. Car rien n’est impossible à Dieu (vue capitale que développeront à plaisir les Lettres aux Romains et aux Galates).

Sur le fond triste des refus égoïstes se détache la joie des coeurs donnés. Les disciples, eux du moins, ont agi autrement que l’homme riche : Nous avons tout quitté pour te suivre. Jésus leur envoie son Amen, je vous le dis des grands jours. Personne n’aura quitté, à cause de moi et de l’Evangile (remarquez la précision qui distance l’ascèse chrétienne d’une simple maîtrise de soi), sans qu’il reçoive, en ce temps déjà, le centuple, une paix, un bonheur profond que ne peut soupçonner l’égoïste. Tout ce qui fait la différence entre le plaisir et le bonheur. Jésus ne promet pas une vie sans difficultés ; le renoncement coûte, et la persécution n’est pas plus épargnée aux disciples qu’au Maître qui est en route vers sa croix. L’énumération, pêle-mêle, maison, frères… à quitter et la conjonction ou montre bien que, pour Jésus, il ne s’agit pas de quitter n’importe quoi (le mari devra rester près de sa femme, les deux près de leurs enfants). L’important est de quitter ce qui nous empêche de servir Dieu de tout notre coeur. Chacun selon ses propres appels.

Mais que sera donc ce bonheur dans le monde à venir, quand ils recevront la vie éternelle, la vie avec Dieu !

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